De Gulden Passer. Jaargang 15
(1937)– [tijdschrift] Gulden Passer, De– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermdII.
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181 (Tacite), 79-81 (Sènèque). Il n'y a pas lieu de reproduire ici cette description. Mais l'exemplaire de Mariemont (R. 907, no 22.940) offre ceci de remarquable qu'il est revêtu d'une somptueuse reliure de vélin blanc, décorée et dorée aux petits fers, et offrant sur les deux plats de chacun des six volumes les armes du cardinal et infant d'Espagne, Ferdinand d'Autriche, gouverneur des Pays-Bas de 1633 à 1641. Ces armes sont reproduites, non d'après un frotti, mais d'après un dessin quelque peu approximatif, par le vicomte de Jonghe d'Ardoye dans son Armorial Belge du Bibliophile (Bruxelles, 1930), t. I, p. 55. L'auteur ne se réfère pas à notre exemplaire des Opera de Juste Lipse, dont il a cru, sans doute, la trace perdue: il se borne à renvoyer à Guigard (Nouvel Armorial du Bibliophile, Paris, 1890), t. I, p. 277. Mais Guigard, après avoir reproduit, décrit et identifié les armes en question, précise qu'elles figurent ‘sur: Justus Lipsius, Antuerpiae, 1637, in-fol. de la collect. de Guntzberger’. Il ajoute, parlant du Cardinal-Infant: ‘Nous ignorons si ce prélat possédait une bibliothèque proprement dite. Ce que nous pouvons dire, c'est que les armes ci-dessus ont été relevées sur un exemplaire de dédicace’. Un exemplaire aux mêmes armes était offert pour le prix de 180 francs, dans un catalogue de la librairie Bachelin-Deflorenne, (Paris, 1873-74, pp. 223-224). Il y est décrit dans les termes suivants: 2967. Lipsii (J.) Opera omnia, postremum ab ipso aucta et recensita, nunc primum copiosa rerum indice illustrata. Antverpiae, ex off. Plantiniana, Balt. Moreti, 1637, 5 vol. in-fol., v.l. fil., tr. dor., dent., comp., dos orné. Une découpure du catalogue de la librairie Bachelin a été insérée en tête de l'exemplaire conservé à Mariemont. Elle y voisine avec une autre, plus récente, du Catalogue de livres anciens, rares et précieux... provenant de la bibliothèque de feu M. Alphonse Willems (Paris, H. Leclerc, 1914), où le même exemplaire figure sous le no 480. Les six volumes sont mentionnés, alors que le catalogue Bachelin n'en signalait, on l'a vu, (sans doute par suite d'une erreur | |
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de plume ou d'une coquille typographique) que cinq; de plus, la description de la reliure est exacte, bien que concise, et ne comporte plus d'abréviations telles que v.l., dont la lecture réclame un effort. On ne peut, en effet, l'interpréter que par vélin, car veau lavé n'aurait aucune signification. En revanche, la notice du catalogue de la vente Alph. Willems reproduit d'une façon littérale les termes erronés dans lesquels sont identifiées, dans le catalogue Bachelin, les armes de Ferdinand d'Autriche, ‘infant d'Espagne, cardinal des provinces de Belgique et de Bourgogne’. On ajoute toutefois, et avec raison, que l'ouvrage a été relié dans l'atelier de Plantin. La vente des livres d'Alph. Willems a eu lieu à Paris, du 4 au 7 mai 1914. Sur la découpure du catalogue, feu Georges vander Meylen a corrigé à la main les erreurs relatives aux titres du Cardinal-Infant. Or Georges vander Meylen, capitaine de réserve, a quitté Mariemont pour partir à la guerre au début du mois d'août 1914. Le même connaisseur, ami et collaborateur de Raoul Warocqué, a consigné une notice relative à ces volumes dans son catalogue (manuscrit) des reliures anciennes de la Bibliothèque du Château de Mariemont. De tous ces indices, déductions et témoignages, il appert que l'ouvrage a été acquis par Warocqué, - pour la somme de 3000 frs, - à la vente susdite et que Alph. Willems l'avait acquis, en 1874, pour 180 frs, à la librairie Bachelin-Deflorenne. Quant à Guntzberger, signalé par Guigard comme le propriétaire de l'ouvrage en 1890, il faut croire, ou bien que le renseignement fourni retarde d'une quinzaine d'années au moins sur les événements, ou bien que Guntzberger possédait, par extraordinaire un volume manquant à la collection offerte en vente par Bachelin et que Willems l'aurait acheté par la suite, ou bien encore qu'il s'agit d'un second exemplaire relié aux mêmes armes. De ces trois hypothèses, la première seule est plausible. L'intérêt de l'exemplaire possédé naguère par Alphonse Willems et actuellement conservé au château de Mariemont est, indépendamment de sa valeur artistique, de se rattacher, historiquement, aux rapports de l'imprimerie Plantin-Moretus avec le Cardinal-Infant. La Pompa Introïtus Ferdinandi Austriaci... in Vrbem Antverpiam (Anvers, J. Meursius, 1641, in-plano) relate non seulement les détails de la fastueuse journée du 16 avril 1635, mais indique à quels objets le gouverneur accorda son attention et son | |
