Oeuvres complètes. Tome III. Correspondance 1660-1661
(1890)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekend
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l'un de ces bouts dans l'ëau elle monte dans ce tuijau sij il est fort estroict beaucoup plus haut que le niueau du reste de l'ëau, & cela par cette raison que l'air qui est soustenu dans le tuijau estroict ne presse pas tant l'ëau sur laquelle il porte que l'air libre presse le reste de cette mesme ëau comme nous venons de dire dans la 3e expérience & ainsij pour demeurer esgalement pressée partout il faut qu'elle monte dans le tuyau. Et ce d'autant plus haut que le Tuijau est plus estroict. Et par cette raison sij un Syphon de verre renuersé & bien net a une de ses branches B beaucoup plus menüe que l'autre A l'ëau ne se placera pas de niueau, mais montera plus haut dans la branche la plus menüe que dans l'autre. Il s'ensuict de cette explication que dans un autre Siphon que représente la figure cij jointe, les deux branches A. B. & C. D. estant d'un égal Diamétre & l'ëau ij aijant esté mise, comme la pratique l'enseignera mieux que je ne le pourrois dire, l'ëau montera esgalement dans la branche A. B. & dans la C. D. Sij le Tuijau est incliné à l'horison elle ij entre en plus grande quantité sans pourtant monter plus haut perpendiculairement. Car ce surcroist d'eau qui ij entre est porte par le verre ou plan incliné dans lequel elle se trouue. Sij le Tuijau de verre bien net & ouuert par les deux bouts est tenu perpendiculaire à l'horison dans l'air & qu'on laisse couler une goutte d'eau le long de la surface extérieure quand elle sera glissee jusqu'au bout d'en bas elle montera audedans, pour ce quelle est moins pressée en cet endroict que dans tout le reste de son cours. Sij le tuijau qu'on a plongé dans l'ëau est plus court que la hauteur à laquelle l'eau pourroit monter, l'eau montera jusques au bout d'en haut sans sortir, & sij on la faict sortir ou surmonter, la surface de cette ëau qui touchera l'air sera conuexe. Vn Tuijau de Verre estant courbé en Siphon dont une branche soit moindre que la hauteur à laquelle l'ëau peut monter sij on la plonge dans l'ëau elle montera jusques au haut puïs descendra dans l'autre branche. Et de la elle coulera en l'air sij le bout où elle est paruenüe est notablement au desoubs du niueau de l'autre et ne coulera pas sij ce bout est au dessus ou seulement de peu au dessoubs du mesme niueau. Sij on retire de l'ëau un Tuijau dans lequel il en seroit monté elle ne tombe pas. Et sij on renuerse ce mesme Tuijau en sorte que le bout où est l'ëau se trouue en haut; elle descendra & ne s'arrestera qu'au bout d'en bas. Sij le trou du Tuijau alloit en diminüant d'un bout à l'autre & qu'on le renuersast | |
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apres qu'il ij seroit monté de l'eau par le bout le plus menu elle pourroit bien descendre vers le bout ou le trou est le plus large pourueü qu'on le tint perpendiculaire à l'horizon. Mais sij on l'incline un peu quand l'ëau est desja paruenüe vers le bout d'en bas elle remontera jusques au hault. Toutes lesquelles experiences sont comme des Corrallaires de l'explication de la troisiesme et s'expliquent par la trop clairement ce me semble pour sij arrester dauantage. Les parties de l'Air que j'aij considérées dans les Tuijaux de verre se tournant tousjours comme je vous aij faict voir en une figure approchante d'une Sphére j'en aij tiré cette conséquence que l'air libre prenoit autant qu'il luij estoit possible cette mesme figure. Sij donc l'on tient un morceau de verre ou quelque autre Corps polij contre lequel l'ëau s'attache esleué sur l'eau, à l'endroict de l'Angle que fera ce Corps auec l'ëau jl restera un angle et un espace que l'air ne pourra pas remplir à cause de sa sphéricité dans lequel espace l'ëau montera puïs-qu'elle ne trouue en cet endroict le pressement de l'air qu'elle a partout ailleurs. Ainsij dans un verre bien net la sursace de l'ëau qui ne le remplira qu'a demij sera concaue. Sij au contraire ce corps qu'on aura mis sur l'ëau est graisseux et sale ou qu'il soit de telle nature que l'ëau ne le mouïlle point jl se fera un creux à l'endroict ou auparauant il ij auoit une éminence et cela par cette supposition que l'ëau ne le peut point mouïller en cét endroict où vous le supposez graiseux, que lair entrerajusques dans le Creux et au desoubs de la surface de l'ëau et que pour reprendre sa sphéricité, il rendra la sursace de cette ëau conuexe. Sij au liëu d'ëau vous prenez du vif argent, il arriuera la mesme chose. il vous paroistra esleué contre les Corps ausquels il s'attache comme contre le plomb, l'argent, l'or et l'estain et au contraire il sera enfoncé contre tous les autres ausquels il ne s'attache point. Enfin sij vous tenez sur l'ëau une Sphére de mesme matiére l'ëau montera, entre cette sphére et le costé du verre & fera une Corps dont la section et celle de l'eau montee sera telle. Des effects differans s'expliquansGa naar voetnoot2) de la sorte par une cause aussi simple que l'est ma supposition, ou plustost mon expérience me confirme dauantage dans l'opinion que j'en aij: Lors que vous jettez de l'ëau en l'air elle prend la forme d'une sphére, | |
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toute la masse de l'ëau a une superficie conuéxe. dans les expériences que je viens de dire, elle est tantost conuéxe et tantost concaue; et cependant cette diuersité suït d'un mesme principe. dans l'air estant pressée esgalement de tous costés elle doibt se reduïre en Sphere. le mesme se doibt dire de la Surface de la Mer. mais estant pressëe inégalement, comme elle est en effect dans ces diuerses expériences des verres elle doibt estre selon cette supposition tantost conuéxe tantost concaue, et auoir les autres apparences sous les quelles elle paroist en effect. Il me reste à respondre à deux objections que l'on me peut faire, l'une que l'ëau respandüe sur de la pousiére et estant couuerte d'un vaiseau éuazé et qui se termine en un col aussi estroict que sont les tuijaux de l'expérience l'ëau montera dans ce Tuijau, quoij que l'air de dehors en soit exclus. par l'interposition du verre qui la couure. Mais je respondraij en un mot que l'air qui est contenu dans la partie du tuijau éuazé peze sur la goutte d'ëau quoij que séparé de l'air libre autant que peseroit toute la colonne si il n'y auoit point de verre jnterpose. ce qui a este prouué au long par raisons et par des expériences dans le traiteGa naar voetnoot3) d'où ce discours a esté tiré. L'autre objection est que cét Air que je suppose engagé dans la branche la plus estroicte du Siphon doibt autant résister, par la raison de cét engagement à l'ëau qui monte qu'au reste de l'air qui peze dessus. Je ne puïs pas respondre plus pertinemment à cette seconde objection que par l'expérience que peuuent faire ceux qui sont dans ce doute et qui leur montrera que dans le Tuijau où l'air est engagé auec de l'ëau que l'ëau monte ou se glisse aisement entre le verre et l'air: lorsqu'elle ne l'en peut pas chasser comme il arriue lors qu'il est fermé des deux bouts. Et pour preuue de cette verité sij la petite branche du Siphon est grasse, l'eau ne montera point du tout, car la graise empesche que l'ëau ne fase ce que je dis qui est de se glisser entre le corps de l'air engagé et le verre. La mesme raison contribüe à empescher aussij le vif argent d'ij monter. |
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