De patriottentijd. Deel 2: 1784-1786
(1898)–H.T. Colenbrander– Auteursrecht onbekend
[pagina 261]
| |||||||||||
Bijlagen. | |||||||||||
[pagina 262]
| |||||||||||
| |||||||||||
[pagina 263]
| |||||||||||
1. - Lodewijk XVI aan Jozef II, 6 Januari 1785Ga naar voetnoot1).- Mon cher beau-frère. Je ne puis mieux répondre à la confiance de Votre Majesté qu'en Lui exposant avec la plus grande franchise les réflexions que me fournit l'expédient dont Elle a bien voulu me faire part pour trancher les difficultés qui subsistent entre Elle et la République d'Hollande. Cet expédient consiste dans l'échange de la Bavière contre la plus grande partie des Pays-Bas; je m'abstiens quant à présent de le considérer sous les raports qu'il peut avoir avec mes convenances, pour ne m'occuper que de l'effet qu'il pourroit produire relativement à l'Empire. En examinant ce projet avec autant d' impartialité que d'attention, Votre Majesté ne sauroit se dissimuler qu'il opéreroit un changement de la plus grande importance dans la position actuelle du Corps Germanique: en effet il déplaceroit la Maison Palatine du centre de l'Empire pour la réléguer à l'extrémité du Continent, ce qui dérangeroit le sistème d'équilibre qui a été l'objet le plus essentiel des traités de Westphalie, et qui a fait jusqu'à présent un des principaux soutiens de la constitution Germanique. C'est cette considération qni m'a paru si majeure que de prime abord j'ai pensé qu'il convenoit avant tout de s'occuper des moïens de prévenir les réclamations et les obstacles qu'on pouvoit prévoir soit de la part du Corps Germanique soit de ses co-Etats. C'est dans cette vuë que j'avois proposé à Votre Majesté de consulter au moins le Roi de Prusse. Elle croit ce préalable peu nécessaire, se fondant sur l'article 18 de la paix de BadeGa naar voetnoot2) à laquelle l'Empire est intervenu; mais sans entrer en discussion sur le | |||||||||||
[pagina 264]
| |||||||||||
plus on moins de force et d'étenduë que pent avoir l'obligation resultante de cet article, peut-on se flatter que le Roi de Prusse se croira tenu d'y subordonner ses vuës et sa conduite? Ce seroit vraisemblablement se faire illusion de le suposer; ce Prince très certainement ne considérera que son intérêt politique, et il pourra croire sa considération affectée, si l'on snit à son insçu un projet de cette conséquence. Votre Majesté ne s'y est arrêtée que dans la vuë d'éloigner des occasions de guerre, et d'affermir par là le repos de l'Europe. Cette disposition que je partage sincèrement avec Elle, me fait un devoir de Lui représenter de nouveau la nécessité de s'entendre avec le Roi de Prusse. C'est à Votre Majesté à déterminer si Elle préfère de s'en expliquer directement avec ce Prince, ou s'il Lui conviendroit mieux que je lui en fisse la première ouverture. Dans ce dernier cas, je vous prie de me faire connoitre sans réserve les moïens que vous jugerez propres à s'assurer par des voies amiables du concours de Sa Majesté Prussienne. Jusque là je garderai le silence le plus absolu vis à vis le Roi de Prusse et je crois même dans ce moment-ci ne devoir faire encore aucune démarche vis à vis le Duc des Deux-Ponts et son frère.... | |||||||||||
2. - Points a éclaircir, remis par la Reine, le 2 Mars 1785Ga naar voetnoot1).Le Roi s'est refusé de contribuer a, l'arrangement de l'échange avec l'Electeur palatin, quoiqu'il l'ait reconnu ministériellement n'être aucunement contre les intérêts de la France, mais uniquement de crainte qu'il ne convienne pas au Roi de Prusse. Je vois que l'intérêt que l'on pourroit prendre à, mon alliance et amitié est subordonné à l'alliance et l'amitié du Roi de Prusse, des Hollandois, de la Porte, et a, tout plein de petits princes d'Allemagne, chez lesquels sans exception les ministres françois tiennent le langage le plus odieux sur ma personne. L'arrangement de mes limites dans un coin de la Croatie avec la Porte a été non seulement reconnu juste et même convenable pour le -Hoi, mais son ambassadeur a été chargé ministériellement de conseiller à la Porte de me satisfaire à ce sujet; dès le moment qu'on m'a vû des embarras d'un autre côté, on a changé de ton, et M. de ChoiseulGa naar voetnoot2) excite actuellement la Porte à tenir ferme, et à ne se prêter à aucun arrangement avec moi. J'ai fait communiquer au Roi ma résolution sur l'ouverture de l'Escaut. On n'y oppose rien; bien au contraire on me conseille de laisser aux Hollandois le tems nécessaire pour délibérer et prendre leur parti. Arrive la canonnade. Le Roi m'écrit qu'il désapprouve ce qu'ils ont fait, et sans attendre ma réponse on me fait une espèce de déclaration de guerre, et l'on donne avec éclat des ordres pour rassembler des troupes sans vouloir jamais me dire qu'on me feroit la guerre, ni qu'on ne me la feroit pas, pour me laisser dans l'incertitude. | |||||||||||
[pagina 265]
| |||||||||||
Le Roi désire que je suspende la marche de mes troupes et tout acte d'hostilité; j'y consens, et je perds le tems pendant que je sais les Hollandois dans la plus grande confusion. Le Roi me propose l'envoi des députés de la République pour faire satisfaction sur la canonnade; il reconnoit mes droits sur Maestricht et son territoire; il promet de me les faire remettre sous condition; j'accepte cette offre et je renonce à cet égard à l'ouverture de l'Escaut, et actuellement de députés pour faire des excuses, on veut en faire des négociateurs, et on ne parle plus qu'avec équivoque de la reddition de Maestricht. | |||||||||||
