Ah! Si vraiment un homme de génie apparaissait, comme il changerait tout cela! Comme par un moyen d'abord hésitant peut-être, mais bientôt décisif et souverain, il inaugurerait une tactique toute autre! Elle s'accorderait cellelà, non plus avec la nature scolaire des Germains, mais avec le tempérament spontané des Français. Elle serait promptitude et certitude. Elle rendrait inutiles et surannées, les rencontres quasi-quotidiennes de tranchée à tranchée, où l'on se heurte sur place, sans qu'après des mois et des mois de lutte, presque rien ne se décide, ni ne se définit.
Mais ce génie ne se trouve pas. Et, voilà peut-être une de ces raisons profondes et mystérieuses qui induisent à croire que la guerre n'est vraiment plus de notre temps. Si elle l'était, les grands capitaines se rencontreraient et s'affirmeraient l'un à côté de l'autre, ou l'un en face de l'autre. Leur pays, leur peuple, leur milieu les produiraient aujourd'hui comme jadis. Dans la dernière grande guerre européenne, Hoche, Dessaix, Gouvion de St. Cyr, Lannes et Ney encadraient admirablement Napoléon. La guerre d'aujourd'hui est plus vaste encore, mais où donc est la constellation suprême de guerriers qui la domine.
En face des batailles, dressons l'art.
Il est, je le sais, relégué au second plan en ces heures tragiques, mais sitôt la paix faite, il refleurira comme les jardins, les champs et les forêts après l'hiver. Et ce qui prouve qu'il est, contrairement à la guerre, dans l'atmosphère et dans la direction de ce temps, c'est que les génies l'illustrent aujourd'hui plus que jamais. Les écoles de littérature, de sculpture, de peinture et de musique françaises, russes et même allemandes, me fournissent des noms nombreux. Quoique restreintes de territoire et de population, la Hollande et la Belgique m'en signalent à leur tour. Pour ne citer que les génies qui se sont éteints, il