Documentatieblad werkgroep Achttiende eeuw. Jaargang 1971
(1971)– [tijdschrift] Documentatieblad werkgroep Achttiende eeuw– Auteursrechtelijk beschermd
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Holbach et les Pays-BasDans la biographie et l'oeuvre de Paul Tiry, baron d'Holbach (1723-1789), le chef de file des matérialistes français du 18e siècle, il est un point intéressant qui mérite qu'on s'y attache: celui des rapports entre le philosophe et les Pays-Bas du Nord. Nous avons déjà eu l'occasion de montrer l'impact important de la Hollande sur la vie et l'oeuvre de VoltaireGa naar eind(1). Or, si l'on considère que des conditions semblables sont réunies pour Holbach (voyages, séjours, relations, bibliothèque et galerie de tableaux, allusions dans l'oeuvre et la correspondance), l'on est en droit de se demander si les conséquences d'un pareil impact furent les mêmes pour l'un et pour l'autre. Nous dirons tout de suite que pour le philosophe du Grandval, l'effet fut assez mitigé. Pour arriver là il faut examiner les conditions que nous venons d'énumérerGa naar eind(2). Au cours de nos recherches nous avons pu découvrir des documents inconnus et que nous croyons intéressants. En premier lieu nous avons vérifié, non sans difficultés, les actes notariés concernant la famille Holbach déposés au Minutier Central des Archives nationales (Paris) et étudiés par John LoughGa naar eind(3). L'examen des répertoires 4 et 5 de l'étude XCIX des notaires Fabien-Jacques Hazon (1739-1766) et Edmé-Hilaire Garnier-Deschesnes (1766-1781) confirme la valeur de ces documents. Au château de Heeze (Noord-Brabant) qui fut la résidence familiale des Holbach de 1732 à 1760, nous n'avons pas non plus, sans quelque difficulté, pu obtenir des renseignements. Heureusement les chercheurs disposent d'un inventaire correct dressé en 1911 par W. MeindersmaGa naar eind(4) et le témoignage d'un érudit local, M.J. Aerts, qui nous a beaucoup appris, a confirmé que les archives du château étaient assez en désordre. De plus tous les papiers y conservés et concernant la famille Holbach ont leurs originaux soit des copies conservés dans des dépôts publics, en particulier le Rijksarchief in Noord-Brabant (Bois-le-Duc), Les Archives de l'Evêché de la même ville, Les Archives de l'Université de Leyde et l'Algemeen Rijksarchief de la Haye. Mis en appétit par les travaux de MeindersmaGa naar eind(5) et surtout l'extraordinaire apparat critique d'un document exceptionnel conservé aux Archives de la paroisse catholique Saint-Martin de HeezeGa naar eind(6), une Kronijk of aantekening der merkwaardige voorvallen binnen de gemeente Heeze en eenige omliggende dorpen en enkelde welken algemene belangstelling verdienen, écrite de 1842 à | |
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1844 par le secrétaire communal de Heeze, Hendrikus Godefridus van Moorsel (1793-1851), nous avons découvert nombre de documents peu connus voir inédits.
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On ne saurait aborder ici l'examen de l'accueil réservé par la Hollande à l'oeuvre d'Holbach. Quoiqu'aucun de ses écrits n'ait jamais été publié en traduction néerlandaise, il est vrai que ceux que la nature de ces écrits pouvait intéresser connaissaient assez le français pour les lire dans le texte. Une vaste enquête englobant les périodiques, les mémoires, les apologies et les réfutations s'avère nécessaire pour en arriver à une telle synthèse. Elle devrait analyser et motiver des jugements aussi précaires qu'erronés comme on peut les trouver par exemple sous la plume de van Moorsel (pp. 119-120), ou plus élaborés et sérieux comme ceux de Frans Hemsterhuis qui lui vaudront la réplique de DiderotGa naar eind(7), ou des jugements nuancés distinguant l'homme de l'oeuvre, comme celui de P.H. Ritter jr.Ga naar eind(8), voire élogieux comme celui de H.E. van GelderGa naar eind(9) ou partiaux tels que ceux de l'abbé L. HaspeslaghGa naar eind(10) ou de R. Willemsen, traducteur de J.A. von StarkGa naar eind(11). Et pour situer à sa juste place cet accueil, il faudrait bien entendu l'inscrire dans le contexte plus vaste de l'audience des philosophes français du 18e siècle aux Pays-Bas, matière encore peu explorée et qui exigerait un travail énorme s'étendant sur plusieurs années. Il faudrait en plus étudier les rapports et les influences quand même ils seraient aussi douteux que ceux signalés par J. EndepolsGa naar eind(12). * * * | |
Voyages et séjoursLes biographes d'Holbach les plus connus et les plus souvent cités, mais pas toujours les plus exacts, n'ont guère parlé de sa période hollandaise. M.P. Cushing parle en 1914Ga naar eind(13) de l'oncle d'Holbach, François-Adam comme de son père. Il commet également une erreur en situant l'inscription de Paul à Leyde en 1746 en se fondant sur deux lettres écrites à cette époque de Heeze à l'ami Wilkes, lettres que nous citerons tout à l'heure. W.H. WickwarGa naar eind(14) consacre également deux pages à ce sujet en parlant brièvement de Heeze, située par erreur en terre liégeoise et dite relevant de Maestricht. | |
