De Gulden Passer. Jaargang 2
(1924)– [tijdschrift] Gulden Passer, De– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Les van Bomberghen d'Anvers
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Corneille IGa naar voetnoot2)
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Plusieurs de leurs descendants passèrent au calvinisme, et s'expatrièrent pour y avoir été mêlés trop activement. Établi à Anvers, et lancé dans le négoce, qui lui permit d'amasser une grosse fortune, Corneille I fit d'importantes affaires avec la ville des lagunes. C'est grâce à cette circonstance très-probablement, et aux prix spéciaux qui lui furent faits, qu'il confia en 1496, aux presses vénitiennes, avec lesquelles les ateliers anversois pouvaient pourtant entrer en lice, l'impression, à ses frais, de la première édition revisée du Bréviaire de l'Église Notre Dame d'Anvers; on ne connaît qu un seul exemplaire complet de ce travail, resté inconnu à Hain et à Reuchlin; il est conservé à la Bibliothèque Royale à Bruxelles, Fonds V.H. 647; Van Hulthem a placé une longue notice manuscrite en tête de cette impression, composée de 2 vol. petit in-12o; en voici les titres: Pars hyemalis bre / uiarij scdm morē ecclesie || sctē marie antuerpiensis. || 10 ff. n.c. pour liminaires, 329 ff. côtés pour texte, et 1, f non côté, où on lit au vo ces lignes imprimées en rouge: Ad laudem et gloriā Sanctissime trinitatis: castissime || quoque excellentissime vginis marie genetricis dei: || Ad honorē decorē ecclesie btē marie Antwerpiēn; ||... Impēsis quo spectabilis vi || ri Cornelij de Bomberga: Arte insuper famatissimi || Venetiarū impressoris Johānis hertzog alemani || eleganter impressa:... Anno chri || stianissime natiuitatis post millesimum quater cē || tesimum nonagesimo sexto. Nonas Martias. ||En dessous marque typographique de J. Hertzog, aux initiales I.H. Pars Estiualis bre = || uiarij scdm morē ecclesie || sctē Marie antuerpiensis. || 12 ff. n.c. pour liminaires, et 288 ff. côtés pour texte; au dernier feuillet: au ro, imprimées à l'encre rouge, ces lignes: Ad laudem omnipotentis dei beatissimeq; matris eius vir || ginis marie: par sestiualis breniarij (sic) scm morē ecclesie beate || marie antwerpien̄:... || Impēsis quoq; spectabilis viri Cornelij || de bomberga: imp̄ssa Venetijs ᵱ. iohannē hertzog; feliciter || explicit Anno salutis post M.CCCC.XCVJ. || Klas Martias. ||; Au vo, imprimée en rouge, la marque typographique de J. Hertzog, aux initiales I.H. | |
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Daniel II van BomberghenGa naar voetnoot1)
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Doué du flair des affaires, qui était la caractéristique de son père, le fils de Corneille I van Bomberghen vit s'ouvrir devant lui un champ immense qu'il défricha, et exploita avec succès pendant une trentaine d'années; il évinça même, par des armes parfois peu courtoises, des concurrents sérieux. Jérôme Soncino, dont il reproduisit, sans autorisation préalable, les éditions hébraïques, aussi bien faites que les siennes, qu'il s'agisse de la beauté des caractères, ou de la restitution critique de plusieurs passages de texte, Soncino, dis-je, fut obligé, grâce à ces procédés, d'émigrer dans les pays soumis au Sultan de ConstantinopleGa naar voetnoot1). Malgré sa prospérité, et sa puissance financière, l'établissement de Daniel, si bien organisé fût-il, finit par rencontrer des difficultés insurmontables: frais énormes résultant de l'exploitation, et notamment du nombreux personnel, spécialisé, employé (on cite comme correcteurs cent rabbins et savants juifs); - concurrence de plus en plus intense, tant à l'intérieur du pays, qu'à l'extérieur; - hostilité ouverte de la Seigneurie de VeniseGa naar voetnoot2); - enfin et surtout à notre sens, décrets de l'Inquisition, qui sévit de façon particulièrement rude sous le pontificat de Jules II; grâce à eux, les livres du Talmud et autres livres hébreux, imprimés en partie par Daniel, furent livrés aux HammesGa naar voetnoot3). Pour toutes ces causes réunies, les van Bomberghen durent suspendre leurs travaux; mais nous ne parvenons pas à saisir sur le vif, le déclin de la grande firme, avec laquelle s'éclipsa la belle impression hébraîque. Sa disparition fut-elle lente ou brusque? Continua-t-elle de subsister encore un certain temps, nous ne disons pas de jeter un certain éclat, après le départ de Venise de Daniel, de son fils Charles peut-être, le seul de ses enfants qui fut majeurGa naar voetnoot4), et de son frère, mais non son cousin, Antoine van Bomberghen? On ne doit pas s'étonner de voir citer ici ce dernier nom. En raison des frais considérables que l'imprimerie bomberghienne imposait, nous nous | |
