Dietsche Warande. Jaargang 3
(1857)– [tijdschrift] Dietsche Warande– Auteursrechtvrij
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‘Dietsche Warande’.
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cercles sphériques, que par les six plans carrés d'un parallélipipède? En tout cas - la seule représentation analytique de la sphère à la portée de notre entendement, n'est-ce pas la multiplication indéfinie de petites surfaces planes, éloignées à distances égales d'un point central impalpable et invisible? Or quelque petites que soient ces surfaces, c'est par leur moyen qu'on parvient à connaître le contenu du cercle et de la sphère - ce qui prouve que la forme normale, la seule qui semble mesurable pour notre entendement, c'est le triangle et le carié. Il se pourrait donc que St Jérome fût dans le vrai en acceptant le carré comme norme de toute grandeur matérielle! - Quoi qu'il en soit, quand l'homme s'est mis à bâtir des maisons pour Dieu, il n'a voulu que copier en des proportions plus bornées le grand temple de la Création, que Dieu s'était bâti de ses propres mains et qu'il avait peuplé de créatures chantant ses louanges, mais libres aussi de rejeter les saintes lois de leur divin Père. Sans discuter la valeur des exceptions à la règle, dans quelques lemples ronds batis par les payens et par les chrétiens, sans même être en opposition réelle avec les esthéticiens qui cherchent dans le ‘Centralbau’ (le systême sphérique dans l'architecture) l'antipode de notre opinionGa naar voetnoot1), - l'on peut constater que comme forme normale des sanctuaires on a toujours considéré le carré oblong, le cube rectangulaire à cotés inégaux, le parallélipipède. Voilà la forme des temples en soi. C'était réservé pour les jours d'nn individualisme mesquin, de continuer à s'occuper un peu de cette forme des temples en elle-même, mais de ne pas s'inquiéter du tout des rapports de l'édifice avec le monde extérieur. Autrefois les objets qui meublaient et décoraient une maison avaient leur place fixe: aujourd'hui nous avons changé tout cela. Nous aimons les collections, qui rassemblent les objets les plus hétérogènes et où ils n'ont rien à demêler avec la place qu'on leur y assigne. Ci-devant on creusait le temple, on bâtissait l'église dans un rapport sévère et judicieusement établi entre le sanctuaire et le grand temple de la création. Un temple, une église, était un organe dans cette création même; et - ce n'est pas par la main qu'on attache le bras au corps. Expliquons-nous! - La norme des saints lieux était donné dans le parallélipipède de l'univers. Les temples des payens, l'arche d'Alliance, le Tabernacle, les Temples de l'Ancien Testament furent construits d'après cette forme primordiale. Restait à établir le rapport entre les sanctuaires et le monde du dehors. Si aux jours de la colère divine l'arche de Noé, quoique bâtie d'après les principes qui jamais, dans les époques fécondes et glorieuses des plus belles civilisations, ne se sont démentis entièrement, était en butte aux mouvements des eaux et des vents, par suite de la sentence de destruction lancée contre l'humanité infidèle, - plus tard, quand Dieu eut renouvelé son alliance avec son peuple, son sanctuaire ne se déplacerait plus au gré des vents, et le Tabernacle et le Temple, fixés sur le sol, auraient toujours leurs entrées principales tournées du côté de l'Orient. Aucun peuple croyant, dont les monuments existent, n'a positivement enfreint cette règle, ni le principe sur lequel elle repose - quelques que fussent d'ailleurs les aberrations où la religion des peuples se perdit. L'axe des sanctuaires s'est constamment tourné vers l'orient. Soit qu'on consulte les ‘merveilles d'Elora’, les pyramides éthiopien- | ||||||||||||||
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nes, le labyrinthe de Labarès, le grand temple de Carnac, les palais de Niniveh, la Giganteja des Phéniciens, les temples du Mexique, les plans des villes chinoises, - on sera frappé de cette tendance con tinuelle de l'ouest à l'est; on trouvera à tout moment, soit l'idole, ou seulement son baldaquin placé à l'extrémité orientale du sanctuaire, soit l'entrée du temple regardant l'orient, soit le côté de l'orient riche en décorations qu'on ne retrouve pas sur les côtés nord et sud. Nous avons détaillé et expliqué tout cela (corroboré par des témoignages irrécusables) dans notre ‘partie néerlandaise’. Le Parthénon, le temple de Thésée, le temple de la ‘Victoire sans ailes’, le portique