Briefwisseling. Deel 5: 1649-1663
(1916)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend5275. Aan Cl. SaumaiseGa naar voetnoot3). (K.A.)Je plain la cause de vostre silence et ne laisse pas de m'en resjouïr, sorti que je me voy de l'apprehension d'avoir faict quelque pas en arriere dans le partage que j'ay presumé de posseder en vos bonnes graces; et puisque vous me faictes l'honneur de me les continuer, j'ose vous donner parole que je seray soigneux de mon costé de les conserver par toutes les voyes de mon pouvoir. J'accepte pour une marque signalée de la constance de ceste amitié la bonté dont vous usez à recevoir les petites ravauderies dont j'ay prins la liberté de vous importuner. Ne vous hastez pas de vous en repentir; j'auray tantost faict. En voyci une nouvelle, mais, j'espere, une derniere ondée. Une belle fille de Paris, que vostre grande Reine de Suede faict venir au septentrion, sur des appointemens nobles et tres-royaulx, attend icy le renouveau, pour achever ce voyage, dont le pere - organiste du Roy, et grand homme en son mestier, par où je le cognois de longtemps - est en beaucoup d'inquietude, et me prie de moderer un peu la precipitation qui pourroit emporter ceste fille, et sa mere et son frere, qui l'accompagnent, pour se haster de satisfaire aux curiositez de la Reine. Hinc lecta est operi vel data causa meo; et quelque soir apres soupper il m'a prins envie de luy en chanter quelque mot en rime françoiseGa naar voetnoot4) dont | |
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la copie va cy joincte, av eq quelqu'autre piece de plus haut goust contre nos beaux voisins d'outre merGa naar voetnoot1). Vous voulez, Monsieur, que je vous croye hors d'habitude de la langue latine; je prens cela pour le mot à rire, et puisque toutefois vous estes dans une inclination presente pour le François, sequar non passibus aequisGa naar voetnoot2), et vous entretien du langage de chez vous. Vous trouverez qu'il sent bien fort le chez moy; mais vous me devez la grace que peut pretendre tout estranger, et dont j'avouë avoir plus besoin que personne; aussi ne la voudriez vous pas refuser à un homme, qui ne mit jamais le pied en France, et ne sçauroit presque se faire entendre aux François que par glossaires et calepins. Je revien cependant à mes flustes pour ce coup, et vous r'assassine de mon Latin, un peu satisfaict, j'advouë, de l'epigramme que vous voyez sur le portraict de la Reine de SuedeGa naar voetnoot3) que son peintre BecqGa naar voetnoot4) nous fit veoir il y a quelques sepmaines. Je vous supplie de me dire franchement, si vous oseriez souscrire au jugement favorable que l'on en a voulu faire icy, ou s'il fault que je prattique la leçon du philosophe, et me die, πῇ παρέβην, me voyant dans l'approbation du commun. Ne craignez pas, s'il vous plaist, de me censurer aveq rigueur; je suis tout susceptible de correction, et non que d'un Saumaise, je la souffre de mon inferieur, sachant combien nous avons la veuë courte en nos defaults, et comme nous sommes juges incompetens de nos productions, antequam refrigeratus sit inventionis amor, comme dit, ce me semble, QuintilienGa naar voetnoot5) ou quelque autre. Que si toutefois, Monsieur, vous vous disposez à juger cum pluribus, hoc vultu me non indigna locutum, et que ceste merveilleuse Princesse pourroit souffrir de veoir quels sont les sentimens que nous avons de son prodigieux merite, je seray plus ayse que cela se fasse par vostre moyen que par d'autres qui s'y pourroyent employer. A vous la disposition qui me sera bonne et aggreable, en quelque façon que vous en usiez. Excusez tout ce babil et ce barbarisme. Un homme qui sort de sa goutte peut gouster toute sorte de divertissement, puisque la folie mesme des insensez facit ad ornatum universi. Quand vous serez revenu en plus belle humeur, j'attendray sçavoir ce qu'il y a sub incude en vostre estude. Il est bien temps de finir, puisque la rime commence à se mettre de la partie malgré moy, qui suis veritablement ..... 10e Feb. 1653. |
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