Histoire
De Marat à Magritte: le bicentenaire des Musées royaux de Bruxelles
En 1794, les Pays-Bas méridionaux devinrent partie intégrante de l'État français. Les idées de la Révolution française eurent un impact direct sur les Pays-Bas méridionaux, qui, pendant les 20 ans qui suivirent, subirent des changements bien plus radicaux que sous n'importe quelle autre période d'occupation. Après la réforme administrative, les Français instaurèrent également la législation en matière ecclésiastique, en vertu de laquelle la plupart des ordres religieux furent supprimés, leurs biens saisis et rassemblés dans des dépôts. Les plus impressionnantes de ces oeuvres d'art somptueuses - parmi lesquelles figuraient, par exemple, Het Lam Gods (L'agneau mystique) des frères Hubert et Jan van Eyck et la Kruisafneming (La descente de croix) de Pierre Paul Rubens - furent acheminées vers Paris.
Les moins intéressantes parmi ces oeuvres confisquées furent réunies dans les locaux de l'ancien palais de Charles de Lorraine à Bruxelles. En 1978, Guillaume Bosschaert fut désigné comme conservateur de cette collection. Celle-ci constitue le point de départ des Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles. Les efforts consentis par Bosschaert furent officiellement reconnus lorsque Napoléon créa, en 1801, le Musée du département de la Dyle, dont cette collection constituait le fonds initial. Cette agréation eut pour effet qu'un certain nombre d'oeuvres importantes - notamment quelques retables de Rubens ainsi que plusieurs toiles françaises et italiennes - furent transférées de Paris à Bruxelles. En 1811, la ville de Bruxelles devint propriétaire du musée. C'est à cette époque, pourtant pas la période la plus florissante pour le musée, que fut acquis un tableau tel que Het portret van Nicolaas van Bambeeck (Le portrait de Nicolaas van Bambeeck) de Rembrandt. Transféré à l'État belge en 1842, le musée jouerait dorénavant un rôle de musée national de plus en plus prononcé.
En 1845 fut créée une section d'art moderne belge, précurseur lointain du Musée royal d'art moderne. Les Musées Antoine Wiertz et Constantin Meunier, consacrés aux oeuvres de ces deux artistes importants du xixe siècle, en constituent les deux autres sections. Le Musée d'art ancien, qui présente un aperçu de la peinture aux Pays-Bas du xve au xviie siècle, et de la sculpture aux xviiie et xixe siècles; le Musée d'art moderne, qui comprend surtout des oeuvres artistiques belges des xixe et xxe siècles, les Musées Wiertz et Meunier constituent ensemble le plus grand complexe muséal de Belgique.
En 1887, les collections d'art ancien furent transférées dans un nouveau bâtiment à proximité du palais de Charles de Lorraine. Ce nouveau musée avait été conçu par Alphonse Balat, l'architecte du roi Léopold II, qui avait également rénové le palais de Laeken et conçu les Serres royales. Cet édifice incarne également le sommet du classicisme en Belgique. Il a toujours fait l'objet de travaux de transformation. Ainsi il a été prolongé et augmenté de 53 salles en 1974. En 2002 devra être achevée la rénovation des deux maisons jouxtant le bâtiment de Balat. Celles-ci abriteront notamment les deux legs les plus importants. Le Musée d'art moderne occupa jusqu'en 1959 les locaux de l'ancienne Cour de Charles de Lorraine. La collection fut ensuite exposée dans plusieurs bâtiments jusqu'en 1984, lorsque le nouveau Musée d'art moderne ouvrit ses portes. Celui-ci occupe principalement des salles souterraines en face du palais de Charles de Lorraine. Roger Bastin en est le concepteur. Le nouveau bâtiment aussi bien que la collection ont suscité bien des critiques. Le bâtiment présentait un nombre considérable de lacunes; les critiques estimaient qu'il n'atteignait pas le niveau des musées d'art moderne d'autres villes européennes. Aux conservateurs on reprochait une politique d'acquisition à courte vue dénuée de tout sens de l'aventure.
Au dernier quart du xixe siècle, plusieurs oeuvres intéressantes avaient tout de même pu être acquises, à commencer par une magnifique collection d'oeuvres principalement du xvie siècle