| |
| |
| |
La bataille de Waterloo,
par P. Lebrocquy,
poëme qui a mérité un accessit.
Horum omnium fortissimi sunt Belgae.
caesar, bel. gal.
RÉveillez vous, Bardes de la Belgique,
Reprenez avec moi vos luths et vos concerts;
Prêtres, à nos accords mêlez un saint cantique,
Que nos chants confondus pénètrent dans les airs.
Aux cent voix de la renommée
Et des vengeurs du trône annonçons les exploits.
Chantons.... dans mon âme enflammée,
Un feu subtil s'est répandu;
Qu'aux sons de ma lyre animée
Le calme au monde soit rendu.
D'un Dieu j'ai senti la présence,
Devant lui, vents, faites silence,
Vous, fleuves, suspendez vos flots:
Entraîné par sa violence,
Mon esprit plus hardi s'élance,
Et s'ouvre des sentiers nouveaux.
Napoléon de sang et de vengeance avide,
De son séjour obscur quitte les tristes bords;
| |
| |
A travers les périls de la plaine liquide,
Un esprit malfaisant le guide,
Et la France en tremblant le reçoit dans ses ports.
Il a paru.... la paix du monde est exilée;
On voit autour de lui frémir ses bataillons;
Par les bras triomphans de trente nations
Du temple de Janus la porte étoit scellée,
Elle fléchit, et croule à la voix des clairons.
De ses cohortes sanguinaires
Le superbe tyran menace l'univers.
J'ai vu ses bataillons inonder nos frontières,
Leur nombre étoit égal à l'arène des mers.
Leur étendard sanglant à nos yeux se déploie,
Tout le camp retentit d'une barbare joie,
Et leurs horribles cris vont fatiguer les airs:
‘Que partout gronde notre foudre,
Au loin qu'elle sème l'effroi;
Le dernier trône mis en poudre
Doit voir tomber le dernier Roi.
Des bords du Tibre jusqu'au Tage,
Du Nil aux rives de l'Ister,
Que tout ressente notre rage,
Que tout périsse par le fer.
Dans la force le droit consiste,
La justice n'est qu'un vain nom;
Marchons, frappons, rien ne résiste
Aux soldats de Napoléon.’
C'est ainsi que jadis les enfans de la terre,
Enorgueillis de leurs corps monstrueux,
Osèrent défier le maître du tonnerre
Et disputer l'Olympe aux Dieux.
| |
| |
Français, titans ambitieux,
Comme eux vous rend audacieux,
Et comme eux vous serez foulés dans la poussière.
Mais quel autre tableau trouble mes sens émus?
Quel est donc ce pompeux spectacle?
Le ciel, par un nouveau miracle,
Nous rendroit-il le siècle de Cadmus?
Soudain les casques, les épées
Semblent sortir de nos sillons;
Partout nos fertiles contrées
Semblent vomir des bataillons.
Vois les peuples les plus braves
Accourir des bords du Rhin,
Et les guerriers de Berlin
Se joindre avec les Bataves.
Vois ces favoris de Mars,
Vrais enfans de la Belgique,
Arborant le Lion antique,
Courir à la victoire unis aux Léopards.
Ne redoutons plus les ravages
Du tyran et de ses bourreaux,
Contr'eux sur nos rivages
L'éternel fait descendre un peuple de héros.
Où suis-je! d'horreur je frissonne,
La terre tremble sous mes pas,
Au loin le bronze qui résonne
Donne le signal des combats.
Le Français bouillonnant dans la plaine s'élance,
Quelques instans sa violence
Semble écraser nos guerriers éperdus.
Mais non, la victoire infidèle
| |
| |
Ne désertera point ses enfans trop connus:
Le trouble les fait fuir, mais l'honneur les rappelle;
Ils sont surpris, mais non vaincus.
Où court ainsi ce jeune Alcide?
Son aspect des combats a changé les destins;
Des Belges c'est le noble guide,
La victoire le suit, la foudre est dans ses mains.
Tel lorsque vainqueur des orages,
Le soleil éclatant reparoît dans les cieux,
Il ramène le jour, et déjà les nuages
Ont fui son disque radieux;
Tel, entraîné par l'ardeur qui l'anime,
Nassau faisoit voler l'effroi de rang en rang,
Quand soudain, ô surprise! ô crime!
Le plomb mortel l'atteint et fait couler son sang?....
Consolons-nous, ce sang devient le gage
De nos plus fortunés succès;
De nos guerriers il redouble la rage,
Et ce sang s'expîra dans le sang des Français.
Mais je sens croître les alarmes:
Alecton sortant des enfers
A dépeupler tout l'univers,
Semble exciter les bras et leur prêter des armes.
A la tête des siens se montre Wellington;
Je vois à son aspect frémir Napoléon.
| |
| |
Mais envain les mourans s'entassent,
Envain les Francs sont renversés,
De nouveaux ennemis remplacent
Tous les ennemis terrassés.
Ni l'audace, ni le courage,
Du combat ne fixent le sort:
Partout dans ces champs de carnage
On ne voit triompher que l'horreur et la mort.
Sous ses longs escadrons la terre a retenti;
Ils ont tremblé ces tyrans de la France,
Le fier Napoléon lui-même en a pâli.
Leur audace les quitte, ils courent, se dispersent,
Les soldats et les chefs se heurtent, se renversent;
Des bataillons entiers se laissent enchaîner,
Et leur bronze homicide a cessé de tonner.
A l'instant mille voix annoncent la victoire;
Nos guerriers sont debout, la palme sur le front,
Et célébrant leurs succès et leur gloire
Des ennemis ils redisent l'affront:
| |
Choeur de Guerriers.
Triomphe! Du couchant aux rives de l'aurore,
Peuples recommencez vos concerts fraternels:
La paix que l'univers implore
Nos bras et Wellington l'ont rendue aux mortels.
| |
| |
Ils ne sont plus ces jours d'alarmes,
Le repos au monde est rendu;
Mères ne versez plus de larmes,
Triomphe! Du couchant, etc.
Lève-toi fertile Belgique,
Jouis du fruit de nos succès;
Vois sous un règne pacifique
Fleurir le commerce et la paix.
Triomphe! Du couchant, etc.
|
|