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demandons si elle n'était pas, ou si elle n'était pas devenue tout au moins une entreprise collective, où les capitaux des trois fils de Corneille I, c'est-à-dire Daniel II, Antoine et François, mort prématurément en 1541, ont été engagés. Il résulte en tous cas d'un accord conclu le 16 mars 1524, entre les huit enfants de Corneille susdit, que ses affaires commerciales ont été laissées à ses trois fils. Ainsi peut s'expliquer l'intervention incontestable d'Antoine, intervention confirmée à toute évidence par la lettre du comte palatin du 19 février 1554, où il est dit que Jean de Rencalino était le facteur des van Bomberghen à Mannheim: ‘dicti Danielis et Antonii Bombergorum cognati, et isthic negotiorum curatoris’. Par amour de l'exactitude, notons que le comte Frédéric a été mal informé; les deux van Bomberghen, auxquels il s'intéresse, étaient frères, et non cousins, et ils étaient morts tous les deux à Anvers en 1553. Si nous ignorons quand et comment la firme Vénitienne a été liquidée, ce ne peut être, on vient de le voir, avant 1554, nous pouvons affirmer en revanche que ses propriétaires n'ont pas été ruinés; les biens, dont les enfants ont hérité en 1556, en portent témoignage. Il est établi d'autre part qu'une partie au moins des caractères hébraïques qu'elle possédait, et que Daniel II avait fait fondre pour son usage, ont été dirigés sur Anvers; Corneille IIGa naar voetnoot1), neveu de celui-ci et fils d'Antoine, en disposa lors de l'association, pour un terme de quatre ans, qu'il conclut le 26 novembre 1563 pour permettre à Christ. Plantin de relever son industrie, qui avait périclité, et de lui rendre sa prospérité d'autrefois; ses coassociés furent l'architypographe, le docteur Goropius Becanus, Jacques de Schotti, et CharlesGa naar voetnoot2), son cousin germain, fils de Daniel II van | |
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Bomberghen. Nous ignorons comment Corneille, qui devint comptable de l'entreprise, était propriétaire de ces caractères. Tous les livres, à l'impression desquels ils furent employés par son groupe, durent porter son adresse; il en fut ainsi de la Bible hébraïque de 1566, qui eut trois tirages, in 4o (1 vol.), in 8o (2 vol.) et in 16o (4 vol.), et pour le Pentateuque in 8o de 1567. A l'expiration de l'association, les ‘matrices d'ébrieu’ devaient retourner à Corneille, ‘sans que la compagnie en ait part quelconque’, dit le contratGa naar voetnoot1); il n'en fut pas ainsi toutefois; Plantin les racheta, et elles sont encore conservées au Musée. Rallié au parti de la Réforme, Corneille fut cité à comparaître le 21 février 1567, à Bruxelles, où il fut condamné au bannissement; mais il s'était réfugié, déjà le 12 février de cette année, à Venise. Il y mourut sans postérité, en 1577. Corneille II a été un audacieux en affaires. Il le devait sans doute à la fréquentation de la Bourse de commerce, qui ne lui porta guère bonheur. D'autre part les prêts d'argent, qu'il faisait assez volontiers, et ses combinaisons financières lui occasionnèrent des tourments. Pierre Gassen, de Paris, correspondant et fournisseur de Chr. | |
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Plantin, était redevable à Corneille, en 1565, d'une somme, dont les acomptes ne furent pas toujours payés à date convenueGa naar voetnoot2). Le 26 juin 1566, Plantin et Corneille II se portèrent garants envers le chevalier de Sèvre, pour une somme de ‘1300 écus au soleil à 52 sous par écu’ qu'il avait pretée à Claude de Witthem. Le terme de l'engagement était de neuf années; de Witthem devait rembourser annuellement ‘2646 fl. l sou, le florin compté à 20 patars’. Il semble que Corneille endossa, à P. Gassen, sa part dans cette affaire, qui occasionna à Plantin une perte de 2630 florinsGa naar voetnoot1). Enfin en 1567 et 1568, Corneille eut le malheur de