De Gulden Passer. Jaargang 1
(1923)– [tijdschrift] Gulden Passer, De– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Une ancienne édition Anversoise de Pierre de Provence.Parmi les livres populaires flamands les plus remarquables de notre collection, il y a certainement lieu de tirer hors de pair celui que nous avons acquis en février 1922 à la librairie Dorbon Aîné, 19 Boulevard Haussmann, à Paris (Cat. 107 No 9886), au prix de Frs 250. -. C'est un exemplaire, peut-être le seul connu, d'une édition du célèbre roman de Pierre de Provence, publiée à Anvers par Jean van Waesberge, en 1587. L'ouvrage est dans un état parfait de conservation et sa reliure, signée de Lortic, est très belle. Celle-ci est en maroquin bleu, avec des filets à encadrements à motif central sur les plats, à dos orné, à larges dentelles intérieures et à tranches dorées.
Le livre a comme titre: La plaisante || HISTOIRE || dv noble et vaillant || Chevalier Pierre de Provence, & de la belle || Maguelonne, fille du Roi de Naples. || Nouvellement mise en Flamen & Françoys ensemble. || ⁌ De ghenuechlijcke Historie vanden || Edelen ende vromen Ridder Peeter van Provencien, || ende vande schoone Maguelonne, Dochter || des Konincx van Napels. || Nieuvvelijcx in Nederduyts ende Fransoys tsamen ghestelt. || Op een nieu ghecorrigeert ende oversien. || [Bois gravé signé: Une joute]. T'ANTWERPEN. || By Jan van Waesberge inde Kamer- // strate / inden Schilt van Vlaenderen. 1587. 32 feuillets in-4o, paginés de 1 à 32, signés A 2 - D. Sans privilège ni approbation. F. 1 verso: l'histoire de pierre de provence. et de || la belle Maguelonne. F. 3 verso. Bois gravé non signé: Pierre prend congé de ses parents. F. 4 verso: Même bois qu'au titre. F. 12 verso. Bois gravé non signé: Entrevue de Pierre et de Maguelonne. F. 14 recto. Bois gravé non signé; Messire Ferrier s'embarque pour Naples. F. 18 recto: Bois gravé signé: Pierre fuit avec Maguelonne. F. 26 recto: Même bois qu'au folio 14. F. 30 verso: Même bois qu'au folio 12. Chaque page est à deux colonnes, à gauche le texte flamand en caractères de civilité, sauf les sommaires des chapitres qui sont en caractères romains; à droite le texte français en caractères romains | |
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ordinaires. Le caractère de civilité adopté est celui gravé vers 1575 par le maître-imprimeur gantois Henri Van den Keere. Les illustrations sont des figures sur bois, dont deux seulement sont signées A. C'est le monogramme du graveur anversois Arnold Nicolaï, souvent attribué erronément à Antoine Silvius. Sujet du roman: Pierre, fils d'un comte de Provence, se rend à la cour du roi de Naples pour obtenir la main de sa fille Maguelonne, dont la beauté est célèbre. Ses prouesses le font remarquer de la jeunefille et il est bientôt aimé d'elle. Ils quittent furtivement la cour et s'enfuient. Tandis que Maguelonne faitiguée est endormie sur les genoux de Pierre, un oiseau de proie lui dérobe les trois anneaux d'or que Pierre lui avait donnés. Pierre se met à la poursuite de l'oiseau, monte dans une barque abandonnée, mais un vent violent s'élève et le pousse en pleine mer. Il est capturé par des corsaires qui en font présent au Soudan. Celui-ci le prend en affection. Entretemps, Maguelonne, seule et ne voulant pas retourner chez ses parents, demande à une pélerine d'échanger ses vêtements contre les siens, se rend à Rome, de là à Gênes et arrive enfin en Provence où elle bâtit un hôpital, Pierre obtient du Soudan un congé pour aller embrasser ses parents; mais, après de nouvelles tribulations, il tombe malade et entre à l'hôpital que Maguelonne dirige. Nos amants se reconnaissent et se marient. * * * Pierre de Provence aurait été écrit en provençal au XIIe siècle, et serait l'oeuvre de Bernard de Trévies, chanoine de la cathédrale de Maguelonne (Hérault). Rien ne témoigne, écrit Nisard, que ce roman soit fondé sur aucune circonstance vraiment historique; on ne voit dans la suite des comtes de Provence ni Jean, ni Pierre: ni Madeleine, ni Maguelonne, dans celle des princes de NaplesGa naar voetnoot1). Le première édition française de ce roman, avec une date certaine, est de 1490, in-4o. Les autres, sans date et antérieures à elle, sont assez nombreuses. Brunet en cite et M. Claudin en décrit quelques-unes et reproduit quelques illustrationsGa naar voetnoot2). La première rédaction française est, dit-on, antérieure à 1450; le roman a été refait par le comte de TressanGa naar voetnoot3). Il y a des manus- | |