principal du temple d'Erechthée, les monuments les plus parfaits du peuple le plus ‘plastiquement’ élevé de toute l'antiquité, regardaient l'orient. A Rome payenne il y eut relachement de la discipline - mais voici néanmoins le témoignage de Plutarque, le philosophe et l'historien qui connaissait l'Egypte, la Grèce et Rome, le prêtre d'Apollon initié aux mystères de Bacchus: ‘estans les temples (de Numa) tournez vers le soleil levant, l'adorateur en y entrant monstre le dos à l'orient, a ceste cause se tourne vers celle part, et puis se retourne devers le dieu, faisant le tour entier, et parachevant la consommation de sa priere par ceste double adoration qu'il fait devant et derrière.’ L'homme est placé sur la terre pour glorifier Dieu, pour travailler au bonheur de son prochain et pour faire son propre salut. Or, comme le fait remarquer Mgr. l'évêque de PoitiersGa naar voetnoot1) ‘l'Orient a eu de grands et longs priviléges. 11 a vu naître le premier et le second Adam, et durant presque tout l'espace qui sépare la création de l'un de l'incarnation de l'autre, il a été le favori du ciel, le mieux traité dans l'ordre de la nature et de la grâce........ Mais le patriarche Noé avait prophétisé, avant de mourir, que les avantages ne reposeraient pas toujours sur une même tête, et qu'un jour ils passeraient à un autre de ses enfants. Après qu'il eut maudit Chanaan et qu'il eût salué dans l'avenir des âges le Seigneur Dieu de Sem il avait ajouté: “Que Dieu multiplie et dilate Japhet, et qu'il le fasse habiter et règner sous les tentes de Sem!” Le second père du genre humain’, poursuit l'éloquent évêque, ‘venait de tirer, en ce peu de mots, l'horoscope de toute sa race; en particulier il avait prononcé l'oracle des destinées futures de l'Occident. Oui, l'Orient sera le théâtre des plus grandes et des plus magnifiques manifestations du Seigneur, soit durant le règne de la loi primitive et de la loi écrite, soit à l'avénement de la loi de grace; ses villes, ses montagnes, ses vallées, ses fleuves, seront consacrés par les souvenirs les plus divins; ils garderont les marques du passage des patriarches, des juges, des rois et des prophètes, la trace même des pieds du Fils de Dieu; car le Verbe fait chair sera fils de Sem: Benedictus Dominus Deus Sem! A l'Orient donc la gloire d'être le berceau du monde et le berceau du Christ; à lui encore de conserver le tombeau du Christ, peut-être même de devenir comme le tombeau du monde, alors que le juge des vivants et des morts revenant en la même façon qu'il est monté au ciel, tous les hommes seront cités à son tribunal dans la vallée de JosaphatGa naar voetnoot2). Mais à l'Occident ont | ||||||||||||||
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été faites aussi de saintes promesses qui s'accompliront dans la plénitude des temps et dans le déclin des âges; à l'Occident est réservé le siége principal de l'Église du Christ: là sera la cité choisie, la nouvelle Jérusalem. Jésus-Christ crucifié sur le mont Calvaire avait le dos tourné à l'encontre de la cité déicide et les yeux dirigés vers l'OccidentGa naar voetnoot1). Les Pères grecs eux-mêmes ont fait cette observation, qu'on trouve consignée par saint Jean Damascène dans son livre de la ‘Foi orthodoxe’, et par saint Germain, patriarche de Constantinople, dans sa ‘Théorie des choses ecclésiastiques’. Semblablement, Jésus-Christ était tourné vers cette même partie du monde lorsqu'il donna l'investiture dernière à ses apôtres, et qu'ensuite il s'éleva dans les cieuxGa naar voetnoot2). Attitude pleine de mystère, nous disent de très graves doeteurs et de très anciens écrivainsGa naar voetnoot3). De ses regards mourants, de son front penché le Christ saluait et baisait son épouse bien-aimée; de ses mains étendues, il désignait et bénissait les régions qui allaient principalement former son empireGa naar voetnoot4). ‘De là, nous dit un vénérable évêque d'Espagne, qui ne fait que résumer la doctrine des âges précédents, de là on peut conclure quelle est la dignité de l'Occident, vers lequel le Christ a incliné la tête quand il a rendu l'esprit. Ce prêtre souverain, ce véritable pontife, par l'oblation volontaire de son corps et par l'aspersion de son sang, a consaeré l'univers entier, mais spécialement l'hémisphère occidental, dans lequel devait résider le Prince des pasteurs, celui auquel il a donné par excellence, et par-dessus tous les évêques du monde, le plein pouvoir de lier et de délierGa naar voetnoot5).... C'est vers