Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6962. Aan den prins De CondéGa naar voetnoot3). (K.A.)Je suis si peu capable d'exprimer par escrit et en langue estrangere le ressentiment qui me demeure des grandes bontez dont il a pleu à V.A. de nous obliger, moy et les miens, que j'ay eu de la peine à l'oser entreprendre. J'espere, Monseigneur, que pour mon secours celuy de mes enfants qui est en France, et vient d'estre nouvellement comblé de si grand nombre de vos faveurs, aura tasché de s'en acquitter de bouche selon son devoir. Encor sera ce bien loin au dessous de ce quc ce devroit estre, tout son dehors ne respondant guere à ce qu'on veut dire qu'il possede d'interieur. Je le trouve tout rejouï et glorieux de ce que V.A. a voulu avoir la patience de l'entendre raisonner sur ce qu'il n'a pû s'empescher de produire et pour la demonstration au sujet de sa pendule, pour fermer la bouche aux Italiens, qui avoyent commencé à se declarer auteurs de ceste invention, au fonds de laquelle il a voulu prouver qu'ils n'ont rien compris jusqu'à present. Je rends graces tres-humbles à V.A. de ce qu'elle a daigné | |
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honorer le veritable auteur de ceste conversation. Au sortir de laquelle il n'a pù se saouler de me tesmoigner avec combien d'estonnement il a veu V.A. comprendre les dernieres subtilitez de la matiere plus promptement qu'il n'a eu moyen de les exposer. Pour moy, Monseigneur, ce rapport ne m'a nullement surpris. J'ay sceu de fort longtemps - et qui ne le sçait pas? - tant de ce qui est du grand coeur de V.A. que de la vaste estendue de son genie en toute sorte de sçavoir. Mais ce que j'ay tousjours admiré de plus parmi tant de qualitez incomparables, c'est de les avoir sceu et veu accompagnées de ceste douceur et bienveuillance si noble et si exemplaire qui brille en toutes ses actions et qui, pour dire tout, a bien faict juger à la petite province d'Utrecht, que si d'abord V.A. s'y fust trouvée, beaucoup de bons bastimens et beaucoup de beaux plantages innocens seroyent encor sur pied, dont la destruction et le ravage n'a de rien servi à personne. C'est donc, Monseigneur, la connoissance et le souvenir de ceste mesme douceur et discretion tant renommée qui m'a faict prendre la liberté de souffrir que vostre Alt.e fust importunée de ma part pour la restitution d'un pauvre volume de ma main, inutile à tout le monde qu'à mon fils aisné, faisant presentement la charge dans laquelle Dieu m'a laissé viellir. Je retourne, Monseigneur, à vous rendre le tres-humble remerciment que je doibs de ce surcroist de nouvelle obligation que V.A. a esté contente de s'acquerir sur moy en ceste occasion, et la supplie de croire, que le plus interessé en ce bienfaict, qui me doibt survivre, s'il plaist à Dieu, ne cessera d'en reconnoistre la faveur par ces tres-humbles respects et obeïssances, et que pour le pere, tant qu'il luy restera un jour de ceste vie qui va finir, il se tiendra tres-heureux de le pouvoir employer à faire paroistre à quel point il estime la grace de se pouvoir dire ..... 20e Dec. 1674. |
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