large, il fallait voir ces files de charettes chargées, de carrioles bâchées, de haquets bien garottés, lesquels se touchaient tous, ces rangées d'attelages superbes, équipages de trois, de quatre de six bêtes, qui descendaient sur Marseille ou qui montaient sur Paris, charriant le blé, le vin, les poches d'avoine, les ballots de morues, les barils d'anchois ou les pains de savon, cahin-caha, bredi-breda, et à la garde de Dieu, comme disaient alors les lettres de voiture...
Tanguant du dos, règlant leur pas sur le cahos des attelages, et saluant du fouet ce monde connu, les fameux charretiers marchaient arrogament, une main à la rêne et de l'autre le fouet, avec la blouse bleue, la culotte de velours, le bonnet multicolore, la limousine au vent, aux jambes les houseaux, tantôt criant: ‘Dia!’ tantôt criant: ‘Hurhau!’ Et quand la route était luisante et que le voyage allait bien et que les roues claquaient aux boîtes des moyeux, ils chantaient, au pas des bêtes et au tintement des grelots, la chanson des rouliers.’
In dit boek van herinneringen kan men zeggen in den letterlijken zin: Hier heeft Mistral zich zelf overtroffen. De verhalen rollen voort met een onverminderde pit en levenskracht. Het relaas van de bedevaart naar de Saintes-Maries, van den dood van den vader zijn levende brokken vol warmte en kleur. En evenals Maurice Barrès aan het volume Choses vues van Victor Hugo boven al diens andere werken de voorkeur gaf, moet ik zeggen, dat de Mémoires et Récits van Mistral mij boven zijn Mireille gaan. Dit proza is geblakerd door den gloed van Provence. In zijn vertelling worden onbelangrijke dingen belangrijk. Zoo wanneer hij van zijn familie vertelt en hoe hij naar Avignon op kostschool wordt gebracht:
‘Trois de mes tantes avec ma mère, l'onele Benoni et moi, tous gîtés sur un long drap plein de paille d'avoine qui rembourrait la charrette, nous partîmes en caravane après le lever du soleil.
J'ai dit ‘trois de mes tantes’. Il en est peu, en effet, qui se soient vu, à la fois, autant de tantes que moi; j'en avais bien une douzaine; d'abord la grand'Mistrale, puis la tante Jeanneton, la tante Madelon, la tante Véronique, la tante Poulinette et la tante Bourdette, la tante Françoise, la tante Marie, la tante Rion, la tante Thérèse, la tante Mélanie et la tante Lisa. Tout ce monde, aujourd'hui, est mort et enterré; mais j'aime à redire ici les noms de ces bonnes