d'avoirs placés de l'ordre de 220 milliards d'euros, ce qui en fait l'une des plus importantes au monde. Elle aussi est indépendante de l'employeur, en l'occurrence les pouvoirs publics.
Jusqu'à il y a quelques années, l'objectif visé dans de nombreux cas était que le cumul de la pension de l'entreprise et de la pension de base égale pour tous les citoyens garantisse au retraité 70% de son dernier salaire. Cela semblait toutefois difficilement réalisable. De ce système fondé sur le salaire de fin de carrière, on est passé à celui prenant pour référence le salaire moyen. Les caisses de retraite privées disposant d'un total d'avoirs global de plus de 780 milliards d'euros (pour un revenu national de près de 600 milliards), placés principalement dans des obligations et des actions, occupent une place particulièrement importante dans le régime des assurances retraite et dans l'économie des Pays-Bas. Or, le secteur se voit confronté à la situation paradoxale que ce régime risque de ne pas être à même de respecter ses engagements en matière de pensions alors que ses réserves sont plus élevées qu'elles ne l'ont jamais été.
Les caisses se sont en général restabilisées après la dégringolade des cours sur le marché des actions due à la crise des crédits. Mais c'est la question de l'espérance de vie qui est devenue préoccupante. Comme les retraités vivent de plus en plus longtemps par rapport à la durée escomptée lors de la fixation des cotisations, les caisses de retraite ont vu baisser le taux de couverture, c'est-à-dire le rapport entre les paiements des pensions actuelles et futures et les fonds disponibles à cet effet. Leurs réserves leur ont encore permis de faire face à cette situation. À l'heure actuelle, c'est la baisse des taux d'intérêt qui risque de leur causer des problèmes.
Les caisses de retraite ont globalement placé la moitié de leurs fonds dans des obligations. À la suite de la baisse des taux d'intérêt, les cours de celles-ci ont considérablement monté. Cela a abouti à la situation paradoxale que les caisses de retraite sont aujourd'hui plus riches que jamais, mais que leur taux de couverture n'a jamais été aussi bas, même inférieur à 90% pour quelques-unes d'entre elles. La loi oblige les fonds de pension à calculer le taux de couverture sur la base de l'actuel taux d'intérêt du marché financier. Personne ne sait en effet - tel est le raisonnement - quand le taux d'intérêt remontera jusqu'au niveau qui permettra de payer effectivement les pensions promises.
Fonder la politique sur une évolution du taux d'intérêt que l'on escompte - c'est ce que préconisent les principaux intéressés - témoignerait d'un comportement irresponsable. La Banque centrale néerlandaise qui assure le contrôle légal sur les caisses de retraite a dès lors fait savoir à un certain nombre d'entre elles qu'elles devront procéder à une réduction des pensions à verser si le taux de couverture s'avérait encore trop peu élevé à la fin de l'année. Par ailleurs, si les réserves le permettent à l'avenir, les retraites pourraient être partiellement ou intégralement ramenées au niveau antérieur.
Indépendamment de l'énvolution des taux d'intérêt se déroule le débat sur le relèvement de l'âge légal de la retraite de 65 à 67 ans. Bien qu'aucune décision n'ait été prise en la matière jusqu'à présent, il était clair au début de cette année-ci déjà qu'une majorité du parlement y est favorable, et aussi que les conseils d'administration des caisses de retraite, employeurs et syndicats, marquent leur accord à ce propos. Il y a des projets visant à porter l'âge légal de la retraite aussi bien pour la pension de base que pour la pension complémentaire à 66 ans en 2020 et à 67 ans en 2025. Cela semble assez éloigné dans l'avenir, mais ces mesures exercent bel et bien une influence favorable immédiate sur le taux de couverture actuel, qui est en effet principalement déterminé en fonction des engagements à venir. Cela permettrait éventuellement de renoncer à des réductions des pensions à verser.
Grâce à leur gigantesque magot pour les retraites de l'ordre de 780 milliards d'euros, constitué, il est vrai, sous contrôle légal mais indépendamment des autorités publiques, les Pays-Bas peuvent s'enorgueillir d'un régime de retraite solide dont ne dispose aucun autre pays de l'Union européenne. Toutes sortes d'adaptations, parfois quelque peu pénibles, s'avéreront le cas échéant indispensables, mais il suffit de passer en revue ces éventuels ajustements pour se rendre compte qu'ils ne risquent pas de menacer le système dans son essence.
christiaan berendsen
(tr. w. devos)