à l'adresse du gouvernement et du secrétaire d'État à la Justice, Job Cohen (socialiste), tout en reconnaissant qu'il exerce un ‘métier de chien’.
Ce pourcentage élevé s'explique pour une part par une forme de perfectionnisme, ou de culture administrative, - que le Néerlandais aime attribuer à son voisin allemand! -, appliqué à l'appréciation de la situation personnelle dans le pays que l'on a fui et au processus d'appel en cas de refus, lequel prend en moyenne 25 mois, etc.; conséquence: une très longue attente avant de longues procédures qui - à supposer qu'elles débouchent sur une expulsion - entraînent une résistance émotionnelle contre des circonstances parfois dramatisées, qualifiées d'injustes, et conduisent population et médias à protester contre la politique gouvernementale.
Le gouvernement affirme s'en tenir strictement aux normes fixées au niveau international, à Genève, Dublin, Dayton, normes qui s'imposent aussi aux autres pays européens, mais que ceux-ci, estime Cohen, ‘n'observent pas avec autant de rigueur que les Pays-Bas’.
Dans le cas de la menace de crise ministérielle évoquée ci-dessus, il s'agissait de savoir si la Bosnie pouvait désormais être considérée comme un pays ‘sûr’, ce qui permettrait de mettre un terme à l'asile accordé. L'Allemagne partant du principe qu'il en était ainsi, c'est un flot soudain de demandeurs d'asile bosniaques, manifestement expulsés d'Allemagne qui submergea les Pays-Bas plus lents à réagir.
D'autres facteurs ajoutent à l'attrait des Pays-Bas pour les demandeurs d'asile: la coquette somme qui leur est allouée, le faible taux de chômage, le droit au regroupement familial (un tiers a moins de quinze ans!). Géographiquement, les Pays-Bas se trouvent par ailleurs au ‘bout de l'entonnoir’. Les clandestins y ont droit à l'enseignement pour leurs enfants; ils peuvent après six ans obtenir un permis de séjour. Cohen déclare: ‘Les Pays-Bas interprètent plus largement que d'autres pays les traités sur les réfugiés’. Afin de décourager quelque peu des demandes d'asile aux Pays-Bas, le cabinet décida ‘de faire preuve de sobriété dans l'accueil’. Il est symptomatique que la population néerlandaise se soit plus ou moins insurgée, lorsqu'elle apprit, au cours du pluvieux été 1998, qu'on hébergeait des demandeurs d'asile dans des tentes de l'armée qui prenaient l'eau. Après ces protestations, on les logea dans des tentes dites de surprise-partie. Les capacités d'accueil sont depuis longtemps épuisées. Même si les Pays-Bas sont le plus en perte d'intérêt pour l'Église de tous les pays européens, le Conseil des Églises protestantes et catholiques a à maintes reprises rappelé le gouvernement à son devoir social en l'occurrence, rappel approuvé par une bonne partie de la population.
Mais une large minorité estime que les Pays-Bas, du fait de cette généreuse politique d'accueil, ‘ont atteint le plafond’: cet afflux risque de faire des Pays-Bas une société multiculturelle, un pays d'immigration. N'oublions pas que les Pays-Bas ont déjà accueilli 150 000 habitants du Suriname (la Guyane néerlandaise), une de leurs anciennes colonies et ceci alors qu'au lendemain de la seconde guerre mondiale, presque un million de Néerlandais avaient émigré en Nouvelle-Zélande, en Australie, au Canada, précisément parce qu'ils trouvaient alors les Pays-Bas ‘trop pleins’.
Les adversaires de ce point de vue renvoient souvent au passé, à savoir à la vague d'immigration venue de la Flandre française et des Pays-Bas du sud après la chute d'Anvers (et d'autres villes flamandes) aux mains des Espagnols (± 1580) et à l'arrivée des huguenots français après la Révocation de l'édit de Nantes en 1685; il s'agissait d'au moins 125 000 demandeurs d'asile, alors que la population hollandaise ne dépassait pas les deux millions. Les partisans d'un large accueil soulignent que ce sont précisément ces ‘réfugiés’ qui ont jeté les bases des progrès économiques et artistiques du Siècle d'or néerlandais.
On peut en dire autant des nombreux Allemands qui gagnèrent les Pays-Bas à la fin du