Dietsche Warande. Jaargang 9
(1871)– [tijdschrift] Dietsche Warande– Auteursrechtvrij
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[Franse bijlage]Bulletin périodique de la ‘Dietsche Warande’.
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Au commencement de ce siècle (je ne regrette pas trop que je doive renoncer, pour deux minutes, à mon rôle de témoin oculaire) nous avions, ici à Amsterdam, un grand acteur, nommé Andries Snoek, qui a été vivement applaudi par Talma. En 1818 notre bonne population, se remettant un peu en haleine, après les ovations interminables dont elle venait de célébrer le retour des ‘Bataves’ à l'indépendance, - il y eut des moments de trève dans l'adoration exclusive du système monarchique, qu'on venait de remettre en honneur sur cette terre républicaine. Snoek se prêtait avec son talent hors-ligne à la représentation de la tragédie de Vondel, Gijsbreght van Aemstel, narration magnifique, dont un des anciens Seigneurs de notre ville et de ses environs était le héros, mais laquelle, au fond, avait la destination de chanter les grandeurs du système aristocratique, et de donner tantôt une allégorie, tantôt une prophétie délicate, mais non équivoque, de la puissance des bourgmestres d'Amsterdam. Leur concitoyen le grand poëte et critique Willem Bilderdijk, quelque opposée que fût la tendance de Gijsbreght van Aemstel à son système politique et à ses vues historiques, qualifie le poëme de ‘chef-d'oeuvre du plus grand poëte’. La voix du peuple du reste à bien confirmé cet oracle du druide. Depuis 1638 la tragédie de Vondel s'est maintenue sur la scène d'Amsterdam; et encore aujour-d'hui on la joue annuellement à l'occasion des fêtes de Noël. Le poëte amsterdammois Cornelis Loots, dont le lyrisme énergique et colorié ne le cède en rien à celui de Bilderdijk, s'est associé à Snoek, pour l'organisation d'une fête, où l'on a proclamé, dans les termes les plus touchants, Joost vanden Vondel le prince des poëtes néerlandais. - En 1854 la grande société amsterdammoise des Beaux-Arts Arti et Amicitiae, avec le concours des musiciens, a donné une fête splendide, pour célébrer le 200me anniversaire du jour où Vondel fût couronné de lauriers par le gilde de St Luc. Le poëte amsterdammois Jacob van Lennep, qui venait d'entreprendre la première publication intégrale des oeuvres de Vondel, accompagnée de notices biographiques et de commentaires littéraires, présidait à cette fête. - Le 24 Septembre 1860 un savant d'Amsterdam, le regretté Bakhuizen van den Brink, assista, à Rotterdam, à l'inauguration de la statue de Tollens et, tout en reconnaissant le mérite de ce poëte né aux bords de la Meuse, il faisait entrevoir l'inconvenance, qu'il y avait eu | |
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pour tous les Pays-Bas, de ne pas encore avoir erigé de monument pour Vondel, qui dépasse de la tête tous les poëtes néerlandais venus après lui, à l'exception du seul Bilderdijk. Cette parole trouva un écho dans bien des coeurs et quelques jours après M. Van Lennep reçut une invitation de plusieurs littérateurs, pour se mettre à la tête d'une commission qui s'occuperait de frayer le chemin pour l'entrée triomphale de Vondel dans la ville de sa résidence et de sa prédilection. M. Van Lennep s'excusa au commencement, disant qu'il croyait s'acquitter suffisamment envers Vondel, en lui érigeant le monument d'une digne édition de ses oeuvres; mais on le persuada bientôt que, par ce grand service que M. Van Lennep rendait aux lettres nationales, le peuple néerlandais ne pouvait pas se sentir dispensé du devoir de rendre un hommage durable à son grand poëte. Le Bourgmestre d'Amsterdam prit alors la résolution de convoquer dans une des salles de l'hôtel de ville ceux d'entre les habitants de la capitale, dont M. Van Lennep à cet effet lui avait présenté la liste. C'étaient MM. A. Beeloo, poëte et inspecteur des écoles d'instruction primaire, P.J. Teding van Berkhout, conseiller dans la cour provinciale, H. Binger, poëte et éditeur de Vondel, J. Bunge, négociant allemand (supposé d'avoir des relations à Cologne), P.A. de Génestet, poëte et théologien rémontrant, W.J. Hofdijk, poëte et professeur au gymnase, G.D. Kölle, membre d'une des chambres de rhétorique, J. Van Lennep, poëte et commentateur de Vondel, E.J. Potgieter, poëte et fondateur de la revue De Gids, P. Scheltema, archéologue et archiviste de la ville et de la province, J.P. Six, archéologue, descendant d'un des bourgmestres d'Amsterdam, protecteur spécial de Vondel, J. de Vos, Jz., mécène éclairé et possesseur d'une de nos plus belles galeries de peinture, et J.A. Alberdingk Thijm. Les différentes communions religieuses étaient de cette manière représentées dans la Commission: conseil de douze, siégeant sons la présidence de M. Van Lennep et en même temps sous les ailes patriarchales de M. Messchert van Vollenhoven, Bourgmestre. Cette première assemblée eut lieu le 15 Octobre de la même année que M. Bakhuizen van den Brink eut pris l'initiative du projet. Dans les différentes localités du pays et dans quelques villes de la Belgique, on invita des personnes d'influence et de dévouement à former des comités qui se chargeraient de recueillir les | |
