Septentrion. Jaargang 17
(1988)– [tijdschrift] Septentrion– Auteursrechtelijk beschermd
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En mer du Nord, le phoque est menacé de disparition (photo Jan Heuff).
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L'hécatombe des phoques de la mer des Wadden
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Un phoque mort sur la plage (photo Jan Heuff).
Un phoque échoué sur la plage est recueilli par une écologiste (photo Jan Heuff).
face au nord-ouest de l'Allemagne, jusqu'au Danemark. Les eaux de la mer du Nord vont et viennent par les chenaux qui séparent les îles les unes des autres. Entre les îles et la côte se trouve le wad c'est-à-dire une sorte de maremme sillonnée de chenaux de marée et encombrée de bancs de sable et dont des parties importantes sont submergées deux fois par jour par la marée montante. Cette situation physico-géographique particulière a créé un biotope très intéressant: les eaux de mer charrient beaucoup de microorganismes - principalement des algues -, dont une grande partie se déposent dans la mer des Wadden, en raison précisément des mouvements de l'eau dans ces bas-fonds. Ces microorganismes représentent une abondante réserve de nourriture pour un nombre considérable d'animaux rampants tels que les vermisseaux et les vers, les crevettes, les crabes, etc. Et ceux-ci constituent à leur tour une nourriture très attrayante pour toutes sortes de poissons et d'oiseaux aquatiques. La mer des Wadden remplit dès lors une double fonction écologique de première importance: elle est à la fois la région d'Europe où s'assemblent le plus d'oiseaux aquatiques, et elle est littéralement la pouponnière de plusieurs espèces de poissons de la mer du Nord. Les facteurs précités expliquent évidemment pourquoi les côtes de la mer du Nord en général et la zone des Wadden en particulier sont depuis toujours une région attrayante pour les phoques. En même temps, une série de chiffres suffit à prouver que la menace qui pèse sur la population des phoques ne date pas de l'été 1988 ni des dernières années. Dans la seule partie néerlandaise de la mer des Wadden, on dénombrait encore quelque 2 400 phoques en 1950. En 1960, ce chiffre était tombé à 1 000 spécimens environ. En 1975, on a atteint le point le plus bas avec 500 phoques. Depuis, certaines mesures concrètes en matière d'environnement et surtout les bons soins de la crèche pour phoques de Pieterburen ont eu pour effet que le nombre de phoques s'élèvait à nouveau à 1 000 environ. Mais l'épidémie de la maladie des chiens a mis fin de manière abrupte à cette évolution favorable. | |
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De toute façon, le phoque était déjà en danger depuis longtemps du fait des diverses menaces qui pèsent sur la mer des Wadden elle-même: plusieurs projets envisagent de la poldériser ou de l'enclore d'une digue de fermeture, etc. La résistance opiniâtre du mouvement écologiste - et surtout de la Landelijke Vereniging tot Behoud van de Waddenzee (Association nationale pour le maintien de la mer des Wadden), créée en 1965 - a eu pour résultat que des projets de ce genre ne se sont pas encore concrétisés jusqu'à présent. Mais il faut rester vigilent: le dernier projet n'a pu être écarté définitivement qu'en 1982. De plus, il faut veiller constamment à ce que la mer des Wadden ne soit grignotée petit à petit, surtout à la suite de l'aménagement d'oléoducs et de gazoducs depuis la mer du Nord. Une mainmise spectaculaire et à grande échelle sur la mer des Wadden a pu être évitée jusqu'à présent. Il n'empêche que cette région particulièrement importante sur le plan écologique est menacée et attaquée de manière beaucoup plus sournoise. Il y a d'abord le processus d'eutrophisation: dû surtout à l'utilisation excessive d'engrais par l'agriculture - le surplus étant drainé vers la mer par les eaux de surface - il découle d'un trop plein de substances nutritives dans l'eau. Comme ce fut le cas l'été dernier, cela entraîne une prolifération d'algues, qui épuisent l'oxygène des eaux, ce qui constitue évidemment une menace mortelle pour toute vie au niveau de la chaîne alimentaire. En deuxième lieu, il y a tout un éventail d'autres formes de pollution. Dans notre article La mer du Nord: dernier terrain vague?Ga naar eind(1), nous avons souligné à quel point la mer du Nord était déjà gravement polluée par toutes sortes de sources: navires-citernes et plates-formes pétrolières off-shore, déversement en mer de
A la crèche de phoques de Pieterburen, on recueille les phoques et on veille sur leur santé (photo Jan Heuff).