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L'auteur se trompe également en disant que naturalisé français en 1749, Paul d'Holbach quitta définitivement la Hollande à cette date. P. Naville a recopié ces erreurs en 1943Ga naar eind(15) en plaçant les villages de ‘Heesen’ et ‘Léande’ (Heeze, Leende) dans la principauté de Liège sous Maestricht. En fait ces villages dont les Holbach furent seigneurs sont situés dans l'ancien quartier de Peelland et le ressort (‘meyerye’) de Bois-Le-Duç;les seigneurs relèvent donc leurs titres de la Cour féodale de Brabant. Sur le plan écclésiastique, les villages relèvent de l'évêché de Bois-Le-Duc et sont administrés comme les autres au 18e siècle par un vicaire apostolique. Ils sont également incorporés dans les circonscriptions de l'Eglise réformée néerlandaiseGa naar eind(16). S'il établit correctement la date de l'inscription de Paul à Leyde, c'est-à-dire en 1744, P. Naville se laisse cependant trop tenter par l'imagination lorsqu'il prête au climat de la ville universitaire des conséquences aussi importantes que celle de la métamorphose du jeune naturaliste déiste qu'était le jeune Holbach en un athée déclaréGa naar eind(17). Au reste les propos sur Heeze sont inspirés par les lettres à Wilkes et les relations entre les familles Holbach et Daine. J. Lough a révélé en 1957 une série importante de documents à incidence hollandaise et se trouvant au Minutier Central des Archives nationales de Paris, mais il ne s'est pas donné la peine de chercher leurs compléments hollandais, se bornant à reproduire les propos peu intéressants de MeindersmaGa naar eind(18). Enfin, H. Sauter a, dans une courte notice biographique de 1964Ga naar eind(19) éclairci quelques points relatifs aux origines allemandes de Paul Tiry et de son oncle François-Adam. Il faut rectifier cependant ici quelques détails. L'auteur estime très douteux que le jeune homme ait étudié à Leyde jusqu'en 1748, puisque les lettres à Wilkes le montrent établi à Heeze en 1746. Il faut faire la part entre les études et les vacances; en outre, les archives de l'Université nous ont montré que Paul était toujours porté sur les listes de résidents en 1748. En outre, s'il reçoit en 1750 à l'occasion de son mariage avec sa cousine Basile Geneviève Suzanne Daine les biens de son oncle, Heeze et Leende, il n'a pas reçu six villages en plus (‘und weitere sechs Weiler’): il s'agit évidemment d'une traduction littérale du toponyme Zes-Gehuchten. * * * | |
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Arrêtons-nous maintenant à l'histoire des possessions hollandaises des Holbach. Le 14 octobre 1732 comparaissent à Bois-le-Duc devant le notaire Jean Louis VersterGa naar eind(20), Albert Charles baron de Snoukart, seigneur de Heeze, et son épouse, et ‘tres noble François-Adam de Holbach, Chevalier, Baron du Saint-Empire’. Le premier vend au second ses seigneuries de Heeze, Leende et Zes-Gehuchten avec tous leurs biens: bâtiments, terres, bois, droits, privilèges et obligations. Leur détail occupe plusieurs pages de l'acte officiel. Le vendeur aura la régence des biens jusqu'au ler janvier 1733 et la jouissance du château jusqu'au ler mai suivant. Le tout est vendu pour 205.000 florins et l'acte est enregistré à Bois-le-Duc le 12 décembre, et par les autorités de Heeze (drossard, échevins et secrétaire), le 9 janvier 1733. Enfin, François Adam relève sa seigneurie devant la Cour de Brabant le 23 févrierGa naar eind(21). Nous ne savons pas grandchose de l'histoire locale pour cette époque. La Kronijk nous apprend que les hivers de 1733 et 1739 furent très rigoureux et que le mauvais temps gâta les récoltes de 1740 au point que le souvenir en demeura dans les mémoires jusqu'au siècle suivant. Le document nous renseigne également sur les nominations d'écclésiastiques catholiques et réformésGa naar eind(22). En 1735 François Adam fait construire les écuries du châteauGa naar eind(23). Le 22 mai 1737 il adresse une requête aux Etats-Généraux visant à obtenir l'autorisation de transformer l'église catholique de Heeze afin de faciliter sa présence et celle de sa famille aux officesGa naar eind(24). On peut cependant se demander si François Adam était réellement attaché à ses possessions hollandaises dont il avait fait sa résidence. En effet, il relève à nouveau sa seigneurie le 28 septembre 1740 parce que l'ayant vendue le 11 septembre 1739 à Jacob Pielat, conseiller et bourgmestre de Hattem (? le document porte ‘Hattum’), l'accord de vente a été rompu le 29 octobre suivant. François Adam dut supporter les conséquences financières de cette rupture de contratGa naar eind(25). Ce n'est qu'en 1744 qu'apparaft pour la première fois le nom de son neveu. Celui-ci est inscrit le 10 janvier à la faculté de droit de Leyde sous la mention ‘Paul us van Holbach, Baro Palatinus, 21’ en compagnie de son ami Paul Pelsner. Il loge en ville chez le pharmacien KruithofGa naar eind(26). La même année les archives de l'uńiversité le signalent comme résident chez un autre particulier, Hendrik Konink; en 1745 et 1746 il loge chez un certain Philippe Pohl, en 1747 et 1748 chez Jan SmagtenberghGa naar eind(27). | |
