Journaal gedurende de veldtochten der jaren 1673, 1675, 1676, 1677 en 1678
(1881)–Constantijn Huygens jr.– Auteursrechtvrij
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disnée. Le Majr Lavergne arriva de Malines et dit qu'au Brabant la nouvelle de la defaite de l'arrieregarde de Mr de Thurenne continuoit. J'escrivis à la Haye pour faire raccommoder un miroir, des ciseaux etc. | |
Mercredy. 4.Mr Le Prince partit le matin auec quelque suitte d'officiers pour s'aller abboucher avec le comte de Monterey. Je n'y fus pas, par ce que mon equipage n'estoit pas arrivé, lequel vint pourtant ce mesme matin. Le Coronel Steck arriva icy estant eschappé, a ce que l'on me dit, de sa prison, auec dessein de se justifier icy. Mr le Pr. revint sur les sept heures du soir et me demanda d'un visage riant pour quoy je n'estois pas venu. Je dis que mes chevaux n'estoyent pas venus. J'appris qu'il auoit esté enfermé avec le C. de Monterey environ trois heures. Walenbourg me dit que Barlau luy auoit dit que pour plusieurs raisons il ne croyoit pas que de eette annee l'on mettroit une armée en campagne. La chere a la seconde table auoit esté fort mediocre. | |
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ou il alloit au Moerdyck et de la au Sas de Stryen pour s'abboucher avec le comte de Waldec, lequel y vint sur les trois heures, accompagné du Comte de Hornes et un valet de chambre. S.A. fut une heure auec luy, puis s'en revint a Rosendael sur les 8 heures du soir. Le Sr d'Oyen me dit que le Majr Lavergne estoit en arrest pour des extorsions faites aux paysans de Rosendael. S.A. dit que demain elle iroit à Anvers. | |
Samedy. 7.Son Alts partit a 11 heures en carosse pour Anvers. Je suivis une heure apres auec le ministre et les deux Roosebooms, et nous arrivasmes sur les 6 heures à Anvers, la porte s'allant fermer, par une pluye continuelle qui ne cessa point et nous perça jusques sur la peau. Mr le P. logea dans la maison de Castro a costé de celle de Duarte. Je ne fus point a la Cour ce soir et me contentay de me sescher dans un tresmechant cabaret nommé de Biekorf ou nous souppasmes tresmal, et je couchay sur la paille laissant les lits aux autres. De Rosendael le chemin va par Nispen, Calmthout, Braschaten et Merxem, mais on peut s'esgarer fort facilement sur la bruyere. | |
Dimanche. 8.Je fus au lever de S.A. De la j'allay chercher Van den Enden, duquel j'acheptay quelques desseins et tailledouces. Je disnay au logis de S.A. L'apres disnee je fus auec Van den Enden, les Srs de Vos et Voet, dont nous attrapasmes a la fin le premier qui me fit voir ses desseins et dont j'en acheptay pour 395 livres. Son Alts partit a 3 heures apres disner et me donna permission de rester jusques au jour suivant. | |
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Moggershil auoit esté mis en arrest samedy passé pour les pretentions de l'Estat dans l'hostellerie van Hoff van Hollandt, ou il estoit gardé par quatre, je ne scay, boden ou bien dienders; la lettre de ma femme du 8e ne dit rien de cela. Le Regiment des Gardes a pied arriva icy en partie. | |
Jeudy. 12.Je disnay chez le Secretaire du bourg auec Languerac, 's Gravemoer etc. Le matin m'estant allé promener auec Albrantsweert sur le chemin de Bergues, il fit une grande cheute avec un cheval qu'il venoit de payer 400 £ à Ouwerkerck, sans se faire pourtant grand mal. S.A. fut le matin a la chasse, l'apresdisnée elle donna les ordres pour la marche du jour suivant. | |
Vendredy. 13.Nous partismes sur les 7½ heures de Roosendael, 's Gravemoer, Mr Bosvelt et moy, et arrivasmes environ à 1 heure a Westwesel, un assez bon village. Nous disnames dans un hameau, a un petit quart d'heure de la, chez Mr le Comte de Nassau. Mr le Prince estoit allé à Bergues et n'arriva au quartier qu'une heure ou deux apres nous. Je logeay dans une petite maison ou il n'y avoit qu'un bon homme et une fille dedans, nommée Anneke, et n'y ayant qu'une chambre ou couchoyent mes gens, et encore une autre; je couchay dans cellecy, ou estoit une petite boutique de chandelles et choses semblables et ou à tout moment on venoit heurter et demander à achepter. | |
