La jeune mère délaissée,
Sur tes traits gracieux où brille un doux souris,
Aimable enfant, fille trop chère,
L'espérance croit voir des charmes accomplis;
Mais la mienne, ô pensée amère,
La mienne est obscurcie et mes jours sont flétris:
Tu n'es plus dans les bras d'un père!
Là, j'aurais pu t'aimer, te chérir encor plus;
Là, j'aurais, loin de la richesse,
Méprisé la fortune et ses biens superflus;
Là, dans une ineffable ivresse,
Heureuse épouse, au sein des paisibles vertus,
J'aurais régné par la tendresse.
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Et qu'es-tu maintenant? un être malheureux,
Gage d'une flamme outragée,
Qu'à de stériles pleurs ont condamné les cieux;
Une douce et tendre affligée,
Qui gémit, près de moi, dans cet abîme affreux,
Où les coups du sort m'ont plongée!
Innocente colombe! ô toi, qui, désormais,
Sur cette malheureuse terre,
Ne trouveras d'asile, au milieu des regrets,
Que le coeur brisé d'une mère;
Puisse le ciel, un jour, te rendre ses bienfaits,
Et t'ouvrir l'arche tutélaire!
Puisse cette arche sainte, à travers les dangers,
Protégeant ta course timide,
Navigner, sans malheur, sur ces bords étrangers,
Et te porter, fidèle guide,
Jusqu'aux lieux, où, soustraite à des maux passagers,
L'éternelle vertu réside!
Si ta mère pour toi ne fait pas d'autrés voeux,
Console-toi, fille trop chère;
Console-toi: le monde a dessillé mes yeux;
Et, de cette vie éphémère,
J'ai connu, mais trop tard, les rêves douloureux:
Tu n'es plus dans le coeur d'un père!
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