Het Cancellierboeck
(1931)–Robert de Sorbon– Auteursrecht onbekend
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Résumé.La théocentricité du Moyen-âge, formant une homogénéité presque uniforme de religion et de vie, comporte la subordination de la vie à l'idéologie monopolisée de ces temps. Il est évident que la littérature catéchétique du Moyen-âge est très étendue; les ouvrages écrits en vue de la confession y occupent une place prépondérante. Aux premiers siècles de la Chrétienté on ne trouve que des libri ou canones poenitentiales, des livres pénitentiels dans lesquels les expiations de grands péchés sont seulement décrites comme l'apostasie, l'homicide et l'adultère. Les livres pénitentiels ont disparu vers le 12e siècle, à cause d'une précision trop poussée. Au fur et à mesure que l'institution de la confession gagnait en influence et qu'on insistait sur la confession des péchés moins graves, on avait besoin de manuels, écrits en langue populaire. Un des plus anciens miroirs en Allemagne, écrit en vieux-saxon, est conservé par un ms. du 10e siècle; il est destiné aux prêtres et aux laics et les péchés n'y sont pas groupés d'après le décalogue, les sept péchés mortels ou d'autres normes. A côté d'autres miroirs ou Beichtspiegel existent les Sündenklagen: des poèmesGa naar voetnoot1) plus on moins lyriques, composés par des moines. On ne s'en sert pas à la confession. Dans le Milstätter Sündenklage le pécheur repentant se charge devant Dieu, en accusant 1o. les pieds, 2o. les genoux, 3o. les mains, 4o. le coeur, 5o. la langue et la bouche, 6o. les oreilles et 7o. les yeux. Les divisions des péchés d'après le décalogue ou d'autre groupement y font défaut. Ce n'est que dans la seconde moitié du 14e siècle, que nous trouvons un ‘Bihtebuoch’, dans lequel les péches sont groupés d'après le décalogue. Les livres concernant la confession, peuvent être divisés en deux groupes. 1o. Les miroirs, proprement dits, écrits seulement en vue de la confession. 2o. Les ouvrages de compilation et les encyclopédies morales, | |
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dans lesquelles se trouvent des traités, concernant la confession et les péchés. La distinction de ces deux catégories d'ouvrages est un peu arbitraire. Maint ouvrage, écrit en vue de la confession, est devenu vraiment une compilation, traitant divers sujets, parce que l'auteur y décrit, à côté des défauts et des péchés de la société de ces temps, le crédo et d'autres sujets, ayant rapport à la théologie morale. Au 12e siècle il y a déjà en France toute une littérature catéchétique, comprenant des miroirs et des ouvrages de compilation. Le Manuel des Pechiez de Wilham de Wadington peut servir d'exemple d'un miroir, écrit en vue de la confession. Un exemple du second groupe est La Lumière as Lais. Le livre III de cet ouvrage est un traité de péchés. A côté de ceux-ci il existe plusieurs ouvrages de confession - plus ou moins étendus - dans des genres différents. Dans la littérature anglaise nous trouvons un exemple d'un ouvrage, dans lequel le contenu d'un miroir fait partie d'une sorte d'encyclopédie historique. Cet ouvrage, Cursor Mundi, comprend l'histoire du monde à partir de la Création jusqu'au Jugement dernier; il traite dans le Boke of Penance des péchés. Ce Boke of Penance contient trois parties, qu'on trouve dans la plupart des ouvrages, écrits en vue de la confession, à savoir: la pénitence, la confession et la satisfaction. La confession en est la partie la plus étendue. La littérature néerlandaise du Moyen-âge possède aussi des miroirs et des ouvrages de compilation ou des encyclopédies morales, dans lesquelles le décalogue et les 7 péchés mortels sont juxtaposés. Il ne faut pas toujours mettre dans un rapport trop étroit la confession et les miroirs. Dans le cadre du décalogue et des sept péchés mortels les moralistes nous ont donné souvent leur opinion sur la société médiévale; ils ignoraient d'autres catégories de jugements, dans lesquels leurs opinions critiques sur la société pouvait être encadrées. Dans ces ouvrages d'inspiration morale on didactique, la confession n'occupe pas toujours la place centrale. Il y en a d'autres encore, dans lesquels l'auteur se sert du décalogue et des sept péchés mortels pour raconter des histoires, | |
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parfois peu édifiantes; citons comme exemple la Confessio Amantis de John Gower. La plupart des ouvrages d'instruction religieuse sont dépourvus de tout mérite esthétique. La place prépondérante, occupée par le décalogue et les sept péchés mortels dans la littérature médiévale nous montre la préoccupation de l'esprit du Moyen-âge, un esprit qui était avant tout théocentrique.