Réponse aux questions de la reine, le 3 Mars 1785Ga naar voetnoot1).Ce n'est point ministériellement, mais confidentiellement que le Roi a communiqué à M. le Comte de Mercy son premier aperçu sur l'ouverture relative à l'échange de la Bavière, et Sa Majesté a même fait prévenir que ce n'étoit qu'un premier coup d'oeuil, en observant en même tems que cette affaire interesseroit éminemment l'Empire et par conséquent le Roi de Prusse qui en est un des principaux membres. Le Roi prise l'amitié et l'alliance de l'Empereur, il désire les conserver, mais il n'a pas dû penser que les raports qui se sont établis entre Lui et la Hollande fussent plus contraires au maintien de ces sentimens que ceux qui existent entre l'Empereur Lui-même et la Russie. Quant au Roi de Prusse, le Roi n'ayant et ne pouvant avoir aucun démêlé direct avec Lui, n'a aucune raison pour n'être pas en bonne intelligence avec ce Prince. Le Roi n'a jamais ni suspecté ni jalousé la bonne intelligence entre la Cour de Vienne et l'Angleterre. Si quelques ministres du Roi en Allemagne osent se permettre les propos odieux qu'on leur reproche, qu'on daigne les constater, le Roi en fera justice. Les liaisons de la France avec la Porte sont trop anciennes et trop connuës pour avoir besoin d'explication, et le Roi a fait servir ces mêmes liaisons pour coopérer à différentes époques à la tranquilité et à la satisfaction de la Cour de Vienne. Le Roi, sans entrer dans l'examen du fond de la question concernant les limites de la Croatie, avoit autorisé son ambassadeur à concourir par ses offices au succes des demandes de l'Empereur: les ordres sont encore les mêmes pour M. de Choiseul, et une preuve qu'il a fait les tentatives nécessaires pour les exécuter est que la Porte en réponse vient d'adresser un' office au Roi pour le prier d'intervenir auprès de l'Empereur afin de l'engager à se désister d'une demande qui n'est fondée sur aucun traité et que la Porte assure ne pouvoir accorder sans compromettre la sûreté du Grand Seigneur et la tête de ses ministres. Il est vrai que la déclaration à faire aux Hollandois relativement à l'Escaut a été communiquée, mais sans demander aucun conseil. Si on a observé qu'encore falloit-il leur laisser le tems de délibérer, c'étoit pour se ménager celui de les empêcher de se précipiter dans des résolutions extrêmes. On peut invoquer M. le Comte de Mercy sur ce qu'on a fait | |||||||||||
[pagina 266]
| |||||||||||
de ce côté-ci dans cette vuë. La canonnade du 8 octobre dernier aiant porté l'Empereur à ordonner l'envoi immédiat de 80 mille hommes, le Roi ne pouvoit trop se presser de faire connoitre à Sa Majesté Impériale les dispositions que cette démarche exigeoit de sa part. C'est le voeu du Roi pour la conservation de la paix qui l'a engagé à prier l'Empereur de suspendre la marche de ses Troupes et les allarmes de la Guerre. L'Empereur par sa lettre au Roi du 17 décembre dernier avoit rejetté l'expédient imaginé par Sa Majesté à l'insu des Hollandois relativement à MaestrichtGa naar voetnoot1), et sur lequel Elle l'avoit simplement consulté sans être entré en examen sur les droits de Sa Majesté Impériale; il n'a pu en être question depuis, et le Roi ne s'est plus occupé que de satisfaire la dignité de l'Empereur par l'envoi des députés hollandois qu'il avoit demandés, et à faire sans perte de tems des ouvertures propres à contenter Sa Majesté Impériale. Comme l'Empereur revient de Lui-même à l'idée du rachat, le Roi va s'emploier avec le zèle le plus décidé à le faciliter en ce qui peut dépendre de lui. | |||||||||||
3. - Vérac aan Vergennes, 6 Augustus 1785Ga naar voetnoot2).Monsieur le Comte, J'ai eu l'honneur de vous mander dans mes dernières dépêches combien il me paroissoit instant que l'accomodement de Leurs Hautes Puissances avec l'Empereur n'éprouvat plus aucun délai. Je n'entrevoiois alors que les inconvénients qui pouvoient résulter de la lenteur de la négociation, et l'avantage réel qu'il y auroit pour l'Empereur lui-même à les éviter. Aujourd'hui, Monsieur le Comte, ce qui n'eut été qu'une précaution dictée par la prudence, est prescrit par la plus impérieuse nécessité, et dans l'état où sont les choses, la France, l'Empereur et les Patriotes n'ont plus qu'un intérêt, celui d'agir de concert pour prévenir l'effet des intrigues de leurs communs ennemis. Le succes m'en paroit malheureusement presque assuré si l'on ne prend pas les mesures les plus promptes et les plus efficaces pour arrêter le progrès d'un mal qui d'un instant à l'autre peut devenir sans remède. Il a son principe dans la Ligue Germanique qui vient d'être concluë et signée entre les principaux Princes d'Allemagne. Les autres Princes de l'Empire doivent être invités d'y accéder et lorsqu'ils auront répondu à cette invitation soit en acceptant soit en refusant, la même proposition doit être faite à la République et à d'autres Puissances étran- | |||||||||||
[pagina 267]
| |||||||||||
gères à l'Empire; l'Angleterre dès ce moment peut être regardée comme liée à la confédération, et tout porte à croire que la Hollande sera la premiere de ces Puissances à laquelle on adressera l'invitation. Si les Hollandois entrent dans cette confédération, il est certain, Monsieur le Comte, qu'ils sont perdus pour nous au moins pour un long espace de tems et qu'ils vont augmenter la puissance relative de l'Angleterre de toute la force que leur alliance avec la France devoit ajouter à la notre et dont ce changement de sistème va nous priver. Tous les soins que vous vous êtes donnés, Monsieur le Comte, vont devenir parfaitement inutiles; vous étiéz parvenu à persuader à la République que le seul moyen de se faire compter pour quelque chose dans la balance générale de l'Europe étoit de mettre sa marine militaire sur un pied respectable; elle avoit écouté vos conseils et ordonné des constructions qui déjà portent à plus de 40 le nombre de ses vaisseaux de ligne; tout cela sera pour la Grande Bretagne, ainsi que l'augmentation dans les troupes de terre. Voilà des conséquences qu'il est impossible d'éviter si la Hollande accède à la Ligue; il n'est question que de savoir s'il est probable qu'elle y accédera. Ce point, Monsieur le Comte, me paroit entièrement hors de doute si nous ne nous occupons pas très promptement des moyens de le prévenir. Nous ne pouvons pas nous dissimuler que le Roi de Prusse par animosité contre l'Empereur, et l'Angleterre par esprit de rivalité contre nous, ne fassent pour s'attacher la Hollande et nous l'enlever les propositions les plus séduisantes à la République. On s'attend que l'invitation d'accéder à la Ligue sera accompagnée de la proposition de ne pas céder à l'Empereur un pouce de terrain, de ne pas accorder la moindre somme, et d'une promesse de la soutenir par tous les moyens possibles quand l'occasion l'exigera. M. Harris dont vous aviés prévu avec la plus grande raison, Monsieur le Comte, que le retour seroit l'époque à laquelle les intrigues recommenceroient avec plus d'activité que jamais, M. Harris dis-je, soutiendra cette proposition de tout son pouvoir, et peut être en ajoutera d'autres aussi capables d'éblouir le gros de Ja nation dont l'opinion, dans la circonstance présente, a