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La présence constante de Paul d'Holbach en terre hollandaise est également attestée par une série de certificats de vie en date du 9 janvier 1745 (donné par les échevins de Leyde), 12 octobre 1746, 17 mars 1747, 10 août 1747 et 13 janvier 1748 (échevins de Heeze), signalés par J. LoughGa naar eind(28). Nous en ajouterons un sixième, également délivré à Heeze en date du 27 février 1749Ga naar eind(29). Sur la vie que mènent les Holbach nous sommes plus ou moins bien renseignés. Les cousins Daine y résident souvent: le jeune Marius Jean Baptiste Nicolas, âgé de 14 ans, y achève une traduction manuscrite de l'In restitutam regis valetudinem, oratio gratuloria (Paris 1744) de Charles Le Beau (1701-1778), traduction dédiée à ‘Mons. de Holbach .... Au château d'Heezen’. Nous ignorons malheureusement si le jeune homme a dédié sa traduction à l'oncle François Adam ou à son cousin PaulGa naar eind(30). Nous avons également deux lettres écrites par celuici de Heeze à son ami John Wilkes, les 9 août et 3 décembre 1746Ga naar eind(31). Dans la première, le jeune homme raconte à son ami comment ayant quitté Leyde huit ou dix jours après lui, il a fait la route de Heeze en compagnie d'un certain M. Vernon qui a demeuré une semaine chez son oncle avant de continuer vers Spa. A son arrivée à Heeze, Paul y a trouvé le général comte Palfi et des officiers à la tête de troupes venant d'Allemagne pour contenir les Alliés (guerre de succession d'Autriche). Au reste, le prince Charles de Lorraine arriva le même jour pour prendre le commandement général des troupes. Holbach était ainsi en mesure de donner des nouvelles directes du déroulement de la campagne. Dans la même lettre il raconte qu'il a proposé à un autre ami anglais, Dowdeswel de le rejoindre à Heeze, et ajoute: ‘What happy triumvirat would be ours if you were to join .... As to me, idleness renders me every day more philosopher[;]every passion is languishing within me .... l took a whim to study a little Physic accordingly I purchased several books that Way and my empty hours here are employ'd with them’. Dans sa seconde lettre, Holbach raconte qu'il est rentré d'Allemagne plus tôt qu'il ne le pensait, à cause de la mort du régisseur de son oncle. Dowdeswell a passé tout le mois d'août à Heeze et les deux amis ‘made sincere libations to you with burgundy and Champaigne’. Holbach ignore combien de temps il restera lui-même à Heeze: ‘in the meanwhile I act pretty well the part of a County Squire, id est, hunting, shooting, fishing, walking every day without to lay aside the | |
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ever charming conversation of Horace, Virgil, Homer and all our friends of the Elysian fields’. Wilkes lui avait promis des livres, Holbach s'inquiète de ne voir rien venir, surtout après la réponse négative de messieurs Conrad et Bouwer de Rotterdam (des courtiers?). Pour terminer, Holbach ajoute quelques nouvelles relatives à des condisciples anglais et aux événements politiques et militaires, en particulier au congrès de Bréda. Let on de ces deux lettres incite à croire qu'il y en eut beaucoup d'autres du même genre et que malheureusement nous ne connaissons pas. Elles nous montrent un jeune Holbach cosmopolite, ouvert, ami de la nature et des Anciens et pratiquant une morale non dépourvue d'épicurisme. Il deviendra le maître de Heeze quelques années plus tard. Le 11 décembre 1749 est signé son contrat de mariage avec sa cousine Daine. L'oncle François Adam donne ses possessions hollandaises à son neveuGa naar eind(32). Cette donation est attestée par de nombreux documents. Par procuration datée du 20 février 1750, le drossar de Heeze, Govert van der Hoeven, reçoit de François Adam pouvoir de transmettre les titres à son neveu PaulGa naar eind(33). La transmission en est faite le 10 avril suivantGa naar eind(34): elle énumère en détail tous les biens et droits dont jouira le nouveau seigneur, entre autres les dîmes, la collation des bénéfices religieux, les novalia les nominations aux charges de drossard, secrétaire, échevin et garde. Paul Tiry d'Holbach relève sa seigneurie devant la Cour de Brabant le 6 maiGa naar eind(35). Cependant le jeune couple s'installa à Paris. Le goût pour les sciences déjà manifesté dans la correspondance de 1746 avait pris corps. En 1751 paraissent les premiers volumes de l'Encyclopédie dans lesquels Holbach avait rédigé de nombreux articles scientifiques. Il continuera sur cette lancée en publiant de nombreuses traductions de chimistes et minéralogistes allemandsGa naar eind(36). Le malheur allait bientot s'abattre sur Holbach: il perdit son oncle et bienfaiteur en 1753; le 26 août 1754 sa jeune femme mourut à son tour. Elle fut enterrée à Saint-Germain l'Auxerrois le lendemainGa naar eind(37). Ce douloureux événement eut ses répercussions à Heeze puisque les registres de l'Evêché portent à la date du 18 septembre: | |
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‘factae sunt exsequiae praenobilis Dominae Basiliae Genevovae Susannae Deen uxor praenobilis Domin d'Holbach Toparchae De Heeze et Leendt’Ga naar eind(38). Deux ans plus tard, une fondation à perpétuité fut créée à Heeze pour faire célébrer chaque année deux messes solennelles chantées, l'une à la mémoire de François Adam, l'autre à la mémoire de ‘Hoog Edel. Geb. Vrouwe Bazilia Genoveva Suzanne Deen huisvrouw van den Ed. Geb. Heer Paulus Baron de Holbach’Ga naar eind(39). La fondation était alimentée par une rente de 600 florins liégeois aux frais d'un certain Arnoldus der Coningen, de Bree. Cette rente fut éteinte le 20 juillet 1861 avec un montant de 235 florins; mais par acte du vicaire apostolique de Bois-le-Duc et Utrecht, mgr. J. Zwijsen, daté du 29 l'obligation des messes fut confirmée et fondée sur une terre nommée ‘de Belier’, échangée en 1958 contre une autre propriété. Les messes fondées par Holbach ont donc été célébrées pendant deux siècles environ. Depuis le ler janvier la fondation Holbach a officiellement cessé d'exister. Une décision épiscopale du 3 septembre 1968 (No. 1075/68) a réuni en une fondation uniques les anciennes fondations in perpetuum ou ayant plus de quarante années d'existence. Il a été stipulé que chaque année seront chantées en l'église de Heeze deux messes solennelles à la mémoire de tous les bienfaiteurs de