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marché auec l'Infanterie. Je logeay dans une petite maison ou il n'y auoit qu'une seule chambre et ou le paisan, nommé Peeter Wouts et sa femme Catlyntje couchoient aussi, mon lict remplissant plus de la moitié de la chambre. Le jeune Rooseboom, Fiscal du Conseil de Guerre, dit que son Alte auoit approuvé la sentence dudt Conseil par laquelle le Cor. Bamphield auoit esté absous et restably en ses charges, mais que S.A. l'avoit pourtant cassé. Mrs de Louvignies et le marquis d'Assentado (sic), et le comte de Schellaert venoient parler a S.A. et retournerent à leur quartier. Le soir on envoya un ordre a Kirkpatrik d'envoyer occuper le pont du Dommel a Boxtel et les autres entre Bolduc et ledt Boxtel, et de faire marcher demain au soir le Regiment de Schellaert a Tilbourg ou il doibt estre rencontré par de la Cavallerie que S.A. luy envoyera auec des ordres, apparemment pour nous joindre, l'ordre touchant les ponts estant apparemment pour empescher les ennemy de venir de la Grave et d'attacquer ledt Regiment. S.A. logea à Santhoven chez le curé, nommé Joncker Willem, et estant gentilhomme en effet. | |
Dimanche. 15.Nous demeurasmes a Santhoven. S.A. escrivit aux Messrs des Affaires Secrettes qu'il devoit se joindre le deuxiesme jour apres à Mol et Bael auec les trouppes Espagnoles pour marcher ensemble à Venlo, à dessein d'y passer la Meuse, loger au pays de Coloigne et de Gulick, et prendre ses mesures, selon les mouvements des trouppes de l'Empereur et celles des ennemys. | |
Lundy. 16.Nous marchasmes de Santhoven à Lichtaert à une demy lieue dudt Santhoven. On passe a costé d'un vieil chasteau ruiné pour la plus part et ou il y a plusieurs petites tours hautes et rien qu'un tresmeschant corps de logis. Nous passames aussi à Grobbendonck une grande maison et de la plus belle situation du monde; une petite riviere fort rapide fait le fossé du jardin et proche de la | |
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fait une furieuse cascade, et tourne un moulin. La diversité des plantages et des jolies veues y est si grande que j'ay veu peu de si beaux paysages. Nous disnames dans une maison bastie sur les ruines d'une plus grande et vieille, appartenante a des St Maertensheeren à .......Ga naar voetnoot1)) Lichtaert est un mediocre village. Le matin il fit bien froid ayant gelé blanc la nuit, a midy il commença a faire un tres mauvais temps de pluye et de vent. S.A. parlant a table ou j'estois de la mort du Roy son grand pere et des affaires d'Angleterre, dit que si le duc de Yorke venoit a mourir devant le Roy ce seroit une dispute si ses filles devroyent le preceder a l'esgard de la Couronne. Je logeay chez un paysan nommé Cornelis van Gusch vis a vis du logis de S.A. Passant a Herentals, une meschante petite ville du Brabant, nous apprismes chez le marquis d'Assentar ou S.A. auoit mis pied a terre pour parler a luy, que l'Espagne auoit declaré la guerre a la France en toutes ses terres. | |
Mardy. 17.Nous marchames de Lichtaert à Mol, qui en est à trois bonnes lieues, et un grand village, plaisant et beau. Il y a un joly couvent de femmes. Je souppay chez 's Gravemoer et S.A. m'envoya querir estant a table, pour dechiffrer une lettre du Conte de Montecuculi, ou il mandoit que le jour suivant (il escrit du 9 de ce mois) il devoit estrc sur la riviere de Bints (sic) pour faciliter les entreprises de S.A. contre Cologne et Munster, qui estoit le vray chemin de mettre ces Princes a leur devoir; qu'il ne doubtoit pas que S.A. ne fust deja en marche pour se rendre maistre du pont d'Andernach et certaines autres petites places; que son armée souffroit disette de fourage et de vivres et que non obstant il auoit dessein de donner battaille a Turenne s'il pouvoit | |
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aller a luy ou qu'il vint a le chercher; qu'il estoit venu 2000 hommes de renfort a Turenne et encor depuis d'autre monde et qu'il falloit pour cela que S.A. luy envoyast du renfort de ses trouppes qui pour cet effet passassent la Lone (sic). | |