une influence décisive sur le parti anquel on s'arrêtera. En effet, on parle déjà de la restitution de Negapatnam, d'avantages de commerce dans l'Inde, et même de modifications dans l'acte de Navigation en faveur de la Hollande. En voilà certainement beaucoup plus qu'il n'en faut pour séduire le peuple et donner au parti stadhoudérien toute la prépondérance que les Patriotes avoient auparavant. Ecartons, pour un moment, Monsieur le Comte, la proposition de l'Angleterre et renfermonsnous dans celle de la Ligue de n'accorder aucune satisfaction à l'Empereur, en promettant des secours au besoin; elle entre si parfaitement dans les vuës de la nation, elle flatte si agréablement le génie du peuple, que je ne doute pas qu'elle n'en soit avidement saisie et que les partisans du Stadhouder ne s'en servent avec le plus grand succes pour écraser à jamais les Patriotes et anéantir irrévocablement leur influence. Je sens aussi bien que personne, Monsieur le Comte, ce qu'il y auroit de répréhensible dans cette conduite, si la République venoit à l'adopter. On | |||||||||||
[pagina 268]
| |||||||||||
objecteroit avec la plus grande raison, sans doute, que les Hollandais se rendroient coupables de la plus noire ingratitude en oubliant si promptement les services essentiels que le Hoi leur a rendus dans la dernière guerre, en ajoutant qu' après avoir accepté la médiation que Sa Majesté a bien voulu leur offrir, après l'avoir engagée par la résolution du 17 mars à porter des paroles d'accommodement à l'Empereur, changer subitement de sistème seroit manquer à Sa Majesté et la compromettre d'une manière insultante; je ne connois rien de plus fort ni de plus vrai que cette réflexion. Aussi, Monsieur le Comte, les Patriotes, pénétrés de respect et de reconnoissance pour tout ce que le Roi a bien voulu faire jusqu'à présent en faveur de la République, feront valoir cette raison autant qu'il sera en leur pouvoir. M. van Berkel et M. de Geyslar sont venus chez moi hier au soir et nous avons eu ensemble une très longue conférence, dans laquelle nous avons longuement discuté ce qu'il étoit raisonnable d'espérer de cet argument. C'est avec la plus vive douleur qu'ils m'ont presque démontré qu'il ne seroit d'aucune utilité, et certainement leur témoignage n'est pas suspect puisque leur existence civile et peut être même leur existence physique est intimement liée à l'intérêt de la France. Mais représentez-vous, Monsieur le Comte, une multitude seduite jusqu'a l'enthousiasme par l'idée de terminer ses différends avec l'Empereur, sans donner ni terrain ni argent, et par la fausse gloire d'obliger ce Prince à céder lui-même et retirer toutes ses prétentions, représentez-vous encore des chefs de parti, ennemis outrés de la France, qui ne cherchent qu'à rompre avec nous de la manière la plus sanglante afin de rendre toute reconciliation impossible; ces chefs de parti animant cette multitude par la comparaison des conditions qui leur sont offertes par la Ligue, avec les sacrifices que la Prance leur demande; au milieu de ce bouleversement d'idées, comment un petit nombre de Patriotes pourroient-ils faire entendre la voix tranquille de la raison et ramener des hommes aveuglés par le fanatisme du moment, à des principes qui leur paroitroient choquer tous leurs intérêts? Encore, Monsieur le Comte, dans ce que je viens de dire n'est question que de la proposition de la Ligue, mais que sera-ce lorsqu'elle sera soutenue par les offres de l'Angletterre? Nos amis peuvent-ils faire voir à la nation dans notre alliance un seul avantage dont M. Harris ne prétende offrir sur le champ l'équivalence? Si la Prance est capable de défendre la Hollande contre l'Angleterre dans une guerre de mer, M. Harris ne dira-t-il pas que l'Angleterre la défendra également contre la Prance? Si nous proposons à la République de lui garantir ses possessions dans les deux Indes, M. Harris leur promettra la même chose et de plus des avantages de commerce auxquels ou attache ici une très grande importance; ainsi la nation qui se croira désormais efficacement soutenue et par mer et par terre, tranquille sur l'avenir et n'ayant à délibérer que sur l'intérêt présent, donnera la préférence au parti qui ne lui coûtera ni terres ni argent, sur celui qui la conduiroit à des sacrifices des deux genres. Je dois, Monsieur le Comte, rendre à nos amis ce témoignage qu'ils | |||||||||||
[pagina 269]
| |||||||||||
sont dans un vrai désespoir de voir les affaires sur le point de prendre une tournure aussi fâcheuse, et que s'ils en étoient les maîtres, ils prodigueroient les millions pour prévenir le changement ds système dont la République est menacée. Mais dans l'effervescence universelle qui résultera des propositions de la Ligue et de l'Angleterre, il leur deviendra absolument impossible de lutter contre une opinion et une volonté qui sera celle de toute la nation; ils ne pourroient l'entreprendre sans compromettre, je ne dis pas leur autorité, mais leur propre vie. Vous observerez sûrement, Monsieur le Comte, que dans ce qui précède je n'articule que des craintes, et qu'elles ne sont fondées que sur un seul fait, savoir la signature de la Ligue Germanique. Je conviens qu'effectivement c'est le seul fait que j'aie ei citer dans le moment présent, mais j'ose vous prier de considérer combien les conséquences que nous craignons sont vraisemblables, et combien elles sont dangereuses. Les Patriotes qui jusqu'à présent avoient parus fermes et inébranlables sont dans l'abattement et la consternation; le parti stathoudérien lève la tête; la Princesse d'Orange a repris toute sa confianceGa naar voetnoot1), on croit être sûr que M. de Thulemeyer est déjà muni d'instructions relatives au nouvel ordre de choses; il est même échappé à ce Ministre de dire ces propres paroles: Les tems malheureux pour la maison d'Orange sont enfin passés. Et peut-on croire que M. Harris laisse passer une pareille occasion sans employer toutes les ressources de son esprit actif et intriguant pour faire rentrer la Hollande dans la dépendance de l'Angleterre? Enfin, Monsieur le Comte, conserverons-nous la République ou la laisserons-nous échapper; voilà l'importante question à résoudre. Si nous étions certains que la Ligue nous donnat du tems je ne doute pas que l'accommodement de la Hollande avec l'Empereur ne se terminât à la satisfaction