ladite église. Ainsi, le souvenir des Holbach est toujours honoré par le clergé catholique de Heeze.... La famille Holbach (François Adam sans doute) fit également don à l'église du village de très beaux ornements liturgiques, richement brodés, dont un porte les armes de la famille, et toujours conservés avec fiertéGa naar eind(40). La succession de l'épouse allait poser quelques problèmes dont les archives du Minutier Central de Paris et de Bois-le-Duc ont conservé la trace. La présence d'un fils mineur, né en 1753, le régime de la communauté de biens exigeaient pour la liquidation de la succession des inventaires desdits biens. J. Lough a trouvé celui des biens sis à Paris mais avoue ne pas avoir trouvé celui des biens sis en HollandeGa naar eind(41). Il suffisait de le chercher à Bois-le-Duc: nous l'y avons trouvé. En fait, il semble qu'il y a eu deux inventaires hollandais. En effet devant les notaires du Châtelet de Paris, la mère de la défunte et tutrice du petit François Paul Nicolas, Suzanne Wetterbourg, veuve de Nicolas Daine révoque chez elle le 2 juillet 1756 la procuration donnée par elle à un certain David van Dijck pour procéder à l'inventaire des biens sis à Heeze, et ce, pour vice de forme. | |
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Par le même acte elle désignait un nouveau procurer pour dresser un nouvel inventaire, Laurens Box, de Heeze. Cette nouvelle procuration fut enregistrée à Heeze le 14 juillet 1756Ga naar eind(42). Un nouvel inventaire, très complet et très détaillé ne comprenant pas moins de 38 pages in folio, fut dressé du 12 au 14 juillet, en présence d'Holbach venu exprès de Paris, de Maria Barbara Haussin, gouvernante au château, et Dirk Wijnhaven, priseur juré, de Bois-le-Duc. Devant les échevins réunis, Holbach contesta à son tour le premier inventaire dressé le ler juin et les pria d'en dresser un nouveauGa naar eind(43). Nous n'entrerons pas ici dans le détail des 95 lots (94 numérotés, mais le no. 51 est compté deux fois) et autres items figurant dans cet inventaire. C'est un document unique pour les amateurs d'ameubl ement puisqu'il énumère en détail tous les objets trouvés et leur utilité. Malheureusement l'inventaire ne détaille pas les 11 tableaux et les 6 cartes géographiques de la salle à manger, les 2 sculptures, les 5 tableaux et le plan de Paris qui décoraient la grande salle, les 37 autres tableaux encadrés sous verre qui se trouvaient dans une chambre derrière ladite salle, 8 autres encore dans la grande chambre au-dessus de la cuisine, 3 autres dans la chambre au-dessus de la salle à manger. Nous ne savons pas non plus quels sujets représentaient les 33 tableaux décorant la bibliothèque, et ceux de 2 autres dans la chambre au-dessus de la bibliothèque, de 2 autres qui se trouvaient dans une chambre voisine. Une chambre au-dessus de la porte du château contenait 2 figures en métal sur pied et 1 tableau. Une deuxième chambre en comptait dix autres. La galerie enfin était décorée de 40 cartes et tableaux. Dans des coffres dont on n'avait pas trouvé les clefs le ler juin, on trouva 6 tapisseries de Bruxelles à sujets guerriers et 1525 livres, la plupart reliés, de tous formats, en latin, français, allemand et néerlandais (article No. 84.) Nous ne pouvons que déplorer cette absence de tout détail intéressant sur les cartes, tableaux, figures et volumes. Leur présence nous aurait permis, avec l'aide de l'inventaire de Paris, plus détaillé heureusement, de reconstituer l'histoire d'une bibliothèque qui comptait en 1789 à la mort de son propriétaire 2956 livres catalogués et celle d'une galerie riche de 93 oeuvres cataloguées. Il est plus que probable que le portrait de François Adam, actuellement conservé au château de Heeze, faisait partie du lot prisé en juillet 1756Ga naar eind(44). Il semble que Paul d'Holbach en ait voulu finir avec Heeze à cette époque. En effet, trois jours après l'inventaire, le 17 | |
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juillet, il comparaît devant les échevins locaux en compagnie de Jan van Oudshoorn de Rotterdam pour leur signifier que le premier vendait au second la seigneurie avec ses bâtiments, terres et droits divers pour la somme de 192.000 florins, somme payable en l'espace de deux ans (soit 555.000 livres de France), et une part du mobilier pour 12.500 florins, le reste du mobilier (malheureusement non précisé) devant être expédié à Paris aux frais de l'acheteurGa naar eind(45). Celui-ci mourut inopinémentale et le 26 février 1757, devant les échevins de Heeze, le secrétaire Paul Eckringa agissant au nom d'Holbach, et Karel Lodewijk van Tielen, au nom de la veuve Oudshoorn déclarèrent que la convention de vente du 17 juillet était annulée; elle fut rayée le 27 avril suivantGa naar eind(46). La résiliation avait d'ailleurs été décidée le 23 décembre 1756 et la veuve paya un dédit de 12.000 livres le 19 juin 1758Ga naar eind(47). Holbach trouva bientôt un nouvel acquéreur. La Cour de Brabant l'autorisa le 2 avril 1759Ga naar eind(48) à vendre sa seigneurie, ce qui fut fait le 14 mai suivant: elle passa aux mains des Tuyll van Serooskerken auxquels le château appartient encore de nos jours. Le tout fut vendu pour 400.000 livres de France versées en obligations de rente à 30/0 sur le comptoir de la généralité des Provinces-UniesGa naar eind(49). Le nouveau propriétaire, Jan van Tuyll van Serooskerken releva sa seigneurie devant la Cour de Brabant le 24 janvier 1760Ga naar eind(50) mais ce n'est qu'en 1775 que le paiement fut achevé. Le 18 novembre de cette année, Holbach et son fils aîné émancipé la même année, donnent décharge de la vente de Heeze à Jacob Costart, ancien bourgmestre de Rotterdam, directeur de la chambre locale de la Compagnie des IndesGa naar eind(51). * * *
