Rembrandt Harmens van Rijn. Deel 1. Ses précurseurs et ses années d'apprentissage
(1863)–Carel Vosmaer– Auteursrechtvrij
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Notes relatives aux precurseurs.Pieter de Grebber est un peintre très peu connu et on trouve ses tableaux rarement hors de la Hollande. Le nouveau musée de Haarlem en possède quatre. Ce sont: les oeuvres de miséricorde, 1628; berger et bergères, 1628; Barberousse, 1630; Hippocrate, non daté. Tous à figures de grandeur naturelle. Seul entre les musées de l'Europe, celui de Dresden conserve quatre tableaux de lui. M. Schäfer, dans son catalogue de ce musée, les a parfaitement appréciés et leur a consacré une notice intéressante. Ils portent tous, comme les tableaux à Haarlem, les initiales PDG. L'un qui représente l'enfant Moïse sauvé des eaux, a été vendu d'abord comme un Rembrandt, après on l'a attribué à Bol. Erreurs qui valent des titres de noblesse. Ce sont de plus des indications du caractère distinctif. Le tableau, qui a 6 pieds de haut et 8 pieds 2 p. de large, représente la fille du Pharaon assise sur un trône élevé, habillée d'une robe blanche à manches jaunes et parée d'or et de bijoux. Elle tient l'enfant; ses dames et ses servantes l'entourent. Dans le costume se remarque le turban usité. Fond de paysage plat, coupé par le fleuve, et avec un palais et des arbres. Le tableau est daté 1634. Les trois autres sont, un portrait de jeune homme blond, cheveux roux, toque noire à plume blanche; - portrait | |
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de jeune homme avec bonnet fourré; - portrait de jeune homme à habit et bonnet fourrés. Que l'auteur du catalogue ait vu à Haarlem un tableau représentant Jacob voyant l'habit ensanglanté de son fils, cela me paraît une méprise. Serait-ce celui qui représente Hippocrate refusant les présents d'Artaxerxes? La date de la mort de de Grebber, n'est pas connue. Si la date que Heller a recueillie sur une des eaux-fortes du maître est exacte, il aurait été encore en vie en 1665. | |
Theodoor de Keyser.Pour les de Keyser on peut consulter le livre de M. Kramm; les poésies de Vondel, et de Jan Vos; un article de M. Kramm dans le Tijdschrift voor Geschied, en Oudh. van Utrecht, 1836, pag. 305; un article de M. Bolhuis dans le même recueil, année 1837, pag. 100; l'Architectura moderna, par Sal. de Bray, 1631. Hendrik de Keyser a eu trois fils artistes; Pieter, architecte et statuaire; Thomas, et Willem peintres. Jakob, frère de Hendrik, est apparemment le père de Theodoor. Voici les oeuvres datées de Theodoor que j'ai notées: 1633. Le grand tableau avec les schutters, à l'hôtel de ville d'Amsterdam; 1638. Les quatre bourgmestres; musée de la Haye. 1639. Portrait d'homme, signé T.D. Keyser, les trois capitales entrelacées. Chez M. Dubus de Gisignies. 1640. Portrait de femme. Chez le même. W. Bürger, Mus. v. d. Hoop etc. 1650. Vieille femme dans un fauteuil, et jeune homme près d'une table; signé T. Keyser. Mus. de Munich. 1654. Portrait de Leeghwater, l'ingénieur. 1657. Thesée et Ariadne. Au dessus de la cheminée de l'ancien hôtel de ville à Amsterdam. | |
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La gravure de Matham, d'après le portrait de J. Bakker peint par Theodoor et dont j'ai parlé pag. 80, porte l'inscription: obiit 27 Aug. ao 1651. aet. 42. | |
Joris van Schooten.1626-28, les portraits des officiers de la garde civique. Actuellement à l'hôtel de ville de Leyden. Il reçut f 12.-pour chaque personnage, et les frais des panneaux. Là est encore un autre tableau représentant des officiers, signé J.v. Schooten (le J.V.S. en monogramme) fecit 1650. | |