commune, et que les affaires ne suivissent le cours que vous avés calculé d'avance. Mais si la proposition d'accéder devance malheureusement la conclusion des affaires avec la Cour de Vienne, les Patriotes ne croïent plus aucun moyen de conserver le gouvernail et d'empêcher nos craintes de se réaliser. Cette proposition peut tarder encore quelque tems, il est possible aussi qu'elle arrive promptement, et c'est cette incertitude qui forme le vrai point de la difficulté sur le parti à prendre dans cette circonstance critique. Lorsque cette proposition se fera, il faut s'attendre qu'elle se fera avec éclat, qu'on en exagérera même les avantages afin de s'emparer de l'esprit de la multitude et d'exciter une fermentation à laquelle les Patriotes n'aient rien à opposer, et c'est alors qu'il seroit inutile et même très dangereux pour eux d'entreprendre d'éclairer la nation sur ses véritables intérêts et sur la fausseté de la démarche dans laquelle on veut l'entraîner. Tout ce qu'ils pourront sera de prendre l'affaire ad referendum, ce qui en retardera la conclusion, mais il n'en est pas moins vrai qu'ils n'en seront plus les maîtres et qu'elle se terminera comme nos ennemis le désirent. Il est donc de la plus haute importance de prévenir ce moment. | |||||||||||
[pagina 270]
| |||||||||||
Le véritable moyen seroit saus doute de terminer promptement avec l'Empereur, mais si M. le Comte de Merci n'est pas muni de pouvoirs très étendus, et si l'on est dans la nécessité d'envoyer des courriers à Vienne et d'attendre leur retour, il est évident que la Prusse et l'Angleterre nous gagneront de vitesse, et les conséquences sont malheureusement trop faciles à prévoir. Il faut, Monsieur le Comte, que l'affaire soit aussi grave et aussi pressante pour que j'ose vous indiquer mon avis tel que les circonstances me le suggèrent. Elles présentent deux cas également possibles, pour chacun desquels il faut prendre des mesures: le premier est celui où la Ligue feroit sa proposition à la Hollande beaucoup plus promptement qu'on ne l'imagine, et l'autre celui où la confédération nous laisseroit assés de tems pour que nous puissions nous flatter de terminer la negociation en y mettant toute la celerité possible. Dans le premier cas, nos amis effrayés de cette seule idée, ne voïent absolument aucun remede, et pensent qu'il ne leur reste qu'à souscrire douloureusement à la nécessité. Les propositions de la Ligue ne peuvent se balancer que par des propositions aussi avantageuses et aussi agréables à la multitude. Je dis la multitude parce que c'est elle qui joue ou à qui on fait jouer le grand rôle de cette affaire. C'est donc une proposition qu'il faut opposer à une proposition pour tâcher au moins de nous conserver en équilibre avec la Ligue. Mais il est certain qu'une proposition qui ne présenteroit que des assurances vagues, loin d'avancer nos affaires, ne feroit au contraire que donner un nouveau relief à celles de la Prusse et de l'Angleterre; ainsi il paroit absolument nécessaire d'articuler quelque chose de positif. En un mot, Monsieur le Comte, il faut prendre un parti décidé et dans cette dure circonstance voici ce que je penserois. L'attachement de l'Empereur pour le Roi et le prix qu'il met à son alliance ne me permettent pas de douter que Sa Majesté Impériale ne fut très fâchée que ses propres affaires missent le Roi son beau-frère dans la nécessité de manquer son alliance avec la République. Cette considération me fait croire que Sa Majesté Impériale, si on lui représentoit la fâcheuse alternative où nous nous trouvons, se détermineroit sans peine à donner à l'Europe un exemple de generosité en renonçant aux millions demandés pour Mastricht et en déclarant qu'elle est satisfaite de la marque de déférence que lui ont donnée les Etats-Généraux; qu'elle veut bien se départir non seulement de l'indemnité qu'elle avoit demandée, mais remettre même aux Etats-Généraux la somme qu'ils avoient déjà offerte pour le rachat de Mastricht, et que l'on s'entendra par la suite paisiblement et à l'amiable sur la démarcation des limites à faire d'après le traité de 1664, ainsi que sur les indemnités relatives à l'inondation. Je croirois, Monsieur le Comte, qu'il ne seroit pas impossible d'amener l'Empereur à cette façon de penser; je ne vois pas même, dans les circonstances actuelles, de maniere plus noble de mettre fin à une querelle qu'il a lui-même l'intérêt le plus pressant de terminer promptement. Il faudroit donc bien convaincre M. le Comte de Merci de la vérité de ces principes en lui onvrant les yeux sur | |||||||||||
[pagina 271]
| |||||||||||
le Labyrinthe dans lequel se jette l'Empereur son maître, s'il se refuse à ce plan; lui exposer ensuite la nécessité où nous nous trouvons de conclure sans délai une alliance qui convient à tous egards au sistème politique du Hoi, l'impossibilité de la conclure tant que nous soutiendrons les demandes pécuniaires de l'Empereur, et les regrets que ce Prince ne manqueroit pas d'éprouver si pour un objet de quelques millions il causoit à notre sistème politique un dérangement que rien ne pourroit réparer. Ensuite, Monsieur le Comte, j'oserois vous proposer de m'autoriser (toujours dans le cas où la proposition de la Ligue viendroit à paroitre inopinément) à remettre ici une déclaration par laquelle le Roi annonceroit à la République qu'il est prêt à conclure le traité d'alliance dans toutes les stipulations qu'il contient, Sa Majesté se faisant forte d'arranger les différends de la République avec l'Empereur à des conditions aussi agréables aux Etats-Généraux qu'ils peuvent le désirer; il faudroit que je pusse donner à nos amis au moins de vive voix l'assurance positive que cet accommodement se fera sans qu'il soit question d'argent. Vous ne doutez pas, Monsieur le Comte, de la circonspection avee laquelle j'userois de ce remede extrème. Je ne l'emploierois qu'au moment où le danger seroit devenu tellement pressant qu'il ne me laisseroit pas un instant à perdre, et je ne ferois même l'assurance verbale que lorsqu'il seroit bien démontré que la déclaration écrite seroit insuffisante. Au surplus ce n'est là qu'une idée à laquelle le tems ne me permet pas de donner le développement nécessaire, mais que vous porterez facilement, Monsieur le Comte, au point de maturité dont elle est susceptible. Je dois vous observer