Els Dottermans (o1964) dans ‘La mouette’.
Strauss et que le monologue
Totale sprakeloosheid (Aphasie totale, 1985) était emprunté au roman autobiographique de Handke,
Wunschloses Unglück (Misère d'outre-désir) sur le suicide de sa mère. Cette dernière production, jouée au
Monty, une ancienne salle de cinéma d'Anvers, se fit surtout remarquer par l'étonnant décor. Un échafaudage portait une cage de plexiglas dans laquelle Perceval occupait un fauteuil rouge; autour de lui, on voyait tout un bric-à-brac, tout ceci devant suggérer l'isolement du narrateur, qui n'arrive pas à avoir prise sur son propre récit, sur la vie et sur le suicide de sa mère et qui finit par s'enliser dans ‘une aphasie totale’. Quelque deux ans plus tard, Guy Joosten se servit à nouveau d'un roman de Handke,
Die linkshändige Frau (La gauchère), pour en tirer une pièce fort réussie,
Een stuk van twee dagen (Une pièce de deux jours, 1987). L'argument de la femme de trente ans qui rompt avec son mari était rendu par une série de scènes-flashes d'une grande intensité, qui exprimaient avec une subtile précision la désaffection entre la protagoniste et son entourage.
L'exploration des relations intimes entre l'homme et la femme ou les parents et l'enfant se révèle être une constante thématique de l'oeuvre de la Blauwe Maandag Compagnie. Les conflits mis en scène se situent souvent dans la zone de tension entre l'individu et le couple. On pouvait déjà s'en rendre compte dans Cucaracha of ons kleiner lot van verbijstering, (Cucaracha ou notre lot mineur d'ahurissement), production créée dès 1984 et reprise en 1986. Aidé de deux acteurs, Perceval développait ici cinq instantanés de la vie conjugale, où la danse de salon servait de métaphore aux diverses phases. A voir cet intérêt pour les relations personnelles et les inévitables crises et frustrations, il était fatal que la Blauwe Maandag Compagnie finirait par déboucher chez Lars Norén. C'est ainsi que Nachtwake (Ronde de nuit, 1987) deviendrait une de ses plus impressionnantes réalisations. Cette pièce, dans laquelle deux couples, après la crémation de leur mère - les deux maris sont frères -, passent une nuit entière à exhumer le passé et à fouiller leur for intérieur, devint, dans la mise en scène de Guy Joosten une représentation exacerbée, poignante.
Ce n'est pas seulement face à des oeuvres contemporaines mais aussi quand ils montent des pièces classiques que Perceval et Joosten se lancent coup sur coup dans une confrontation personnelle avec le texte. Grâce à un processus créatif fait de ratures, de permutations et d'improvisations, ils en viennent la plupart du temps à un script personnel. Aux oeuvres classiques, c'est en première instance par leur propre sensibilité qu'ils donnent forme. Cette approche conduit parfois à des représentations, qui, pour réduire la portée du texte originel, n'en constituent pas moins de passionnantes expériences. Dans leur Othello (1986), Perceval et Joosten réduisirent cette tragédie d'héroïsme et d'exotisme à un drame de petites gens ordinaires. L'amour romantique d'Othello pour Desdémone dégénéra en plaisir des sens. Cette vue des choses eut pour conséquence d'estomper fortement, avec le contraste tranché entre Othello et Jago, l'opposition thématique entre être et paraître qui le double. Ne restait qu'un regard cynique sur le comportement humain: le point de vue de Jago donc, lequel dominait du reste toute la représentation. Dans une série de scènes tournant à la parodie ou à la revue, cet Othello, pourtant enlevé de main de maître par les acteurs faillit bien dérailler.
Le mythe d'OEdipe lui aussi fut plié à la fantaisie de ce duo d'auteurs très particuliers. En collaboration avec le Brussels Kamertoneel (Théâtre de chambre bruxellois), la Blauwe Maandag Compagnie monta en 1987 Oedipus / Kommentaar (OEdipe / Commentaire) qui partait de la supposition qu'OEdipe tout autant que le peuple avait pour le moins quelque soupçon de la vérité. Cette version énergiquement remaniée et raccourcie montrait Oedipus/Perceval en passionnante confrontation avec un peuple/public contestataire.
Par sa façon très personnelle de digérer et de remanier le matériel textuel, la Blauwe Maandag Compagnie atteint sans aucun doute à une grande authenticité dans ses productions. Il est curieux que l'approche très particulière de Joosten et Perceval ne mène pas à un pur et simple théâtre de metteur en scène. L'apport et l'implication personnels des acteurs sont au contraire extrê-