Joannes van Ravesteyn.J'ai commis une erreur en disant 1614 la date la plus ancienne dans son oeuvre. Il y a un portrait du prince Maurice au musée de Dresden qui est daté 1605. 1614. Portrait de J. Buyesius. 1616. Les officiers de la garde civique sortant du Doelen (à l'hôtel de ville de la Haye). Signé sur la rampe de l'escalier 1616 J.v. Ravesteyn. Les premières lettres J.v.R. entrelacées. Sur panneau. Les officiers, dans leurs costumes pittoresques, avec les écharpes oranges autour du corps, armés de pertuisanes et de mousquets, descendent pèle-mèle les marches du perron du Doelen. Carnations vives et fraîches; un jour égal et clair; belles têtes pleines de vie et de caractère. Le peintre se montre au haut du perron s'appuyant contre la colonne, la main posée sur un casque; habit de soie noire ouvragée; hausse-col en acier; petite collerette montée; la tête un peu chauve, moustaches et mouche. 1618. Banquet du magistrat, recevant les officiers de la garde. Toile; 26 figures de grandeur naturelle à mi- | |
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corps. Ce tableau se trouve également à l'hôtel de ville de la Haye et fut payé au peintre f 500.-. Grande composition en largeur. Autour d'une table, couverte d'un tapis brun et rouge sont assis les magistrats; habits noirs, chapeaux noirs à bords étroits, fraises à tuyaux. Le Balluw Willem van Outshoorn, se retourne sur sa chaise, - tête pâle à cheveux gris courts - et, levant le verre rempli de vin du Rhin, porte une santé aux officiers de la garde. Le premier de ceux-ci, habillé de noir avec une écharpe orange, frangée d'or, se découvre et s'incline; sa main droite tient la pertuisane. Derrière lui, deux officiers et deux porte-étendard. Derrière la table, un serviteur près d'un buffet avec des burettes et du pain. Au fond, le mur de la salle, tapissé d'une draperie avec des armoiries. A droite la cheminée. Coloris très foncé, chaud. Dessin, facture, expression admirables. 1619. Portrait de Rombout Hoogerbeets. 1628. Portrait en buste du prince Frédéric Henri. 1629. Portraits en pied de L. Reaal et de son épouse. 1631. Portrait en pied de jeune homme, vêtu de rouge; signé Ao 1631 J.V.R., les lettres entrelacées pareilles à celles du tableau de 1616. Se trouve à la Haye. 1633. Portrait d'homme de la famille Nieuwerkerke. Gal. Suermondt, W. Bürger. 1636. Le magistrat de la Haye, délibérant sur la construction du nouveau Doelen. Sur un papier au coin droit en bas, les noms des personnages et Pinxit Joannes a Ravesteyn privato uniuscujusque sumptu ao 1636. Quatorze figures de grandeur naturelle; les magistrats, en habits noirs ou foncés, grands cols plissés, chapeaux noirs à larges bords. Grande vérité d'expression. Jour égal sans grands effets de lumière; l'harmonie générale, de tons gris, noirs et verts, un peu sombre. Hôtel de ville de la Haye. | |
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1638. Officiers de la garde avec le porte étendard; six figures de grandeur naturelle à mi-corps, debout, en costumes très bariolés et multicolores. Jour égal et clair. Hôtel de ville de la Haye. - Portrait de Uyttenbogaerd: obiit 1644. Portrait d'homme; tête vivement coloriée; chaîne d'or au cou. Au Musée Boymans. Signé J.V. Ravesteyn F., les trois premières lettres entrelacées. | |
Frans Hals.On consultera avec fruit les livres de M. Bürger. Oeuvres datées: 1616. Banquet d'officiers; musée de Haarlem. Du même temps environ est le grand tableau au musée d'Amsterdam, Hals et sa femme dans un paysage. 1626. Portrait de Scriverius. Gravé par J.v.d. Velde en 1626. 1627. Portrait d'Acronius, professeur à Haarlem, mort en 1627. Ce petit panneau se trouve au musée de Berlin; il porte l'inscription aet. 62 ao 1627. 1627. Banquet d'offfciers; Haarlem. 1627. Banquet d'officiers, signé F.H. Il contient le portrait d'Adriaen Matham. Egalement à Haarlem. 1630. Portrait de femme. Mus. v.d. Hoop. 1633. Assemblée d'officiers; Haarlem. Il contient le portrait d'un Hendrik Pot; c'est peut-être le peintre. 1634. Portrait de Bor; Mus. Boymans, signé aetatis 75, 1634. 1637. 16 officiers; tableau cité par les auteurs comme la compagnie maigre (de magere compagnie); à l'hôtel de ville d'Amsterdam. | |