A la différence de Voltaire, Holbach n'a jamais fait mention dans ses lettres de ses nombreux voyages et séjours en Hollande entre 1744 et 1760. Aussi est-il fort délicat de vouloir mesurer l'importance de l'impact produit par ses études à Leyde et ses séjours à Heeze. Sans doute l'atmosphère universitaire, un certain protestantisme, le libéralisme économique et politique allaient-ils contribuer à son émancipation intellectuelle et philosophique. Seules les lettres de 1746 à Wilkes soulèvent un coin du voile. En attendant l'édition de la correspondance d'Holbach, à laquelle s'ocupe monsieur H. Sauter de Mayence, qui ne manquera pas de nous révéler de inédits, il faut donc se montrer très réservé dans l'appréciation de cet impact. * * * | |
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RelationsSur les relations entretenues par Holbach avec des Hollandais nous sommes très mal renseignés. Il rest e beaucoup à étudier en la matière. Il faudrait, par exemple, mieux connaître ses relations avec Willem van HogendorpGa naar eind(52). Ce n'est que par le plus grand hasard que nous avons pu mettre la main sur deux lettres échangées entre Holbach et Willem van Haren, traces d'une correspondance s'étendant au moins sur huit annéesGa naar eind(53). Nous ignorons encore où et quand les deux hommes firent connaissance. On peut supposer qu'étudiant à Leyde, Holbach ait entendu parler de van Haren: le bruit suscité par ses poèmes patriotiques remplissait tout le pays. La première lettre, datée du ler février 1753, est écrite de Bruxelles où le poète était ambassadeur. Elle fait état d'une correspondance plus ancienne et que nous ne connaissons pas, de services rendus (expédition de vins), de mondanités et d'une singulière requête. Le poète venait de remanier son Friso paru en 1741 et en projetait une traduction en français, traduction qui dans son esprit devait lui valoir un succès aussi considérable que celui rencontré par la première édition en néerlandais. Mais à qui s'adresser pour trouver un bon traducteur? Certes, une première traduction avait été faite mais il fallait trouver maintenant quelqu'un qui fût capable de la parfaire, car, écrit-il, ‘je ne voudrois pas paroitre en Campagnard a Paris ou je suis sur que ce Poeme trouvera des Lecteurs’. L'autre lettre, une réponse d'Holbach datée du 22 mars 1760, nous apprend que le baron a traduit la célèbre ode de van Haren, Het Menselijk Leven, dont nous connaissons trois éditionsGa naar eind(54), de même que le poème de son ancien condisciple de Leyde, Akenside, intitulé The Pleasures of imagination. Au reste, van Haren avait dû revenir à la charge pour la traduction de son Friso car Holbach s'offre à la revoir, et demandant pour ce faire une ‘traduction Littérale et exacte, faite pour ainsi dire mot à mot, d'après laquelle je partirois, vû que je ne posséde point la langue hollandoise assés sûrement pour ne pas me risquer de me tromper souvent.’ La traduction de Friso ne vit finalement le jour qu'en 1785 et elle était l'oeuvre de Hendrik JansenGa naar eind(55). Enfin, madame de Charrière, née Isabelle van Tuyl van Serooskerken et parente des seigneurs de Heeze, qui prend p. 30 de ses Eclaircissemens relatifs à la publication des Confessions de Rousseau, avec des réflexions sur la réputation, les apologies de mm. Ceruti et d'Holback sur le moment présent | |
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(sl 1789) le parti de Jean-Jacques Rousseau contre Holbach, rencontra celui-ci au moins une fois dans sa vie: ‘Si M. Ceruti a vu M. d'Holback a Contrexeville, je l'ai vu à Plombieres. Il ne m'a point parlé de philosophie anti-Thérésienne, d'homme anti-littérateur, anti-social; mais il m'a dit beaucoup de mal de Rousseau. Les premieres Confessions étoient prêtes à paroître; il m'assura qu'on ne pourroit les lire, tant elles seroient remplies d'horreurs dégoûtantes. Il m'assura de plus, que Rousseau s'étoit tué: &c'est ce qui me surprend aujourd'hui’. Les Confessions ayant vu le jour en 1782, la rencontre de la dame de Charrière et du baron a dû se situer vers 1781-1782. Ce sont les seules relations entretenues par Holbach avec des Hollandais que nous connaissons; il y en eut sans doute d'autres et nous ne désespérons pas de les découvrir un jour. A ce chapitre nous pourrions joindre les relations d'Holbach avec des éditeurs vivant en Hollande. Ici encore, la matière est suffisamment riche pour que l'on consacre un volume entier à cette délicate question. Dans notre Bibliographie d'Holbach nous avons tenté d'identifier les éditions hollandaises de ses oeuvres en nous référant à des éléments extérieurs (confidences de Diderot, Voltaire, du baronGa naar eind(56), allusions dans la presse, documents de police) et a des éléments intérieurs (caractères typographiques, mise en page, typographie, papiers et filigranes). Nous avons pu établir ainsi que la plupart des écrits du baron, qu'il s'agisse d'oeuvres originales, traduites, adaptées, ont été i mprimés d'abord chez Marc-Michel Rey d'Amsterdam sous des marques fausses. Rey n'a pas hésité cependant de mettre son nom sur l'édition de l'Antiquité dévoilée de Boulanger revue par Holbach et ses amis, sur celles de l'Ethocratie et de La Morale universelle. Si les Recherches sur l'origine du despotisme oriental de Boulanger et le Christianisme dévoilé échappent à cette catégorie d'éditions originales, ils ont par la suite été intégrés dans le vaste mouvement des innombrables réimpressions de Rey. Nous songeons d'ailleurs à écrire un jour l'histoire des publications philosophiques de Marc-Michel Rey: les écrits d'Holbach y avoisineront ceux de Voltaire, Diderot et Rousseau pour ne citer que les principaux. Nous n'avons pu jusqu'à maintenant contrôler le propos de van seypesteynGa naar eind(57) selon lequel les imprimeurs d'Amsterdam (Rey?) auraient appelé Holbach ‘la pluie d'or mystérieuse’ parce qu'il payait largement ses publications entreprises à compte d'auteur. * * * | |