perdre huit mille florins dans les assurances maritimes, et de voir s'engouffrer la plus grande partie de sa fortune dans la banqueroute d'un certain ElixaGa naar voetnoot2), et d'autres hommes d'affairesGa naar voetnoot3). Bien qu'il n'ait pas hésité, dans ces pénibles circonstances, à se dépouiller pour satisfaire à ses engagements, Corneille, qui aimait encore à paraître, ne sut plus trafiquer en Bourse. Il vécut d'emprunts, que lui consentirent quelques amis bienveillants. Jamais il ne démentit le bruit que Plantin était son obligé, et qu'il avait encore, comme ses aînés, les moyens, d'imprimer des Bibles en hébreu. Or il n'a pas su, faute d'argent, laisser achever celles qu'il avait fait commencer; l'architypographe ne les termina que grâce aux précieux concours qu'il parvint à s'assurer. On s'explique mieux maintenant l'achat fait par Plantin, au moment où la crise, qu'il avait subie, n'était pas à sa fin, des caractères hébraïques appartenant à Corneille II van Bomberghen, et qui lui servirent, avec des caractères hébraïques d'un autre type, à imprimer la Biblia hebraïca, de 1568. Nous ne voulons pas nous borner aux détails biographiques qu'on vient de lire. En raison du rôle qu'ella a joué en Italie, la grande firme Vénitienne a droit, dans cette étude, à une place privilégiée. Le vrai moyen de rendre hommage à ses mérites, c'est de donner un relevé sommaire des nombreuses et belles impressions qu'on lui doit. | |
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La Jewish EncyclopediaGa naar voetnoot1), et le travail de Monsieur Henri van BomberghenGa naar voetnoot2) notamment faciliteront notre tâche. Avec le concours de Félix Pratensis et de plusieurs dévoués collaborateurs, Daniel II mit au jour: Le 27 novembre 1518 la première édition de la Biblia rabbinica Bombergiana (texte hébreu et chaldaïque) en 4 t. in fol. (La dédicace à Léon X est de 1517). - La deuxième édition, plus exacte et plus belle que la première, parce qu'il a été tenu compte des critiques, fut imprimée de 1524 à 1525 (4 t. in fol). La revision est l'oeuvre du successeur de F. de PratoGa naar voetnoot3), le rabbin Jacob ben Chajim, né à Tunis, ancien correcteur de la firme. - Le ‘typographus’ de cette édition, Corneille ben Baruch AdelkindGa naar voetnoot4), se vit confier la direction de la troisième (1547-1548). - Enfin une quatrième édition fut imprimée par Plantin pour le compte de Daniel III, en 1568, ‘typis Bombergianis’. Dans ces conditions, des huit Biblia rabbinica (Biblia magna) existantes, quatre ont été imprimées avec les caractères de Daniel II van Bomberghen. L'impression de ce trés gros travail marcha de pair avec celle de Bibles hébraïques, ou parties de la Bible, qui présentent toutes un réel mérite, et sont des plus rares. En 1518, première édition de la Biblia hebraïca (en 4 t. in 4o); rééditions en 1521; 1525-1528; 1533; 1544-1545; En 1518, une Biblia hebraïca (texte sans commentaires), 1 vol. in 4o, plus spécialement destinée aux fidèles; Comme parties de la Bible, il faut citer cinq éditions du Pentateuque, Megilloth, Haftarot, texte hébreu et chaldaïque, 1523, 1524, 1548 (in fol.); 1527, 1543 (in 8o); Trois éd. du Pentateuque, texte hébreu, 1527, 1544, 1548 (in 8o); | |
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Cinq éd. des Psaumes, texte hébreu, 1518, 1522 (in 24o); 1524 (in 18o); 1537 et 1538 (in 8o); Trois éd. des Proverbes, Cantiq., Eccles., texte hébreu, 1522, dédiée à Jean Reuchlin ‘XII Kalen. februarias MDXXII’; 1524, 1533 (in 16o); Trois éd. des livres de Job-Daniel, texte hébreu, 1527, 1538, 1544 (in 16o); Une éd. des Megilloth, texte hébreu et chaldaïque, avec commentaires, 1524 (in fol). Sachant qu'il n'avait paru que des traités isolés du Talmud de Babylone (Talmud Babli), Daniel II van Bomberghen, le premier, en publia, en 1520, le texte complet (15 vol. in fol.), avec les commentaires de plusieurs rabbins-exégètes; cette éd. fut suivie de deux autres (1526 et 1548); d'après Scaliger, les frais d'impression de chacune d'elles fut de cent mille écus. En raison de sa valeur intrinsèque, l'édition de van Bomberghen est reproduite de nos jours, avec la mention de son nom, de préférence à celle d'autres imprimeurs ou commentateurs. Le Talmud-Babli se compléte par le Talmud de Jérusalem (1 vol. in-fol.), que