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1638. Portrait de De la Chambre, Suyderhoeff sc. 1688. 1639. Officiers du Doelen de St. George. Parmi eux le portrait du peintre. Haarlem. 1641. Régents de l'hospice de St. Elisabeth. Haarlem. 166?. Portrait d'homme; à M. Henry Farrer: cité par M. Bürger, Manchester. 1664. Deux tableaux; régents et régentes de l'hospice des vieillards. Haarlem. | |
Jacob Gerritsz. Cuyp.Cuyp est très peu connu comme peintre de portraits et de figure. Le catalogue de la galerie Fesch lui attribue la Charité de Saint Martin, composition de 12 figures. Le musée d'Amsterdam conserve de lui encore un tableau de famille. Le musée Boymans, un dessin à l'encre de Chine; scène de famille. M. Le Cte Clément de Ris a mentionné encore deux portraits de grandeur naturelle, homme et femme, qui sont au musée de Metz. Ils sont à mi-corps, figures de trois quarts. La femme, en noir, grande fraise, signé Aetatis 52 J.G. Cuyp fecit Ao. 1649. L'homme en noir, avec col blanc plat. Signé Aetatis 63 J.G. Cuyp fecit 1649. Le G. et le J. entortillés. Les têtes touchées avec esprit et fermeté. Les vêtements paraissent d'une autre main. Revue Univ. d.b. arts, mars 1863. Au musée Städel à Frankfurt il y a encore un portrait de femme, et dans la galerie Lazienski à Varsovie un portrait d'homme. Enfin l'exposition marseillaise en 1861 possédait deux beaux portraits à mi-corps, portrait de vieille femme signé aetatis 65 J.G. Cuyp fecit 1649, et portrait d'homme J.G. Cuyp 1646. Tous les deux d'un beau ton doré. | |
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Esajas van de Velde.1597 est donnée comme année de naissance de ce peintre. Elle devra être reculée peut-être de quelques années. Orlers le cite déjà comme peintre en 1614. C'est la date que portent aussi deux estampes du maître, la baleine sur la plage de Scheveningen, et une vue de village. 1616. Eau-forte, la mort de J. van Wely. 1619. Série de petites eaux-fortes, E.V.V., sujets politiques, - le supplice d'Oldenbarneveld, Ledenberg, le chateau de Loevestein avec Hoogerbeets et de Groot, et Vorstius avec D. Trevel, J. Utenbogaerd et Haen. 1623. Tableau au Mus. Boymans; choc de cavaliers et de soldats; effet d'incendie. E.v. Velde 1623. 1624. Eau-forte; rupture de la digue du Lek. 1652. M. Kramm possède un dessin au crayon, signé E.v. Velde 1652; paysage, vue d'une ville, avec des animaux; sur des ruines est assis un homme dessinant. Cette date curieuse démontre qu'on s'est trompé en le disant décédé en 1648. Deux tableaux remarquables comme satire politique: le prince Maurice attachant les grelots à un chat; mus. d'Amsterdam; - et la danse des princes et princesses en présence du vieux Oldenbarnevelt et de sa femme; mentionné par Hoet, Catal. I. | |
Pieter Molijn.Son monogramme est PM. Au musée de Brunsvic un tableau à plusieurs figures 8 p. de l. sur 5 de h., Matthieu dans la maison du publicain, appelé par Jesus, est attribué à Claes Moyaert. Cependant, sur un grand livre se trouve le monogramme de Pieter Molijn. C'est un tableau entièrement dans le goût de Rembrandt. Le jour vient de la fenêtre à gauche, | |
