Volledige werken. Deel 3. Japanse gesprekken. De school des levens. Ideeën, tweede bundel. De bruid daarboven. De zegen Gods door Waterloo. Franse rymen
(1951)– Multatuli– Auteursrecht onbekend535.Of ik ‘mooi’ gesproken heb op dat Congres? Waarschynlyk niet. Ik spreek niet mooi. Maar wel schyn ik goed gesproken te hebben, gedreven als Juvenalis by 't maken van z'n verzen, door verontwaardiging. Ziehier wat ik gezegd heb volgens de officiële ‘Annales de l'Association internationale pour le progrès des sciences sociales, troisième session, Congrès d' Amsterdam.’ M. Douwes Dekker (Amsterdam): - Je n'aime pas les discours. Je crois qu'ordinairement ils tendent plutôt à produire beaucoup de paroles qu'à faire sentir la vérité, et je viens d'en constater une nouvelle preuve. Le dernier orateur si éloquent m'aurait presque séduit et entraîné à me ranger sous la bannière du parti libéral, si je ne préférais me ranger sous la bannière des gens de coeur. (Murmures) Je n'ai pas parlé des libéraux, messieurs, j'ai parlé du parti libéral. J'attaque la politique, mais non les personnes. Je n'ai pas besoin de dire que je respecte l'orateur qui descend de cette tribune: je viens de lui tendre la main. | |
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Je suis responsable de ce que je dis. Il y a quatre ans que mes écrits ont été publiés en Hollande. Il vous est très facile de m'empêcher de continuer, mais j'affirme que jusqu'ici, parmi ceux-là même qui étaient appelés personnellement à me combattre, aucun ne m'a répondu. (Interruption) Je reviens à la question: Quelle a été et quelle doit être l'influence des sciences économiques sur le régime colonial? Vous comprenez que dans cette enceinte et dans le court espace de temps dont je dispose, pressé par les remarques qui bientôt me viendront du bureau, il m'est impossible de traiter cette question à fond. A la question: Quel a été l'effet des sciences économiques sur le régime colonial? Je réponds, en me bornant à la Hollande: il a été nul. Je vous le demande, quelle pouvait être, avant 1830, l'influence de la science économique sur la manière de conduire les affaires au divan du dey d'Alger? Ce que je dis, je l'ai écrit, et l'on ne m'a pas répondu. On me demande des preuves. Voulez-vous que je vous raconte l'administration sanglante, s'il en fut, de la Compagnie des Indes, de ces épiciers armés qui, tenant la bible d'une main et l'épée de l'autre, montraient le ciel aux aborigènes en leur enlevant la terre? Voulez-vous que je cite tous les faits qui se pressent dans mes souvenirs? Voulez-vous que je vous fasse la déscription des villages détruits et brûlés par les héros de l'armée néerlandaise? Voulez-vous que je vous montre les cadavres des femmes et des enfants assassinés sous l'égide du Dieu de la Hollande? Non, ce n'est pas de pareils faits que je vous entretiendrai; car il pourrait se lever ici telle personne qui, ayant séjourné aux Indes et n'ayant pas vu ces choses auxquelles j'ai assisté, me répondrait: Cela n'est pas vrai, parce que je ne l'ai pas vu. Je ne dirai donc rien de mon expérience personelle. J'ai dit, il y a quatre ans, dans un petit livre que j'ai ici, que les chefs javanais s'appropriaient les biens des indigènes, et que les résidents, vice-résidents et autres, au lieu de punir ces crimes, se faisaient, pour ainsi dire, les complices de ces malfaiteurs. On me croira ou l'on | |
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ne me croira pas, mais l'année suivante, j'ai publié la liste de tous les buffles qui ont été volés, dans le cours du mois de fevrier 1856, dans un seul arrondissement, pendant que j'administrais la province, sous l'autorité du gouvernement du roi de Hollande. On ne m'a pas répondu. Est-ce une preuve? J'ai ici un ordre du jour du lieutenant-général Vanswieten, dans lequel il dit que, lorsqu'il y a deux siècles, l'armée française saccageait le Palatinat, il s'éleva partout un cri d'indignation, et il engage ses officiers à en finir avec cette manière de faire, parce que, dit-il, nous ne pouvons faire maintenant ce qui était condamné déjà il y a deux siècles. Voilà l'humanité mise au rang d'une nouveauté. Il y a de cela trois ans. Quant à la manière dont se divisent les partis en Hollande, je n'en sais pas grand-chose. On parle de conservateurs et de libéraux. M. Bake disait tout à l'heure que le Javanais ne travaillait que lorsqu'il y était contraint. Il y a du vrai dans cette assertion, mais si le Javanais n'est pas majeur en ce moment, cela ne prouve pas qu'il ne pourrait pas le devenir sous un gouvernement humain. Mais on ne l'entend pas ainsi! Toute l'economie sociale, aux Indes, est basée sur le respect inné de l'aborigène pour son chef naturel. Craindre le chef de sa tribu, c'est presque synonyme pour lui de craindre le Seigneur. Son chef, c'est son Dieu, sa religion. Aussi le régime colonial, soi-disant conservateur, a parfaitement compris tout le parti qu'on pouvait tirer de ces dispositions. On s'est dit que, pour s'emparer des biens des aborigènes, il suffirait de donner une partie du butin au chef et c'est ce qu'on a fait. A ce propos, permettez-moi de vous dire la seule différence qui existe, selon moi, entre les conservateurs et les libéraux. Les conservateurs veulent faire travailler les Javanais et enrichir à leurs dépens, le trésor public de la nation hollandaise, tandis que les libéraux veulent que ce soient les industriels hollandais euxmêmes qui profitent du travail des Javanais. (Applaudissements) Et c'est pour cela que moi, qui ne veux appartenir qu'au parti des honnêtes gens, je n'ai pu jusqu'ici m'associer encore à aucun de ces deux partis. Pour vous donner une idée du respect du Javanais pour son chef, | |
