Brieven aan zijn broeder. Deel 3
(1914)–Vincent van Gogh– Auteursrecht onbekend
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Auvers s/Oise
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l'auberge indiquée par lui préférable, mais que 6 était 2 francs trop cher pour les dépenses que je fais. Il a beau dire que j'y serai plus tranquille, assez c'est assez. La maison à lui est pleine de vieilleries noires, noires, noires, à l'exception des tableaux d'impressionistes nommés. L'impression qu'il a faite sur moi n'est pas défavorable. Causant de la Belgique et des jours des anciens peintres, sa figure raidie par le chagrin redevient souriante, et je crois bien que je resterai amis avec lui et que je ferai son portrait. Puis il me dit qu'il faut beaucoup travailler hardiment, et ne pas du tout songer à ce que j'ai eu. J'ai bien senti à Paris, que tout le bruit de là-bas n'est pas ce qu'il me faut. Que je suis content d'avoir vu Jo et le petit et ton appartement, qui certes est mieux que l'autre. Vous souhaitant bonne chance et santé et espérant vous revoir sous bien peu, bonnes poignées de main, Vincent. | |
636Mon cher Theo et Jo, Dans l'autre lettre j'ai d'abord oublié de te donner l'adresse d'ici, qui est provisoirement Place de la Mairie chez Ravoux, puis lorsque je t'ai écrit je n'avais encore rien fait. A présent j'ai une étude de vieux toits de chaume avec sur l'avant-plan un champ de pois en fleur et du blé, fond de colline, une étude que je crois que tu aimeras. Et je m'aperçois déjà que cela m'a fait du bien d'aller dans le midi pour mieux voir le nord. C'est comme je le supposais, je vois des violets davantage où ils sont. Auvers est décidément fort beau. Tellement que je crois que ce sera plus avantageux de travailler que de ne pas travailler, malgré toutes les mauvaises chances qui sont à prévoir dans les tableaux. C'est très coloré ici - mais comme il y a de jolies maisons de campagne bourgeoises, bien plus joli que Ville d'Avray, etc. à mon goût. Paraît que Desmoulins, celui qui fait le Japon, a été ici, mais est reparti. Si vers la fin de la semaine tu pouvais m'envoyer de l'argent, ce que j'ai me tiendra jusqu'alors, mais je n'en ai pas pour plus longtemps. Je te demanderais également 10 mètres de toile, si cela ne te dérangeait | |
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pas, mais si puisque c'est vers la fin du mois cela te dérangerait, tu enverrais 20 feuilles papier Ingres. Ceux-là il me les faudrait quand même pour ne pas perdre du temps. Il y a beaucoup à dessiner ici. Mon cher, réflexion faite, je ne dis pas que mon travail soit bien, mais c'est ce que je peux faire de moins mauvais. Tout le reste, relations avec les gens, est très secondaire, parce que je n'ai pas de talent pour ça. A cela je n'y peux rien. Ne pas travailler ou travailler moins coûterait le double, voilà tout ce que je prévois, si on cherchait un autre chemin de parvenir que le chemin naturel travailler - ce que nous ne ferons guère. Tenez, si je travaille, les gens qui sont ici viendront tout aussi bien chez moi, sans que j'aille les voir exprès, que si je faisais des démarches pour faire des connaissances. C'est en travaillant que l'on se rencontre, et ça c'est la meilleure manière. Suis d'ailleurs bien convaincu que telle est ton opinion et aussi celle de Jo. A ma maladie je n'y peux rien - je souffre un peu de ces jours-ci - c'est qu'après cette longue reclusion les journées me paraîssent des semaines,. J'avais ça à Paris et ici aussi, mais le travail marchant un peu, la sérénité viendra. Quoiqu'il en soit, je ne regrette pas d'être revenu et cela ira mieux ici. Serai bien content si d'ici quelque temps tu viennes un dimanche ici avec ta famille. Tu verras bien que pour comprendre la campagne et la culture, ça ne fait que du bien de voir d'autres pays. Mais je trouve presqu'aussi joli les villas modernes et les maisons de campagne bourgeoises que les vieux chaumes, qui tombent en ruines. Mmes. Daubigny et Daumier - à ce qu'on dit - restent encore ici, au moins je suis sûr que la première y reste. Lorsque tu pourras le faire, tu m'enverrais pour un temps les exercices au fusain de Bargue, j'en ai absolument besoin, je les copierai pour garder pour de bon les copies. Poignées de main bien cordiales, Vincent. | |
637Mon cher Theo, ma chère Jo, Merci de ta lettre que j'ai reçue ce matin, et des cinquante francs qui s'y trouvaient. Aujourd'hui j'ai revu le Dr. Gachet et je vais peindre chez lui mardi matin, puis je dînerais avec lui et après il viendrait voir ma | |