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près de laquelle est assis à une table un publicain en costume oriental et d'autres personnages. Les gens sont occupés à ranger des marchandises et des caisses. Jesus entre par la porte à droite, et fait signe à Matthieu. Costumes, dessin, gestes, lumière rembrandtesques. Quelques paysages de Molijn sont dans le goût de Rembrandt; mais j'hésite à lui attribuer ce tableau d'histoire. Molijn a peint la figure, mais pas que je sache des tableaux de cette grandeur. Toutefois le monogramme paraît décisif. En attendant cherchons et si l'attention se porte sur tous ces maîtres oubliés et ces oeuvres dont l'origine est encore douteuse, le jour se fera à la fin. Notons encore de lui un Choc de cavalerie, petit tableau, figures de 0,12 cent., qui est au Louvre.; signé du monogramme PM 1643. Le paysage de la Galerie Suermondt est signé P. Molyn, 1633. Une de ses eaux-fortes, paysage avec trois paysans et une femme, est signée de son nom et de l'année 1626. | |
Roeland Roghman.Roghman, qui a fait une énorme quantité de dessins - la collection de Ploos van Amstel seule en contenait 241 - n'a laissé relativement que peu de peintures. J'ai trouvé les traces d'une douzaine. Les catalogues de Hoet en mentionnent 7: Grand paysage, avec figures de Lingelbach, vendu f 7. Paysage avec cascade, vendu f 30. Grand paysage, un de ses meilleurs (sic) f 30. Paysage, figures de Lingelbach, f 17. Paysage, avec ruines et des vaches, h. 1, 6½ large 1, 8½, f 16.10. Paysage, vendu f 11.10. Beau paysage avec figures, h. 37½ large 47 pouces, f 22. | |
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A la vente du cabinet du prof. Bleuland, à Utrecht en 1839, a figuré un paysage rocailleux, avec cascade, figures et animaux; peinture vigoureuse et hardie. Toile h. 1, 9, 9; large 1, 7, 6. La galerie Suermondt contient une magnifique vue de ville; voyez M. Bürger, Gal. Suermondt p. 161 et 29. Les deux paysages de Cassel. Enfin il y avait encore un beau specimen de sa peinture dans la galerie Fesch; toile haute 2 p. 6 p. 6 l., large 3 p. l p. 8 l. C'était un paysage rocailleux avec de beaux massifs d'arbres et une rivière; - deux hommes pêchent à la ligne; des bergers, des chêvres, des moutons, ‘Autant par sa couleur chaude et vigoureuse que par l'effet et l'habileté du pinceau, ce paysage est un de ceux qui se soutiennent le mieux à côté des ouvrages de Rembrandt. L'aspect est d'une grande vérité et l'action du soleil qui frappe sur la route produit un effet d'une merveilleuse illusion.’ Catal. Fesch p. 217. Le paysage du musée de Berlin que j'ai signalé. (?) Il signait rarement ses oeuvres et plusieurs d'entre elles ont assurément été attribuées à d'autres noms ou ont été oubliées comme anonymes. Je ne connais que deux ou trois dessins qui portent sa signature, écrite Rogman et Roghman. Deux portent des dates, le premier, Vue du château de Loenen 1647; l'autre, Vue sur le Oudezijds-kapel à Amsterdam, prise du Zeedijk, 1644. On trouve parmi ses dessins le paysage panoramique. | |
Salomon Ruijsdael.Cet excellent peintre a été sacrifié, lui et ses oeuvres, à son frère. Notons quatre tableaux datés, intéressants pour sa biographie. Trois se trouvent au musée de Dresden; | |
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L'un, une vue de rivière avec des bateaux de pêcheur et des vaisseaux à voile; horizon garni d'arbres; l'autre, l'entrée d'un village, avec un groupe de voyageurs. Signés S.R. 1633. Pièces ovales. - Le troisième, vue de ville avec beaucoup de figures; signé S.R. 1658. Le quatrième est au musée de Berlin; un grand et superbe paysage d'un ton jaune et brun, signé et avec la date 1642. | |