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je me permettrai de vous raconter un fait, un malheur qui a eu lieu, il y a quelque vingt ans, et qui vous permettra de juger de la civilisation que les Hollandais donnent à leurs colonies, en retour des richesses qu'ils en retirent. Un PancyrienGa naar voetnoot* appartenant à la cour de l'Empereur de Souracarta rentra un soir dans son craton (le craton n'est ni un palais, ni un château, c'est quelque chose comme tout cela ensemble, une espèce de forteresse). Il sortait du club européen, c'était un Javanais civilisé, il avait des bottes. (Rires) Rentré dans son craton il se met dans un état peut-être un peu trop civilisé; il ordonne à un jeune page, petit garçon de famille noble, dont le titre correspondrait, en France, à celui de chevalier, il ordonne à ce jeune page de lui ôter ses bottes; l'enfant s'incline. Le prince lui dit: sais-tu bien que je peux te tuer? - Oui, Monseigneur. - Mais c'est la vérité: j'ai droit de vie et de mort sur toi. - Comme vous le dites, Seigneur. Le prince, exaspéré de ce calme, il aurait peut-être mieux aimé être contredit, ordonne à son page de lui apporter son kriss. L'enfant prend l'arme, l'offre à son seigneur, le manche en avant, et lui présente sa poitrine. Le pancyrienGa naar voetnoot* saisit l'arme des mains de son page et le tue raide. (Mouvement) Eh bien, ce pancyrienGa naar voetnoot*, je l'ai connu à MalteGa naar voetnoot**, et je dois le dire, j'ai aimé cet homme; c'est de ses yeux que, pour la première et peut-être pour la dernière fois de ma vie, j'ai vu couler des larmes javanaises. (Sensation) Ne vous en étonnez pas, messieurs, les larmes sont une invention de l'Occident, de l'Occident si fertile en inventions pour remplacer le sentiment par des manifestations! Pour ne pas obliger M. le Président à me rappeler au règlement, j'abrège.
De toutes parts: - Non, non, parlez.
M. Douwes Dekker: - Je vous remercie du fond du coeur de votre bienveillance: mais en voulant tout dire, j'aurais trop à | |
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‘Mon livre est mauvais, d'un méchant style, il n'y a pas d'harmonie entre les diverses parties... l'auteur est incapable, pas de talent, pas de méthode... Bien... bien, très-bien, mais le Javanais est maltraité. Car voici le mérite de mon livre: toute réfutation est impossible. Plus on sera mécontent de mon ouvrage, plus je m'en féliciterai; car la chance d'être écouté sera d'autant plus grande que votre mécontentement sera plus vif. Je veux être lu, je le veux... Et vous que j'ose déranger dans votre repos, anciens gouverneurs-généraux ou ministres, ne comptez pas trop sur l'incapacité de ma plume. Elle pourrait s'exercer au point même de faire croire à la vérité! Alors je demanderais un mandat de représentant pour protester contre la honte de ma patrie; pour protester contre ces guerres meurtrières, faites là-bas aux pauvres gens qu'on excite à la révolte par l'oppression; pour protester contre la lâcheté qui laisse tant de sujets du roi de Hollande à la merci des pirates de l'archipel indien... Il est vrai que ces pirates sont des guerriers, et les révoltés des spectres à demi morts de misère. Et si l'on ne me croyait pas, je traduirais mon livre dans le peu de langues que je sais, et dans toutes celles que je pourrais apprendre, pour demander à l'Europe ce que j'aurais vainement cherché en Hollande. Et si mes efforts échouaient encore, je traduirais mes livres en malais, en javanais, en batta, en alfomeGa naar voetnoot*, en bougi, en soendah. Et j'aiguisera is les kléwangs en lançant des chants de guerre dans le coeur de ces pauvres martyrs, auxquels j'ai promis du secours... Mais cela ne sera pas nécessaire, j'espère. Car c'est à vous que je dédie mon livre, Guillaume iii, roi, grand-duc, prince, empereur du magnifique empire d'Insulinde qui se déroule autour de l'équateur, comme une guirlande d'éméraudes. C'est à vous, Guillaume iii, que je demande avec confiance, si | |
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c'est votre volonté impériale, que là-bas trente millions de vos sujets soient maltraités, opprimés, martyrisés en votre nom?’ On n'a pas répondu. La nation hollandaise, représentée par son gouvernement, est condamnée par défaut.
M. Dumonceau (Liège). - Le gouvernement hollandais a été attaqué avec une telle vivacité, qu'il est nécessaire que l'un ou l'autre membre de cette assemblée veuille bien maintenant entreprendre sa défense, afin que nous n'en emportions pas une trop mauvaise idée.
Nog eens, niemand heeft geantwoord. De heer Dumonceau kan precies geweten hebben, onder welken indruk de vreemdelingen Holland verlaten zouden. |
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