seulement que si la nécessité que je sois autorisé à faire cette déclaration vous paroit aussi indispensable qu'à moi, vous ne pouvez me donner trop promptement le pouvoir dont j'ai besoin pour la faire. Il reste maintenant à examiner le cas où la confédération germanique nous laissera le tems de conclure la négociation avec l'Empereur, en la pressant aussi vivement qu'il sera possible. Ce cas moins inquiétant sans doute que celui dont je viens d'avoir l'honneur de vous entretenir, exige cependant beaucoup d'attention et de celerité. Il présente du moins cette facilité que la négociation pourra se continuer sur la base posée par la résolution du 17 mars. Lss Patriotes ne demanderoient pas mieux que d'augmenter l'offre énoncée dans cette résolution pour terminer plus promptement les difficultés, mais dans la disposition actuelle des esprits j'ose vous assurer, Monsieur le Comte, qu'il leur est impossible d'en faire la proposition par eux-mêmes, et cependant il faut trouver un moyen d'abréger la négociation si l'on veut prévenir l'effet des intrigues de M. de Thulemeyer et de M. Harris. Nos amis n'ont aucune confiance dans M. de Berkenrode qu'ils regardent comme un homme borné et que sa mauvaise santé et sa paresse rendent incapable de traiter les affaires; ils aiment et estiment encore moins M. de Brantzen qu'ils croyent attaché au parti Stathoudérien par des vuës particulières de fortune et d'ambition. Dans l'impossibilité donc de faire la négociation par le moyen des am- | |||||||||||
[pagina 272]
| |||||||||||
bassadeurs de la République, ils ont imaginé de vous envoyer une personne qui a toute leur confiance et qu'ils chargeront de vous présenter leur ultimatum, et cette personne est M. le Rhingrave de Salm. Je n'entrerai pas dans le détail de ses qualités personnelles, pour ne pas allonger cette dépêche outre mesure. Vous lui trouverés beaucoup d'esprit et d'activité, et, ce qui est essentiel dans la circonstance présente, son intérêt personnel est tellement lié avee le sistème de la France et les vuës des Patriotes, qu'il a....Ga naar voetnoot1) à voir l'autorité sortir de leurs mains. Du reste, Monsieur le Comte, personne ne peut vous parier de M. le Rhingrave de Salm plus en connaissance de cause que M. de BérengerGa naar voetnoot2) et je ne puis que m'en rapporter à ce qu'il aura l'honneur de vous en dire, lorsque vous le questionnerez à ce sujet. M. le Rhingrave de Salm aura donc l'honneur de vous présenter les dernières conditions auxquelles les Patriotes croyent pouvoir acheter la paix. Si vous les agréés, Monsieur le Comte, et si l'Empereur est assés éclairé sur ses véritables intérêts pour y souscrire, alors il faudra que M. le Comte de Merci propose aux ambassadeurs de la République au nom de son maître, ce même ultimatum comme le propre ultimatum de Sa Majesté Impériale, et que le Roi m'autorise en même tems à insister ici pour le faire accepter. Par cette tournure les Patriotes ne proposeront pas d'eux-mêmes une augmentation à la somme énoncée dans la résolution du 17 mars; ils paroitront ne porter à la délibération des Etats-Généraux que l'ultimatum de l'Empereur et ils seront beaucoup plus assurés du succes. Il me reste à désirer, Monsieur le Comte, que l'Empereur se rende très facile sur un accommodement qu'il lui importe de terminer promptement; que cette malheureuse affaire ne détruise pas entièrement notre sistème au moment où nous allions le voir accompli, et surtout que les mesures que nous prenons aujourd'hui ne soient pas trop tardives. J'ai l'honneur .... etc. | |||||||||||
4. - Memorie van den Rijngraaf van Salm, Augustus 1785Ga naar voetnoot3).Le parti patriotique en Hollande ayant envoyé le Rhingrave de Salm à Paris, pour concerter avec M. le Comte de Vergennes les moyens les plus propres pour terminer les différens de Sa Majesté Impériale avec la République, afin d'accélérer la ratification du Traite d'alliance projetté entre la France et Elle, le Rhingrave croit devoir préalablement mettre sous les yeux de M. le Comte de Vergennes le Tableau fidele des affaires en Hollande, en développant les causes qui les ont amenées à la crise actuelle. Le parti des Patriotes, ayant entrepris la réforme des abus du Stathoudérat, fut d'abord complettement secondé dans ses vuës par la haute ma- | |||||||||||
[pagina 273]
| |||||||||||
gistrature qui se flattoit de recouvrer par là son ancienne autorité perdue dans la révolution de l'année 1748. Les Patriotes, loin d'entrer dans les vuës aristocratiques de la haute magistrature, fondèrent leur influence, en persuadant et en prouvant au gros de la nation, qu'ils n'avoient d'autre dessein que de lui rendre son ancienne Liberté, bornée tantôt par les magistrats, et tantôt par le Stathouder. Dans le courant de cette réforme les aristocrates sentirent bientôt qu'on les égaroit de leur but, et pour l'atteindre, ils employèrent successivement toutes sortes de moyens, mais inutilement. Cependant, les Patriotes consolidèrent leur sistème, en persuadant aux bons bourgeois de s'armer pour la défense de leurs privileges, et ils se mirent par là en état de contenir les vuës ambitieuses des aristocrates qui sortant enfin de leur rêve de Grandeur imaginaire, firent à Rotterdam, à Utrecht, en Gueldre et en Zélande des démarches onvertes pour réduire et désarmer la Bourgeoisie, et les corps de volontaires qui s'étoient formés dans presque toutes les villes de la République. Alors, les Patriotes recourants à leurs derniers moyens, forcèrent les Régens des villes, à Rotterdam et à Utrecht surtout, à renoncer à leurs postes, ou à leurs prétentions, par des déclarations publiques. Cet éclat produisit naturellement l'effet que le parti des aristocrates opprimé se réunit à celui du Stathouder, qui devint tout à coup formidable, de méprisé et anéanti qu'il étoit auparavant. Le petit peuple, aveuglement attaché au nom d'Orange, aigri contre les bons bourgeois, qui les armes à la main soutinrent leur autorité sur la canaille, les habitants de la campagne, enfin aujourd'huy les premiers magistrats, et la majeure partie de la noblesse et de l'armée, qui l'une et l'autre dépendent du Stathouder par les faveurs dont il dispose, se sont réunis à lui pour écraser le parti patriotique, dont ils traitent publiquement l'influence de domination usurpée. Ces mouvemens qui dans les deux derniers mois se sont accrus d'une manière très allarmante, sont d'autant plus à craindre que la Bourgeoisie armée, ainsi que les volontaires, commencent à être fatiguée du service militaire qu'elle fait depuis quatre ansGa naar voetnoot1) à ses frais, et se montre dans plusieurs villes du premier ordre moins chaude pour la défense de ses privileges, au point de quitter les armes qu'elle avoit prises et portées avec enthousiasme jusqu'icy. La guerre avec l'Angleterre qui a fini par une paix désavantageuse pour la République; les différens survenus avec l'Empereur; une guerre nouvelle à soutenir ou une paix onéreuse et humiliante à conclure; l'insinuation absurde que la France nous abandonne dans notre querelle avec ce monarque; l'espoir chimérique de secours étrangers; les machinations de l'Angleterre, et sinon celles du Roy de Prusse, du moins celles de son ministre à la Haye; sont les divers moyens par lesquels on travaille | |||||||||||