Nicolaas Moyaert.J'ai négligé de nommer ce peintre qui, par le goût et le choix de ses oeuvres a sa place parmi les précurseurs. C'est toujours le même refrein, avec ces artistes sacrifiés par l'histoire, - point de biographie, rareté d'oeuvres. Aucune galerie de l'Europe n'enregistre son nomGa naar voetnoot1. Seul le catalogue de la galerie de Brunsvic lui attribue un tableau. Mais c'est celui dont j'ai parlé au sujet de Pieter Molijn, dont il porte le monogramme. Moyaert paraît être né vers 1600. En 1630 ou 24 il était établi à Amsterdam. Il cultivait la peinture de portrait, d'histoire, de paysage avec figures. Son coloris est vigoureux, un sentiment pour la couleur et le clair-obscur analogue à celui de Rembrandt se fait jour dans ses oeuvres. Quelques auteurs le disent inspiré d'Elsheimer; d'autres de Rembrandt et de Lievens. Il a au contraire précédé de quelques années ces deux derniers. Salomon Koninck, si rapproché de Rembrandt, est disciple de Moyaert. Les eaux-fortes de Moyaert, 15 à 20 en nombre, sont encore dans le goût de Rembrandt. Ce sont des paysages avec les | |
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sujets bibliques généralement choisis, Agar renvoyée par Abraham, le sacrifice d'Isaac, diverses scènes de l'histoire de Tobie. Ses tableaux sont extrêmement rares. A l'année 1624 les Annales de Rathgeber mentionnent un tableau, les quatre saisons. Th. Matham a gravé le portrait de L. Marius, peint par Moyaert. Hoet mentionne dans le lr vol. de ses catalogues un petit tableau vendu f1.10 sous. Rathgeber, un tableau daté 1653, Le jèune Tobie revenant avec l'ange. Ploos van Amstel possédait un paysage, dessiné à la plume et à l'encre de chine. La collection de Onderdewijngaart Canzius, vendue en 1806 en Hollande, conservait encore une peinture de Moyaert, un petit paysage avec des baigneurs. M. du Rosey avait de lui un paysage à grands arbres; au premier plan cinq figures orientales. D'un coloris vigoureux. Cela paraît un sujet de l'ancien testament. C'est d'après ses compositions peintes à l'occasion de l'entrée de Marie de Médicis à Amsterdam en 1638, que Nolpe a gravé les planches pour illustrer la description de ces fêtes par Barlaeus. Dans ces compositions encore le peintre vise à l'effet pittoresque de la lumière et des ombres. Il existe encore un tableau de Nicolaas Moyaert parmi ceux que la ville d'Amsterdam possède dans son hôtel de ville. Voilà à peu près ce que l'on sait de ce peintre. Sa place est avec Bramer, Uytenbrouck, Lastman, Elsheimer.
Les sujets bibliques et mythologiques choisis par ces peintres, Bramer, Moyaert, Uytenbrouck, Lastman, Elsheimer, sont très remarquables pour l'étude qui nous occupe. La liste de leurs oeuvres montre à tout moment des sujets fami- | |
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liers à tout connaisseur de Rembrandt. Au lieu de la partie visionnaire, prophétique de la bible c'est la partie historique et patriarcale qui attira ces peintres. Aux scènes d'horreur on préféra les scènes attendrissantes; au côté dogmatique le côté moral. L'art évidemment s'était rapproché de la vie, du sentiment humain. Ainsi ces peintres se complurent à reproduire les bienfaits de Jesus, ses disciples, ses amis. Lazare, la femme adultère, le bon Samaritain, l'adoration des bergers, la fuite en Egypte, Simeon au temple, Paul et Barnabas à Lystres, voilà les sujets traités par les artistes que nous avons nommés. Dans l'ancien testament de même, ils recherchaient la vie des partriarches, l'histoire de Joseph, de Manoé, de David, d'Esther. Tous s'éprirent de l'histoire romantique de Tobie. Le vieux Tobie aveugle, le jeune Tobie recevant la bénédiction de son père, - Tobie en voyage, conduit par l'ange, portant le poisson miraculeux, Tobie qui guérit les yeux de son père, l'ange disparaissant, - on les rencontre chez tous. Tous ces mêmes sujets se retrouvent dans l'oeuvre de Rembrandt.
