6489. C. van Beuningen. (A.B.)
Je me repute a un bonheur bien particulier que vous me faites la grace de vous servir de mes envelloppes au commerce que vous entretenez avec l'illustre Bergerotte. Je vous y serviray avec fidelite et avec soing et me trouveray tousjours trop bien recompense de ma peine par le bon accueil que me procurent les lettres que je luy porte de vostre part. Je vous sçaurois difficilement exprimer la joye et l'impatience avec laquelle a este receue la premiere que je luy ay mis entre les mains. Je ne sçay pas si elle est harmonieuse - comme vous dites - ou amoureuse, mais je suis bien trompe si vous n'y avez touche agreablement un endroit qui luy est fort chatouilleux et fort sensible. Au moins personne ne rist jamais de meilleur coeur que la Signora en lisant vostre lettre, avec un brillant aux yeux, et un feu au visage qui marquoyent que vous aviez bien remue de mesnage chez elle. Tout ce qu'elle dist estoit que vous estiez le plus admirable homme du monde et le plus galand. Je ne sçay rien par la plus que ce que je sçavois, mais un certain air fripon dont elle accompagna dans ce temps la tout ce qu'elle dist et fist me donna bien de la curiosite pour scavoir la cause. Mais il falloist me contenter de la confidence qu'elle me fist d'un endroit ou vous luy recommandiez d'avoir pour moy des sentimens un peu particuliers, et elle m'a promis qu'elle les aura a cause de vous. Voyez donc, Monsieur, si je n'ay pas grande raison de me louer de ma fortune, et de vos bons offices, et de vous prier de me continuer l'honneur de vos bonnes graces ..... Ce 18 Decembre 1665, a Paris.