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peinture. Il me parait très raisonnable, mais est aussi découragé dans son métier de médecin de campagne que moi de ma peinture. Alors je lui ai dit, que j'échangerais pourtant volontiers métier pour métier. Enfin je crois volontiers que je finirai par étre amis avec lui. Il m'a d'ailleurs dit, que si de la mélancolie ou autre chose deviendrait trop forte pour que je la supporte, il pouvait bien encore y faire quelque chose pour en diminuer l'intensité, et qu'il ne fallait pas se gêner d'être franc avec lui. Eh bien ce moment-là où j'aurai besoin de lui peut certes venir, pourtant jusqu'à aujourd'hui cela va bien. Et cela peut devenir encore mieux, je crois toujours que c'est surtout une maladie du midi que j'ai attrapé et que le retour ici suffira pour dissiper tout cela. Souvent, fort souvent je pense à ton petit et je me dis alors que je voudrais qu'il fût grand assez pour venir à la campagne. Car c'est le meilleur système de les élever là. Combien je souhaiterais que toi, Jo et le petit preniez un repos à la campagne au lieu du voyage traditionnel en Hollande. Oui je sais bien que la mère voudra absolument voir le petit et c'est certes une raison d'y aller, pourtant certes elle comprendrait si c'était réellement l'avantage du petit. Ici on est loin assez de Paris pour que ce soit la vraie campagne, mais combien néanmoins changé depuis Daubigny. Mais non pas changé d'un façon déplaisante, il y a beaucoup de villas et habitations diverses modernes et bourgeoises très souriantes ensoleillées, et fleuries. Cela dans une campagne presque grasse, juste à ce moment-ci du développement d'une société nouvelle dans la vieille, n'a rien de désagréable; il y a beaucoup de bien-être dans l'air. Un calme à la Puvis de Chavannes j'y vois ou y crois voir, pas d'usines, mais de la belle verdure en abondance et en bon ordre. Veux-tu me dire à l'occasion, quel est le tableau qu'a acheté Mlle. Bock? Je dois écrire à son frère pour les remercier et puis je proposerai l'échange de deux de mes études contre une de chacun d'eux. J'ai un dessin d'une vieille vigne, dont je me propose de faire une toile de 30, puis une étude de maronniers roses et une de maronniers blancs. Mais si les circonstances me le permettront, j'espère faire un peu de figure. Vaguement des tableaux se présentent à ma vision, qu'il prendra du temps pour mettre au clair, mais ça viendra peu à peu. Si je n'avais pas été malade, depuis longtemps j'aurais écrit | |
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à Bock et à Isaäcson. Ma malle n'est pas encore arrivée, ce qui m'embête, j'ai envoyé ce matin une dépêche. Je te remercie d'avance de la toile et du papier. Hier et aujourd'hui il pleut et fait de l'orage, mais c'est pas désagréable de revoir ces effets-là. Les lits ne sont pas arrivés non plus. Mais quoi qu'il en soit de ces embêtements, je me sens heureux de ne plus être si loin de vous autres et des amis. J'espère que la santé va bien. Cela m'a pourtant paru que tu avais moins d'appétit que dans le temps et d'après ce que disent les médecins, pour nos tempéraments il faudrait une nourriture très solide. Sois donc sage là dedans, surtout Jo aussi, ayant son enfant à nourrir. Vrai il faudrait bien doubler la dose, ce serait rien exagérer quand il y a des enfants à faire et à nourrir. Sans ça c'est comme un train qui marche lentement là où la route est droite. Temps assez de modérer la vapeur, quand la route est plus accidentée. Poignée de main en pensée. t.à.t. Vincent. | |
638Mon cher Theo, (4 Juni.) Déjà depuis plusieurs jours j'aurais désiré t'écrire à tête reposée, mais ai été absorbé par le travail. Ce matin arrive ta lettre, de laquelle je te remercie et du billet de 50 fr. qu'elle contenait. Oui je crois que pour bien des choses il serait bien que nous fussions encore ensemble tous ici pour une huitaine de tes vacances, si plus longtemps n'est pas possible. Je pense souvent à toi, à Jo et au petit, et je vois que les enfants ici au grand air sain ont l'air de bien se porter. Et pourtant c'est déjà ici aussi difficile assez de les élever, à plus forte raison est-ce plus ou moins terrible à de certains moments de les garder sains et saufs à Paris dans un quatrième étage. Mais enfin il faut prendre les choses comme elles sont. M. Gachet dit qu'il faut que père et mère se nourrissent bien naturellement, il parle de prendre 2 litres de bière par jour, etc. dans ces mesures-là. Mais tu feras certes avec plaisir plus ample connaissance avec lui et il y compte déjà, en parle toutes les fois que je le vois, que vous tous viendrez. Il me paraît certes aussi malade et ahuri que toi ou moi, et il est plus âgé et il a perdu il y a quelques années sa femme, mais il est très médecin et son métier et sa foi le tiennent pourtant. Nous sommes déjà très amis et par hasard il a connu encore Brias de Montpellier et a les mêmes idées sur lui que j'ai, que c'est quelqu'un d'important dans l'histoire de l'art moderne. | |
