bienvenue à une traduction en français de poèmes de paul van ostaijen
rené ménard ● paris
‘La Poésie ne se traduit pas!’ - Voire. La mauvaise, c'est-à-dire celle qui ne laisse entendre que le clapotis d'un cerveau en mal de s'émouvoir, sans doute ne dit-elle plus rien à travers une autre langue. Mais c'est qu'elle n'avait jamais dit quoi que ce soit. Quant à la bonne, ou plutôt celle qui existe tout simplement en tant que telle, il suffit que le traducteur soit capable de la revivre pour qu'elle reprenne vie. Henry Fagne a eu ce pouvoir pour les dix-sept poèmes de Paul van Ostaijen dont il vient de faire don aux lecteurs de langue française et qui seront pour l'immense majorité d'entre eux une révélation. J'imagine bien que certaines résonances harmoniques propres au néerlandais auront été perdues. Cependant, il semble ici que la syntaxe poétique originale ait été comprise, respectée, valablement transposée. Sans quoi ces versions ne se liraient pas comme des poèmes français, ce qui est le cas, ce qui nous permet d'ajouter Paul van Ostaijen au nombre de nos profonds amis.
Nous prions son ombre d'accepter cette place parmi nous. Sa voix nous rappellera que le vrai chemin vers la réalité que dévoile la Poésie est un chemin où l'on marche solitaire, et que celle-ci, comme l'a magnifiquement écrit Joé Bousquet se ‘traduit du silence’. Si bien qu'il suffit de retrouver ce silence préalable - grâce qu'aura sûrement reçue Henry Fagne - pour que le poème renaisse, ou, plus justement se reconstitue à partir de sa perpétuelle source première. Car toujours seront à voir une pomme, un village, un hiver, un vieil homme, un flacon d'eau limpide, après avoir suivi comme le dit Paul van Ostaijen un long chemin ‘vers le mont sans passion de la contemplation nue’. Seul un très grand poète pouvait accéder de son vivant à ce que peut-être promet la Mort qu'il a si tôt rencontrée.