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BibliothequeUne troisième source d'informations sur la Hollande dont pouvait disposer Holbach, était sa très riche bibliothèque dont le Catalogue des livres (Paris 1789) mérite un examen détaillé. Au chapitre religieux, nous noterons les éditions bibliques de J. Leusden (nos. 1, 2, 49) et les classiques de la théologie néerlandaise: Le Monde enchanté de B. Bekker (Amsterdam 1694, No. 630), le Traité de la vérité de la religion chrétienne de H. Grotius (Amsterdam 1728, No. 145), L'Existence de Dieu de B. Nieuwentydt (Paris 1725, No. 165), le De Veritate religionis christianae et l'Historia inquisitionis de P. Limborch (Bâle 1740, No. 175; Amsterdam 1692, No. 2086), le De Theologia gentili de G.J. Vossius (Amsterdam 1668, No. 255), le De Fornicatione cavenda admonitio d'A. Beverland (sl 1698, No. 235), les Dissertationes de origine ac progressu idolatriae & superstitionum d'A. van Dale (Amsterdam 1696, No. 2053) et la Palestina ex monumentis veteribus illustrata d'A. Reeland (Utrecht 1714, No. 2098). Pour autant que l'on veuille bien considérer Spinoza comme Hollandais à part entiere, il faut évidemment mentionner la présence de son fameux Tractatus theologico-politicus (Hambourg 1670, No. 236). Sur l'histoire des Provinces-Unies, Holbach est fort bien documenté par une série de douze livres historiques ou descriptifs: Les Délices de la Hollande (La Haye 1710, No. 2409), l'Histoire de la guerre des Pays-Bas par F. Strada (Bruxelles 1727-1739, No. 2410), l'Histoire abrégée de la réformation des Pays-Bas de G. Brandt (La Haye 1726, No. 2411), l'Histoire des Provinces-Unies de J. Le Clerc (Amsterdam 1723-1728, No. 2412), l'Histoire générale des Provinces-Unies (Paris 1757, No. 2413, le Tableau de l'histoire générale des Provinces-Unies,Ga naar voetnoot/_ (La Haye 1719, No. 2415), les Mémoires d'A. de Gramont, comte de Guiche (Utrecht 1744, No. 2416) et l'Avis fidele aux véritables Hollandois contenant ce qui s'est passé dans les villages de Bodegrave (sl 1673, No. 2417) illustré par Romeyn de Hooge. Sur le plan descriptif on notera la présence d'ouvrages sans doute utilisés par l'étudiant de Leyde: Les Délices de Leide (Leyde 1712, No. 2418) et Les Délices de la campagne à l'entour de la ville de Leide de G. Goris (Leyde 1712, No. 2419). Signalons aussi les Travels through Holland, Germany de J. Blainville (Dublin 1743, No. 1918). | |
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Il faut également not er la présence d'ouvrages dûs à des historiens néerlandais. Nous citerons entre autres les Inscriptiones antiquae totius orbis romani de J.G. Graevius (Amsterdam 1707, No. 2625), les Recherches philosophiques sur les Egyptiens et les Chinois de C. de Pauw (Berlin 1773, No. 2106) de même que ses Recherches philosophiques sur les Américains (Berlin 1768, No. 2564). Nous citerons aussi l'Aegyptiarum originum et temporum antiquissimorum investigatio de J. Perizonius (Leyde 1711, No. 2105), le Lexicon antiquitatum romanorum de S. Pitiscus (Leuwaarde 1713, No. 2612), les Antiquitates sacrae veterum Hebraeorum d'A. Reeland (Utrecht 1708, No. 2606) et le Novus thesaurus antiquitatum romanorum congestus d'A.H. Sallengré (La Haye 1716-1719, No. 2614). Pour les ouvrages juridiques, la première place revient évidemment à H. Grotius dont Holbach possede le De Jure belli ac pacis (Amsterdam 1735, No. 295) et la traduction française par Barbeyrac (Amsterdam 1724, No. 296). Il faut citer aussi l'ouvrage classique d'A. van Wicquefort, L'Ambassadeur et ses fonctions (Cologne 1690, No. 556) à côté d'ouvrages moins connus de P.R. Vitriarius: Institutiones juris naturae & gentium (Leyde 1734, No. 289), ou de C. van Bynkershoek, Observationum juris romani libri IV (Leyde 1749, No. 311), ou de F.W. Pestel, dont il possede la traduction française des Fundamenta (Utrecht 1774, No. 287). Il faudrait aussi mentionner l'édition des Leges atticae par P. Wesseling (Leyde 1742, No. 303) et celle du Corpus juris civilis par S. van Leeuwen (Amsterdam 1663, No. 308). Pour la littérature de voyages nous retiendrons L'Ambassade de la compagnie orientale des Provinces Unies vers l'empereur de la Chine (Leyde 1665, No. 2548), les Ambassades de la compagnie des Indes orientales des Provinces Unies vers les empereurs du Japon (Amsterdam 1680, No. 2554) et le Recueil des voyages qui ont servi à l'établissement et aux progrès de la compagnie des Indes orientales formée dans les Pays-Bas (Amsterdam 1725, No. 1895). Nous y joindrons une Description historique, géographique &c de la colonie de Surinam (Amsterdam 1769, No. 2582). Holbach possède également quelques récits de voyageurs hollandais: le Voyage au Levant de C. de Bruin (Delft 1700, No. 1925), Les Voyages en Moscovie, en Tartarie, en Perse de J. Struys (Amsterdam 1681, No. 1926) et le VoiageGa naar voetnoot/_ | |