[pagina 274]
| |||||||||||
l'esprit de la nation afin de l'aliéner de la France, et de la rejetter dans son ancien système. Ce seroit s'aveugler volontairement sur la situation des affaires en Hollande que de se dissimuler que la révolution y est prochaines et infaillible, si l'on ne parvient pas à conclure la paix avec l'Empereur, et si elle n'est pas suivie immédiatement de la ratification de notre traite d'alliance projetté avec la France. Le parti aristocratique, aujourd'huy Stathoudérien, intimement persuadé de cette vérité, fait tous ses efforts pour dilatoriser cette paix et cette alliance comme destructives de ses desseins. Il préférera de provoquer les armes de l'Empereur, bien convaincu qu'une seule ville de prise, une incursion hostile de faite, suffiront pour occasionner une révolte fatale aux patriotes, qui en peu de jours remettroit les rênes du Gouvernement entre leurs mains, que le foible Stathouder ne sauroit tenir par lui-même. D'ailleurs les aristocrates se croyent pour le moment suffisamment en état de défendre leurs frontières contre le peu de Troupes que l'Empereur a actuellement dans les Pays-Bas; ils regardent la campagne comme manquée, et se persuadent que l'hiver, qui s'approche, leur donnera le loisir pour augmenter leurs propres forces, et se procurer, moyennant de gros subsides, des secours étrangers, sauf au pis aller, de faire la paix à des conditions qui leur seront indifférentes, pourvu que par là ils parviennent à leur but. Pour éloigner la conclusion de la paix, ils empêchent et empêcheront par leur influence dans l'assemblée de Leurs Hautes Puissances que ses ambassadeurs soyent autorisés d'une manière légale à la conclure, et qu'ils ne reçoivent des instructions positives pour cet effet. Ils voudroient forcer les patriotes à proposer aux Etats-Généraux les articles de cette instruction, pour avoir occasion de les combattre, de leur en faire un crime aux yeux de la nation, et tirer de là un prétexte pour exciter le peuple à la révolte, dont ils préparent l'esprit tous les jours par les diffamations les plus odieuses contre la France, et contre le parti qui lui est attaché dans la République. Pour éviter tous ces écueils, le parti patriotique ne voit d'autre ressource que de remettre. ses intérêts particuliers et ceux de la République entre les mains du Roy, et du sage ministre qu'il honore de sa confiance, bien convaincu que l'Empereur cédera aux bons offices de l'auguste médiateur qui a bien voulu jusqu'icy protéger notre cause, et que bientêt nous verrons la paix conclue sous ses auspices, et notre alliance avec la France que nous regardons comme le salut de la République, signée et ratifiée par Sa Majesté. Nadat blz. 55 afgedrukt was, kwamen mij uit de verzameling Dumont-Pigalle op het Rijksarchief de volgende stukken in handen, die tamelijk afdoende uitwijzen wat wij van de fameuse lijst der aanbiedingen van Harris, voorkomende in de dépêche van Vérac van 8 November 4785, te denken | |||||||||||
[pagina 275]
| |||||||||||
hebben. De waarheid blijkt nu de volgende te zijn: Harris heeft den sardinischen minister graaf de Mirabel, dien wij roeds vroeger ontmoet hebben als aan Engeland diensten bewijzende (hiervóór I, 209-212, en Rendorp II, 8), op Pieter Paulus afgezonden, om uit te vorschen in hoeverre deze en zijn vrienden op Frankrijk ontevreden waren, en of er eenige mogelijkheid was met deze ontevredenheid voordeel te doen voor Engeland. Door zoo te handelen, ging Harris zijn last niet te buiten: den 16den Augustus had Lord Carmarthen hem geschreven: ‘As the Treaty [het alliantie-tractaat der Republiek met Frankrijk] is not to be signed till the Negotiation with the Emperor is actually concluded, any delay in this latter business must of course retard the conclusion of the former. It does not appear to me quite impossible to procrastinate for some months the final arrangement of the Flemish dispute. In the mean time no effort should be omitted on our part, to sound the dispositions of every Party in Holland [ik cursiveer] in order to prevent by any means the signature of the French alliance’ (R.O.). Om Pieter Paulus te meer tot vertrouwen uit te lokken, zal Harris hem hebben doen voorspiegelen wat in Bijlage I, 7 wordt vermeld, en dat al veel meer was dan zijn regeering openlijk zou hebben willen bevestigen; een officieuse engelsche nota zooals Vérac die opgeeft heeft niet bestaan. Als bijdragen tot de critiek van de overdreven voorstellingen van Vérac - misschien zeggen wij beter, van zijn secretaris Caillard, vgl. blz. 60 noot - in de dépêches aan Vergennes, ook in de hierboven afgedrukte van 6 Augustus 1785, hebben de stukken die nu volgen haar waarde. De schrijver van no. 5 is blijkbaar zeer weinig van nabij met de zaken bekend geweest: hij verwart de ratificatie van het alliantietractaat met het sluiten zelf, is er niet zeker op of Vérac in het najaar van 1785 reeds bij de Republiek in functie was, vergeet dat op 8 November, den dag waarop de ‘koerier’ waarvan hij spreekt naar Fontainebleau vertrok, de vrede met den Keizer reeds geteekend werd, en geeft daardoor van het antwoord van Vergennes een geheel verkeerde voorstelling; de juiste vindt men hiervóór, blz. 57. - De schrijver drukt uit wat een halfingewijd patriot zich van de zaak moet hebben voorgesteld. Het pronkerig vermelden van zijn gewezen waardigheid kenmerkt den gelegenheidsregent. Dumont-Pigalle deelt de onderstelling mede, dat de brief gesehreven zou zijn door Mr. Jacob Anthony de Roth. Diens naam komt niet eerder voor dan in 1787, na de bekende remotie van eenige burger-officieren en van negen vroedschappen te Amsterdam; den 25sten April werd hij in plaats van een geremoveerde tot kolonel vaneen compagnie der schutterij verkozen, en den 3den Mei met 24 anderen door de burgergeconstitueerden op de groslijst geplaatst ter aanvulling van de vroedschap. Den 7den Mei werd hij met 8 anderen door de aangebleven leden der vroedschap uit die groslijst tot medelid gekozen. De R op het cachet van den brief is nog duidelijk zichtbaar. Welke aanleiding schrijver kan gehad hebben om te meenen, omtrent het in het najaar van 1785 tusschen Harris en Pieter Paulus voorgevallene bizonder goed ingelicht te zijn, is kwalijk na te gaan, en doet ook weinig ter zake. | |||||||||||
