Briefwisseling. Deel 1: 1608-1634
(1911)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend673. J.L. Guez de BalzacGa naar voetnoot5). (R.A.)Je ne me plains plus de la fortune; elle me fait au moins quelque courtoisie parmy les injures que j'en recois, puisqu'elle souffre que vous m'aymiés, c'est à dire qu'ell' a soin de moy au milieu de la persecution qu'elle me suscite. J'ay appris cette bonne nouvelle dans une lettre que vous escrivés à M.r le Baron de Saint SurinGa naar voetnoot6), et il vous tesmoignera qu'apres l'avoir leüe, je n'ay rien desiré pour la perfection de ma joye, que d'estre celuy que vous me faites, et de ressembler à mon portrait. Si c'est de charbon de Hollande que vous tracés de pareils | |
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ouvrages, il surpasse toutes les couleurs, dont on se sert icy pour farder, et la beauté ne vous couste gueres. Mais vous ne me ferés pas accroire cela. Je connois l'or et l'azur, et le distingue d'avec le charbon. Je voy, Monsieur, les embusches que vous me cachés. La facilité de vostre style en couvre la force, mais elle ne l'enerve pas, et soubs une negligence apparente je trouve de l'art et des ornemens. Il ne vous suffit pas, au lieu où vous estes, de faire mieux que nous, et de posseder a nostre exclusion l'ancienne et la solide vertu; vous nous allés encore oster ce qui reste de passable dans les estats corrompus, je veux dire la gloire du langage, et ne permettés pas que nous nous consolions avec ce petit jouët de la perte des veritables biens. Apres avoir cinquante ans vaincu, vous voulés a cette heure persuader, et vous rendre maistres des hommes par une voye plus douce et plus humaine que la premiere. C'est estre en effet, comme on vous a nommés autresfois, les freres du peuple romain, et les heritiers de ces vieux Catons, qui faisoient profession de la severité, et n'estoient pas ennemis des Graces; c'est parfumer le fer et le cuivre, et adjouster a la liberté et a la discipline de Sparte la galanterie et les delices d'Athenes. M.r de Saint Surin m'a fait la dessus d'excellentes relations, et vous nous l'avés renvoyé avec le coeur blessé, et l'ame esprise de ce qu'il a veu. Il ne s'en faut de gueres qu'il n'en soit devenn mauvais François. Au moins n'a il plus pour sa patrie qu'une affection de devoir et de reverence; vostre isle possede son amour, et j'ay grand peur que vous aurés plus d'aymant pour l'attirer, que nous n'aurons de cheisnes pour le retenir. Il est tout plein des objets qu'il a laissés, et quand je luy parle de nostre cour et de nos brouilleries, il me fait responce de vostre police et de vostre ordre. Sur quoy, Monsieur, vous me pardonnerés bien, si je change mon compliment en reproche, et si je vous demande raison de ce que vous me desbauches un amy qui tempere par son seul visage toutes les amertumes de ma vie. Le nombre de ceux qui me persecutent est presque infiny; mais pour combien pensés vous que je conte un si brave deffenseur. Si vous me le ravissés, je suis desarmé contre la mauvaise fortune; je pers ma consolation dans l'adversité, et mon exemple pour la vertu. Et vous considerant comme le principal autheur de cette disgrace, je ne sçay comment je pourray ne pas vous hayr, et perseverer en la resolution que j'ay prise d'estre passionnement ..... Le 26 Mars 1632. Si M.r Heinsius et M.r CunaeusGa naar voetnoot1) ont publié quelque chose de nouveau, vous m'obligerés bien fort de m'en faire part. Ce sont deux hommes, selon mon jugement, comparables aux anciens, et qui valent tout ce que l'Italie a produit de plus docte et de plus poli soubs le pontificat de Leon dixiesmeGa naar voetnoot2). |
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