Jeudy. 19.Nous marchames par Bael ou nous avions logé dans la marche de Charleroy et couchasmes a Peer, petite ville du pais de Liege ou nous auions logé aussi en la mesme marche. Je disnay avec Mr le Rhingrave dans la bruyere. Comme nous fusmes tout pres de cette place S.A. m'ayant appellé me dit: ‘mettez vostre chapeau’, et puis: Il faut donc donner aux officiers des Gardes de ces sauvegardes que j'ay signées. On prendra de chacune certain argent et pour vous, vous aurez pour vostre droit un demy ducaton.’ Je repondis que cela seroit comme S.A. le trouveroit bon. Il fit ce jour la un tres beau temps et chaud, le chemin est assez bon depuis Bael. | |
Vendredy. 20.Nous marchasmes de Peer a Stampray, un village qui en est a 4½ lieuses. On passe par un village nommé Boeckholt ou l'on ne trouva quasi point de paisans, le tout s'estant retiré dans l'eglise et dans un certain fort ou ils avoyent sauvé leur bestail. Stampray est un petit et pauvre village. Il ne fit que pleuvoir tout le jour. Le soir on amena prisoniers un Capitaine de Cavallerie et seize cavaliers Francois. Le major du Regimt de Churlant ayant battu un party Francois aupres de Cranendoncq, dont il en estoit demeuré 20 sur la place. | |
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mois contre une cavalle eschappée d'un cheval Espagnol, de l'haras du Baron de Grysperre qu'auoit le Capne Sordet, en luy donnant 250 £ de retour. Il fit assez beau temps ce jour la. | |
Dimanche. 22.Nous marchasmes de Roggel a Baerle, a une lieue de Venlo et passames a Kessel ou l'on arriue sur la Meuse. Il y a un vieil chasteau situé sur la riviere. Je disnay auec son Altesse, qui conta à table au Rhingrave que Dyckvelt a Utrecht auoit gouverné toute la Prouince par le moyen de trois femmes, qu'il baisoit, a scavoir Mesdames de Borneval, Schadé et Hamel. Incontinent apres disner Mr le Prince, estant allé pour mettre les gardes et reconnoistre les avenues, j'allay avec Walenbourg a Venlo, a dessein d'y faire faire un bonnet. Je revins avec Rooseboom et nous nous esgarames plus d'une petite demyheure; en allant et revenant j'eus tousjours de la pluye. Rooseboom me dit en chemin que Beverning auoit tué Van Bergen à boire. | |
Lundy. 23.Nous partimes de Baerle, passames la Meuse a Venlo et allasmes loger a Kaldekirchen, la premiere place du pais de Juliers de ce costé la, estant une espece de villette ou de grand bourg. Je deseignay a la haste la veue de Venlo du haut d'une colline et S.A. l'ayant sceu, voulut voir ce petit dessein. Je faillis d'auoir un malheur sur le pont de la Meuse, la garde d'un sabre d'un cavalier du Regimt des gardes, qui voulut passer devant moy, s'estant embarrassé dans le mors de mon cheval. | |
Mardy. 24.Nous restames a Kaldekirchen. Je fus toute l'apresdisnee a mettre en chiffre une lettre de son Alts au Comte de Waldec ou il luy mandoit que ayant tenu le jour passé conseil de guerre auec les officiers generaux, il auoit esté resolu d'aller droit a Coblentz. 1. pour retenir dans le party l'Electeur de Treves qui commencoit fort a bransler. 2. pour faire subsister la | |
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cavallerie dans le Pais de Coloigne. 3. pour attirer la guerre dans ledt pays et en delivrer le nostre, et 4. pour faire partir le Rhin à l'armée imperiale qui ne le feroit pas autrement. | |
Jeudy. 26.Nous marchasmes de Dalen à Koninxhoven, un village situé entre les montagnes, l'Eglise estant tout en haut, et la situation tres belle. Il y a quatre bonnes heures de chemin; les chemins quoyque parmy un tres beau temps, furent tres vilains. Le Comte de Nassau prit poste a Caster sur la petite riviere de l'Erft qu'il nous falloit passer. Un maistre d'Hostel de l'Electeur de Treves, venu pour des sauvegardes, me conta entre autres choses que les Francois traittoyent l'Evesque de Strasbourg de ridicule. | |