ce climat qu'il a poussé un grand cri, et que, son côté divin ayant été ouvert, il en a jailli du sang et de l'eau: un cri, pour rappeler à la vie et à la lumière les peuples du couchant, couchés eux-mêmes dans les ténèbres et dans les ombres de la mort; du sang, pour infuser une chaleur divine dans ces races engourdies par le souffle glacé de l'aquilon; de l'eau pour purifier et rajeunir ces nations idolâtres qui avaient vieilli sur le fumier de leur putréfaction moraleGa naar voetnoot6)’. Et ces ‘peuples du couchant’ pense-t-on qu'ils auront à tourner le dos à cet Orient où un Homme-Dieu s'est rendu la victime de leur salut éternel? Sera-ce seulement devant des crucifix qui ne sont que l'image de l'arbre de la croix, du haut duquel Dieu a régi le monde, qu'on se dira: ‘Venite et adoremus!’ Ou les peuples du couchant se souviendront-ils que le ‘Juste serait appelé de l'Orient’Ga naar voetnoot7) et que ‘la | ||||||||||||||
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gloire du Seigneur s'est placée sur les images des saints évangiles en dessus de la porte du temple du coté de l'Orient’Ga naar voetnoot1)? D'innombrables auteurs, et des plus anciens et des plus respectables, déclarent que les Chrétiens dans la prière se tournaient vers l'orientGa naar voetnoot2). Ce qui avait été défendu au peuple juif, par horreur d'une idolâtrie comme celle commise par les vingt-cinq hommes qui, tournant le dos au Temple du Seigneur, se mirent à adorer le soleil levantGa naar voetnoot3), redevint un vénérable précepte pour les Chrétiens. Depuis les temps les plus reculés la position regardant l'orient, ayant à droite le sud, à gauche le nord, et l'ouest par derrière, avait été considérée comme la position par excellence. C'est assez connu qu'en Hébreu le côté de devant et l'orient sont désignés par le même mot; comme aussi le côté de derrière et l'occidentGa naar voetnoot4). Chez les Indiens se présente la même analogie. Para ou purra signifie le devant et l'orient, apara et pascha le derrière et l'occidentGa naar voetnoot5). Chez les anciens Irlandais le même phénomène se produit encore: l'est et le devant s'appelle oirthur, l'ouest et le derrière s'appelle jar. Ce peuple désigne le sud d'un mot qui signifie à droite et il appelle le pôle septentrional du mot de tuath, en rapport direct avec thuaidh, la gauche. Les mots sanscrits dakschina et vama s'appliquent également au côté droit et au midi, au coté gauche et au septentrion; c'est la même chose avec l'hébreu jamin et smaul, pour droit et méridional, pour gauche et septentrionalGa naar voetnoot6). Que de choses n'ont pas été rendues aux Chrétiens que les Juifs avaient perdues par le péché de l'abus: pour n'en nommer qu'une seule: la sainte plastique, l'art sacré des formes dans son ensemble et rétabli sur ses véritables bases. L'Écriture nous apprend que Dieu n'a pas dédaigné d'enseigner personnellement la sainte architecture aux hommes. Dieu appela par son nom Bezeleël le sils de Hur et l'a constitué son architecte; c'est par le Saint Esprit que Bezeleël et Ooliab, fils d'Achisamech, ont été remplis de la sagesse, de la science et du talent, nécessaires pour l'invention et la confection des ouvrages de bois, de métal, de pierres précieuses et de tissus, pour le service du templeGa naar voetnoot7). Tandis qu'il n'y a même pas jusqu'aux mesures de l'arche de Noé que Dien n'a daigné prescrire à son onvrier. Si le Seigneur en a fait autant pour l'arche de salut et pour l'arche d'alliance qui n'étaient que l'image de la Sainte Église et le prototype des temples chrétiens - aurait-Il moins sait pour ceux-ci? - Tertullien a dit: ‘La figure du Saint-Esprit, la Columbe aime l'Orient, qui représente le Christ: amat figura Spiritus Sancti Orientem, Christi figuram.’ ‘Tournés vers l'Orient nous regardons et adorons la face de Jésus-Christ crucifié,’ dit S. Jean Damascène: ‘Conversi ad Orientem respicimus et adoramus faciem Christi crucifixi’. ‘Or donc,’ dit Tertullien, ‘que la Maison de notre Colombe (c. à. d. l'église avec la pyxide qui avait la forme d'une colombe) soit simple, située sur un terrain haut et recevant la lumière.’ ‘Quand les anciens batirent une église,’ dit S. Isidore, ‘ils la tournèrent vers l'Orient, où le soleil se lève à l'équi- | ||||||||||||||