Daniel fit paraître en 1523-1524; la deuxième éd. de ce dernier ouvrage sortit des presses à Cracovie, en 1609 seulement. Citons encore: Abot, 1e éd. 1521; - 2e éd. 1526; Moïse de Concy, ‘Sefer Mizwot’, 1e éd. 1522; - 2e éd. 1547; Elijah Mizrahi, Commentaires sur Rashi, 1e éd. 1527; - 2e éd. 1545; Et quarante six autres ouvrages relatifs aux Saintes Écritures. Pendant la période brillante qu'elle a connue, la firme van Bomberghen, qui se spécialisa, nous le répétons, dans les impressions hébraïques, a encore fait sortir de ses presses: En 1524, la Concordance hébraïque, la première qui ait été imprimée, du rabbin Isaac Nathan (1 vol. in-fol.); En 1523, une volumineuse grammaire hébraïque, établie à l'initiative de Daniel II, par Je rabbin Abraham de Balmis. L'imprimeur traduisit eet ouvrage en latin, et le publia, encore en 1523, précédé d'une préface de sa main, sous le titre;,.. Pecvlivm Abrae. Gramma- || tica Hebraea vna cvm Latino nvper edita per Doctiss. virum Magistrum Abraham de Balmis Artium & Medicinae doctorem. Impressa Venetijs in Aedibus Danielis Bôbergi, XIIII kl. Decêbris MDXXIII (1 vol. in-4o). Il y a une éd. anversoise de 1564, et une autre à Hanau en 1594. | |
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De Balmis mourut au cours de l'impression de ce travail, et fut remplacé, dit van Bomberghen, par Calos Calonymos, qui y apporta de larges remaniements; En 1529, la grammaire hébraïque de David Kimchi, accompagnée d'un lexique; la grammaire seule fut reproduite en 1545. Daniel II van Bomberghen, qui fut en rapport avec plusieurs savants, Nic. Clénard, G. Postel, Reuchlin, A. Masius, etc., et qui, ‘le premier, tenta de grandes choses dans le champ de la typographie et de l'érudition’Ga naar voetnoot1), attend toujours, de même que sa familie, son historien. | |
Nicolas van Bomberghen
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sa doctrine, au moyen de nombreux écrits; il en confia l'impression à Dirk de Borne (de Deventer), à Augustin de Hasselt, à Chr. Plantin, et à Nicolas ‘de Bomberghe’Ga naar voetnoot1). Celui-ci a imprimé des planches apocalyptiques de Henri Niclaes, où on lit cette adresse: Gedruckt zu Coelln durch Niclaes BohmbergenGa naar voetnoot2). Le détail est fort intéressant; il confirme l'existence dans la grande ville rhénane d'une imprimerie des van Bomberghen, signalée maintes fois, mais accidentellement et de façon trop sommaire, par Max Rooses, et dont nous ne tarderons pas à nous occuper. | |
Daniel III van Bomberghen
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ghen, établi à Cologne, et qui furent employés pour la paraphrase chaldéenne de la Bible exécutée de 1568 à 1572Ga naar voetnoot1). L'idée de cette imprimerie bomberghienne se trouve aussi dans le Christophe PlantinGa naar voetnoot2), où Daniel III est cité dans la liste des imprimeurs avec lesquels le prototypographe fut en relation. Mais la vente de caractères typographiques ne suffit pas pour conclure à l'existence d'une imprimerie; ses produits, quel que soit leur nombre, sont un témoignage autrement probant. Or ce témoignage faisant toujours défaut, nous estimions, contrairement à l'opinion de Max Rooses, à la haute compètence duquel nous rendons hommage, mais qui pouvait errer, que les van Bomberghen n'avaient jamais fait rouler leurs presses à Cologne, et que leur action s'était bornée à l'exploitation d'une librairie d'allure modeste, à la fondation de laquelle on ne savait pas assigner de date. Un détail, que nous venons d'emprunter à Tiele, et qui avait échappé aux chercheurs, ne laisse plus place au moindre doute; l'assertion de Max Rooses est exacte, et les van Bomberghen doivent être rangés parmi les imprimeurs belges établis à Cologne. D'après Max Rooses, on lit dans la Bible Hébraïque de 1568, une inscription dont il donne cette traduction: ‘Imprimé par Christophe Plantin par ordre du Sieur Bomberghe (Dieu est son rocher et son libérateur), dans l'année 326 de la petite computation, ici dans la célèbre ville d'Anvers’Ga naar voetnoot3). Rien ne dit que l'éditeur de ce livre est Daniel III, comme rien ne dit qu'il fut libraire ou imprimeur et installé à Cologne. Il semble cependant, grâce aux données que nous possédons, qu'il ne peut s'agir ici que de Nicolas, ou mieux de l'ancien étudiant de Leyde; c'est lui qui vendit des caractères hébraïques spéciaux à Plantin, c'est à lui que Benedictus Arias Montanus s'adressaGa naar voetnoot4) pour avoir le moyen d'achever convenablement la Bible Polyglotte, qu'il avait en préparation. Lors de son passage à Venise en 1559, le savant écrivain espagnol apprit de personnes dignes de foi que Daniel II avait possédé deux exemplaires manuscrits fort anciens ‘Venerandae Vetusta- | |