Vendredy. 27.Nous marchasmes de Koninxhoven à une abbaye qui en est à 4 bonnes lieues et à deux heures de Coloigne, nommée Brawiler grande et riche. Ayant passé la petite riviere de l'Erft a Caster, le pays que l'on passe, est relevé de belles collines et fait de veues fort agreables, sur tout a une heure de l'abbayie susdite. Le soir sur les 9 heures et demye, pendant que nous estions a table et S.A. aussi, on vint crier au feu et ayant couru voir ce que c'estoit, je vis que c'estoyent les granges et les escuries du Cloistre qui estoyent fort grandes et brusloyent, et en mesme temps je rencontray de Wilde, qui criant comme une femme, me dit que tonts mes chevaux et les leurs estoyent bruslés et que mesme l'on ne scauoit ce qu'estoyent devenus Vlack et Offenberg qui avoyent couché dans lesds escuries. Je sauvay vistement ce que je desiray de conserver le premier et fus long temps a voir ce feu qui dura encor long temps et fut esteint apres auoir bruslé ces escuries et un corp de logis qui les joig- | |
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noit. Je remarquay des pigeons qui, ayant leur petits aux greniers de ce logis bruslé ne cesserent de voler continuellement dans la flamme quasi et au milieu de la fumee et des estincelles. Je perdis mes trois chevaux et leur equippage et une couverture de Japon qui me fut desrobbee apparemment. | |
Dimanche. 29.Je partis a 8 heures du matin pour Cologne auec Mr le Rhingrave par ordre de S.A. pour tascher d'aprester les affaires de la contribution. Nous parlasmes pour cet effet au Sr Donneker et par son addresse au Sr Screversdorf, receveur gnĚ…al de la taxe des simples, dont nous le pressames de nous donner les cahiers; il nous promit un extrait qu'il ne porta pas à l'heure promise n'y apres. Nous disnames a l'hostellerie du St Esprit. Je rencontray Jan mon palfrenier qui m'auoit achepté un cheval de valet pour 115 £. Trois de nos Plenipotentaires de Coulogne vindrent trouver S.A. Je revins a Brawiler auec mon valet dans l'obscurité, le chemin estant plein de soldats yvres. | |
Lundy. 30.Je fis rapport a S.A. de ce que nous auions fait a Coloigne. Nous marchasmes de Brawiler et arrivasmes environ a une heure a Breul, une petite ville a trois heures de Brawiler ou il y a un chasteau ou maison de plaisance auec un Parc de l'Electeur; dans cette maison il y auoit quelque garnison de l'Electeur qui tira sur nos gens qui s'approchoyent, un boulet d'une arquebuse a crochet. Ayant passé assez pres d'un lieu ou je m'amusay a regarder, S.A. les fit sommer; mais n'ayant point voulu se rendre, ils promirent de ne point tirer pourveu qu'on ne les approchast pas de trop pres. C'est | |
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icy le Chasteau ou se tint le Cardinal Mazarin du temps de sa retraitte. Nous logeasmes dans la Ville. | |
Mardy. 31.Nous marchasmes de Breul a Metternich, un village qui n'en est qu'a trois lieues. Son Altesse logea dans le Chasteau qui est situé plaisemment, et la maison assez bonne pour les bastiments de ce pays la. Dans une petite cour il y auoit une fontaine de tres belle eau et en assez grande quantité, mais qui estoit versée par un simple tuyau. La maison estoit toute en desordre et touts les meubles qu'on auoit pû sauver de hors. Un homme nommé Tromer, que S.A. m'avoit dit quelques jours passés qu'il avoit pris pour clercq de ma secretairie par ce qu'il scauoit l'Allemand, me vint trouver et saluer. Il y avoit dans une chambre joignant la mienne deux grands tours a tourner, mais sans outils. Tout le fossé de la maison est d'eau de fontaines et a costé, a la distance de quelques deux cents pas, une assez haute montagne couverte de beaux arbres faisant une tresagreable veue. Je receus des lettres de logis de Miralinde (sic), la cousine de Willem, ma femme, mon Pere etc. En marchant a Metternich, comme j'estois avec Mr le Rhingrave, nous rencontrames un petit lacquais, habillé de vert, pleurant et portant un enfant d'environ un an sur son dos, qui estoit la fille de la nourrice de Mad. de Metternich, et qu'il alloit porter a Coloigne, mais n'en pouvoit quasi plus. Mr le Rhingrave fit porter l'enfant a un soldat et revenir le lacquais pour les envoyer apres dans une charrette a Coloigne. |