Dietsche Warande. Nieuwe reeks 2. Jaargang 2
(1889)– [tijdschrift] Dietsche Warande– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Bijlagen.
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Dans les gymnases on formait la jeunesse à tous les arts de la paix et de la guerre, et les athlètes ainsi que tous les hommes faits venaient s'y livrer aux luttes et aux jeux qui constituaient le goût dominant de cette nation sobre et guerrière. Les olympiques, ces jeux nationaux établis, croyait-on, par Hercule, réunissaient dans une union parfaite tous les Grecs, suspendant les hostilités et servant de point de ralliement à tout ce peuple animé d'une 'émulation et d'un désir de victoire facile à comprendre, puisque le vainqueur était fêté à l'égal des dieux. Des prix de beauté étaient décernés chaque année à Lesbos, à Ténélos et à Sparte et les jeunes gens et les jeunes filles y concouraient dans une nudité complète. Hélène, la plus belle des jeunes Lacédémoniennes, y obtint le prix aux applaudissements frénétiques d'une foule en délire et plus de cent prétendants, tous princes, se présentèrent pour obtenir sa main. Enfin les danseuses thessaliennes dansaient nues aux banquets des riches, et l'art de la danse jouit en Grèce d'une telle faveur, que les plus doctes philosophes ne craignirent pas de dire qu'ils la considéraient comme nécessaire pour donner de la grace aux mouvements du corps et qu'il fallait y penser avant même que de songer à orner l'esprit. Les artistes avaient donc constamment sous les yeux des modêles d'une beauté parfaite dans les poses les plus diverses, en groupes gracieux et animés par le désir de briller et de remporter la victoire si vivement disputée. En copiant ce qui frappa sans cesse leurs regards, ils créêrent ceschets-d'oeuvre de marbre, qui, après plus de 2000 ans sont encore considérés comme des modèles inimitables de perfection plastique et de grâce. De notre côté sommes-nous logiques en perpétuant ces principes du nu dans notre statuaire moderne? Il est permis d'en douter; car, contrairement aux Grecs, notre religion, nos moeurs et nos lois proscrivent la nudité et nous qualifions d'immoral le moindre écart à ce principe. L'individu qui aurait la fantaisie de se promener en athlête dans nos rues, serait empoigné comme un malfaiteur, jeté en prison et condamné pour outrage aux moeurs. Notre climat en outre serait peu propice à cette simplicité par trop primitive de parure, et ce n'est qu'à renfort de chaudes enveloppes que nous parvenons à déjouer les perfidies de Borée. L'homme du Nord a une répugnance invincible et certes bien naturelle pour le nu, puisque l'on peut dire qu'il naît, vit et meurt habillé. Ses vêtements font en quelque sorte partie intégrante de son individu, et il applique tout son art à donner à cette partie si importante de son être, les contours les plus flatteurs et les plus en harmonie avec les caprices de son goût. | |
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Inutile de dire qu'au point de vue de la religion chrétienne le nu est considéré comme une impudicité. Le christianisme- à son aurore se leva pur et immatériel comme un météore, écrasant sous ses divins préceptes le vieil ordre social du paganisme et anéantissant pour toujours une religion basée sur des fondements d'argile, sans morale et sans vertu, par conséquent incapable de résister au flot des passions humaines. L'âme sacrifiée jusqu'alors au corps s'éleva tout à coup jusqu'à la divinité. L'homme comprit qu'en le créant, Dieu n'avait pas eu pour but unique de le faire jouir des biens terrestres; mais qu'il était avant tout spirituel et que l'étincelle divine dont il était animé, devait être la préoccupation première de son existence. L'Evangile nous apprit à dominer nos passions et à triompher de notre être matériel. Il nous enseigna la pudeur et la décence, et les sublimes préceptes de Jésus-Christ enthousiasmèrent l'huma nité et jetèrent au loin des racines profondes et inébranlables. Pendant le moyen-âge la foi fut vive et les moeurs austères; le nu fut pour ainsi dire complètement exclu et les sujets religieux inspirèrent le génie de nos grands artistes. La renaissance fut un retour d'admiration pour l'art antique et on en revint à copier et à imiter ces chefs-d'oeuvre d'un autre age. Depuis, l'art statuaire vit d'imitation et il reproduit fidèlement des Vénus et des Mercure, sans parvenir à se frayer une route nouvelle qui rompe avec les traditions d'un passé incontestablement glorieux, mais qui toutefois-est en contradiction flagrante avec notre civilisation moderne. Disons en terminant que le sculpteur grec fut logique lorsqu'il représenta l'Olympe sans voiles, ainsi que le seraient les nègres de l'Afrique s'ils avaient un art statuaire; mais que nous, habitants du Nord et chrétiens, nous ne le sommes pas en les imitant, puisque la nudité est un outrage à nos moeurs et à nos lois. Conservons dans nos musées ces remarquables monuments de l'antiquité païenne, mais rompons avec la routine qui nous égare dans une voie fausse et excluons de nos rues et de nos places publiques les nudités qui 'les souillent.
Ctesse Marie Nahuys. | |
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