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crits, en vers comme en prose, qui sont fort anciens. Le poème obtint un très grand succès, surtout au XVIe siècle, et fut traduit en espagnol, en catalan, en hollandais, en allemand, en danois, en russe et en polonais. L'édition flamande publiée à Anvers chez Claes Van den Wouwere contient plusieurs Refereynen. Le Refereyn est une variante de la ballade dans laquelle le dernier vers de chaque strophe est le même. Le texte bilingue de notre édition est entièrement en prose et le récit flamand est une traduction littérale du récit français. Le texte français s'écarte très peu de celui que reproduit Claudin dans son Histoire de l'Imprimerie en France. Le roman de Pierre de Provence n'eut fort probablement dans les Pays-Bas qu'une vogue éphémère. Il fut plusieurs fois censuré par l'autorité ecclésiastique. En 1621, Jean Maldérus. évêque d'Anvers, en condamne la lecture dans les écoles parce que deux personnes s'y rendent très souvent à l'église pour leurs amours, que la jeune fille dort sur le sein de Pierre, que celui-ci la regarde avec curiosité et qu'il la méprise après l'avoir bien vueGa naar voetnoot1). Ce dernier détail est inexact. Cependant, nous retrouvons le titre de l'ouvrage dans le catalogue imprimé par les Moretus sous forme de placard in-folio et sous le titre de: Taxatie oft Priisen vande ghemeyne School-Boecken. Ce catalogue indique les prix des ouvrages scolaires, prix fixés par l'autorité communale le 10 février 1642. Peter van Provencien devait compter 5 feuilles de papier et se vendre deux sous. L'ouvrage avait sans doute été expurgé depuis sa condamnation. Victor dela Montagne, dans son travail ‘Schoolboeken te Antwerpen in de XVIIe EeuwGa naar voetnoot2)’, mentionne deux autres éditions du même ouvrage, la première parue à Anvers en 1560 chez Jan van Waesberge père, la seconde à Rotterdam chez son fils en 1624. Il les a trouvées citées dans Brunet. F.J. MoneGa naar voetnoot3) et à sa suite SchotelGa naar voetnoot4) et V. delà MontagneGa naar voetnoot2) renseignent sur une édition in-4o parue à Anvers vers le milieu du XVIe siècle, chez Claes Van den Wouwere, op die Lombaerde veste. C'est l'exemplaire de Serrure, qui appartient actuellement au duc d'Arenberg (Bruxelles). | |
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Mais antérieurement à ces imprimeurs, Willem Vorsterman, d'Anvers, en avait publié une édition in-4o, de 64 pages signées A-P, dont le seul exemplaire connu se trouve à la bibliothèque de l'université à Munich. Notre ami, M. le Dr G.J. Boekenoogen, qui a bien voulu nous signaler ce dernier exemplaire, en possède un lui-même d'une édition publiée à Utrecht par la Veuve de J. van Poolsum, entre les années 1690-1709. Ce sont là les seuls exemplaires anciens connus de ce roman populaire. L.Ph.C. Van den Bergh ne cite aucune édition de l'ouvrageGa naar voetnoot1). Schotel reconnaît qu'il n'en a jamais vu d'édition ancienne; la maison Fréderic Muller et Co, dans son catalogue, si riche cependant, de livres populaires, publié en 1893, R.W.P. de Vries, dans celui publié en 1907, n'en mentionnent aucun exemplaire. Suivant des renseignements fournis par des bibliothécaires attachés à ces dépôts, ni la Bibliothèque Royale de Belgique, ni la bibliothèque de l'Université de Gand, ni celle du British Museum, ni la Bibliothèque Nationale de Paris n'en possèdent une édition flamande ancienneGa naar voetnoot2). Il ressort donc des renseignements que nous venons de donner et des enquêtes faites par M. le Dr G.J. Boekenoogen vers 1905 et nous-même cette année, qu'il n'existe dans les bibliothèques de Belgique et de l'étranger, que quatre exemplaires flamands ou hollandais anciens du roman de Pierre de Provence, sauf ceux de 1560 et 1624 mentionnés par Brunet et dont on ne sait où ils se trouvent. L'édition la plus ancienne, celle de Munich, remonte à la première moitié et la seconde, celle du duc d'Arenberg, au milieu du XVIe siècle; la troisième ou la nôtre à l'année 1587 et enfin la quatrième, celle du Dr Boekenoogen, date de la fin du XVIIe siècle ou du commencement du XVIIIe. Notre exemplaire n'est donc pas, pensons-nous, tout à fait dépourvu d'intérêt pour l'étude des livres populaires et de leur diffusion dans notre pays. Emile H. VAN HEURCK. |
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