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aux Indes orientales de W. Schouten (Amsterdam 1707, No. 1937). Dans le chapitre consacré aux sciences nous relèverons les Elémens de physique (Paris 1747, No.642) et les Oeuvres philosophiques et mathématiques (Amsterdam 1774, No. 958) de W. 's Gravesande, les Institutiones physicae de P. van Musschenbroek (Leyde 1748, No. 643), les Elementa chemiae (Paris 1733, No. 900) et leur traduction (Amsterdam 1752, No. 901) d'H. Boerhaave, la célèbre Biblia naturae (Leyde 1737-1738) No. 812) et l'Histoire générale des insectes (Utrecht 1682, No. 813) de J. Swammerdam. Ajoutons-y le Thesaurus imaginum piscium de G.E. Rumphius (La Haye 1739, No. 806). Sur le plan littéraire enfin, il faut citer d'abord Erasme dont Holbach possède la Vie écrite par J. Levesque de Burigny (Paris 1757, No. 270) et de nombreux ouvrages: les Opera omnia (Amsterdam 1743, No. 1692), l'Eloge de la folie (sl 1751, No. 1646), l'Adagiorum epitome (Amsterdam 1650, No. 1664), l'Epigrammatum delectus (Paris 1659, No. 1664), les Colloquia en trois éditions différentes Leyde 1636, Amsterdam 1650, Delft 1729, nos. 1814-1816) et en traduction (Leyde 1720, No. 1817). Parmi les autres écrivains néo-latins il faut citer D. Heinsius dont Holbach possède deux éditions des Poematum (Leyde 1621, Amsterdam 1649, Nos. 1361, 1363), D. Baudius et ses Epistolae & orationes (Amsterdam 1660, No. 1693) et J. Tollius dont ou trouve les Epistolae itinerariae (Amsterdam 1700, No. 1840). Pour les oeuvres en langue française nous citerons l'Histoire de Pierre de Montmaur d'A.H. Sallengré (La Haye 1715, No. 1639) et les Oeuvres diverses de J. van Effen (Amsterdam 1742, No. 1717). Les travaux de philologues néerlandais sont légion. Nous ne pouvons citer ici les dizaines d'éditions d'auteurs classiques faites par les Heinsius, les van Goens, les Havercamp, les Gronovius, les Perizonius, les Vossius, les Hemsterhuis, les Thysius, les Graevius, les Burman, les Grotius, les Scaliger et tant d'autres. La simple nomenclature des seuls noms d'auteurs remplirait à elle seule plusieurs pages: il faut y renoncer dans le cadre de la présente étude. Nous pouvons bien citer des travaux originaux de philologues néerlandais: la Dissertatio de Brittenbergo de H. Cannegieter (La Haye 1734, No. 1840), les Antiquitates homericae d'E. Feithius (Argentotrati 1743, No. 1171), les Doctrinae particularum linguae graecae d'H. Hoogeveen (sl 1769, No. 10440), les Horapolli nis hieroglyphica de J.C. de Pauw (Utrecht 1727, No. 1680), le Lexicon antiquitatum romanorum de S. Pitiscus (Leuwaarde 1713, No. 2612), des Dissertationes | |
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miscellanae (Utrecht 1716, No. 1696) d'A. Reeland, le Lexicon graeco-latinum de C. Schrevelius (Amsterdam 1752, No. 1053) et la Nova via docendi graeca de J. Verwey (Gouda 1702, No. 1038). Enfin, pour rafraîchir sa connaissance de la langue néerlandaise, attestée par la correspondance avec van Haren, Holbach disposait du Dictionnaire flamand & françois de F. Halma (Amsterdam 1727, No. 1093). Nous ne savons pas si à l'instar de Voltaire par exemple, Holbach avait l'habitude d'annoter ses livres. La dispersion de sa bibliothèque en 1789 a évidemment anéanti tout espoir de retrouver un jour un volume ayant appartenu à et annoté par Holbach. * * * | |
Connaissances & impressionsLe moment est venu de dresser le bilan des connaissances et impressions hollandaises d'Holbach. Nous savons qu'il disposait d'atouts remarquables: séjours, études, voyages, relations et correspondances, bibliothèque riche en ouvrages consacrés à la Hollande ou écrits par des Hollandais. Ses citations d'auteurs sont rares. Le De Veritate de Limborch, qu'il a en bibliothèque est cité en note dans l'Histoire critique de Jésus-Christ (slnd 1770, p. 22), tout comme le De Natali Jesu Christi d'A. Bynaeus dans le Tableau des saints (Londres 1770, i. 115, 117) et le Censorius de die natali d'Erophile édité par Havercamp dans La Morale universelle (Amsterdam 1776, ii. 237). Erasme est cité deux fois sans précision dans le Tableau des saints (i. 146, ii. 57-58); ses Apophtegmess sont cités trois fois dans le Système social (Londres 1773, i. 115, ii. 85-86, iii. 37) et La Morale universelle (ii. 10). Aucune appréciation cependant pour les écrits du célèbre humaniste. Il n'en est pas de même pour Grotius qualifié de ‘célèbre’ dans l'Ethocratie (Amsterdam 1776, p. 227), cité en exemple pour son interprétation de la Genèse (ii. 5-6) dans le Système de la nature (Londres 1770, i. 26) mais déprécié en tant que justificateur de l'esprit de conquête et de ses conséquences dans l'Essai sur les préjugés (Londres 1770, p. 110). Citons encore des références dans la Théologie portative (Londres 1768, article ‘Samuel’), le Tableau des saints (ii. 2. et le Système | |
