Briefwisseling en aantekeningen. Deel 1
(1934)–Willem Bentinck– Auteursrecht onbekendAken, 18 April 1748.J'appréhende plus que chose au monde que le mécontentement qui règne à présent et qui a été occasionné par le peu de fermeté à soutenir des mesures très sagement concertées l'année passée, ne produise à la fin un mécontentement national entre l'Angleterre et notre République. Je vois avec douleur qu'il y a de la pique et de l'aigreur. Ce sont les plus mauvais conseillers en affaires. Jusqu'à présent cela n'est que personnel. Si une fois tout ce qui c'est passé, devient public et que de certains papiers soient produits, il n'y aura plus moien d'eteindre l'incendie. Chacun de son côté voudra avoir raison; et de quelque côté que le tort soit, n'importe, l'effet en sera tousjours le même. La France seul en profitera; et par nos démêlés et par nos mésintelligences, nous tomberons sous sa dépendance, sans espoir de retour, à moins de | |
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quelque évènement imprévu ou de quelque circonstance critique, sur lesquels on ne peut pas compter, moins encore bâtir là-dessus. Dans une situation pareille personne ne sera plus embarrassé que moi. Vous savez ce qui s'est fait l'année passée et cette année-ci, pour comprendre que je pers en ce cas-là le seul soutien qui me restoit. Notre amiGa naar voetnoot1) verra qu'il s'appuie sur un roseau cassé, en se fiant et se laissant conduire par des gens qu'il croit mener, et qui le mènent lui-même à sa ruine, et à son déshonneur. Le seul moyen de prévenir ce malheur dont l'Angleterre, la République, et de reste de l'Europe se ressentiroit également, est, de maintenir mon crédit. D'un autre côté vous savez mieux que personne combien il y a de gens autour de notre ami, qui par envie, par intérest, par ambition, ou par quelque autre passion, cherchent à m'ôter toute direction, et qui pour cet effet me représentent comme un homme livré aveuglément à l'Angleterre, et mené en dupe par le nez par les ministres d'Angleterre. Tout le parti François et Antistadhoudérien, qui conserve encore toute sa vigueur, cultive ses anciennes liaisons tant dans le païs, que dans les cours étrangères, travaille jour et nuit à acquérir de nouvelles forces, et les fera tout d'un coup paroître à une occasion favorable. A tout cela se joindra en Angleterre le parti de Chesterfield, Harrington, Trevor, avec tous les débris du parti Walpolien. Trevor ne me pardonnera jamais la façon dont je l'ai découvert et démasquéGa naar voetnoot2), et ceux qui l'ont placé et patrociné, seront charmés de le justifier. Chesterfield a la mémoire trop bonne pour oublier l'année passée et il sait très bien que la nécessité où il s'est trouvé de quitter, par ce qu'il avoit trop à faire et trop peu à dire, vient en grande partie de ce que j'ai fait et dit quand j'étois en Angleterre. En un mot comme je suis le premier ou le | |
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seul qui aye attaché le grelot, c'est par moi que l'on doit commencer; après cela on ira plus loin. Je ne prétens pas être assez considérable pour que ma situation puisse directement influer sur celle du présent Ministère en Angleterre, mais je crois qu'elle le pouroit indirectement. Quand cela ne seroit pas, je croirois avoir une espèce de droit de demander d'être soutenu, après tout ce qui s'est passé, et que le Duc de Newcastle sait mieux que personne, à moins que ce ne fût Myld. Sandwich, qui le sait aussi bien que lui. Notre ami doit sentir le besoin qu'il a de moi ou de vous, car c'est la même chose. Tous les gens du parti contraire dans le gouvernement en Hollande ont cherché à me dénigrer; mais la Nation n'en a pas jugé de même; la confiance et l'estime du public a fait pendant longtemps ma seule sûreté, et la faveur publique m'a garanti alors de la fureur de la CabaleGa naar voetnoot1). Cette même faveur doit encore me soutenir contre cette même cabale. Il faut pour cela que dans tous les points purement nationaux l'on ne puisse en Hollande voir aucun changement, ni aucune différence entre l'année passée et celle-ci. Peu avant la Révolution je reçus une lettre d'un marchand d'Amsterdam qui me prioit de proposer aux Etats Généraux de demander à l'Angleterre de la part de la République la protection du pavillon anglois pour les vaisseaux hollandais. J'en parlai à Myld. Sandwich qui en écrivit en Engleterre à ma réquisition et reçut en moins de huit jours ordre d'offrir cette protection. Il n'en dit rien à personne que le lendemain, de façon que j'eu le tems le soir même de l'écrire à Amsterdam, où on le sut le matin avant que personne en fût informé à la Haye. Ma lettre fut lue publiquement à la Bourse, où elle causa une grande joye et m'attira beaucoup de bénédictions d'un côté, aussi bien que beaucoup d'envie de l'autre. J'ai toujours soutenu en public que tout ce que l'on débitoit de lieux communs sur la jalousie de commerce, sur la haine des Anglois contre les Hollandois, n'étoient que des ruses de guerre, pour frayer le chemin à des | |
