Het Boek. Serie 3. Jaargang 33
(1958-1959)– [tijdschrift] Boek, Het– Auteursrechtelijk beschermd
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André Jammes
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postérieures, il est exceptionnel qu'une fonte de caractères détermine un atelierGa naar voetnoot1. Cette absence d'utilité immédiate a fait longtemps négliger l'étude des caractères du XVIe siècle et des graveurs ou fondeurs qui les ont façonnés. Il n'est pas indifférent pourtant de connaître le nom et la personnalité de ceux qui ont bouleversé l'esthétique du livre et contribué à lui donner sa physionomie moderne. La connaissance exacte de ces noms, des dates d'exercices, du moment où de nouvelles formes de lettres sont apparues, permettra de préciser les influences, les styles, les prépondérances régionales, les variations du goût, les modes. Par exemple, l'étude de l'évolution de l'italique en France comparée aux créations italiennes ne serait-elle pas une importante contribution à l'histoire de l'humanisme? En plus des points de vue esthéthique ou historique, d'un intérêt incontestable, il faut reconnaître que l'établissement d'un catalogue des types du XVIe comparable à celui que Haebler a rédigé pour les incunables rendrait de grands services à la science bibliographique. La détermination d'une fonte, même si elle ne permet pas de caractériser clairement un imprimeur peut être un indice non négligeable. Les identifications de fontes ont permis en partie à Mademoiselle E. Droz de décrire les productions de Pierre de Vingle, dans un brillant article récemment paru, apportant une nouvelle fois la preuve qu'au XVIe siécle la vie religieuse et politique est intimement liée à la vie du livreGa naar voetnoot2. Les spécimens de caractères publiés par les fondeurs ou les imprimeurs sont les éléments de base indispensables aux identifications. Ils en sont l'étalon, la pierre de touche. Malheureusement ils sont d'une extrême rareté. Tout au plus connait-on quelques feuilles volantes, dont les plus importantes sont celles qui sont conservées au Musée Plantin à AnversGa naar voetnoot3. Il faut y ajouter un spécimen également sous forme de placard publié par le fondeur Konrad Berner, à Francfort en 1592Ga naar voetnoot4. Les chercheurs doivent aussi avoir recours aux caractères eux-mêmes, ou plus précisément aux poinçons, matrices, frappes, dont ils sont issus. A ce point de vue, les centres d'Oxford et d'Anvers sont d'un très grand secours. Remarquablement riches en fontes du XVIe siècle, ils conservent leurs archives intactes. En France, l'Imprimerie | |
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Nationale possède un fonds ancien important, mais pauvre en types du XVIe siècle, à l'exception toutefois des ‘Grecs du Roi’ de Garamond. Il est cependant possible de découvrir dans les archives françaises des documents utilisables. La mise au jour des inventaires et des notes provenant de la famille Le Bé-Fournier en est une preuve évidente.
M. Harry Carter a entrepris avec M. Stanley Morison de cataloguer et étudier les caractères offerts à l'imprimerie de l'Université d'Oxford par le Docteur Fell vers 1670. Une part importante de ce matériel est originaire du continent et provient des grandes fonderies du XVIe. Pour établir des comparaisons préparatoires aux identifications, M. Carter a été amené à étudier systématiquement les richesses du Musée Plantin, source admirable et unique. En un seul lieu sont conservés les poinçons de caractères, les matrices, les fontes anciennes, les archives permettant d'en connaître l'histoire, ainsi que les essais d'impressions effectués à l'époque même. On voit l'importance de cette source d'information, et partant, l'utilité des travaux de M. Carter. Son premier soin fut de publier des Essais de fonte dans les matrices conservées au musée Plantin-Moretus. Ces essais furent imprimés à Oxford, et accompagnés d'identifications provisoiresGa naar voetnoot1. En Septembre 1956 parut dans The Library un article résumant ses travaux: The types of Christophe Plantin. Joint à cette revue se trouve un grand feuillet dépliant où 62 fontes sont reproduites datées et identifiéesGa naar voetnoot2. Monsieur Carter a publié un autre travail qui complète celui-ci dans le Gedenkboek der Plantin-DagenGa naar voetnoot3. L'importance des essais effectués à Anvers ferait volontiers oublier le but dans lequel ils ont été entrepris: l'identification des ‘Fell types’. Une étude sommaire avait été publiée à Oxford en 1950Ga naar voetnoot4 par Stanley Morison, suivie de trois fascicules de Notes on the ancient typographical materials of the University of Oxford du même auteurGa naar voetnoot5. Ces plaquettes documentaires ne sont que les préliminaires de l'immense travail sur les ‘Fell types’ que le grand spécialiste anglais est sur le point d'achever. | |