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social (iii. 161). Holbach n'apprécie que modérément les travaux de l'abbé Cornelis de Pauw. Il recommande ses Recherches philosophiques sur les Américains lues ‘avec beaucoup d'avidité’ à l'abbé Galiani le 3 juin 1770Ga naar eind(58) et s'ingénie à lui en procurer un exemplaire. Cependant, un an plus tard, il nuancera cet avis en reprochant à ce livre ‘très intéressant’ de ‘traiter de dégénération ce qui dans la vie n'est que défaut de développement’. Tournons-nous maintenant vers l'histoire, la politique et la religion, matières privilégiées dans l'oeuvre d'Holbach. Par deux fois il a signalé les conséquences heureuses de la révolution nationale du XVIe siècle contre la tyrannie espagnole. D'abord dans le dernier chapitre du Militaire philosophe (Londres 1768, p. 174) où il a ce propos sur la conduite de Philippe II: ‘Philippe Second, son cruel fils, a-t-il mieux réussi quand il voulut ramener les Pays-Bas sous le joug de ses Prêtres? Il a perdu par ce moyen les plus courageux & les plus industrieux de ses sujets; les horribles cruautés de son Duc d'Albe n'ont fait que consolider le Calvinisme & fait naître des cendres des bûchers qui avoient brûlé des hérétiques, une République florissante capable d'en impos er à ses anciens maîtres’. Dans le Système social (ii. 31), citant les Idées républicaines de Voltaire, il montre que le revenu actuel de la seule province de Hollande est cent fois supérieur à ce-lui de toutes les provinces sous Philippe II, pour aboutir à cette conclusion que le régime républicain est plus avantageux. Conséquences heureuses donc, mais aussi un exemple heureux du danger des républiques aristocratiques cité dans La Politique naturelle (Londres 1773, ii. 156): la Hollande et Venise offrent des ‘exemples frappants des effets que peuvent produire le Commerce & l'Industrie dans des Nations que la Nature n'a point favorisées. Mais par leur décadence & leur chûte, ces mêmes Nations nous prouvent qu'une Puissance, fondée uniquement sur les richesses, ne peut être que précaire’. Dans le même ouvrage les Provinces-Unies sont alignées sur la Ligue achéenne et la Confédération helvétique pour illustrer le principe que l'union des peuples est la garantie de leur force et de leur victoire (i. 59). Au reste, qu'attendent les autres nations civilisées pour imiter cet exemple d'émancipation? C'est la question qu'Holbach pose dans le Système social (iii. 10-11, 162). Ces propos nous amènent naturellement à citer les appréciations du caractère hollandais: libres comme les Anglais, les Hollandais sont également très propres dit-il dans l'Ethocratie (p. 194). | |
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Mais dans l'Essai sur les préjugés (p. 53) il souligne qu'ils ne se sont pas entièrement débarassés de leurs préjugés religieux, ce qui lui fait dire dans le Tableau des saints (ii. 272) que le vice est moins apparent en Hollande que dans les pays catholiques. Enfin, dans le même ordre de comparaison, Holbach remarque dans Le Christianisme dévoilé (Londres 1767, p. 179) que le trait de caractère prédominant des Hollandais est l'esprit de commerce dont ils profitent au détriment des catholiques, au point, dit-il quelques pages plus loin (p. 225) qu'ils deviennent des ‘Chrétiens tiedes & lâches, qui préferent la prospérité de l'Etat & du commerce aux intérêts de la religion’. Religion et politique vont de pair: c'est le propos de tous les philosophes du temps. Holbach n'a guère parlé des institutions si ce n'est que pour signer un très banal article ‘Stadhouder’ dans l'Encyclopédie (Neuchâtel 1765, xv. 494-495), article dénué de tout jugement, et souligner par un exemple classique (le maître qui bat son domestique sera puni) l'égalité des conditions en Hollande comme en Angleterre dans l'Ethocratie (p. 218). Egalité légale qui ne signifie pas nécessairement égalité de fait. La tolérance hollandaise si vantée, a eu à souffrir des luttes cruelles entre Gomaristes et Arminiens et cet exemple cher à tous les philosophes du XVIIIe siècle apparaft dans plusieurs écrits du baron: Le Christianisme dévoilé (p. 232), De l'intolérance (Londres 1769, p. 155), le Système de la nature (ii. 352), le Tableau des saints (ii. 200) et l'Histoire critique de Jésus-Christ (p. 388). Voilà les seules allusions que l'on trouve à la Hollande dans l'oeuvre d'Holbach. Aucun propos sur le pays, les villes, les beaux-arts, les sciences, les lettres. On est donc loin d'une vue aussi complète que celle que l'on peuttrouver chez Voltaire ou Diderot. Ces lacunes peuvent être expliquées de diverses façons: tourné tout entier vers la contestation totale, Holbach ne s'intéresse guère aux sujets que nous venons de nommer. Ou bien, la Hollande, pays protestant et libéral ne présente pas autant d'exemples que les pays catholiques pour illustrer la collusion du trône et de l'autel et ses effets pernicieux. Il est vrai que le baron a quelque fois choisi des exemples hollandais dans cette perspective mais alors comme modèle repoussoir. On peut dire aussi que philosophe engagé, Holbach raisonne plus qu'il ne raconte. Son oeuvre est plus abstraite que narrative ou amusante et son raisonnement ne | |
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s'embarrasse pas toujours d'anecdotes, de choses vues, vécues. En conclusion, l'impact hollandais sur la pensée d'Holbach ne se révèle pas d'une manière nette et détaillé. Peut-être faut-il le chercher ailleurs, dans les profondeurs d'un caractère, d'une conscience qui auraient enregistré des faits et des situations à des moments donnés et dont l'effet ne se serait fait sentir que bien plus tard et d'une manière très particulière. Mais chercher à délimiter avec précision de telles influences, expliquer leur formation et leur expression par lapsycho-genèse ou plutôt la sociogenèse, c'est aborder un sujet tout à fait nouveau, différent. C'est là une matière à des recherches d'une nature différentes que celles dont nous venons d'analyser les résultats et pour lesquelles l'heure, en attendant une meilleure connaissance de la vie et de l'oeuvre du philosophe, n'a pas encore sonné. Jeroom VERCRUYSSE
Vrije Universiteit Brussel |
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