La Révocation de l'édit de Nantes dans l'historiographie française et néerlandaise
Les vicissitudes des huguenots français continuent à passionner les historiens de l'Église néerlandaise. En témoigne le recueil de conférences ici présenté, lequel embrasse d'importants secteurs de l'intérêt historiographique porté à la Révocation de l'édit de Nantes.
Le premier auteur, l'historien A.Th. van Deursen, attaché à la Vrije Universiteit Amsterdam (Université libre d'Amsterdam), établit un bilan de l'historiographie française actuelle sur la Révocation de l'édit de Nantes. Il constate qu'à ce jour personne n'a encore brossé une fresque exhaustive du déclin de la communauté huguenote, ce qui le conduit à souhaiter qu'il se lève quelqu'un pour se charger de cette tâche. A cet égard, il fait référence à l'ouvrage de J. Presser sur le Ondergang (l'élimination) des juifs néerlandais au cours de la seconde guerre mondiale.
Non content de formuler ce voeu ‘pieux’, Van Deursen s'intéresse à deux nouvelles pistes. La première concerne l'importance numérique des huguenots au xviie siècle. Si l'on estimait jadis leur proportion à 10% de la population française de l'époque, on s'en tient aujourd'hui à 4,5%. Bien que tolérés depuis 1598, au cours du xviie siècle, ils furent rejetés dans une position de plus en plus subalterne. Il revient à la recherche de montrer comment cette minorité a pu se maintenir. La seconde concerne le rôle de la noblesse huguenote, laquelle, dans le courant du xviie siècle, revint presque toute entière au catholicisme romain, ce qui priva les huguenots de leur colonne dorsale politique et militaire; or, celle-ci était indispensable à une éventuelle résistance à l'oppression royale.
Le second article est de la main de S.B.J. Zilverberg, professeur à l'Université d'Amsterdam. Il décrit l'intérêt porté aux huguenots depuis 1685 par l'historiographie néerlandaise. Il en ressort qu'aux Pays-Bas on se sentait très concerné par les évolutions que connaissait la France et qu'on observait très attentivement les événements qui s'y déroulaient. L'étude qui fait autorité est encore toujours l'ouvrage de référence de H.J. Koenen Geschiedenis van de vestiging en den invloed der Fransche vluchtelingen in Nederland (Histoire de l'implantation et de l'impact des fugitifs français aux Pays-Bas), lequel date de 1846. L'année du tricentenaire, quelques nouvelles études virent le jour; elles privilégiaient toutefois le détail. L'absence à ce jour d'un ouvrage de synthèse concerne également les Pays-Bas.
L'auteur du troisième article repris dans ce recueil est l'historien de l'Eglise groninguois F.R.J. Knetsch. Ayant consacré sa thèse de doctorat (1967) au prédicateur huguenot Jurieu, il commente brièvement les dix principaux points de conflit entre celui-ci et son collègue Elie Saurin. Ce dernier avait émigré aux Pays-Bas dès avant 1685 et n'avait pas tardé à s'y tailler une place importante. C'est ainsi qu'il ne cessait de plaider l'accueil de coreligionnaires et qu'il défendait la doctrine réformée contre les opinions divergentes, comme celles qu'il avait décelées notamment chez Jurieu.
Dans leurs notes, ces trois études renvoient aux sources utilisées. En s'en aidant, il est possible de s'orienter plus largement dans ce secteur du passionnant paysage de l'histoire de l'Église. Si ce