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Leonard Bramer.Comme la plupart de ces peintres n'ont jamais été étudiés, il importe de rassembler une fois ce qu'on a pu trouver concernant leur vie et leurs oeuvres. Mes notices pourront être utiles à des recherches plus étendues. Bramer est né à Noël en l'an 1596 à Delft, et vivait encore en 1667. (Bleyswijk, Descript. de Delft, auteur contemporain et demeurant dans cette ville.) Après ses voyages en France et en Italie il se fixa à Delft. Là il exécuta ses peintures ‘al fresco’ dans la salle dite la | |
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salle peinte, au Doelen, reconstruit en 1655 après le désastre de 1654. En 1661 il est à la tête de quelquesuns de ses confrères pour constituer une gilde de Saint Luc. - Les six chefs étaient Bramer, C. de Man, A. van de Velde, A van Sanen, Q. Kleynoven, A. Keyzer. On s'assemblait dans la ci-devant chapelle de Saint Chistophe. La salle était ornée d'un arc de triomphe avec des figures allégoriques par de Man. Bramer couvrit la voûte de ses peintures. Hoet et Terwesten ont noté 18 tableaux de sa main: La femme adultère f 2,5. Naissance de Jesus f6.-. Les pères de l'Eglise décrivant l'ascension de Marie f 50.-. La reine de Saba f 77.-. Salomon priant f 130.-. Un Docteur f 61.-. Descente de croix f 60.-. Offrande f 32.-. David f 10,5. Circoncision f 11.-. Naissance f 4,2. Adoration des mages f 4,10. Naissance et Christ en croix f 17.-. Pyrame et Thisbé, sur cuivre, f 28,5. Jugement de Salomon, f 20,5. Marie lavant les pieds de Jesus f 10,5. Sujet histor. f 43.-. Dans la collection de l'Electeur de Cologne en 1764 a passé un Pyrame et Thisbé, 500 livres. Collect. Neyman à Amsterdam 1776, Adoration des rois mages, 9 livres. Vente van der Marck, à Amsterdam 1773, portrait de l'artiste par lui-même. Dans la galerie Fesch, adoration des rois mages; la composition est éclairée d'une manière piquante par l'étoile. ‘Vigueur et bel empâtement de la couleur; fermeté de la brosse; grand effet.’ - H, 2 p. 2, 10 l. 2 p. 8, 3. Cabinet Renesse Breidbach, 1835, Esther devant Ahasuerus; sur bois. Coll. Ploos van Amstel, 19 dessins, compositions bibliques, à l'encre de Chine et au blanc. | |
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Coll. du prof. Bleuland, 1839 à Utrecht, Tobie qui guérit les yeux de son père. Musée de Turin, résurrection de Lazare. Galerie de Brunsvic, Jesus parmi les docteurs; effet piquant de lumière; - Circoncision; - Simeon dans le temple. Musée de Vienne, un homme joue du luth, une femme se contemple dans un miroir; la table est couverte de bijoux. Signé L. Bramer. A Dresden, Salomon au temple; - La reine de Saba visitant Salomon; - Jesus portant la couronne d'épines. Musée d'Amsterdam, portrait de P.C. Hooft; tableau douteux. A l'hôtel de ville de Delft, le triptyque. Musée Boymans à Rotterdam, Descente de croix, effet rembrandtesque; - Vieillard lisant; - trois dessins à l'encre de Chine et au blanc, deux sujets du Nouv. Testam. le troisième des soldats jouant aux cartes. Eaux-fortes: Jesus chez Nicodème; dans la manière de van Vliet et de Grebber. Deux sujets allégoriques. Homme faisant de la musique; Nature morte, un coffre, un bocal etc. M. Kramm mentionne encore une collection de 72 croquis, illustrations de la vie de Tijl Uilenspiegel, ‘door L. Bramer geïnventeerd, 1656.’