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dons que l'on voudrait consacrer à la réalisation de notre projet. Cependant la Commission principale prévit que la majeure partie des ressources devrait être trouvée à Amsterdam-même, et s'était réservée une entière indépendance des comités de province, quant à l'exécution du mandat que M. Van Lennep avait accepté. Aussi ces comités s'acquittèrent de leur tâche avec plus ou moins de zèleGa naar voetnoot*). Mais le roi des Belges nous gratifia d'une somme de frcs 1500. -; l'empereur des français nous en donna 1000. -; les bourgmestres de Cologne ne donnèrent rien; le roi des Pays-Bas donna fl. 600. -. Quand la Commission d'Amsterdam se mit à examiner la voie qu'on devrait suivre pour trouver au bout la belle statue qu'on rêvait, on était assez généralement d'avis qu'il fallait ouvrir un concours; mais c'est surtout au chaleureux plaidoyer de M. Quack, qui avait remplacé M. Kölle, défunt, et qui est un des plus brillants ornements de notre nouvelle école de littérature, que nous devons la résolution de confier la composition et l'exécution de la statue à M. Louis Royer, Directeur de la sculpture à l'académie royale d'Amsterdam. On avait compris que M. Royer ne pouvait pas entrer en lice avec ses anciens élèves, ni avec les professeurs de sculpture qui avaient passé un examen devant lui et qui tenaient de lui leur diplôme. M. Royer s'acquitta de sa tache de la manière que vous savezGa naar voetnoot†). Le statuaire s'était engagé vis-à-vis de la Commission de fournir aussi le piédestal, et à cet effet il avait posté, aux quatre coins | |
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du dé, des génies, des enfants représentant les quatre genres de poésie, dans lesquels Vondel avait travaillé - comme il apparaît encore par l'esquisse en terre-cuite, qui présentement fait partie d'une collection particulière. Après, M. Royer a consulté l'architecte M. Cuypers, au sujet de la partie architectonique de ce piédestal, et il a fini par céder à celui-ci l'honneur et la satisfaction de pourvoir à la composition et à l'exécution de tout le piédestal, - sauf l'idée-mère des quatre génies et la partie épigraphique, que la Commission s'était réservée. Quand tout fut prêt: la statue coulée en bronze, l'endroit, où la statue serait placée, arrêté (après bien des débats), les fondements jetés, le piédestal bâti et l'oeuvre dressée sur sa plinthe, la Commission d'Amsterdam organisa une série de fêtes, pour lesquelles elle eut la bonne chance de s'assurer le concours de MM. Herman van Lennep, échevin de la ville, C. Becker et N.J. den Tex, membres de la commission du Parc, et les artistes MM. C. Rochussen, peintre, J.J.H. Verhulst, compositeur, et P.J.H. Cuypers, architecte. Ce dernier, demeurant depuis peu de temps à Amsterdam, venait de bâtir quelques maisons d'un style excellent, dans la rue qui reçut plus tard le nom de Vondelstraat, mais dont on n'a pas toujours été très sûr, que la Commission du Parc, où Vondel serait placé, consentirait à la rallier à son plan. Comme corporations, qui se sont donné la main pour l'oeuvre du monument de Vondel, sont inscrites, au-bas de la statue: la Commission dont M. Van Lennep était président, la Ville d'Amsterdam, et la Commission du Parc - laquelle, plus tard, à donné le nom de Vondelspark à toute sa création. Voilà, cher Monsieur, comment (si, de temps en temps, il faut écrire un peu de prose) littéralement les choses se sont passées. Faut-il y ajouter que nous avons trouvé encore au fond de certaine caisse vondélienne les moyens de consacrer une nouvelle dalle tumulaire à notre grand poëte, et que ce qui restait de ses ossements (enterrés dans l'ancienne église de Ste Marie et Ste Catherine) a été pieusement deterré et dans un coffret de chêne, doublé de plomb, replacé dans le tombeau? - Ceci eut lieu au mois de Février de l'année courante. J'avais prié MM. De Vos, Quack et Den Tex de vouloir me prêter une main secourable pour l'accomplissement de ce devoir. Mon beau-frère, M. Cuypers, qui avait fait exécuter la dalle dans son atelier de sculpture, | |
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M. l'abbé Brouwers, qui avait eu la bonté de me procurer l'autorisation de la famille sur le nom de laquelle le tombeau était inscrit, M. Anton Sterck, mon ami et fidèle collaborateur dans differentes sphères d'étude, et M.Ch. Boissevain, grand admirateur de Vondel, ont apposé leurs sceaux et signatures sur le procès-verbal de l'exhumation et du nouvel ensevelissement de ces précieux reliques, dans cette vieille église, où le poëte attend le signal du dernier clairon au milieu des restes mortels de plusieurs d'entre ses anciens amis. J'espère que, par ce résumé rapide de ce qu'on a fait pour honorer les mânes d'un grand homme, on aura reçu l'impression que c'est à la ville d'Amsterdam qu'en revient principalement l'honneur, et que toutes les communions religieuses ont fait preuve d'un zèle fort louable dans la célébration de la gloire d'un homme, dont toutes, quelque fussent les opinions de Vondel aux différentes époques de sa vie, ont exalté le noble caractère et les sublimes talents.
Agréez etc.
J.A. Alberdingk Thijm. Note.
On lit dans le Journal des Beaux-Arts (15 Mars, 1870): ‘La première grande fête célébrée en faveur du monument de Vondel a eu lieu dans le Limbourg hollandais, à Ruremonde... C'était la un commencement, quelque chose comme la première pierre du monument qui vicut d'être consacré par une dernière solennité... Toutes les espérances qui nous souriaient à Ruremonde ont été non-seulement entièrement accomplies à Amsterdam, mais encore merveilleusement agrandies... Nous ne rêvions qu' un seul monument et voilà... Nous ne voulions qu' apporter de la frontière notre humble pierre, sans prévoir quelle rayonnaute influence allait sortir de la fête de Ruremonde.’ |
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