Un exemple d'un ouvrage, écrit en vue de la confession, qu'on trouve dans la littérature néerlandaise médiévale, est connu sous le nom de Cancellierboeck. (‘Livre du Chancelier’; ce livre est intitulé ainsi à cause de la comparaison de Dieu comme Chancelier au Jugement dernier avec le Chancelier de l'Université). Cet ouvrage contient une traduction de deux traités de Robert de Sorbon, à savoir le De Consciencia et le De Tribus Dietis. Le compilateur y a ajouté un traité de péchés. Il existe de cet ouvrage plusieurs mss., écrits en differents dialectes du moyen-néerlandais. L'étude des dialectes de ces mss., la couche sousjacente et la stratigraphie des mots nous montrent, que l'original est fait dans les Pays-Bas du Sud. Plusieurs ouvrages, traduits du français se répandent du Brabant ou des Flandres vers la Hollande. Dans le Cancellierboeck les deux traités de Robert de Sorbon sont compilés d'une manière assez singulière. Le compilateur a suivi d'abord une partie du De Consciencia; ensuite il prend quelques pages du De Tribus Dietis pour remonter au De Consciencia; après l'avoir traduit entièrement, il reprend le De Tribus Dietis. Puis suit la seconde partie, qui traite du décalogue, des sept péchés mortels et des oeuvres de miséricorde. On rencontre ces parties dans tous les ouvrages, écrits en vue de la confession et dans tous les miroirs. Dans le ‘Cancellierboeck’ ces traités sont un vrai catalogue de péchés, sans autre importance qu'ils nous renseignent sur nombre d'abus dans la société médiévale. Après cette partie le compilateur reprend le De Tribus Dietis, qu'il suit jusqu'à la fin. Malgré cette compilation singulière, la transition est graduelle et la cohérence en est restée intacte. | |
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Nous appelons rédaction B du Cancellierboeck, le texte qui nous est conservé par un ms. W. et par une édition incunable, imprimée à LübeckGa naar voetnoot1). Cette redaction B (à l'opposé de rédaction A) comprend plusieurs amplifications, qui sont empruntées aux deux Summae de Guillaume Péraud. Le compilateur n'a probablement pas utilisé le De Confessione en ce qui concerne la seconde partie, qui traite des péchés; celle-ci est rédigée différemment que le traité de Robert de Sorbon. On peut supposer que les mss. du moyen-néerlandais sont une traduction d'une compilation latine, dans laquelle deux traités de Robert de Sorbon, à savoir le De Consciencia et le De Tribus Dietis sont combinés avec une troisième partie, qui traite des péches. Les deux rédactions A et B du Cancellierboeck approchent de la rédaction B du De Consciencia et des rédactions C et B du De Tribus Dietis, citées par ChambonGa naar voetnoot2). Aprés la comparaison des différents textes nous avons trouvé qu'aucune paraphrase des deux ouvrages de Robert de Sorbon a servi d'exemple. Il faut citer encore le groupe des mss. en moyen-néerlandais, qui comprend seulement une traduction du De Tribus Dietis, connue sous le nom: Van den drien Dachvaerden ou Van den drie Milen. Ils remontent, autant que nous les avons comparés, à une seule source. Les mss. comprenant le texte du Cancellierboeck sont plus récents que ceux, qui contiennent la traduction seule du De Tribus Dietis. Les deux groupes de mss. ne se sont pas influencéés. Les traités de Robert de Sorbon ont eu beaucoup de succès, comme le prouvent nombre de mss. latins en France et les traductions (parfois fortement remaniées) en moyen-néerlandais et moyen-bas-allemand. |
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