Oeuvres complètes. Tome X. Correspondance 1691-1695
(1905)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekendNo 2707.
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spherique l'autre en spheroïde vous rend cette hypothese fort vraisemblable, mais vous ne laissez pas d'y concevoir des difficultez, qui semblent en empescher la possibilitè. Je vois pourtant que vous demeurez d'accord qu'il n'est pas impossible que les dissicultez qui nous semblent insurmontables dans l'etablissement d'une hypothese qui d'ailleurs satisfait aux phenomenes, se puissent expliquer de quelque maniere qui ne s'est pas encore presentée a nostre esprit. Je n'ay pas recherchè par le menu dans mon Traitè de la lumiere, comment ses 2 extensions se font dans ce Cristal, composé de particules spheroides, par ce que cette composition n'estoit elle mesme qu'une conjecture, mais j'y ay pensè du depuis et voicy de quelle maniere la chose m'a paru possible. Il est certain premierement qu'un espace estant rempli de matieres differentes, peut admettre des emanations d'ondes differentes en vitesse car cela arrive dans l'air meslé de la matiere etherée où il se fait des ondes pour l'etendue du son, et d'autres pour la lumiere qui sont beaucoup plus vistes que ces premieres. Ainsi lors qu'on voit de loin tirer un canon les ondes du son et celles de la lumiere partent en mesme instant, mais les unes s'avancent vers nous incomparablement plus viste que les autres. Apres pour ce qui est des matieres qui sont contenues dans le cristal d'Islande, je conçois ou suppose outre celle qui compose les petits spheroides, une autre qui occupe les intervalles qui restent autour des mesmes spheroides, et qui sert a les tenir joints ensemble. Et qu'outre cela il y a la matiere de l'ether repandue par tout le cristal tant entre que dans les parcelles des deux matieres que je viens de dire, car je pose et les petits spheroides, et la matiere dans les intervalles autour d'eux estre composè de particules tres menues et fixes, entre les quelles celles de l'ether encore plus deliées et qui sont en continuel mouvement sont repandues. Rien n'empesche maintenant que la refraction reguliere du cristal ne se fasse par les ondes qui s'etendent dans cette matiere etherée, entant qu'elle ne sert que seule a cette propagation. Et pour la refraction irreguliere je m'imagine un autre rang d'ondes qui ont pour vehicule et la matiere etherée, et les deux autres matieres du cristal, que j'ay appelées fixes. des quelles deux matieres je suppose que celles des petits spheroides transmet les ondes un peu plus vite que ne fait la matiere etherée telle qu'elle est semée dans le cristal; et que celle autour des spheroides transmet ces ondes un peu plus lentement que la mesme matiere etherée. Ainsi ces ondes s'etendant dans le sens de l'axe du cristal qui est aussi l'axe des spheroides, et cela à travers les trois matieres differentes, qui donnent le passage de differentes vitesses, il s'en pourra fort bien ensuivre la mesme vitesse ou a peu pres que celle que donne la matiere moyene, scavoir celle de l'ether repandüe dans le cristal. Mais ces mesmes ondes, dans le sens de la largeur des spheroides rencontrant dans leur passage plus de la matiere de ces spheroides ou du moins la passant avec moins d'interruption, elles s'etendront un peu plus viste en ce sens qu'en l'autre; et par ce moyen la lumiere formera des spheroides dont l'axe sera egal, ou peu s'en faut, au diametre de la sphere que font les ondes pour la refraction reguliere, mais dont le diametre perpend.e a l'axe | |
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sera un peu plus grand; comme j'avois trouvé ces raports par les effets des refractions pag. 68. Cette explication me paroit n'avoir rien d'impossible et je crois qu'elle pourra vous satisfaire. Si non, il faut penser qu'il y en a peut estre de meilleures. Je ne scaurois douter cependant que dans ce cristal la lumiere ne s'estende par des ondes spheriques et spheroides, vu le raport exact de tant d'experiences. Pour ce qui est de nostre dispute touchant la duretè des corps, je voudrois que vous repondissiez à mon argument du morceau de fer, ou de marbreGa naar voetnoot2) serré dans un estau, au quel j'ay fait voir que ni la pression d'en haut ni de costè de la matiere etherée ne peut empescher de laisser aller la partie superieure quand on la pousse horizontalement. De plus je ne comprens pas comment vostre idée de l'etendue enferme aussi la resistence et l'impenetrabilitè des corps, car ce dire trivial que non datur dimensionum penetratio n'a point de sens legitime. En sin un corps n'est pas corps selon moy s'il n'a en soy de quoy maintenir son etendue, et je ne vois pas que l'etendue elle mesme puisse servir a cela. Et quand cela seroit vos corps ne pourroient pourtant estre tous que parfaitement liquides, par ce qu'aucune force de pression par dehors ne pourroit empescher qu'au moindre attouchement un tel corps ne changeast de figure, mais cela est contraire a l'experience. |
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