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tis’, et d'excellente exégèse, du Nouveau Testament en Syriaque. Ce texte, auquel il ne connaissait rien de comparable, lui était indispensable pour la collation et la revision des Bibles imprimées existantes, et aussi pour la publication la plus prompte, la plus correcte et la plus scientifique possible des Livres Saints dont le Roi Philippe l'avait chargé; Arias demanda à Daniel III de le lui procurer et de bien vouloir même faire des démarches à Venise, s'il ne se trouve pas à Cologne, contrairement à ce qui lui a été affirmé. Van Bomberghen ne resta pas sourd à cette sollicitation, mais il eut à lutter contre l'opposition de Charles, son frère aîné; celui-ci craignait vraisemblablement que le manuscrit resté, d'après nous, un bien de famille indivis, ne courût le risque d'être confisqué. Un accord s'établit entre les deux frères, que résument les lettres patentes, en date du 14 juin 1570, revêtues du sceau du Magistrat et du Sénat de la ville Impériale de Cologne, et où intervinrent comme parties contractantes, Mare Velberger, mandataire de Charles van Bomberghen, Georges von Steine, Dominique Petitpass, et enfin Daniel III van Bomberghen, qui devait jouir de considération dans te milieu Colonais. Ce dernier pouvait recevoir en communication les deux précieux volumes du Nouveau Testament, que Daniel II avait fait venir à ses frais de Syrie à Venise, à la condition formelle qu'une provision de quatre vingts couronnes d'or fût déposée, ou qu'un citoyen de la grande ville métropolitaine rhénane promît de restituer le manuscrit à Cologne même, endéans le semestre. Georges von Steine en ordre principal, puis Dominique Petitpass, et enfin Daniel III. qui temporairement ne savait pas accepter les obligations imposées par son frère, prirent l'engagement réciproque de donner satisfaction à Charles. Daniel fit le voyage de Cologne à Anvers pour remettre à Arias le manuscrit tant convoité. Cela résulte de la préface au lecteur datée d'Anvers du ‘x Cal. Sextiles cIƆ IƆ lxxi’, qui est placée en tête de la Biblia SacraGa naar voetnoot1). A partir de ce moment nous perdons toute trace de ce intéressant document. Malgré l'intervention directe de Daniel III à la convention dont nous venons de tracer les grandes lignes, on ne sait toujours pas comment et en quelle qualité il échoua à Cologne. Son cousin Nico- | |
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las y était-il déjà installé? Lui même y vint-il, après avoir achevé ses études à Leyde? ou émigra-t-il d'Anvers après les troubles qui y éclatèrent, en emportant la Bible Syriaque, dont on craignait la disparition par un acte de l'autorité? Autant d'énigmes en vérité, auxquelles s'en ajoutent d'autres, dont nous allons dire un mot. Il semble établi que Daniel III habita Bruxelles de 1571 à 1584, et qu'il y devint colonel de la garde bourgeoise en 1579. Si le renseignement est exact, il aura quitté Cologne, étant assuré de l'impunité, grâce au service marquant rendu à Bénédictus Arias. Que devint alors l'imprimerie? Fut-elle liquidée? y plaça-t-il un gérant? ou Nicolas continua-t-il à l'exploiter? Quoi qu'il en soit nous revoyons Daniel à Cologne en 1587. Le 7 juin et le 23 août de cette année, deux membres du consistoire de l'église réformée des flamands réfugiés en cette ville, Herman Faukelius et Paul Mondekins se présentèrent d'abord à la femme de Daniel III van Bomberghen, puis à son mari, pour leur reprocher leur réconciliation ‘met den Romanisten’, et pour leur suggérer l'idée de faire pénitence, et de se rapprocher de nouveau du SeigneurGa naar voetnoot1). Nous ignorons la suite qui fut réservée à ces entretiens. L'impriprimerie des van Bomberghen fonctionnait-elle toujours? En 1611 Daniel III habitait Middelbourg.
F. Van Ortroy. |
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