Moyses van Uytenbrouck. Immerzeel dit qu'il est né à la Haye vers 1600. Je ne discuterai pas le lieu de naissance; mais je ferai observer que plusieurs personnes de ce nom ont occupé des charges municipales à Delft, à la fin du 16e et au commencement du 17e siècle. Ses relations de famille doivent donc être | |
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cherchées à Delft. Il faut qu'il soit né avant 1600. M. Kramm a remarqué qu'une estampe de sa main, St. Pierre et St. Paul guérissant le paralytique, est datée 1615. Ainsi que je l'ai déjà dit, Willem Swanenburch, mort en 1612, a gravé d'après lui, ce qui nous fournit une date encore plus reculée. De l'année 1620 on a de lui des estampes, Abraham renvoyant Agar; Saul oint par Samuel; Tobie; de 1621, Tobie guérissant son père; de 1627, Loth et ses filles; de 1646 le sacrifice d'Abraham. Plusieurs de ses compositions ont été gravées par Jan van de Velde, entre autres l'histoire de Tobie. Voici quelques notes concernant ses tableaux: En 1626 C. Liefrinck et J. van Goyen ont fait l'inventaire des tableaux laissés par Aernout Elsevier; il s'y trouvait un grand tableau de Uytenbrouck, avec ‘l'histoire de Jacob’ évalué f 60.- et un autre, évalué f 28.-. Paysage avec cascade et animaux, à la galerie de Florence. Paysage avec bergers dansant autour d'un arbre; à Vienne. Paysage avec Nymphes et Faunes; à Vienne. Dans les ventes notées par Hoet et Terwesten ont passé: Un paysage avec figures f 16.-. Paysage avec figures et ruines f 16.15. Grand paysage figures et ruines f 10.10. Une bacchanale (h. 4 p., 1. 6 p.) f 72.-. Beau paysage avec fleurs et plantes, et une Cleopâtre mordue par l'aspic; paysage par Elsheimer figures de M. v. Uytenbrouck f 54.-. h. 1 p. 4 ½ 1. 1 p. 7¾. Moïse sauvé des eaux f 110.-. Calisto au bain f 18.-. Thamar et Juda, dans un paysage f 8.10. | |
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Venus et Satyre f 13.-. Paysage avec des vaches f 5.-. Pan et Syrinx f 25.-. Les amours d'Alphée et d'Aréthuse f 3.-. Paysage avec figures f 13.-. Sujet historique f 42.-. Jugement de Midas f 13.-. Paysage avec figures et animaux f 12.-. Id. f 10.-. M. du Rosey possédait de lui trois petits paysages avec figures orientales, sujets de l'ancien testament; compositions à plusieurs figures; paysages d'un ton vert bleuâtre; très délicatement peints, dans le goût d'Elsheimer. Dans les livres d'ordonnance du prince Frédéric Henri, j'ai trouvé des payements faits à M. van Uytenbrouck pour trois tableaux, Pomone, et Europe, f 1200, en 1642. Orphée, f 850, en 1646. A Brunsvic, - Jupiter et Mercure chez Philemon et Baucis; - Fête de Bacchus dans un paysage; signé M̊V.WBr 1627. A Vienne, deux paysages boisés, avec Nymphes et Faunes, signés Mozes Vyt den Broeck. Pour la connaissance des sujets et des prix ces notices peuvent offrir quelque intérêt.
Elsheimer. Hoet mentionne dans le 1r vol. de ses catalogues un paysage d'Elsheimer, dont les figures, - Diane entourée de ses femmes et découvrant la grossesse de Calisto, - auraient été peintes par Philip Koninck. Ce fait, qui de cette façon rapprocherait encore Elsheimer de l'entourage de Rembrandt, ne saurait être accepté. Koninck né en 1609 ne peut avoir travaillé avec Elsheimer mort en | |
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1620. Le Koninck cité par Hoet, sera peut-être J. König de Nürnberg, qui était disciple et sectateur d'Elsheimer et se trouvait en 1613 à Rome. | |
Pieter Lastman.Voici les vers de Vondel au sujet du portrait de Lastman: Op Peter Lastman, Den Apelles Onzer Eeuwe.
De geest van Peter voer in 't ordineren speelen,
En volghde vrou Natuur op doeken en panneelen,
Zijn kunstgetuigen. Toon, wie 't oordeel strijken kan,
Of lastman Fenix was, of Rubens, zijn genan.
De Keizer heeft hem dus den ommetrek gegeven:
Maer anders tekent hij zich in zijn kunst naer 't leven.
Houbraken, faisant mention de ce portrait, le dit ‘peint par Thomas de Keyser.’ La seconde pièce de poésie que Vondel fit en l'honneur du tableau de Lastman, représentant Paul et Barnabé à Lystres, est trop longue pour l'insérer ici. Les vers sont dédiés à Joan Six ‘le grand connaisseur,’ qui possédait le tableau en question. Ils contiennent, après un éloge du peintre, la paraphrase poétique du tableau. On y reconnaît parfaitement les détails qu'on rencontre ordinairement dans les tableaux de Lastman. |
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