Oeuvres complètes. Tome VIII. Correspondance 1676-1684

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N^o 2105.
Christiaan Huygens à J.B. Colbert.
14 octobre 1677.

La minute se trouve à Leiden, coll. Huygens.
La lettre fait suite au No. 2102¹⁾.

A Monsieur Colbert.

Monseigneur

Je ne scaurois vous tesmoigner assez l'obligation que j'ay a vostre bontè, tant de ce que vous daignez prendre quelque interest dans ma santè, en approuvant ce que j'ay creu necessaire pour la confirmer, que du soin qu'il vous a plu avoir de me faire jouir des gratifications du Roy non obstant ma longue absence et le peu de service, qu'il m'est permis de rendre pendant que je suis encore dans l'incertitude de mon entier restablissement.

Je le souhaite plus fortement Monseigneur pour avoir moyen de vous donner des marques plus expresses de ma reconnoissance, et pour pouvoir seconder autant que je suis capable vos hauts et nobles desseins en ce qui regarde l'avancement des sciences. Et puisque vous m'exhortez de songer a ce qui pourroit contribuer a rendre nostre academie plus illustre, quoyque je sois persuadè, que vos pensées la dessus devancent de beaucoup les mienes, je ne laisseray pas dès a cet'heure de chercher en moymesme et mediter avec application sur cette affaire, pour obeir a vos ordres.

J'ay veu depuis peu avec bien de la joye la belle invention qu'a trouvè le Sr. Romer, pour demonstrer que la lumiere en se repandant emploie du temps, et mesme pour mesurer ce temps, qui est une decouverte fort importante et a la confirmation de la quelle l'observatoire Royal s'emploiera dignement. Pour moy cette demonstration m'a agréee d'autant plus, que dans ce que j'escris de la Dioptrique j'ay supposè la mesme chose touchant la lumiere, et demontrè par la les proprietez de la refraction, et depuis peu celle du Cristal d'Islande²⁾, qui n'est pas une petite

1) Dans une lettre, dont une copie se trouve à l'Académie royale d'Amsterdam, Constantyn Huygens, père, écrivit à H. de Beringhen, sous la date 20 octobre 1677, ce qui suit:
‘Mon Archimède est assez bien remis de ses maux, quoy que tousjours foiblet et sujet à des douleurs de teste. Il receut ces jours passez une lettre fort civile de Monsieur Colbert, avec quelque lettre d'echange pour un terme de sa pension (consultez la Lettre N^o. 1837, note 1). J'espère que vers le printemps il sera en estat de se rendre à son devoir. Tel père que vous se peut imaginer s'il m'en est bien aysé de me passer de la conversation d'un tel enfant’.
Nous ne possédons pas cette lettre de Colbert.

2) Le livre E des Adversaria de Chr. Huygens fournit à ce sujet de nombreux renseignements. Aux pages 93 et 197 on trouve les démonstrations de la loi, découverte par Huygens dans la double réfraction du cristal d'Islande, d'après laquelle la surface d'onde du rayon extraordinaire est une sphéroïde. Plusieurs pages de ce journal se trouvent remplies de calculs faits à ce sujet. La démonstration de la page 93 porte l'inscription:
'eyphka 6 Aug. 1677. Causam mirae refractionis in Crystallo Islandico.
Au-dessus de l'article des pages 197 et suiv. Huygens a inscrit:
à Paris 6 aoust 1679. 'eyphka. La confirmation de ma theorie de la lumière et des refractions.
Ces articles trouveront leur place parmi les OEuvres inédites de Christiaan Huygens, qui suivront la Correspondance.

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merveille de la nature, ni aisée a aprofondir. Je me plains bien souvent de ma destinée d'estre d'une complexion si peu proportionnée a l'inclination que j'ay de travailler a ces belles connoissances. Cependant je m'y employe suivant que mes forces me permettent et avec cette satisfaction que ce n'est pas tout a fait inutilement. J'espere qu'un jour j'auray le bonheur de vous en rendre compte et me recommandant a vostre puissante protection je demeure

Monseigneur

Vostre treshumble et tres etc.

A la Haye ce 14 d'Octob. 1677.