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noxe, afin que celui qui prie regardât le véritable soleil levant’ (savoir: Jésus-Christ). Et cet usage qui date des premiers temps s'est maintenu pendant tout le moyen âge. Les Constitutions Apostoliques, un précieux recueil d'ordonnances qui remonte au moins au troisième siècleGa naar voetnoot1) s'étaient exprimées ainsi qu'il suit: ‘Il faut se tenir à l'église d'une manière sage, usant de sobriété et de vigilance, prêtant une oreille attentive à la parole du Seigneur. Quand les catéchumènes et les pénitents se seront retirés, le peuple se lève et regardant vers l'Orient prie Dieu qui est monté au ciel des cieux à l'OrientGa naar voetnoot2), se souvenant de l'antique possession du paradis, situé en Orient, d'où le premier homme, en suivant les conseils du serpent et négligeant le commandement de Dieu, fut chassé.’ Dans la ‘partie néerlandaise’ nous avons consulté le témoignage de bien d'autres autorités encore, qui prouvent qu'on priait vers l'orient et que l'axe des églises y tendait. S. Paulin de Nole s'excuse de ce qu'il n'a pas, ‘ut usitatior mos est’, tourné l'axe d'une petite église vers l'Orient; mais il l'explique en faisant remarquer qu'on devait considérer cette petite basilique comme une sorte de sanctuaire accessoire, qui regardait le tombeau du patron de la cathédrale. ‘Ad Orientem,’ s'écriait Guillaume Durand au XIIIe siècle,’ ‘c. à. d. au Christ, qui est notre Orient, à nous’, la véritable lumière éclairant tous les hommes qui viennent en ce monde. Les Constitutions Apostoliques parlent, dans un autre endroit, encore de la direction orientale des églises. On y trouve ‘que l'édifice de l'église soit oblong, tourné vers l'Orient, ayant des deux côtés des pastophores et qu'il soit comme un vaisseau.’Ga naar voetnoot3) La seconde partie de notre travail prouvera que, peudant tout le moyen âge, on a observé la règle. Si nous interrogeons les monuments les plus anciens du culte chrétien, nous trouvons ces préceptes parfaitement justifiés par la pratique, et le célèbre Innocent 111 pouvait se prévaloir non-seulement des textes des SS. Ecritures, mais encore de l'usage de tous les temps en faisant ressortir ce qu'il y avait de bon et de louable dans la pratique des Chrétiens, de se diriger vers l'Orient dans leurs prières. Depuis les temps de St Dunstan on a appelé la tendance de l'Ouest à l'Est la ligne sacrée, et, en effet. soit que nous consultions les descriptions des basiliques données par Eusèbe, dans son ‘Hist. Eccles.’ et dans sa ‘Vita Const.’ - soit que nous interrogions la célèbre basilique byzantine, consacrée à la Sagesse, c. à. d. au Fils de Dieu, et rébâtie par l'Empereur Justinien, ou bien les basiliques latines, dont la fondation remonte également à Constantin, ou bien l'ensemble des sanctuaires au Saint-Sépulcre - partout, partout nous voyons prédominer et resplendir la ligne sacrée. Les anciennes églises qui semblent être en contradiction avec cette règle out subi l'influence des époques, auxquelles soit les calomnies des payens, soit l'hérésie des Manichéens décidèrent les catholiques à sacrifier leur pieux usage à la nécessité de faire une profession de foi non équivoque contre ceux qui interprétaient mal leurs nobles habitudes. Cependant il y a une différence à établir entre les deux modes | ||||||||||||||
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d'orientation. L'on orientait par la façade des portes ou bien par la façade apsidiale. M.W. Lübke qui, malheureusement, n'est pas resté fidèle aux louables antécédents déposés dans ses études sur les églises de la Westphalie. loin de ‘s'élargir l'âme’ depuis qu'il habite Berlin et qu'il porte le titre de docteur, tombe dans une méprise impardonnable en racontant tout doucement dans sa ‘Geschichte der Architektur’Ga naar voetnoot1) qu'ordinairement l'apside des basiliques était tournée vers l'orientGa naar voetnoot2), et conséquemment, l'entrée regardait l'occident. Comment donc M. Lübke, qui semble avoir étudié la géométrie et qui se donne des airs de philosophe, a-t-il pu faire des fautes d'addition aussi lourdes que celle que nous devons nous permettre de relever? La majeure partie des basiliques tourne l'apside vers l'Orient, et l'entrée vers l'Occident. M. Lühke au lieu de faire par lui-même le dénombrement des basiliques, parait avancer ce spécimen de statistique monumentale sur la foi de quelque manuel d'archéologie des mauvais jours de 1820-1836. C'est étonnant! Quand j'ai là sous mes yeux les faits et les monuments dont se compose l'Histoire de l'Architecture, qu'alors le courage on la bonne volonté viennent à me manquer pour compter tout simplement, au moyen d'une petite baguette et, au besoin, d'un lorgnon, les basiliques qui tournent leur apside vers l'occident! C'est cependant ce dont M. Lübke s'est dispensé. Pour faciliter la preuve, nous écartons de notre calcul les cinq ou six bâtiments religieux qu'à certains titres on pourrait compter ou ne pas compter parmi les basiliques, pour nous en tenir aux seules basiliques romaines. MM. Knapp & Gutensohn, Bunsen, Nibby, Canina et Zestermann ont déblayé le terrain; rien de plus facile que de procéder à la petite supputation qui a découragé M. Lübke et dont l'aspect l'a poussé dans cet entrain lyrique où la malheureuse assertion lui échappe: ‘Die meistens gegen Osten angelegte Apsis.’ Voyons: prenons les vingt-sept basiliques romaines qui ont indubitablement droit à être portées en compte. Voyons d'abord la grande majorité de M. Lübke; c'est-à-dire toutes les basiliques qui ont l'apside tournée vers l'orient. Ce sont
L'apside de ‘San Lobenzo fuori le mura’ était au VIme siècle tournée vers l'occident, mais le Pape Honorius IV, au commencement du XIIIe siècle changea l'orientation de l'église, en bâtissant la nef actuelle | ||||||||||||||
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du côté de l'ouest et en fermant l'ancienne porteGa naar voetnoot1). II ne parait pas prouvé du reste qu'à travers les révolutions des siècles, l'orientation de la ‘plupart’ des douze basiliques que nous avons nommés soit restée sans atteinte. Voici, s'il faut en croire M. Lübke, les exceptions; voici les basiliques qui, de leur façade, regardent l'Orient:
La ‘Santa Prassede’ a la façade tournée vers le sud avec une légére inclination vers l'ouest; le ‘San Giorgio in Velabro’, au contraire, tourne l'apside vers le nord, avec la même inclination. ‘S. Agostinon’, si l'on vent qu'il soit du nombre, tourne son apside au sud. Qu'est ce qui résulte de ce petit tableau? Rien que je sache en faveur de la thèse, nonchalamment jetée dans l'arène par le docteur Lübke. Des cinq basiliques représentant les cinq patriarchats, ‘Paulus, Virgo, Petrus, Laurentius atque Joannes quatre, par leurs façades primitives, regardent l'orientGa naar voetnoot2): ‘San Pietro’, ‘Sta Maria Maggiore’, ‘San Giovanni in Laterano’ et ‘San Lorenzo’; il n'y a que ‘San Paolo fuori le mura’ et le ‘Lorenzo’ agrandi dont les apsides sont orientées. S. Pierre et S. Paul semblent flanquer la ‘Ville Eternelle’ des deux côtés et ouvrir leurs girons à sa population, antiques représentants du commun des fidèles. ‘Santa Maria Maggiore’ dont on trouva le dessin, en plein été, tracé sur un lit de neige nouvellement tombé, regarde l'orient de sa façade; St Jean de Latran, la basilica aurea, ‘ecclesia urbis’, le ‘caput ecclesiarum’, cathédrale du St Père, tourne également la façade vers l'orient; et St Clément qui s'étend, à grande distance, entre les deux, est disposée de la même manière. Non! la question de l'orientation est une question large et admettant des explications différentes. Quand la basilique aura atteint sa dernière perfection et que le systême liturgique se sera coordonné totalement les détails architectoniques, quand l'autel sera reculé dans le presbytère de manière à ce que le prêtre y monte toujours du côté du peuple, - alors, dans l'Europe du moyen âge, le jour sera venu, où, comme le veut M. Lübke, l'apside regardera l'orient; et nous nous en constituons, pour ces époques plus récentes, les défenseurs dans la mesure | ||||||||||||||
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de nos forces. De nos jours, en Angleterre, en Germanie, en France, 1 faut que l'apside soit tournée vers l'orient - nous espérons y revenir amplement: mais quand on écrit l'histoire, il faut savoir distinguer les époques, et rien n'est plus naturel, plus clair et plus logique que la direction de la façade basilicale vers l'orient, du moment que la disposition de l'autel, des ambons, du clocher, du matronaeum et du senatorium s'en ressentent; et, ils s'en sont ressentis, ils en ont dépendus directement. Par notre petite statistique néerlandaise de plusieurs autres églises de l'Italie, l'on se convaincra aisément que l'Italie ne prête guère d'appui à ceux qui combattraient notre amour pour la ligne sacréc. Dans un second chapitre nous leur raconterons d'autres choses encore, qui leur feront dresser les cheveux sur la tête, tellement ces choses sont symboliques, boétiques, et pourtant nécessaires et pourtant vraies. | ||||||||||||||