5. - Mr. Jacob Anthony de Roth [?] aan Dumont-Pigalle, 10 Maart 1791Ga naar voetnoot1).Monsieur! J'apprens par quelques de mes amis réfugiés à Paris, que vous êtes occupé à une relation de nos derniers troubles et révolution, et que dans | |||||||||||
[pagina 276]
| |||||||||||
peu ce morceau interessant verra le jour. Comme tous les faits y doivent être placés, permettez-moi de vous demander si vous connoissez les offertes faites par M. Harris au nom de son gouvernement à quelques de nos Pensionnaires, et surtout à M. Pieter Paulus, qui a le plus travaillé dans cette affaire. Quelque tems avant que l'Alliance fut conclue entre la France et la République, M. Harris tâcha, s'il étoit possible d'éviter cette ratification, en déclarant de la part de sa Cour aux Chefs du Parti Patriotique que cette alliance avec la France ne pouvoit qu'être vue d'un très mauvais oeuil de la part de l'Angleterre, qu'il demandoit ce que les Patriotes vouloient, qu'il étoit autorisé à entrer en matière sur cela, et de donner à notre gouvernement telle forme de constitution que les Patriotes désireroient, pourvu que nous renoncions à l'alliance de la France. M Pieter Paulus, en homme d'honneur et digne de son caractère légal, lui répondit que ce seroit manquer à la bonne foy, et à la franchise et la pureté des intentions de tous les bons et braves Patriotes, puisqu'on s'étoit engagé si en avant avec la France, de la duper de cette façon-là. Mais sentant cependant que la France biaisoit à la ratification du traite mentionné, à cause des différens que nous eumes alors avec l'Empereur au sujet de l'Escaut, il croyoit avoir trouvé un bon moyen pour presser la France à le conclusion de cette affaire, et pour être plus sçur des offertes de la part de l'Angleterre il demanda à M. Harris une note par écrit de tout ce qu'il lui venoit de communiquer, avec la permission spéciale d'en faire les ouvertures nécessaires. M. Harris ne balança pas, lui donna tout ce qu'il lui demanda à ce sujet; dès que M. Pieter Paulus eut veu en forme légale ces assurances par écrit, il fut trouver les chefs du Parti patriotique, leur communiqua dont il s'agissoit, et du consentement de tous il fut convenu d'en faire les ouvertures à la Cour de France, en montrant à M. l'Ambassadeur les offertes données par écrit de la part de l'Angleterre. M. de Vérac, alors ministre de France, si je ne me trompe, envoya directement un Courier à sa Cour avec une copie de cet instrumentGa naar voetnoot1), sur quoi la France ne tarda pas à hâter la ratification du traité, en envoyant une réponse des plus flatteuses pour les Patriotes, avec assurance de les protéger de tout son pouvoir et de s'intercéder auprès de l'Empereur pour finir la querelle aux souhaits des Patriotes, même avec des sacrifices pécuniaires de sa part. Voilà à peu près ce qui est passé dans cette affaire, | |||||||||||
[pagina 277]
| |||||||||||
mais si vous souhaitez d'avoir un détail précis de cette histoire, adressezvotis à M. Pieter Paulus ou Geyzelaer, je suis persuadé qu'ils ne vous le refuseront, quoique le premier soit très circonspect, prudent, et très politique; peut-être s'il ne vous connoit particulièrement il pourroit faire des difficultés à vous donner les informations nécessaires; en tout cas, Monsieur, j'ai cru devoir vous rappeler un anecdote si interessant, afin de ne pas l'omettre dans votre relation projettée. J'ai l'honneur d'être avec considération, Monsieur, votre très humble serviteur Un ancien membre de ia RégenceGa naar voetnoot1). Ce 10 Mars 1791. Monsieur Monsieur du Montpigale s.t. à Paris. | |||||||||||
6. - Dumont-Pigalle aan De Gijselaar, 21 Maart 1791Ga naar voetnoot2).Monsieur, .... Un anonyme, qui a soussigné sa Lettre: Un ancien Membre de la Régence, vient de m'écrire.... Inhoud van bovenstaanden brief. .... Voilà, Monsieur, ce que ce Régent m'a mandé. Si vous, avez copie de la dite Note de Harris, je vous prie de me la communiquer; sinon, demandez-la pour moi à M. Paulus .... Paris ce 21 mars 1791. | |||||||||||
7. - De Gijselaar aan Dumont-Pigalle, 7 Mei 1791Ga naar voetnoot3).Mijn Heer! In and-woord op uwen laadsten, moet ik speciaal ten aanzien van het aan uw gecommuniceerde door een oud-Regent melden, dat deeze Informatiën meestendeels geheel en al abusif zijn: wel is waar, dat Harris den fiscaal Paulus, voor het sluiten der alliantie met Vrankrijk, gedurende de negociatiën met den Keizer, door meer dan een mensch heeft doen te kennen geeven (onder anderen door den Heer De Mirabel, toen Envoyé van Zijne Sardinische Majesteit in s' Haage) dat de Republicq geene alliantie met Vrankrijk behoorde aan te gaan; dat de staat van met niemand geallieerd te weezen haar het best convenieerde, en dat zij dan door ieder een zou aangezogt en gevleid worden etc.; - dat hier op geandwoord wordende, dat dit voorgeeven van die zijde nu alleen geschiede met oogmerk, om de alliantie met Vrankrijk die men wel voorzag dat stond plaads te hebben, | |||||||||||
[pagina 278]
| |||||||||||
