37 Léon Bazalgette aan August Vermeylen, Parijs 17.4.1924
Cher Monsieur Vermeylen,
Que je vous dise d'abord comme votre admirable version française m'a rendu agréable la lecture du ‘Juif Errant’. Sans connaître le texte, cela m'apparaît comme l'idéal d'une traduction.
Pour l'oeuvre elle-même, on y reconnaît déjà une sorte de solidité classique. J'en aime surtout, et entièrement la dernière partie, celle où Ahasverus se mêle aux travailleurs.
Quant à la possibilité de sa publication en volume, j'y vois un obstacle grave, et probablement insurmontable, dans le goût du public, qui, très malheureusement, est rebelle aux Légendes de cette envergure, et notamment à la légende du Christ, même interprétée d'une façon aussi vivante par un artiste.
Il n'est pas jusqu'au titre - le Juif Errant - ou Ahasverus - qui n'éloignerait ce public bizarre et fort entêté dans ses préjugés qu'est le public français.
Il ne faudrait donc nullement compter sur lui pour la vente (je n'entends même pas la grosse vente - mais simplement celle qui paierait les frais de l'édition). Or, on ne pourrait compter davantage sur le public beige d'expression française, qui se désintéresse entièrement des écrivains de son terroir et met sa fierté à les ignorer. Les dernières nouveautés parisiennes ont plus d'attrait pour lui.