Fragments de la vie de J.C.LE spécimen le plus important qui nous reste de la prose néerlandaise du XIIIe siècle, est une Vie de Notre Seigneur publiée en l'année 1835 par feu le professeur Meyer avec toute la gracieuse négligence qui caractérise les travaux de la vieille écoleGa naar voetnoot1). Peu de temps après le docteur Monc découvrit dans la bibliothèque de Stutigard un manuscrit plus récent du même ouvrage. Dans le présent numéro de la ‘Warande’ notre ami M. Nieuwenhuyzen a inséré cinq petits fragments d'un troisième manuscrit qui semble remonter au delà des premières années du XVe siècle. La trouvaille de notre collaborateur (les morceaux de velin ont été détachés par lui de la couverture d'un in-folio du XVIIe siècle) mérite quelque attention, si nous sommes dans le vrai en inférant d'une collation de ces morceaux avec les leçons du professeur Meyer que les deux codex sont des traductions différentes d'un même original latin: un synopse des SS. Évangiles, comme le moyen âge en a produit plusieurs. | ||||||||||||||
Poésies thioises.M. Phil. Blommaert, le gentilhomme et jurisconsulte flamand qui consacre ses loisirs à l'étude de notre littérature nationale, a gratifié le présent numéro de notre revue d'une quarantaine de vers mélodieux sur la vanité de la vie et le poids des peines éternelles. C'est encore un homme mort qui varie sur ce thême, inépuisable aux yeux de nos ancêtres religieuxGa naar voetnoot2). | ||||||||||||||
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Le rév. père Koets, professeur à l'Institut de Katwijk, nous fouruit une leçon peu connue de l'hymne ‘Jhesu dulcis memoria’, en néerlandais du XVme siècle. M. le docteur Hoffmann, dont il a été question dans notre dernière livraison, nous avait remis, il y a quelques mois déjà, un petit travail sur ‘les chansons de frère Dirck van Munster’. Cette notice littéraire est illustrée d'une copie de plusieurs chansons de frère Dirck, faite d'après le plus ancien recueil imprimé de chansons néerlandaises qui soit venu à la connaissance de M. Hoffmann, et M. Hoffmann les connait mieux que nous; c'est-à-dire qu'il les connait presque tous. | ||||||||||||||
Vandalisme.NOus continuons toujours à faire la guerre aux destructeurs. Cette fois-ci nous avons donné les verges à une administration qui abat une maison monumentale (une ancienne chambre de rhétorique à Lier) et à un honnête particulier d'Amsterdam, qui nous a ravi la vue d'un excellent pignon de la moitie du XVIIe siècle. Ce monsieur peut facilement abattre son pignon. Il est peut-être toujours chez lui; il n'en voit rien et il ne sent pas son absence; mais pour nous qui ne sommes jamais chez lui et qui étions heureux de contempler sa solide façade, c'est différent, et nous avons raison de nous plaindre et de le fustiger. | ||||||||||||||
Bibliographie.Nos notices bibliographiques ne sont pas nombreuses cette fois Nous n'avons annoncé que trois ouvrages: 1o Un livre sur l'art écrit en français, par un des rares littérateurs qui, en Hollande, se mêlent d'esthétique pratique. On parle quelquefois art en Hollande; mais les plumes néerlandaises ne s'en occupent guère. M. van Westhreene fait une exception à la règle. Un littérateur français a proposé à notre excellent statuaire M. Royer, de le mettre dans une cage, rara avis qu'il est dans notre climat. Nons inclinerions à proposer la même chose pour les auteurs qui s'occupent sérieusement de nos arts du dessin, n'eussions la crainte que les artistes et les ‘connaisseurs’ mourraient de plaisir en voyant la critique et l'histoire en prison. Quoi qu'il en soit, M. Westrheene ne s'est pas montré enchaîné dans ce nouveau livre; il use de toute la liberté que le bon Dieu et notre assez bonne Constitution laissent aux écrivains. Il se meut avec facilité dans son sujet; il n'y a que la langue étrangère qui met des entraves à ses élans, comme au style de nous tous tant que nous sommes (trois ou quatre), qui sommes assez indiscrets pour raconter dans un français médiocre ce que nous savons de bien et de mal de nos prochains néerlandais. M. van Westrheene donne une monographie de Jan | ||||||||||||||