te prevenieren, en de Republicq daar door weer in de mogelijkheid te stellen, om de oude liaisons met Engeland te hernieuwen, gav men te kennen, dat, als de Republicq van die alliantie wilde afzien, en zich met opzicht tot haare quaestie met den Keizer meer of min naar Engeland wenden, of wel de Engelsche mediatie of protectie dienaangaande zou willen aanneemen, men niet twijfelde, of de Republicq zou favorabeler conditiën bedingen, dan nu onder de mediatie en protectie van Vrankrijk; - dat men althans geen 10 millioen zou behoeven te betaalen; dat men daar voor wel in stond en dat men ook geene vastigheeden zou behoeven af te staan; doch het is volstrekt abusif, dat Harris daar over eene Note zou hebben overgegeeven, die door gemelden fiscaal toen ter tijd wel is gevraagd, maar niet gegeeven, wijl men eerst meer geinformeerd wilde zijn van de dispositiën in Holland. - Ook is er geene quaestie geweest van de constitutie, veel min dat Engeland daaromtrent zou approuveren zodanige form van Regeering als men wilde; alleen heeft men den Heer Paulus toen gepermitteerd het bovengemelde op te teekenen, zo als geschied is, en waar van in dien tijd hier en daar, onder anderen ook aan mij is kennis gegeeven, gelijk ook aan de Heeren Veirac en La Coste, die daar van ongetwijfeld aan het Ministerie zullen hebben kennis gegeeven; maar in den tussen-tijd, voordat de alliantie met Vrankrijk geslooten was, en zelv noch na dien tijd, heeft de Heer Harris gemelden fiscaal een en andermaal laaten onderhouden over het aangaan van een tractaat van commercie, voorgeevende daaromtrend de grootste inschikkelijkheid te willen plaads geeven, en niets meer te verlangen, dan de gedagten van meergemelden fiscaal desweegens te mogen weeten; in het eerst heeft die Heer zich daar van afgemaakt met te zeggen, dat het hem voorkwam badinage te zijn; dat als men zulke ordres en intentien had, men zich dan direct aan het ministerie, of aan H.H.M. moest vervoegen, en dat die zaak dan op eene meer geschikte wijze in zijne handen zou komen etc.; men convenieerde daar van wel, maar aan wie der ministers moest men zich dan vervoegen? Fagel was oud, en had geen vertrouwen bij Holland, en Bleyswijk was geen man, om mee te handelen; aan H.H.M. kon de koning zich niet eerst en onzeeker van den uitslag addresseren, etc.; dit was niet bestaanbaar met zijne waardigheid; daar en boven verzogt men niets te weeten als de personeele gedagten van hem, met wie men te hands sprak, en men zou zelv zijne relatiën geheel laaten stil staan. - De Heer Paulus heeft doen vervolgens gezegd, dat als er ooit een tractaat van commercie tusschen de Republicq en Engeland, met eenige hoop van stabiliteit, en op gronden van billijkheid, zou kunnen worden aangegaan, men dan van weerskanten tot basis zou moeten stellen eene volstrekte gelijkheid en zodanige wederzijdsche rechten, waar door de eene mogendheid in contractando vis à vis van de andere gelijkgesteld zou worden, en waar door derhalven wederzijdsch dezelvde voorrechten met opzicht van de wederzijdsche commercie en navigatie voor alle ingezeetenen zouden kunnen worden bedongen; want dat geen een Regent of Minister van de Provincie op een anderen grond zich daar over kon of zou inlaaten, wijl het onmogelijk te suppo- | |||||||||||
[pagina 279]
| |||||||||||
neren was, dat iemand zon kunnen of willen toestaan, dat men begon, met tot een grondslag te leggen, dat de beide Natien ab initio niet gelijk zonden staan, maar dat de een boven de andere per se, en zonder recompens, verschelde avantages vooruit zon moeten hebben, met een woord, dat men begon met de partage van harlequin; ten minsten, dat hij, als een eerlijk man, begreep, dat daar over nooit, dan op een voet van volstrekte gelijkheid, kon worden gesprooken; en dat hij daar omtrend anders spreekende, zou meenen, te kort te doen aan de belangens en natuurlijke rechten van zijn eigen land, en zich zelvs verachtelijk aanstellen in 't oog van die mogendheid, welker belangens hij alzo aan die van zijn vaderland zou willen voortrekken. - Dat uit die gronden nu volgde, dat Engeland van de Republicq niet zou kunnen exigeren, om op dezelve op een andere wijze te navigeren dan zij zulks aan haar toestonden; dat derhalven de gronden der acte van navigatie van Cromwel, of wel die acte zelve, daar door ten eenemaal wierden gesubverteerd, en dat hij zich niet dorst vleijen, dat men in Engeland ter contemplatie van de Republicq daar van, en van andere daar uit geproflueerde schikkingen zou willen afgaan, terwijl hij het aan het oordeel van de man, die hem sprak, overliet, te beslissen, of een eerlijk Regent of Minister van het land, zonder dat men ondertusschen hiertoe bereid was, wel vrijheid hebben kon, om het aangaan van een commercietractaat met Engeland aan te raaden. Men was daar over zeer stupéfait, en wist er niets op te andwoorden, dan: qu'il parlait en honnet homme, et que dans son cas on ne pourrait parier autrement, cependant qu'il fallait voir; que l'Angleterre paraissait vouloir être raisonnable avec la République; et qu'on ferait son rapport. - Doch men heeft het daar bij gelaaten, en men heeft den Heer Paulus daar over nooit verder gesprooken, dan eens op een maaltijd en passant, namelijk, dat deeze gelijkheid nu toch ook geen plaads had, en dat het daarom dan altijd beter zou zijn, de helft te hebben, als niets; doch hierop gerepliceerd wordende, dat het geheel wat anders was, van iets verstooten te zijn, par le droit du plus fort, en heel wat anders, zulks gedaan te worden par un contract volontaire, en dat dit droit du plus fort juist het poinct was, waar over men zich in de Republicq beklaagde, en waarom men meer zogt, met zodanige Natie te contracteren, die niet alleen zodanige ongelijkheid niet vergde, maar bereid scheen, op een gelijken voet te handelen, brak men de conversatie af, zonder dat men gemelden Heer daar over meer heeft onderhouden. Integendeel heeft hij sederd dien tijd aan den Heer Harris duidelijk geremarqueerd, dat hij over hem te onvreeden was, ten minsten, dat hij hem mijdde; en men kan onder anderen ook daar aan toe schrijven het empressement, dat de Heer Harris heeft betoont, om den Heer Paulus te doen dimitteren; zo als hij zich daar van na de dimissie van dien Heer, opentlijk heeft beroemd; hoe zeer hij er bij zeide, dat hij tog gaarne erkende, dat het departement van den fiscaal Paulus het eenige was, dat in order was geweest, en dat die post in geene beetere handen had kunnen weezen; de Heer Caillard moet zulks hebben horen zeggen, en ook aan zijn Hov hebben overgeschreeven; men twijfeld zelv, of Harris | |||||||||||
[pagina 280]
| |||||||||||
niet teffens heeft gezegd, dat hij van wegens zijn Hov op gemelde dimissie had aangedrongenGa naar voetnoot1).... Brussel, 7 May 1791. Uw gehoorzaame dienaar c. de gijselaar. |
|