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* Lettre DCCII.
Le Prince d'Orange au Comte Jean de Nassau. Edit Perpétuel.
Monsieur mon frère. D'aultant que j'ay enchargé à Mr Taffin vous escripre plusieurs particularitez des affaires de par-deçà, et mesmes vous envoyer le double de la Pacification, depuis huyct jours ençà faicte avecq Don Jéhan d'Austriche, je ne vous feray icy long discours, me remectant à ce qu'entendrez par ses lettres; seullement vous diray qu'ayant receu vos dernières et veu joinctement icelles la coppie de la lettre qu'ung amy vous a escript, ensemble la responce que luy avez faicte, j'ay trouvé la ditte responce fort bien à propos et le mieulx accommodée au temps et affaires présentes qu'il soit possible, ayant touché le tout au viff; car faict grandement à craindre que rentrant l'Espaignol aultresfois au gouvernement, les pays tomberont en plus grande subjection que du passé; vous remerchiant de la payne que prenez journellement pour le bien de nos affaires. L'on s'est fort hasté à faire et conclure la ditte paix, enquoy les Ambassadeurs de l'Empereur ont bien aydé, mais ne sçay si
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Ga naar margenoot+ce sera à l'advantaige du pays et de leur maistre, lequel demeure maintenant assez frustré de l'espoirGa naar voetnoot(1) qu'il pouvoit avoir de parvenir cy-après au dit pays. J'espère que de brieff nous en discourrerons plus amplement, si je puis avoir ce bien de vous tenir par-deçà... Escript à Middelburg, ce 24 de fébvrier 1577.
VostreGa naar voetnoot1 bien bon frère à vous faire service,
Guillaume de Nassau.
A. Monsieur, Monsieur le Conte Jéhan de Nassau, Catzenellenbogen, mon bien bon frère, à Dillenberch.
L'opposition du Prince à l'accord ayant été inutile, quelle fut sa conduite après le fait accompli?
D'abord il a garde de publier l'Edit ou d'y adhèrer. C'eût été un obstacle de moins à l'arrangement final qu'il redoutoit; même il eût dû immédiatement reconnoître, en Hollande et en Zélande, l'autorité du Gouverneur-Général. Sans positivement refuser, il pousse donc, de son côté, les exigences jusqu'à être sûr d'un refus. - Les expressions vagues dont il se servit sans doute à dessein, sembloient menaçantes pour l'autorité du Gouverneur et même pour le pouvoir Royal. Il demandoit acte aux Etats-G. ‘dat men D. Johan niet ontfangen zall, voor dat hy alle Privilegiën realick gerestitueert, en 't gene contrarie van dien gedaen is, geredintegreert sal hebben’ (Bond. II. 153); sur quoi Fl. Thin, quoique dévoué au Prince
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Ga naar margenoot+(p. 596) ne peut s'empêcher de faire la remarque: ‘'t welck een sware clausule is, daerop als noch by de Staten nyet en is geresolveert.’ (Bond. l.l.). Il y a plus. Selon le Prince on ne doit pas se borner à la manutention des anciennes libertés; il faut en conquérir de nouvelles. Dans sa réponse aux Etats-G. il dit expressément: ‘Noz ancestres n'ont jamais en semblables occurrences obmis de requerrir et obtenir privilèges nouveaux et bien louables.... Il estoit maintenant temps de demander et poursuivre, à l'exemple de noz ancestres, d'obtenir ampliation et extension des privilèges, droits, et libertez qu'avons reçus d'eux mesmes en une telle ouverture et opportunité qui se présente’ (†MS.).
D'un autre côté il a soin de ne pas rompre avec les Etats-Généraux. - Ceux-ci semblent avoir eu des craintes très-vives à cet égard. Ils tenoient à être bien avec le Prince; par amour de la paix, et parce-qu'il pouvoit leur servir d'épouvantail contre D. Juan, et redevenir un appui nécessaire, au retour du péril. C'est par là que s'explique l'effusion de leur gratitude envers le Sr de Willerval, portant une réponse pacifique: ‘Ils l'ont grandement remercié de son travail et bonne négociation par luy raporté, et de sa bonne veulle et affection qu'il porte à la Patrie, se sentans pour ce grandement obligez à luy et à sa posterité en tous endroitz recognoistre selon leur possibilité:’ Rés. d. Et.-G. II. 102. - Mais le Prince aussi connoissoit trop bien ses intérêts pour ne pas éviter une rupture. Il se sert des termes les plus mesurés. Lui et les Etats de H. et Z. ‘ne peuvent autre chose sinon de souhaiter, comme ilz souhaitent de tout leur coeur, et prier Dieu que l'issue en puisse estre telle comme tous les bons patriots désirent. De leur part, puisque maintenant il seroit superflu de alléguer raison au contraire ou débattre sur une chose faicte, ils promettent et asseurent mes Srs des Estats que par tous moyens ils maintiendront la Pacif. de Gand, comme aussi ils espèrent que telle est l'intention d'iceux’ (†MS.). En faisant preuve de modération, il rappelle qu'il a de puissants moyens de se faire valoir; c'est apparemment en partie la cause pourquoi il fait si fréquemment
mention du peuple. (‘Le povre peuple affligé de tant de misères et calamitez.... On trouvera matière envers le peuple et villes en général pour les charger des
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Ga naar margenoot+crimes de rebellion et de lèze-Majesté.... On n'y peut remarquer aucune asseurance pour... tout le povre peuple:’ l.l.). - Son influence étoit considérable. ‘Habebat per omnes illas Provincias, quae cum Austriaco transegerant, innumeros sibi faventes; scatebant illae hereticis, qui omnes ei adherebant, in Ordinum Collegio haud pauci erant, quibus omnia sua coepta grata et accepta, quique ea tantum, quae in rem Auriaci essent, pro honesto ac utili habebant; erantque adhuc ex recentibus malis omnium animi ad res novas amplectandas dispositi:’ de Tassis, Comment. IV. 263.
Du reste il continue à suivre envers D. Juan la même tactique. Il nourrit la défiance, il fortifie les soupçons.
Les 17 Provinces avoient été réunies par la Pacification de Gand. L'Edit-Perpétuel, non-accepté par le Prince, relâchoit ce lien. Séparées de lui sous quelques rapports, se déclarant presque contre lui, désormais quinze Provinces faisoient avec le nouveau Gouverneur cause commune. Il s'agissoit de réparer cet échec; de veiller, d'attendre, d'amener les occasions, et d'en profiter; de saisir un moment de crise, pour rallier, autour de soi et contre D. Juan, la totalité des Pays-Bas. |
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voetnoot(1)
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l'espoir. Il est assez difficile de démêler ici avec certitude la pensée du Prince. Peut-être veut-il simplement dire que, par la réconciliation avec le Roi, l'Empereur a perdu une occasion favorable d'intervenir à son propre profit. Peut-être aussi donne-t-il à entendre que les Pays-Bas, ayant reçu de la part del'Empereur de si mauvais conseils, seront bientòt dans le cas de chercher protection ailleurs (p. 425, 1. 6.), se separant de la Maison de Habsbourg.
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