Brieven en dokumenten
[13 januari 1864
Brief van Tine aan Stéphanie]
* 13 januari 1864
Brief van Tine aan Stéphanie. (Pée: Tine, blz. 24-25)
Bruxelles, le 13 Janvier 64.
Ma Loutjou très chèrelje suis un peu plus gaie; une lettre de Dekker m'a donné un rayon d'espoir et mon esprit est plus calme après ta lettre du 8 Janvier.
J'ai soif d'être grondée par toi. Et puis, je me figure que tu me pardonnes, que tu m'embrasses tendrement et que mon courage se ranime par ton influence. Je sens très bien que j'ai un devoir à remplir qui n'est pas facile, mais ce serait impardonnable de faiblir là où mon courage et ma persévérance sont exigés. Dekker compte sur moi. Je ne serais pas digne d'être sa femme, si je manque à mes devoirs. Autrefois, quand Dekker fut toujours auprès de moi, c'était beaucoup plus facile. J'ai mené une vie exceptionnelle et très excentrique; j'étais animée par lui. Aujourd'hui je suis seule, je dois agir moi-même. Car si Dekker est préoccupé, je dois le ménager en tout; il est très irritable; pourquoi je ne lui dis plus toutes mes pensées. Si je suis mélancolique, je ne lui en parle pas. C'est alors à toi, à ma chère enfant qui me comprend, que je m'adresse, et qui a le coeur de me répondre et de sentir avec moi, qui sait remonter mon esprit et ranimer mon courage. Comprends-tu à présent que tu m'es nécessaire?
Edouard est mon bon sauvage; son coeur ne connaît pas le mal. Nonnie est plus intelligente que lui, mais beaucoup plus irritable, ce que je dois tâcher de dompter par la douceur. Je voudrais que j'avais le don d'imposer, ce que toi tu as si bien; tu imposes avec dignité et douceur, en charmant en même temps par ta franchise de coeur et l'élévation de ton âme. Voilà le secret que tu auras toujours...
Je vais t'embrasser tendrement, mon enfant; je t'aime comme j'aime Nonnie, avec passion. Oh, comme j'aimerais de passer les bois de Java remplis de tigres, moi seule, si cela était le chemin de pouvoir venir auprès de toi!