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En 1953, l'University Press de Cambridge a publié un livre important de M. Morison qui est le résumé d'une doctrine: A Tally of types cut for machine compositionGa naar voetnoot1. Ce livre qui traite des ‘historic founts’ contient de nombreuses notes sur Garamond, Granjon, Jannon, et sur plusieurs fontes italiennes du XVe et du XVIe siècles. Plus récemment, M. Morison vient de publier l'Inventaire de la fonderie le Bé selon la transcription de Jean-Pierre FournierGa naar voetnoot2. Ce document remarquable, car il décrit le matériel de la plus importante fonderie française du XVIe, a été découvert par Miss Abbott à Paris. C'est ici l'occasion de célébrer la mémoire de cette chercheuse infatigable, qui pendant des années a fouillé les archives et les bibliothèques de France en quête de documents inédits concernant l'histoire de l'imprimerie. On doit aussi à Miss Abbott la découverte d'une série de notices de Guillaume II Le Bé sur les fondeurs et graveurs de caractères du XVIe siècleGa naar voetnoot3. Ces documents ont pu déjà être utilisés en partie. C'est ainsi que Madame Veyrin-Forrer s'aidant des notes de Le Bé, a pu retracer la physionomie presque inconnue d'Antoine Augereau qui désormais prend rang dans les annales du livre et de la Réforme aux côtés de Colines, de Tory et de DoletGa naar voetnoot4. Madame Veyrin-Forrer rédige à la Bibliothèque Nationale le catalogue des spécimens de caractères. Ce travail simplifiera et stimulera les études typographiques. Une de ses découvertes est particulièrement importante. Il s'agit du premier spécimen de l'Imprimerie royale. Daté de 1643, il vient d'être publié en fac-similé, et les différents caractères dont il est composé ont été identifiésGa naar voetnoot5. Pour ce travail, les documents publiés par M. Harry Carter ont été largement utilisés ainsi que les reproductions des spécimens Berner-Egenolff. Ces différentes publications montrent s'il en était besoin, l'importance des spécimens de caractères anciens et l'intérêt qu'il y a à les reproduire, d'autant que les plus intéressants d'entre eux sont généralement uniques. Ce manque se fait particulièrement sentir en ce qui concerne la fonderie Le Bé dont on possède maintenant l'inventaire. Un spécimen général, qui en serait l'illustration idéale, n'existe malheureusement pas. Seules quelques épreuves d'hébreu subsistent à Paris et quelques feuilles d'essais adressées à Jean Moretus. Un moyen de combler cette lacune consiste à retrouver les différentes épreuves de | |
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caractères anciens que Jean-Pierre Fournier, frère de Simon-Pierre et héritier de la fonderie Le Bé, publia au XVIIIe siècle. Il n'existe pas de spécimen complet de la fonderie de Fournier l'ainé, mais seulement des feuillets séparés. Il s'en trouve une série unique à la Bibliothèque Nationale. On peut aussi examiner le spécimen de Philippe-Denis Pierres de 1785Ga naar voetnoot1 et celui de Lottin de 1781Ga naar voetnoot2 oû se trouvent des caractères provenant de la fonderie de Fournier l'ainé. Malgré les altérations subies, on peut reconnaître les formes anciennes dans ces livrets typographiques, et le phénomène de leur survivance si tardive est en soi un sujet d'intérêt. L'édition en facsimilés exacts des spécimens est une des conditions primordiales au progrès de la science typographique. Déjà les reproductions données en Allemagne par Gustav Mori, celles de Douglas Mac MurtrieGa naar voetnoot3, malheureusement peu connues en France, la reproduction du spécimen de Jean Jannon par Beatrice WardeGa naar voetnoot4 avaient avant la guerre apporté d'intéressants éléments. La récente publication d'un spécimen Plantin dans The Library et celui de l'Imprimerie royale de 1643, accompagnés d'identifications serviront à établir des comparaisons et permettront d'autres identifications. En Angleterre, l'édition systématique des spécimens de caractères étudiés et annotés par MM. A.F. Johnson et H. Carter, est entreprise par M. John Dreyfus. Peu à peu, les ténèbres qui entourent l'histoire des admirables caractères du XVIe siècle vont être percés. La vraie figure de Garamond se précise, plusieurs graveurs inconnus jusqu'ici prennent une place importante. Il faut souhaiter que les efforts des chercheurs des différents pays permettent d'établir un catalogue des caractères français du XVIe siècle. Ce sera un instrument de travail indispensable pour les bibliographes et qui aura une influence certaine sur les créations modernes de caractères. |
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