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temps durant la semaine entière qu'il passa ensuite à Anvers. Parmi les visites qu'il daigna faire des établissements religieux et profanes de la ville, figure celle du Typographeion Plantinianum, que l'auteur de la relation qualifie sans grande modestie de toto orbe celeberrimum, et où le prince examina et admira, surtout, le magnifique assortiment de caractères, - près de cent jeux, - les douze presses, simultanément gémissantes, et les nouveaux corps de bâtiments édifiés par Balthasar Moretus (p. 171). Il y revint deux ans après, en avril 1637, et c'est à l'occasion de cette deuxième visite que Balthazar Moretus obtint la faveur de pouvoir lui offrir personnellement la grande édition collective des oeuvres de Juste Lipse, dont les privilèges des Archiducs et de l'Empereur étaient datés, respectivement, de 1611 et de 1636, mais dont la sortie de presse était toute récente, et qu'il avait expressément dédiée à Ferdinand. L'ouvrage avait été tiré à 1525 exemplaires, dont 200 sur beau papier. L'un de ceux-ci, accrû du Tacite et du Sénèque, reçut la reliure de luxe, appropriée à son caractère d'exemplaire de dédicace ou de présentation. La plupart de ces détails sont confirmés de la façon la plus authentique, grâce aux extraits de la correspondance de Balthasar Moretus dont Max Rooses communiqua naguère le texte à Alph. Willems, dans une lettre personnelle datée du 4 décembre 1883, et insérée, elle aussi, en tête de notre exemplaire. Voici la teneur de cette lettre, que nous pensons inédite et digne d'intéresser les Bibliophiles Anversois: | |
Antwerpen, 4 december 1883.Waarde Vriend Willems,
Hierbij een paar uittreksels uit de briefwesseling der Moretussen, die eenig belang voor U kennen opleveren.
Den 28 April 1637 schreef Balthasar Moretus I aan zijnen neef Petrus Ursinus (de Beer) van de Orde der Predikheeren te Lissabon:
Sermus Princeps Cardinalis Antverpiam superiori hebdomade advenit, atque iterum Typographiam meam praesentia sua illustravit. Opportune ei Justi Lipsii Opera omnia in folio obtuli quae recens absolveram, et Regio ejus nomini inscripseram, ob non unam caussam quam in epistola mea dedicatoria expono.
Den 6n april 1637 schreef hij aan Philips Chifflet te Brussel:
Ego vero his diebus chartam nactus, operibus Justi Lipsii in folio finiendis | |
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vacavi; nec porro indigna ea censui, quae Sermo principi inscriberem. Jam in bibliopegi manibus exemplar est, quod sub hebdomadae (sic apud Rooses) hujus sanctae finem ut spero, absolvet, et ego ad Amplissimum Dominum fratrem tuum mittam, rogaturus ut Sermo principi nomine meo offerre ne (sic apud Rooses), gravetur.
Den 30n april 1637 schreef hij aan Jan van Egmondt te Keulen:
Sermus princeps Cardinalis superiori hebdomada (sic apud Rooses) Antverpiam venit: typographiam meam denuo visitavit. Die Veneris elapso Hulstum hinc discessit.
Dit alles moet betrekking hebben op uw exempl. van Justus Lipsius.
La suite de la lettre de Max Rooses a trait à un autre sujetGa naar voetnoot1). On voit par l'ensemble des textes cités quelle a été la suite des faits. En avril 1635, première visite de Ferdinand à l'imprimerie Plantinienne; au début d'avril 1637, Balthasar Moretus achève l'édition des Opera, et confie au relieur l'exemplaire qu'il compte faire offrir au Cardinal-Infant, dédicataire de l'ouvrage, par l'intermédiaire des Chifflet; mais dans la seconde quinzaine du même mois, le prince visite pour la seconde fois l'officine plantinienne et Moretus a de la sorte l'occasion (opportune) de lui offrir lui-même l'exemplaire qu'il lui destinait. Il est piquant d'observer que Balthasar Moretus, dans une pompeuse épître dédicatoire, affectait de croire que les oeuvres de Juste Lipse s'adaptaient exactement aux aspirations intellectuelles et morales du prince, héritier d'un grand passé et gouverneur des Pays-Bas. A ses vertus militaires, répondait le traité, jugé ici d'un intérêt actuel, sur la Militia Romana; et tout ce qui pouvait évoquer la clémence d'Auguste paraissait être, au sortir d'une époque si troublée, une leçon de modération donnée aux princes, surtout depuis que Juste Lipse lui-même en avait disserté en chaire devant les Archiducs. Amplectere igitur, conclut Moretus, Sanctissimae Amitae Tuae instinctu, mutos hos Consiliarios: nam quae ad Pacis Bellique artes, quae ad civilem et Militarem Prudentiam, quae ad Virtutes et Munia Principis spectent, plena fidelitatis consilia suggerunt. Hélas! Le conseiller resta plus muet encore que Moretus ne le concevait. Il paraît certain, à voir l'état de conservation de notre exemplaire, que le cardinal, infant d'Espagne, ne fit aucun usage | |
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des six in-folios qui lui avaient été dédiés et offerts. Il mourut à Bruxelles quatre ans après, le 9 novembre 1641, et ses livres connurent le destin des bibliothèques désormais sans maîtreGa naar voetnoot1). |
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