Dietsche Warande. Nieuwe reeks 2. Jaargang 1
(1887-1888)– [tijdschrift] Dietsche Warande– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Chronique des expositions industrielles.
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d'Athènes); constatons en passant que le plâtre rend bien mal la richesse des mausolées de Charles le Téméraire et de Marie de Bourgogne et qu'à défaut de pouvoir, faute de temps ou d'argent, se rendre à Florence, il est toutefois agréable de se faire une idée des tombeaux de Julien et de Laurent de Médicis. Saluons le tabernacle de Léau et pénétrons par la porte du fond, dans le compartiment de l'exposition rétrospective. Ceux qui ont vu l'exposition nationale de l'art ancien à Bruxelles en 1880, se rappellent le succès mérité qu'elle obtint. Après avoir fait quelques pas dans l'exposition de 1888, on est convaincu que le succès de celle-ci ne sera pas moindre. Gardons-nous toutefois de comparer: les éléments sont différents; l'exposition de 1880 était uniquement nationale; aujourd'hui, bien que notre pays ait fourni un contingent très considérable et des plus remarquables, l'étranger nous a envoyé des collections de tout premier ordre pour des catégories d'objets où nous étions bien peu fournis en 1880; citons par exemple les miniatures, les émaux, les sceptres chinois, les bronzes etc.; par contre il y a moins d'armes, de porcelaines et faïences, de dentelles; de plus la commission semble s'être attachée à écarter le dejà vu. Ne comparons donc pas, mais regardons et admirons, car nous n'aurons pas souvent occasion meilleure. Voici d'abord tout autour de la salle principale une collection de tapisseries; cette décoration donne à ce hall un air de fête et de splendeur des plus caractéristiques. Le long de la paroi de gauche, de spacieuses armoires contiennent des faïences, des porcelaines, des majoliques et des argenteries anciennes; puis viennent des objets d'archéologie chrétienne: métaux précieux transformés en statues, calices, encensoirs, chandeliers, croix, reliquaires, provenant des églises de St-Pierre et de St-Jacques à Louvain, de N.-D. de Tournay, etc. On voit que le savant chanoine Reusens a réuni des splendeurs, mais ce n'est rien encore: en nous retournant nous voici devant les 19 pièces d'orfévrerie du frère Hugo, le grand artiste du moyen-age, et qui appartiennent aux soeurs de N.-D. à Namur. Tout près de là, le Trésor de N.-D. de Tongres, la croix de l'église de Walcourt, des reliquaires; au milieu de ces merveilles, une série de lutrins en cuivre, faisant cercle autour du célèbre et monumental chandelier pascal de Léau, semble attendre que les chanteurs viennent y prendre place pour nous faire entendre quelque oeuvre palestrinienne. Après avoir jeté un coup d'oeil sur des sculptures, des clefs, des coffrets, nous rencontrons une collection bizarre mais intéressante de tissus coptes de la Haute-Egypte, puis deux châsses remarquables, l'une appartenant à l'église St-Hadelin à Visé, l'autre, plus riche, appartenant au Duc de Beaufort. Au fond de la grande salle sont installées les collections particulièrement curieuses relatives aux anciennes parures depuis le 1er siècle de notre ère jusqu'à Charlemagne: bagues, pendants d'oreilles, colliers; dans la formation de ces derniers intervien- | |
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nent l'ambre, le verre, la céramique. Les boucles en fer revêtues d'argent, provenant d'un cimetière de la province de Namur, les bijoux gallo-romains trouvés à Marilles et appartenant a Mr L. d'Udekem de Guertechin attirent l'attention, les premiers par leur étrangeté, les seconds par leurs émaux et la qualité de leur or, celui-ci est à peu près vierge et, faute d'alliage, manque de solidité. Quel éclat remarquable présentent encore ces émaux des premiers siècles: quelques uns sont fort bien conservés après 1700 ans de séjour