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liaisons avec la France, qui seroient la cause de la ruïne de la République, et pour lesquelles on vouloit préparer les esprits en excitant d'avance la haine contre les Anglois et par contrecoup contre la maison d'Orange, à cause des liaisons de sang avec la famille Royale d'Angleterre, qu'on regardera toujours comme le soutien de celle d'Orange, comme elle l'est effectivement. Si je suis à present obligé de changer de stile sur ce point si châtouillieux, et si national, je pers une de mes jambes et je ne puis plus me soutenir, moins encore cheminer. Dans le public j'entendrai plainte sur plainte contre les Anglois sans avoir rien à répliquer, et en particulier l'on me dira qu'il n'y a rien à faire avec Messieurs les Anglois, etc. Vous jugez bien comme Gillis et Haren en feront leur profit, surtout si la SignoraGa naar voetnoot1) vient à l'appui de la boule, comme elle ne manquera pas. La première dépêche que Sandwich reçut de Newcastle dans sa nouvelle qualité de secrétaire d'état pour le NordGa naar voetnoot2), contenoit un ordre de déclarer au Prince d'Orange qu'il feroit, par considération pour le Prince, examiner incessamment les griefs qu'on avoit sur les vaissaux pris, dont il demandoit une liste pour cet effet et s'engageoit à faire tout ce qui seroit possible pour ôter tout sujet fondé de plainte. Sandwich donna un extrait de cet ordre au Greffier. Cet extrait fut lu le soir même dans le cabinet du Prince, où j'étais moi quatrième avec Gillis, qui fit une grimace involontaire, ne s'attendant pas à voir un papier qui servoit si peu au but qu'il suit constamment. Cet ordre est publié en Hollande parce que le Greffier et moi avons pris soin de le publier. J'ai fait plusieurs démarches en conséquence, qui impliquent un engagement à la partie commerçante de notre nation de leur en faire sentir les effets. Et depuis que je suis à Aix, j'ai reçu plusieurs lettres de Marchands considérables, et très bien intentionnésGa naar voetnoot3), qui me prient très instamment de me servir du crédit que j'ai en Angleterre par le moyen de Myld. Sandwich et directement auprès du duc de Newcastle pour leur procurer satisfaction dans les points qui seront trouvés raisonnables, car | |
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les honnêtes gens avouent que les plaintes sont exagérées, et qu'il y en a sans aucun fondement, pendant que d'autres sont très bien fondées. J'ai tout lieu de craindre qu'après la démarche contradictoire que notre ami a faiteGa naar voetnoot1), et qui a mis les choses dans une situation presque désesperée, l'on ne témoigne plus en Angleterre la même ardeur à satisfaire la nation dans un point si délicat et où elle a en grande partie la plus grande raison, et la justice de son côté. Mais je vous prie de représenter au duc de Newcastle très sérieusement de ma part, que si on se laisse aller à la pique dans cette affaire, l'on fera comme celui qui se coupa le nez pour faire dépit à son visage, et l'on fera d'une affaire purement personnelle une affaire nationale, dont les effets seront peut-être sans remède, contre son intention et contre les principes dont il a toujours fait profession. Quant à moi je regarde ce point-ci comme le tout par raport à moi; et si on le traite froidement, comme il me paroit qu'on est à présent disposé à faire, je serai muet en public, dans les assemblées d'Etat, dans les Committés, et dans le Conseil privé du Prince, toutes les fois qu'il s'en agira, et il s'en agira toujours si l'on voit que cela me rend muet. Le Greffier sera dans le même cas que moi et les autres en triompheront. Il ne me sera pas possible de soutenir ce surcroît de dégoût après tous ceux que j'ai déjà essuiés, et je serai dorénavant absolument inutile pour le soutien du parti pour lequel j'ai déjà tant souffert. Ce n'est que pour le soutenir que je suis ici et que j'y reste; car les affaires ici ne vont pas du tout selon mes principes, ni selon mes vues. C'est dans l'espérance de pouvoir empêcher qu'elles n'aillent plus mal encore que je me laisse par provision employer, mais si je vois que pendant que tout se précipite ici, je perds du côté de l'Angleterre tout soutien réel et solide et toute espérance de voir dans la suite aller les choses mieux, je n'y pourrai plus tenir et je quitterai le partie pendant que je le puis avec honneur et avant que je sois baffoué d'amis et d'ennemis. Conclusion: je demande de vous que vous priez in- | |
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stamment au Duc de Newcastle de veiller à ce que les affaires, si elles sont mauvaises, ne deviennent pas pire. S'il n'a pas en Hollande le soutien qu'il attend il ne faut pas qu'il se prive de celui qui lui reste encore, et qu'il peut augmenter s'il le cultive. Vous pouvez lui dire que j'attens cela non seulement de ses principes, pour lesquels je le respecte et l'honore, mais de son amitié pour moi et en récompence de mon attachement pour sa personne et pour ses intérests. Avec le temps notre ami verra qu'il ne peut se passer de l'Angleterre, qui est son seul soutien contra la cabale françoise Antistadhoudérienne, qui le ruinera et le rendra petit et inconsidérable, d'abord que la paix sera faite, quoi qu'il la souhaite tout à present, et il n'est pas d'un homme sage, prudent et habile de faire à tête reposée des démarches qui doivent absolument tourner contre lui-même, non dans une futurité incertaine, mais dans un cas qu'il prévoit devoir arriver incessamment. Il me paroit que tout homme qui a tant soit peu de connaissance du monde ne peut manquer de voir que d'abord que la paix sera faite, la France travaillera à prévenir dans la suite que le Prince d'Orange ne mette empêchement à ses vues et ne puisse avec aucune sorte de probabilité regagner le terrein qu'il a perdu. C'est pourquoi il est de l'autre côté sensé et prudent de le maintenir pour lui; et cela pour l'intérest commun. Cela ne se peut faire qu'en soutenant ceux dont les principes n'ont jamais varié, et en faisant ce qu'il faut faire pour cela. Rien n'y conduit plus directement que ce que je demande dans cette lettre. Et quoi qu'il semble que cela me regarde moi-même directement, je proteste que non, et que ce n'est pas là mon but. D'un autre côté ce que je demande au Duc de Newcastle n'est pas autre chose que ce qu'il devroit faire par prudence et pour soutenir son propre parti, et ses propres principes. | |
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