A propos des impressions négatives, la plupart des élèves néerlandais soulignent les essais nucléaires, la disparité entre riches et pauvres et l'arrogance des Français, imputable selon eux à un manque de sens de la communication: ‘Que les Français apprennent d'abord l'anglais!’ Détail piquant: l'esprit de liberté des Néerlandais est perçu de façon négative par les Français. (Ceux qui se disent gourmets considèrent en outre que ‘le fromage hollandais manque de saveur’). Dommage qu'on n'ait pas demandé aux jeunes des deux pays comment ils perçoivent l'intégration européenne, l'euro, etc. ou comment ils jugent les relations commerciales entre les deux pays. Les Pays-Bas sont le sixième partenaire commercial de la France, après l'Allemagne, l'Italie, le couple belgoluxembourgeois, l'Angleterre et l'Espagne. Ils exportent plus vers la France (72 milliards de FF) qu'ils n'en importent (65,5 milliards de FF).
Peut-être les différences dans les appréciations et critiques mutuelles s'expliquent-elles par le fait que 80% des jeunes français n'ont jamais mis les pieds aux Pays-Bas, alors que seuls 12% des jeunes néerlandais déclarent n'être jamais allés en France (70% des jeunes néerlandais s'y sont rendus au moins trois fois). Ces chiffres reflètent d'ailleurs les statistiques générales sur le tourisme. Les Français se classent au cinquième rang (après les Allemands, les Belges, les Anglais et les Américains) pour ce qui est du nombre de touristes étrangers qui se rendent aux Pays-Bas. Si la France est la destination touristique habituelle de 2,5 millions de Néerlandais, les Pays-Bas n'accueillent que 390 000 visiteurs français (chiffres de 1995); parmi ceux-ci, 31% se limitent à la visite d'Amsterdam, tandis que le Néerlandais fréquente plus d'un lieu de séjour. Et l'enquête menée de manière méthodique de conclure: ‘Alors que pour une nette majorité des élèves néerlandais la France est un pays qu'ils ont découvert par eux-mêmes, pour les jeunes français, en revanche, les Pays-Bas demeurent un pays relativement inconnu et que peu d'entre eux ont visité’.
Éveiller l'intérêt pour la France dépend beaucoup du professeur de français de l'enseignement secondaire. Certaines écoles des Pays-Bas, par exemple, correspondent avec des établissements français: les jeunes néerlandais rédigent leurs lettres en français, les Français en anglais. Ils se corrigent mutuellement, l'élève néerlandais en tire un avantage supplémentaire étant donné qu'il est obligé de parfaire ses connaissances en anglais.
Et pourtant la France et les Pays-Bas présentent de nombreux points communs; il n'est que de se pencher sur le passé des deux pays. Ainsi, nulle part en Europe occidentale, la Révolution française n'a autant marqué de son empreinte l'organisation politique qu'aux Pays-Bas précisément. Si les Pays-Bas sont devenus un royaume en 1815, après deux siècles et demi de république, c'est en grande partie grâce à Louis-Napoléon, ‘roi de Hollande’ de 1806 à 1810. Il serait même question d'ériger une statue en l'honneur de ce souverain (bien que souverain étranger), ne serait-ce que pour la simple raison qu'il a contribué à la promotion de la langue néerlandaise.
Notons au passage que la langue française contient plus de mots d'origine néerlandaise que le Français ne le soupçonne, par exemple boulevard (bolwerk), fauteuil (vouwstoel), flibustier (vrijbuiter) et... drogue (droog).
C'est par la phrase ‘Papa fume une pipe’ que les plus âgé d'entre nous ont établi leurs premiers contacts avec la langue française. Peut-être faudrait-il que nos aînés se remettent à ‘fumer la pipe’ pour que l'usage du français soit à nouveau stimulé.
Kees Middelhoff
(Tr. J. Deleye)
Ce rapport a été publié par le Département de langue et littérature françaises de l'Université de l'Etat de Leyde. Contact: M.P. Bogaards, Prins Hendriklaan 68, NL-2051 JE Overveen.