Briefwisseling. Deel 5: 1649-1663
(1916)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend
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5294. Aan graaf Chr. D. van DohnaGa naar voetnoot1). (K.A.)Il y a deux jours que j'apprins avec beaucoup d'estonnement et un peu d'indignation, qu'un certain MeibomiusGa naar voetnoot2), presentement à Stockholm, se seroit plaint par lettre à de ses amis icy de ce que pardelà il auroit esté chargé du soupçon de m'avoir escrit choses calumnieuses touchant la personne de la Reine, et que j'auroy produict ceste lettre à la cour de Madame la Princesse Douariere. Faussetez si evidentes et qui m'ont tellement touché, que je n'ay pû m'empescher de vous en tesmoigner mon ressentiment par ces lignes, que je vous supplie de vouloir faire servir où il appartient à la defense de deux innocens, qui n'ont jamais eu aucune communication ensemble. Il est vray, Monsieur, que j'ay veu ce Meibomius precepteur d'un mien nepveu et des enfans de M. le conseiller DoubletGa naar voetnoot3), mais depuis qu'il a quitté cest employ, je n'ay pas sceu ce qu'il a esté devenu, jusques à ce que par ceste belle occasion presente l'on m'informe qu'il est en Suede, d'où je puis bien jurer, de n'avoir jamais receu ni veu aucune lettre de sa main, non plus que d'aucun autre lieu du monde. Me souvenant du reste, de l'avoir tousjours ouy reputer pour homme d'autant de probité que de sçavoir, et de qui en suitte j'auroy bien de la peine à presumer la sottise que je voy qu'on a osé luy imputer, laquelle s'il eust commise envers moy, il me semble que je me fusse pû aviser de luy en faire sentir mon desplaisir. Mais Dieu sçait qu'il ne m'en a point donné de subject. Pour ce qui me regarde, Monsieur, je me souviens qu'entendant parler chez Madame la Princesse de ce qu'il courroit d'estranges bruicts par la Haye de la Reine de Suede, j'ay avoué aveq plusieurs autres de les avoir entendus aussi, et mesmes d'en avoir veu l'extraict de quelques lignes en Aleman, où entre autres il y avoit que la Reine estoit fort perplexe; sur quoy il fut lors discourru de ce que pourroit signifier ce mot au subject de ce qui se disoit de S.M.té peu conforme à ceste expression, et en somme tout le monde exploda(?) si bien cest advis aveq moy, qui l'avoit tousjours mesprisé, qu'il n'en fut plus parlé depuis, sinon que Madame vostre mereGa naar voetnoot4) à ceste occasion me fit l'honneur de me communiquer quelqu'une de vos lettres, Monsieur, contenant un recit assez ample de la belle maniere dont vous passez le temps à la cour et au service de ceste merveilleuse Princesse, et du contentement qu'il y a à l'approcher. Ce que confrontant aveq d'autres lettres assez recentes que de mes amis avoyent eues de Suede, nous fismes et vismes enfin disparoistre ceste chimere au rayon de tant de veritez manifestes, et ne sache pas d'en avoir plus ouy parler. Quant à l'extraict aleman que j'avoy veu, je proteste sincerement, Monsieur, de n'avoir jamais sceu à qui s'estoit adressée la lettre, dont il sembloit estre tiré. Si je ne me trompe, il fut dit, que c'estoit d'un Aleman qu'on le tenoit, et comme je ne l'avoy consideré qu'aveq mespris en main tierce, je fus assez nonchalant pour ne m'en informer pas de plus près. | |
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Il me reste, Monsieur, de vous supplier tres-humblement de conferer ces circonstances aveq ce qui a esté debité du pauvre Meibomius et moy, avec qui il a si peu de commerce qu'à ceste heure mesme il n'a pas osé me faire ceste plainte que par intervention d'autruy, dont certes je n'eusse pas voulu vous en donner tant d'importunité, ne fust que je m'en suis tenu redevable et à son innocence et à mon honneur, que j'espere que vous aurez la bonté d'ayder à garentir contre de si noires impressions. Au fonds, Monsieur, il ne fault pas aller bien loing, pour sçavoir quels sont mes sentimens d'une Reine de Suede, qui pourroit l'estre de tout le monde. Si ce n'est assez de ce que j'en ay tous les jours dans la bouche, quelque bonne partie de la Chrestienté tesmoignera ce que j'en ay souvent escrit, et Monsieur ChanutGa naar voetnoot1), qui est pardelà, ne me refusera pas d'en deposer ce qu'il sçait. Si vous prenez la peine de veoir entre ses mains une epigramme que j'ay faicte depuis peu sur le portraict de S.M., je croy que vous en aggreerez la conclusion qui dit que Sol alter et coeli et soli; quid amplius? et que parlant ainsi je ne doibs pas estre jugé susceptible ni activement, ni passivement de l'impertinence que de mauvaises gens m'ont voulu attribuer. Je les connoisteray quelque jour, et pourray trouver moyen de payer leurs peines. Quoyque ma lettre soit longue, elle le doibt estre un peu davantage pour vous prier de prendre la peine de jetter la veuë sur un nouvel almanach de ma façon, que mon fils aisné vient de mettre au jourGa naar voetnoot3). Il y a du burlesque et du serieux pro re nata, et tout esloigné que vous estes de la Hollande, je vous en tiens si peu destourné d'affection, qu'à des heures de loisir vous serez encor content de veoir la vie qu'on y faict, et comme les poetes du temps y sont tousjours en possession de cest ancien privilege, de faire passer la mouche pour un elephant, pourveu que cela rime, et marche en cadence de vers. Si repellor a limine, et que vous ne puissiez vous resoudre à la patience de lire trois mil vers flamens sur un subject de rien, autant de papier sale prouffité; vous n'avez qu'à deschirer le parchemin, tout le reste est d'usage en Suede et icy ..... Le 26 May 1653. Si ce pauvre escolier Meibomius est tousjours là, je vous supplie de luy vouloir faire sçavoir par occasion, comme j'ay de soin de maintenir son innocence, que je tiens veritablement du tout esgale à la miene, selon ce que j'ay reconnu de candeur et de simplicité en luy. |
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