souplesse si l'on ignorait le contexte culturel et/ou religieux et, plus radicalement encore, si elle ne serait pas favorisée par l'apprentissage obligatoire - et au besoin imposé de force - de la langue néerlandaise. A cet égard, on partait et on part de la supposition généralement admise comme évidente qu'à l'école primaire, les enfants des travailleurs étrangers accusent un retard (intellectuel) précisément parce qu'ils ne maîtrisent pas la langue néerlandaise. Ce retard se ferait sentir aussi en ce qu'il empêcherait la deuxième génération de suivre l'enseignement secondaire. Il résulte de tout cela que les enfants des travailleurs immigrés se sentent discriminés, avec toutes les frustrations qui en découlent. Au chapitre de la délinquance juvénile aux Pays-Bas, par exemple, on note 35% de jeunes Marocains, 23% de jeunes Turcs et 15% de jeunes Néerlandais autochtones.
Une étude, publiée à la Katholieke Universiteit Brabant (Université catholique du Brabant) à Tilburg peu avant la déclaration gouvernementale, démontrait très clairement que le retard intellectuel chez les enfants de travailleurs immigrés n'est pas le résultat du seul substrat culturel et linguistique. Elle affirme que le retard en matière d'enseignement des élèves allochtones est dû à la position sociale inférieure qu'occupent leurs parents dans la société néerlandaise. Les enquêteurs ont établi une comparaison entre les enfants issus de familles de travailleurs immigrés et des enfants provenant de milieux sociaux défavorisés néerlandais, qui sont souvent dialectophones: ‘Le retard actuel sur le plan linguistique et scolaire d'enfants allochtones est à peine dû à leur culture d'origine non néerlandaise ou à leur bilinguisme’. Ils constatent en outre que ‘pour des enfants allochtones, les enseignants des écoles primaires des Pays-Bas tiennent effectivement compte de la catégorie sociale de leurs parents, ce qu'ils ne font pas pour des enfants néerlandais. Le retard en matière d'enseignement d'élèves allochtones n'est donc pas une nouvelle sorte d'inégalité, mais il reflète l'ancienne inégalité sociale et économique, telle qu'elle existe également au niveau des autochtones, tout en étant nettement plus perceptible, et liée à la nationalité, au groupe ethnique et à la langue que l'on parle chez soi’.
Précédemment déjà, des enquêtes effectuées aux Pays-Bas avaient déjà permis de constater que l'enseignement linguistique dans la langue propre - soit principalement le turc et l'arabe aux Pays-Bas - ‘favorise’ une meilleure compréhension et connaissance de la langue néerlandaise.
Aux Pays-Bas, dans l'enseignement fondamental, quelque deux heures et demie sont consacrées à la langue propre; après les heures de classe, deux heures et demie sont encore consacrées à la connaissance de la culture propre.
La grande valeur attachée à la connaissance de la langue et de la culture propres des immigrés aux Pays-Bas s'explique par le fait que ce pays a été confronté tardivement aux travailleurs étrangers, l'industrialisation n'y ayant commencé qu'au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Initialement, on croyait que leur présence sur le territoire néerlandais ne serait que ‘temporaire’. On tenait donc à stimuler la connaissance de la langue et de la culture propres pour que la ‘rémigration’, le retour au pays d'origine, puisse se dérouler dans les meilleures conditions.
Pour conclure, relevons un détail piquant encore de l'étude publiée à Tilburg concernant les aptitudes à l'arithmétique des élèves provenant de familles socialement arriérées: ‘Un prestige professionnel égal chez les parents allochtones comblerait entièrement le fossé - entre élèves allochtones et autochtones -, voire se commuerait en une légère ‘avance’ pour les élèves allochtones par rapport aux élèves parlant la langue standard.
Kees Middelhoff
(Tr. W. Devos)
j. donkers et a. kerkhoff, Onderwijs en gezin. Achtste onderwijs-sociologische conferentie (Enseignement et famille. Huitième conférence sociologique de l'enseignement), SISWO, no 345, Amsterdam, 1989.