métaux lourds et de produits chimiques depuis la terre ferme, déversement de déchets en mer, etc. Et dans ce domaine la mer des Wadden reproduit les mêmes phénomènes que pour les substances nutritives: par suite des mouvements particuliers de l'eau, c'est là précisément que se déposent et s'accumulent toutes sortes de particules flottantes ou dissoutes qui empoisonnent la vase. Mais tout ce qui se trouve dans l'eau ou dans la vase, par la force des choses, se retrouve tôt ou tard dans la chaîne alimentaire. Et depuis pas mal de temps déjà, un certain nombre de faits et d'éléments sont parfaitement connus dans ce domaine. Une mortalité occasionnelle mais massive chez plusieurs espèces de canards, en 1971, était due incontestablement au déversement de pesticides aux environs de Rotterdam. Chez plusieurs espèces d'animaux de la mer du Nord et de la mer des Wadden, on a constaté des concentrations élevées de PCB (polychlorides de biphényles). Ceux-ci sont ou étaient surtout utilisés comme liquides de condensation et ont fini par se répandre de manière très diffuse dans l'environnement. Il s'agit surtout de substances particulièrement stables qui, en outre, s'accumulent dans le tissu adipeux, en l'occurrence la couche de graisse des oiseaux aquatiques et des... phoques. Déjà vers la fin des années soixante-dix, | |
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La pollution considérable de la mer du Nord et plus particulièrement des eaux côtières de la mer des Wadden a gravement perturbé les mécanismes de défense des phoques, au point que ceux-ci sont actuellement hypersensibles à chaque menace supplémentaire. (photo Jan Heuff).
on a démontré scientifiquement que ces PCB sont responsables d'une baisse considérable des chances de reproduction des phoques. Cette forme de pollution compromet donc directement la survie de cette espèce. Pour d'autres formes de pollution, le caractère effectif de cette menace n'est pas encore établi de manière irréfutable. Il n'en est pas moins tout à fait raisonnable d'admettre qu'elles sont nuisibles à la santé des phoques, dont elles attaquent et sapent les mécanismes immunitaires. Tous ces faits et éléments d'information concernant les menaces qui pèsent sur les phoques sont connus depuis longtemps déjà. Mais c'est surtout l'entêtement de l'homme, semble-t-il, qui a empêché d'en tirer les conséquences qui s'imposent sur le plan politique. Il est vrai que dans le secteur agricole, l'épandage excessif d'engrais est dorénavant réglementé. Seulement, cette mesure vient à peine d'entrer en vigueur et ne modifie en rien l'utilisation tout aussi excessive de pesticides, par exemple. Bien sûr, les conditions pour obtenir une autorisation de déverser directement ou indirectement toutes sortes d'eaux résiduaires dans la mer des Wadden sont devenues plus sévères. Seulement, si le nombre d'industries s'accroît dans la région de Delfzijl, la pollution se maintiendra globalement au même niveau. Biens sûr, entre-temps, on a approuvé une Planologische Kernbeslissing (PKB - Directives générales en matière d'aménagement du territoire), c'est-à-dire un cadre général fixant les principes de l'aménagement du territoire et du développement dans une région. Seulement, proclamer des principes n'arrête en aucune manière les eaux polluées de la mer du Nord, surtout pas si le Rhin ne cesse d'en amener toujours de nouvelles tout aussi contaminées. Bref, la mort massive de phoques constitue la énième mise en garde on ne peut plus claire: nous sommes en train de saper, de détruire la résistance et les ressources de l'environnement, il convient de les préserver d'urgence. Mais cela, on aurait pu et dû le savoir depuis longtemps déjà! Reste à savoir si la menace de plus en plus évidente suffira à mobiliser sans plus tarder suffisamment d'esprits et de pouvoirs pour la combattre efficacement.
PIETER LEROY Professeur Adresse: Weezenhof 68-13, NL-6563 BL Nijmegen. Traduit du néerlandais par Willy Devos. |
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