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SteenGa naar voetnoot1). Nous n'avons que des louanges pour le zèle que l'auteur a mise en oeuvre dans la recherche des détails dont il a composé son tableau. Il tient surtout à réhabiliter un peu le caractère moral de son héros qui avait souffert sous la pression d'une série d'accusations répétées par tous ses biographes et qui manquent d'un fond suffisant. Nous trouvons bien que M.v. Westrheene fait trop facilement main-basse de la tradition, en n'y reconnaissant aucune valeur historique. On n'est pas en droit de récuser entièrement l'autorité d'une tradition générale, à moins qu'on ne donne des preuves péremptoires de sa fausseté. Nous croyons, avec M. van Westrheene, que Jan Steen n'aurait pas fait les 500 tableaux que son biographe énumère et décrit en grande partie, s'il avait toujours été au cabaret; nous reconnaissons que dans certains tableaux de ce maître éminent il y a un sens philosophique et une tendance morale même, qui parlent en faveur de l'artiste (le détail relevé par M. van Westrheene, d'une enfant qui, dans une scène de crapule, jette des roses aux pourceaux a même une portée touchante); mais nous ne pouvons douter que Jan Steen n'ait eu de la sympathie pour les scènes de désordre rendues si admirablement par son pinceau; et tout en supposant que Jan Steen à son lit de mort se soit montré un fidèle enfant de l'église catholique - nous ne pouvons laisser de regretter que pendant sa vie il n'ait eu de plus nobles penchants que nous ne connaissons par ses oeuvres. M. van Westhreene caractérise son talent dans une couple de pages, que nous nous promettons de faire connaître à nos lecteurs, dans notre prochaine livraison. 2o Une poésie nouvelle de M.S.-J. van den Bergh, dans laquelle il traite des exploits d'un de nos héros du moyen áge. M. van den Bergh prend place parmi nos poëtes nationaux les mieux réputés. 3o Une publication des ‘vues’ les plus remarquables de la ville d'Amsterdam. Nous croyons que notre ami M. Didron s'orienterait facilement dans ce recueil. Cette ‘gaité’ dans les tons et dans les lignes, que l'illustre archéologue français appréciait tant dans notre capitale, est parfaitement exprimée dans les dessins de M.W. Hekking. Editeur: M. Tielkemeyer à Amsterdam.
Nous avions aussi rédigé quelques modestes observations sur la théorie iconographique de Mgr l'évêque de Bruges touchant le sujet de l'Immaculée Conception; mais nous ne pourrons insérer ce petit travail que dans notre prochain numéro. | ||||||||||||||
Mélanges.NOur nos ‘Mélanges’, elles se composent principalement de quelques extraits des revues flamandes. Elles contiennent, entre autres, un petit récit historique de la première application de la vapeur sur les navires - sous l'empereur Charles-Quint! Le | ||||||||||||||
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dix-neuvième siècle pense quelquefois avoir inventé la poudre; c'est prouvé maintenant qu'il n'a pas inventé la vapeur.
Nous nous permettons de reproduire, dans nos ‘mélanges’, la communication que voici: | ||||||||||||||
La Ste Vierge à l'Autel.Nos amis se rappellent la belle lettre de M. le baron de Roisin, insérée dans notre ‘partie française’, T. I, p. 54-59, et traitant de ‘l'autel par excellence des cathédrales françaises.’ Notre honorable correspondant avait élevé la voix (et il n'est pas à beaucoup près le seul d'entre nos iconologues qui en ont fait autant) contre la représentation de la Sainte Vierge évanouie au pied de l'arbre de la croix. Nous avions entrepris de défendre le sens et la beauté de ce sujet. L'un de ces jours M. de Roisin a appelé notre attention sur le passage suivant du rév. père Cahier: ‘Il importe de remarquer que le XIIIe siècle en figurant Marie au pied de la croix, s'était imposé une simplicité sobre et sévère, qui parut sans doute trop sèche au XIVe siècle, car alors on vit apparaître ces pamoisons (spasmes) de la Sainte Vierge, qui prirent fureur dans plusieurs contrées, malgré l'opposition (un peu tardive) des plus grands théologiens.... Marie la femme forte valait bien au moins la mère des sept Machabées, dont nul sculpteur ou peintre, que je sache, n'a songé à faire une mère éplorée.... Il est urgent, d'appeler particulièrement une censure attentive sur les compositions qui s'offrent d'abord comme inspirées par une piété tendre, mais qui tiennent peu de compte des faits exposés par l'Écriture et des formes longtemps admises dans les ages de foi, qui affectent une tendance à tourner les faits évangéliques en des scènes d'apitoiement sentimental.’ Le rév. père Cahier, l'excellent archéologue, dont nous faisons grand cas, va très loin: les coups pleuvent. Peut-être cependant qu'il en tombe de trop. Le père Cahier aime beaucoup le XIIIe siècle, - c'est comme nous, comme tout ce qui se mêle un peu d'art chrétien; mais nous ne l'en aimons pas moins, ce grand XIIIe siècle, pour nous avoir légué la scène que le père Cahier qualifie un peu légèrement ‘d'apitoiement sentimental’! Quoi! si l'Italie du XIIIe siècle, tout rempli encore des grands souvenirs de ses peintres mosaïstes des basiliques, l'Italie, à la veille d'enfanter Cimabue, Giotto et le Dante, l'Italie du XIIIe siècle nous eut donné l'exemple de ces ‘pamoisons, qui prirent fureur’!.... Ce sera une preuve de plus, il est vrai, que les ‘grands théologiens’ sont venus trop tard avec leur opposition. Cependant nous nous rappelons parfaitement ce que S. Bernard avait dit de la mère au pied de la Croix: ‘Stantem video, flentem non lego’; mais il s'agit de savoir s'il faut interdire à l'art toute représentation de ‘faits qui ne sont pas exposées par l'Écriture’. Nous savons aussi qu'un des SS. Pères a dit que si la mort de l'Homme-Dieu était un miracle, c'en était un plus grand que la Mère n'était pas expirée à la vue des tourments de son divin fils. En tout cas, voici les faits et la preuve que nous voulions avancer: Giunta Pisano, vers la moitié du XIIIe siècle (selon le Prof. | ||||||||||||||
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Mosler ‘um 1236’) et Margaritone d'Arezzo, son contemporain, ont donné dans les excès que le père Cahier condamne avec tant de véhémence!Ga naar voetnoot1) A Assise, dans l'église même de Saint François, l'on admire une peinture murale de Giunta Pisano, où St Jean et la Vierge, placés tous deux à dextre de la croix, se donnent la main (quelque moderne et quelque condamnnable que cela paraisse aux yeux d'un ‘Duecentisme’ trop rigoureux); dans la même église l'on trouve une autre ‘Mort en croix’ de la même époque, et Margaritone d'Arezzo y représente l'évanouisssement de Marie et le secours que lui prête Saint Jean. Non, cette idée n'est pas une innovation du bienheureux Fiesole. Déjà dans l'école de Giotto elle avait été adoptée. Pietro Cavallino, l'ami du grand disciple de Cimabue, a traité le sujet à Assise dans l'église souterraine de Saint François. Un autre élève de Giotto l'a exécuté dans la ci-devant église de Sainte Claire, à Ravenne. Nous passons sous silence Giovanni Gaddi qui appartient à la seconde moitié du XIVe siècle et qui aussi a peint pour les pères franciscains d'Assise ‘Le christ en croix et Marie évanouieGa naar voetnoot2)’. Si maintenant les XIVe et XVe siècles sont responsables d'écarts commis déjà par le XIIIe et par l'école de Giotto, nous aussi nous leur jetterons la pierre; mais nous leur demanderons aussi comment il s'est fait que les enfants de S. François, autant que les enfants de S. Dominique, ont trouvé de la beauté dans une scène que le père Cahier, en la rangeant parmi les ‘apitoiements sentimentaux’, semble renvoyer au temps de LL. Majestés Louis XV et XVI. Et que dira le père Cahier, si nous lui rappelons que déjà au XIIe siècle il s'est trouvé un peintre (à l'église de St Etienne de Bologne) qui fait évanouir la Sainte Vierge, à la vue du seul portement de la croixGa naar voetnoot3) Un de nos amis, excellent théologien aussi, nous fit l'observation que l'évanouissement de la Mère à la mort du Fils, était comme une participation à cette mort même et comme une figure de la consommation du sacrifice par Marie.
Nous plaçons ici le fragment publié par M. Heyse d'une belle ‘complainte’, qui, par son sujet, se rattache à la question que nous venons de traiter: Chant de la Ste Vierge Marie.
Je plains et plors come feme dolente,
Quar ie ay perdu ce que plus m'atalente.
A grant tristour fuie ma iouvente,
Sans nul confort triste sera ma uie iusques a la....
Beau dous cher fis, simple uis, bele bouche!
La uostre mort, beau fis, au cuer me touche.
Des ores mais uiuray come une souche.
Sans nul confort triste sera ma uie jusques a la.
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Beau dous cher fis, uos deinaistes decendre
Dou ciel en moy et char umaine prendre.
Por uostre mort bien me doit li cuer fendre.
Sans nul confort triste sera ma uie iusqnes a la.
Beau dous cher fis, et beau sire et bean pere!
Quant uos de moi fistes uostre mere,
Por uostre mort doi ge auoir bouche amcre.
Sans nul confort triste sera ma uie jusques a la.
Beau dous cher fis! a la uostre naisance
Remes uirge sans mal et sans greuance,
Que enpren trop nature sans uengance.
Sans nul confort triste sera ma uie iusques a la.
Beau dous cher fis! que grant ioic iauoie
‘Romanische inedita auf italiänischen bibliotheken gefammelt von Paul Heyse Dr Phil.’ Pag. 60. |
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