Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6357. Aan prinses Amalia van OranjeGa naar voetnoot1). (H.A.)aant.IlGa naar voetnoot2) me tarde bien fort de recevoir l'honneur des ordres de V.A., mais je ne laisse pas de bien considerer les tristes embaras qui apparemment l'ont empesché de me les departir si promptement qu'en une autre saison je les eusse pû avoir. Cependant je croy aussi que V.A. n'attend rien de moy qui soit d'importance. Tout consiste à balancer, si, et jusques à quand nous demeurerons accrochez à M. l'ambassadeur d'Angleterre. J'en revins hier au soir, aussi incertain que jamais, quand il me dit qu'il espere qu'ils seront bientost en estat de recommencer à parler; il ajouste que ce ne sera pas si tost qu'il le souhaitteroit bien, et je me confirme de plus en plus dans l'opinion, qu'il a l'oeil sur le succès de leurs armes contre nous. Comme toutefois il est personnage fort discret, quand je luy represente ce que Son A. va souffrant et en son honneur et en sa boursse, et de quelle maniere la misere et le desordre de ses subjects va croissant de jour en jour soubs la domination estrangere, il m'escoutte avec assez de tendresse, et ne tesmoigne pas trop d'aversion de ce que je le prie d'en donner à connoistre et à consider[er] à M. le chancelier, qui en nostre mal nous traicte comme un medecin qui ne feroit que gronder et menacer la fiebvre de son malade, sans faire paroistre aucun remede à l'en guerir. Ledit S.r ambassadeur me demanda apres force discours, si je jugeoy donc que le Roy de France refuseroit tousjours le Roy son Maistre; et je respondis que je ne croyois pas seulement cela, mais bien plus que tant que la demande se faisoit sur le mesme pied que plusieurs Princes la luy ont faicte jusques à present, ce ne seroit pas sa seule humeur inesbranlable qui le feroit perseverer au refus, mais un pretexte mesme assez plausible de ne pouvoir accorder à un ce qui a esté refusé à plusieurs autres; d'où resulte sans contradiction qu'il faut songer à une planche par où ce Prince puisse sortir sans choquer son naturel, ni sembler offenser personne. C'est icy le sommaire de mes conversations ordinaires avec ce Seigneur; V.A. peut bien s'imaginer que je ne cesse gueres d'y mesler mon interest particulier et celuy de toute ma maison, qu'il me faict l'honneur d'assez bien considerer, mais c'est de quoy j'ay resolu de ne rompre plus la teste à V.A. qui sçait assez ce que je souffre sur la fin de mes jours, et en une saison où mes enfans ont besoin le plus de mon assistence, se voyans partout ou rebutez, ou oubliez, ou postposez en toutes sortes d'occurrences de quelqu'avancement, à ceux qui, peut estre, ne les valent point, et n'ont pas tous de quoy balancer mes services de tantost quarante ans sans relache. V.A. a sceu l'accouchement de la Reine. Tout ce qu'il y a icy de ministres estrangers songeront là dessus aux debvoirs de leurs complimens, et en | |
[pagina 105]
| |
ces audiences j'ay ven qu'on ose bien faire quelque mention d'affaires. Si V.A. trouve à propos d'en user par moy de mesme que d'autres, peut estre cela pourroit servir à un pen retenter l'esprit du Roy, et à sonder si cest arbre auquel nous avons donné tant de coups de cognée, ne commence pas à s'esbranler d'un costé ou d'autre. Mais il seroit necessaire que je fusse authorisé là dessus d'une lettre, et qu'il pleust en mesme temps à V.A. me faire la grace de m'instruire et ordonner jusques où elle entendroit que j'aurois à m'estendre au faict d'Orange. J'ajouste à ce pacquet quelque chose de ce qui vient d'arriver d'Orange en suitte de ce que les dernieres nous avoyent appris de la persécution où se trouve le S.r de Beaufaiu baron de Viòles, en revenche, à ce qu'il dit, de ce qu'estant un des principaux vassaux de S.A. il s'est mis en debvoir d'exposer à l'envoyé du Roy, et de luy faire exposer par d'autres les outrages du chasteau; les verbaux en sont si grands et si vastes que je n'ay pas voulu en importuner V.A. Ce gentilhomme en escrit à M. le duc de l'EdiguiereGa naar voetnoot1), comme le touchant de parentage, ainsi que d'autres grands de la cour qui asseurement en feront leurs plaintes au Roy, et ainsi S.M. verra comme on observe les rigoureux ordres qu'elle vient de donner, que le chasteau n'ayt à se mesler d'aucunes affaires du Prince. Peut estre viendra-il en personne se presenter an Roy, ce qui ne nous nuira pas. J'envoye à M. Buysero le project d'un brevet qui doibt authoriser le Bureau d'Orange à l'enregistrement de celuy du 10e Octobre 1663, suranné par la faute des fermiers qui depuis peu de jours seulement l'ont esté presenter, comme V.A., s'il luy plaist, verra par la lettre dudit Bureau cy joincte. A Paris, ce 21e Nov. 1664. |
|