Kees van Kooten (o1941) (Photo Roel Bazen).
néerlandais moderne est indéniable et a depuis été démontrée et étudiée dans plusieurs publications, le plus récemment dans
Jemig de pemig! (titre intraduisible, 1999) par l'historien de la langue Ewoud Sanders. Plusieurs mots et tournures de Van Kooten et De Bie sont par ailleurs tombés dans le domaine public au point qu'ils ont même été enregistrés dans la nouvelle (treizième) édition du
Van Dale (1999), le dictionnaire le plus important de la langue néerlandaise.
Regelneef (littéralement: cousin des règles; personne tatil-lonne, formaliste, vétilleuse, etc.) est l'un de ces mots: on les rencontre dans toutes les familles, ces hommes - car en général il s'agit d'hommes - qui entendent toujours tout organiser et régler jusque dans les moindres détails, connaissent toujours la bonne adresse qu'il faut pour tout et n'importe quoi, et qui montent la garde à proximité de la boîte aux lettres pour vérifier si le courrier est effectivement levé à l'heure indiquée. Ou oudere jongere (jeune plus âgé...), qui désigne les personnes dans la trentaine et la quarantaine grandies avec des idéaux de gauche et qui ont envers et contre tout continué à caresser les rêves, la musique et les drogues psychédéliques. Ou doemdenken (pratiquer le catastrophisme, broyer du noir...), verbe si bien intégré au néerlandais d'aujourd'hui que plus personne ne peut imaginer qu'il n'a été lancé par le duo Van Kooten et De Bie qu'en l'an 1980 seulement. Cette notion date de l'époque où, aux Pays-Bas, la perspective d'une éventuelle troisième guerre mondiale imminente donnait lieu à d'innombrables débats et renvoie à une vision sombre et pessimiste du futur.
Que ce fût intentionnellement ou involontairement, Van Kooten et De Bie réussissaient à gaten te dichten in de taal (boucher des trous dans la langue), c'est-à-dire à inventer et lancer des dizaines de mots et de tournures dont l'usager de la langue ne se rend compte à quel point ils ont dû lui manquer qu'au moment où tout à coup ils sont là, à la disposition de tout un chacun d'une manière tout à fait évidente. Que le prix Groenman - nommé d'après le donateur, décédé en 1943 - d'un legs de cent mille florins (soit quelque 2 000 000 de FB ou quelque 330 000 FF) ait été attribué au seul Kees van Kooten, et non au duo, ne peut se comprendre qu'en raison du succès que celui-ci a récolté - et continue à récolter depuis ses adieux à la télévision - en sa qualité d'écrivain dans une mesure beaucoup plus large que ce ne fut le cas de Wim de Bie. Ses récits (pseudo-) autobiographiques, ses billets et chroniques parus en recueils ainsi que ses autres oeuvres littéraires, parmi lesquelles le récent livre pour enfants Het schaampaard (Le cheval de honte, 1999), ont trouvé un public de lecteurs enthousiastes de sept à soixante-dix-sept ans.
Le rapport du jury se termine comme suit: ‘Van Kooten a démontré de manière éclectique, au cours des dernières décennies, qu'il y a toujours la place, dans les médias, pour la créativité et l'originalité linguistiques et que le néerlandais constitue une langue vivante, “notre langue vivante”. C'est la raison pour laquelle, en lui décernant ce prix linguistique Groenman, le jury tient à lui exprimer sans ambages toute son admiration et toute son estime.’
Jos Nijhof
(Tr. W. Devos)
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