Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend
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matieres de deplaisir, dans lesquelles me trouvant engagé presentement, je supplie tres-humblement V.A. d'aggreer que je m'en explique par ce peu de lignes. Il y a si peu de jours que V.A. apres avoir veu la liste qu'il luy avoit pleu faire exhiber par Zeelhem des droicts de depesches qu'on avoit accoustumé de recevoir à la secretairie, elle eut la bonté de m'asseurer par deux fois, qu'elle se tenoit pleinement satisfaicte de la conduitte de ce secretaire. Il y a, dis-je, si peu depuis ces gracieuses declarations qui me ramenerent tout consolé chez moy, que venant à rapporter cela à ce qui vient d'estre annoncé à mondit fils au detriment de sa charge, j'avoue, Monseigneur, que j'en reste tout interdit et comme estonné d'un coup d'esclair, ne pouvant m'imaginer si tant en que V.A. s'est bien laissée informer de toutGa naar voetnoot1), comment son intention pourroit estre de se declarer contente du service d'un fidele serviteur et de le chastier à la derniere extremité. En effet je doubte, Monseigneur, si on vous a bien faict veoir le fonds de l'affaire, qui est que par ce nouveau reglement duquel il s'agit, le salaire du secretaire se trouve reduit à un seul tiers de ce qu'on a profité de tout temps, et encor ce miserable tiers chargé d'un defrayement des clerqs et de toute[s] les fraix de la secretairie, dont par le passé jamais nous n'avions ouy parler. Si bien que supputant le tout conjoinctement avec la depense des voyages que Zeelhem a pris coustume de supporter par sa boursse en suivant V.A. par tout pais et en toute saison, il fera veoir clairement qu'en somme il ne luy pourra rester pour sa subsistence des 500 ℔ de gage peut estre 50 ou 60 ℔ par dessus. Sur quoy j'ose prier V.A. de vouloir considerer si c'est bien là un salaire proportionné aux peines infinies et aux fatigues assiduelles dependantes de cest employ, et si le moindre petit commis ou clerq en pourroit estre entretenu, et finalement si seulement le caractere d'une charge de telle importance autour de la personne de V.A. peut souffrir d'estre avily à ce point et en effect reduit à neant. Si ces Messieurs du Conseil eussent voulu conferer sur le tout avec Zeelhem, ou moy au moins, comme ils en ont continuellement usé aveq le S.r PettenGa naar voetnoot2), en nous excluant de toute connoissance et raisonnement, ces choses eussent pû estre representées à temps. Ceste faveur ne nous ayant pû estre octroyée il m'est bien force, Monseigneur, de revenir directement à la grande equité et douceur de V.A. en la suppliant tres-humblement de ne permettre pas que j'aille au tombeau qui m'attend avec ce trop sensible regret de veoir mon aisné sans cause plus mal traicté que pas un de tous ses devanciers apres avoir servi l'espace de neuf ans à la satisfaction de son Maistre. Je trouve dans ledit reglement qu'on sera obligé de l'afficher et exposer publiquement à la veuë d'un chascun, comme au bureau d'un peage, afin de verifier, ce semble, la fidelité et l'obeïssance de ceux qu'il concerne. Quelle honte, Monseigneur, à un honeste serviteur, de qui jamais, grace à Dieu, ni la fidelité ny l'obeïssance n'ont esté tirées en question. Et apres tout quel esclat doibt faire tout cecy, et comment pourra on empescher le monde de presupposer le secretaire coupable de quelque griefve offense ou malversation, le voyant chastié et empiré de condition avec tant de rigueur, au lieu de se la veoir | |
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ameliorée en consideration de tant de bon service[s], comme c'est en effet pour cela que chascun s'evertue, et que, selon le proverbe espagnol, assez demande qui bien sert. Il y va donc surtout de l'honneur, Monseigneur, lequel si on pouvoit n'avoir pas merité, au moins ose-t-on soustenir de n'avoir jamais donné sujet de punition ignominieuse. V.A. me pardonne ces libertez; elle peut juger, et sçaura, j'espere, quelque jour que c'est que des mouvemens du coeur d'un pere. - Je finis enGa naar voetnoot1) la suppliant en tout humble respect de vouloir considerer tout ce que dessus en sa haute prudence, et de remettre ces choses sur un pied que je ne puis m'empescher d'attendre de sa bonté et justice, quand elle aura voulu prendre la peine de faire examiner le tout par le menu, sans faire reflexion sur d'autres que l'envie peut faire parler. 27 Dec. 1680. |
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