dans la terre. En revenant sur nos pas nous trouvons les missels aux riches couvertures, les manuscrits enluminés, les collections Edward Joseph de Londres, Odiot, de Chabières et Mohl, de Paris, Bon von Oppenheim, de Cologne; puis après avoir revu la croix de Walcourt, le tryptique de Ste Croix à Liége et ce curieux groupe, appartenant à la cathédrale de St-Paul à Liége, représentant un donateur et son patron, nous arrivons à une série d'objets moins esthétiques mais d'une réelle utilité, nous voulons parler des couteaux, cuillers et fourchettes. Que de formes bizarres, mais aussi que de dessins élégants, dans les couteaux surtout. Les cuillers ont en général la forme arrondie, comme celles dont se servent les petits enfants; les fourchettes ont souvent deux dents, parfois trois et leur longueur'est très variable; nous en avons vu une seule à quatre dents, c'est une fourchette en fer à manche de bois. Les matières les plus diverses interviennent dans la fabrication des manches: argent, ivoire, bois, verre, cornaline, cuivre émaillé, fer, porcelaine. A signaler une fourchette en verre à trois dents dont l'une est cassée, ce qui n'est guère étonnant, et aussi une fourchette, une cuiller et un couteau en porcelaine de l'an 1695, portant les armes du prince J. Sulkowsky; le dessin et les émaux des armoiries sont des plus remarquables. Après avoir examiné les spécimens si curieux de l'art préhistorique, rapportés d'Espagne par MM. H. et L. Siret, nos collègues de l'Ecole de Génie civil de Louvain, quittons la galerie principale pour nous rendre dans les annexes de droite où nous appelle une salle flamande avec sa cheminée de cuisine, ses armoires, tables, meubles de toute espèce depuis les rouets jusqu'à la petite chaise d'enfant et au berceau en cuivre repoussé. Dans un coin, une couronne garnie de ses crocs pour suspendre la viande, mais au lieu d'être un ustensile banal, c'est une oeuvre d'art, ornée de fleurs battues au marteau; plus loin, un porte-essuie-mains garni d'un vieux tissu aux deux aigles, un moulin à café, des assiettes avec vue du château de Freyr etc. La collection van den Corput a largement contribué à l'ornementation de cette salle des plus intéressantes; avant de la quitter, signalons le très curieux coffre en cuir repoussé du XVe siècle appartenant au commandant Lambert. Les salles suivantes ne sont pas entièrement achevées: on voit que le dernier coup d'oeil des organisateurs doit encore passer par là. Mais déjà les objets curieux et rares les remplissent: meubles flamands et autres de divers styles, notamment des armoires vitrées, en style | |
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Louis XV; émaux de Limoges, envois de M. Malfait, objets de la collection Cardon, du trésor de l'église de St-Trond, tout se réunit pour charmer les regards et stimuler l'attention des amateurs. Il y a aussi des objets amusants, telles les curieuses tablettes en ivoire chargées de cire rouge, dont les couvertures et l'étui sont ornés de sujets galants et naïfs. Ceux qu'intéresse l'histoire de nos vieilles gildes flamandes verront avec plaisir les colliers et décorations des présidents et des rois de tirs. La Campine anversoise se distingue ici: elle a envoyé les trophées de Rethy, de Casterlé, de Turnhout, d'Olmen et autres lieux. Devaient-ils être fiers et glorieux ce Verstappen qui fut roi du tir ‘van 't jaer 1699 tot 't jaer 1710,’ et ce prince de la Tour et Taxis qui fut vainqueur du tir ‘à l'âge de 12 ans et 4 1/2 mois.’ Dans d'autres vitrines se trouvent les colliers de la gilde des arbalétriers et de la gilde des carabiniers de Nivelles, (ce dernier donné par Charles-Quint), de la gilde de St-Jacques à Louvain, tous ornés de l'oiseau couronné, et un collier superbe aux armes de la famille Poose, appartenant au comte Van der Dilft. Mousquets, dagues, épées, poignards, cuirasses diverses forment un contingent très apprécié, notamment certaines armes italiennes d'un mérite particulier. Près des armoires qui les renferment nous trouvons divers scribans très intéressants, parmi lesquels nous citerons ceux du Prince Charles de Ligne et du Bon de Brocqueville. En fait d'objets spéciaux remarquons le coffret donné par Louis XV au Cte de Mercy Argenteau le jour du mariage du Dauphin avec Marie-Antoinette. Ce coffret a renfermé un service à dessert en on Signalons le siège du cardinal de Granvelle: la tapisserie porte le nom, les titres et les armoiries du prélat brodés sur le fond et les bras, avec la devise ‘Durate’ et la date 1561. N'oublions pas de regarder les verres de Venise, les verres flamands et autres, les tabatières, les miniatures et rentrons dans le hall principal. Deux vases de Chine nous arrêtent autant par leur hauteui que par leur décor, mais nous ne pouvons que regretter la perte d'un des couvercles et surtout son remplacement par un couvercle faux qui, au lieu de porter une chimère, comme son voisin, se termine par un vulgaire bouton en forme d'artichaut. Tout en regardant des appliques en faïence de Rouen, nous apercevons plus loin les costumes anciens de la collection Gilbert: habits, vestes, gilets brodés de divers genres sont artistement disposés pour faire valoir leur riche ornementation. Quelques-uns de ces vêtements sont vraiment surchargés de dessins aux couleurs tropvoyantes, mais d'autres sont de bon goût et étaient certainement d'unporter plus distingué que notre vulgaire habit noir. M. Ed. Joseph de Londres expose une superbe collection de miniatures, dont plusieurs entourées de perles, de diamants, d'émeraudes, de rubis. Tous ces portraits ont un air de famille qui tient | |
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au procédé lui-même; les teintes et les contours sont en général adoucis, les visages ont une expression gracieuse et l'on sent que beaucoup sont embellis ou tout au moins corrigés dans ce qu'ils pouvaient avoir de défectueux; en somme il y a là beaucoup de dessin de convention et surtout de mièvrerie, mais combien la touche est douce et flatteuse et comme on comprend l'agrément de posséder ces délicats et charmants souvenirs! Les boîtes et bonbonnières de M. André de Paris nous offrent de bien jolis spécimens d'un art que remplacent trop souvent aujourd'hui la banalité et la pacotille. A étudier aussi la belle collection de montres anciennes, léguée à l'Etat par feu le Marquis de Rodes. Dans une annexe latérale se trouvent des dentelles, des chasubles, des étoffes précieuses et la collection si originale des sceptres chino envoyés par M. Gasnault de Paris. Nous remarquons aussi de belles porcelaines de Chine, des scribans en laque de Chine..... Bien que la voiture ancienne du style Louis XV exposée par M. Handelaar tienne beaucoup de place, et qu'elle présente un réel intérêt de curiosité, l'ensemble en est plus encombrant qu'attrayant. Pour terminer jetons un coup d'oeil sur quelques instruments de musique, violons et autres et sur les éventails. N'oublions pas quelques belles sculptures, notamment le Christ sculpté par Duquesnoy ‘il flamingo’ comme le porte l'inscription, et nous aurons terminé l'examen rapide de cette belle exposition. A la suite de l'exposition de 1880 parut un ouvrage intitulé: ‘L'art belge à l'Exposition de 1880.’ Des archéologues et des artistes collaborèrent à cette oeuvre qui restera un souvenir intéressant et durable de cette exposition. Malgré l'aléa de ce genre de publications au point de vue financier, espérons que cette fois aussi le burin et la chromolithographie reproduiront les principaux objets d'art exposés. Ce serait le couronnement d'une entreprise qui fait le plus grand honneur à ses savants et dévoués organisateurs.
15 Juillet 1888. Bon A. de Fierlant, ingénieur. | |
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