ges y sont un élément de la vie quotidienne: tous les matins et soirs, de janvier à décembre, des bouchons se forment dans les régions d'Amsterdam, de Schiphol, d'Utrecht, de La Haye et de Rotterdam, bouchons pouvant atteindre ensemble jusqu'à plusieurs dizaines de kilomètres.
Les embouteillages des vacances s'oublient généralement assez vite. Il n'en est pas de même s'ils deviennent une réalité quotidienne. Par ailleurs, dans ce caslà, le phénomène ne se réduit pas à des nuisances individuelles: nervosité, irritation, perte de temps et rendez-vous manqués. Des embouteillages quotidiens de cette ampleur constituent un problème national et économique. Depuis pas mal de temps déjà, les entreprises néerlandaises se plaignent des préjudices sérieux qu'entraîne cette situation sur le plan économique. Les collaborateurs et chauffeurs prisonniers des embouteillages représentent des pertes financières considérables. Le gain de temps réalisé grâce au transport aérien des marchandises se trouve en grande partie neutralisé par le transport par la route à partir de ou en direction de l'aéroport de Schiphol. Dans le port de Rotterdam et ailleurs, des noeuds routiers vitaux sont souvent difficiles à atteindre pour les poids lourds.
Certes, il est difficile de chiffrer exactement des données de ce genre. Il n'empêche qu'un rapport réalisé par le bureau d'étude McKinsey en 1986 a estimé le préjudice économique causé par les embouteillages à quelque 700 millions de florins (12,6 milliards FB ou 2,1 milliards FF) par an. Le montant précis a beau être discutable, l'ordre de grandeur est évident. Aussi le rapport McKinsey formulait-il un certain nombre d'avis urgents à l'intention du gouvernement. Chose frappante on n'y plaidait pas uniquement, ni en premier lieu, en faveur d'autoroutes nouvelles et plus larges: en plus de l'impact considérable sur l'espace et l'environnement - dans une Conurbation hollandaise déjà largement saturée et polluée -, une infrastructure routière plus développée encore ne ferait qu'accroître davantage le trafic automobile. Planologues, spécialistes de la circulation et défenseurs de la nature le savaient depuis longtemps, mais c'est la première fois qu'un rapport émanant d'une instance non suspecte prônait explicitement cette façon de voir les choses.
Bien sûr, une nouvelle route ou un tunnel plus large peuvent contribuer à résoudre le problème de certains points névralgiques par-ci par-là, mais le rapport recommande surtout de freiner la circulation automobile, et cela essentiellement de trois manières. En premier lieu, par un certain nombre de mesures d'ordre physico-spatial. Ainsi, par exemple, les aires de stationnement doivent être considérablement réduites dans les centres. En deuxième lieu, toutes sortes de mesures sur le plan économicofinancier doivent rendre financièrement moins attrayants les déplacements en auto. On songe notamment à des prix du carburant plus élevés, à des indemnités kilométriques moins élevées, à des tarifs de parking plus onéreux, et ainsi de suite. Et enfin, dernier point qui n'est pas le moins important, il faut améliorer considérablement les alternatives au trafic automobile, plus spécialement les transports publics. Seule une politique qui tienne compte de ces trois lignes directrices permettra de garantir quelque fluidité à un trafic en augmentation constante sans accaparer encore plus d'espace, polluer davantage encore et entraîner des embouteillages toujours plus encombrants.
Après une première réaction assez enthousiaste, le gouvernement néerlandais, et plus particulièrement le ministre des Transports, madame Smit-Kroes, ont par la suite adopté une attitude nettement plus réservée. Non seulement parce que certains avis s'avéraient à peine réalisables au niveau national: une hausse des prix du carburant, par exemple, inciterait immédiatement de nombreux conducteurs à faire le plein de l'autre côté de la frontière et, par ailleurs, compromettrait la compétitivité. Mais cette attitude négative est due surtout au fait que ces avis et d'autres recommandations d'une portée analogue vont à l'encontre de la politique menée par le gouvernement actuel. Celui-ci se propose justement de réaliser encore plus d'économies dans le secteur des transports publics - quelque 150 millions de florins (2,7 milliards FB ou 450 millions FF) d'ici 1990 - et d'injecter plus de fonds dans toutes sortes de nouvelles infrastructures routières, surtout dans la Conurbation hollandaise.
La mise en oeuvre de cette politique soulève toute une série de problèmes, moins à cause des protestations - plutôt rares, assez curieusement - tant à l'intérieur du Parlement qu'en dehors de celui-ci qu'en raison tout simplement du.... manque de moyens financiers. Le département des Transports doit, lui aussi, faire des économies, de sorte que la construction d'autoroutes, avec les ponts et tunnels indispensables, avance bien plus lentement qu'il ne semble ‘souhaitable’. Toutefois, se fondant sur la tendance politique actuelle à la privatisation, d'une part, et se référant aux effets économiques positifs, d'autre part, le ministre a invité les entreprises à contribuer au financement. Ces investissements non seulement permettraient de remédier plus vite aux pertes économiques qu'entraînent les embouteillages; ils seraient récupérés sous forme de péage et, pourquoi pas? pourraient même s'avérer bénéficiaires... Entretemps, des fonds privés semblent effectivement se constituer, et on ajuste quelque peu les projets des nouvelles autoroutes. Provisoirement, les bouchons sont toujours un spectacle quotidien familier. Provisoirement? Peut-être même définitivement! Car personne n'entrevoit de quelle manière on pourra faire face à la croissance attendue du trafic - de quelque