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Je travaille à son portrait, la tête avec une casquette blanche, très blonde, très claire, les mains aussi à carnation claire, un frac bleu et un fond bleu cobalt, appuyé sur une table rouge, sur laquelle un livre jaune et une plante de digitale à fleurs pourpres. Cela est dans le même sentiment que le portrait de moi, que j'ai pris lorsque je suis parti pour ici. M. Gachet est absolument fanatique pour ce portrait et veut que j'en fasse un pour lui, si je peux, absolument comme cela, ce que je désire faire aussi. Il est maintenant aussi arrivé à comprendre le dernier portrait d'Arlésienne, dont tu en as un en rose; il revient lorsqu'il vient voir les études tout le temps sur ces deux portraits et il les admet en plein, mais en plein, tels qu'ils sont. J'espère t'envoyer un portrait de lui bientôt. Puis j'ai peint chez lui deux études, que je lui ai données semaine passée, un aloès avec des soucis et des cyprès, puis dimanche dernier des roses blanches, de la vigne et une figure blanche là-dedans. Je ferai très probablement aussi le portrait de sa fille qui a 19 ans, et avec laquelle je me figure aisément que Jo sera vite amies. Alors je m'en fais une fête de faire les portraits de vous tous en plein air: le tien, celui de Jo et celui du petit. J'ai encore rien trouvé d'intéressant en fait d'atelier possible, et il faudra pourtant prendre une chambre pour y mettre les toiles qui sont de trop chez toi et qui sont chez Tanguy. Car il faut encore beaucoup y retoucher. Mais enfin je vis au jour le jour - il fait si beau. Et la santé va bien, je me couche à 9 heures, mais me lève à 5 heures la plupart du temps. J'ai espérance qu'il ne sera pas désagréable de se retrouver après une longue absence. Et j'espère aussi que cela continuera que je me sens bien plus sûr de mon pinceau qu'avant d'aller à Arles. Et M. Gachet dit, qu'il trouverait fort improbable que cela revienne, et que cela va tout à fait bien. Mais lui aussi se plaint amèrement de l'état de choses partout dans les villages où il est venu le moindre étranger, que la vie y devient si horriblement chère. Il dit qu'il s'étonne que les gens où je suis me logent et nourrissent pour cela et que j'ai encore relativement à d'autres qui sont venus et qu'il a connus, de la chance. Que si tu | |
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viens et Jo et le petit, vous ne pourrez faire mieux que de loger à cette même auberge. Maintenant rien, absolument rien ne nous retient ici, que Gachet - mais celui-là restera un ami à ce que je présumerais. Je sens que chez lui je peux faire un tableau pas trop mal toutes les fois que j'y vais et il continuera bien de m'inviter à dîner tous les dimanches ou lundis. Mais jusqu'à présent, si c'est, agréable d'y faire un tableau, c'est une corvée pour moi d'y dîner et déjeuner, car l'excellent homme se donne du mal pour faire des dîners où il y a 4 ou 5 plats, ce qui est abominable pour lui comme pour moi - car il n'a certes pas l'estomac fort. Ce qui m'a un peu retenu d'y trouver à redire, c'est que je vois que lui cela lui rappelle les jours d'autrefois où l'on faisait des dîners de famille, qu'enfin nous connaissons bien aussi. Mais l'idée moderne de manger un - tout au plus deux - plats est pourtant certes un progrès et un loin retour à l'antiquité vraie. Enfin le père Gachet est beaucoup, mais beaucoup comme toi et moi. J'ai lu avec plaisir dans ta lettre que M. Peyron a demandé de mes nouvelles en t'écrivant, je vais lui écrire que cela va bien ce soir même, car il était très bon pour moi et je ne l'oublierai certes pas. Desmoulins, celui qui a des tableaux japonais au Champ de Mars, est revenu ici et j'espère bien le rencontrer. Qu'est-ce qu'a dit Gauguin du dernier portrait d'Arlésienne, qui est fait sur son dessin? Tu finiras par voir, je croirais, que cela est une des choses les moins mauvaises que j'ai faites. Gachet a un Guillaumin, femme nue sur un lit que je trouve fort belle, il a aussi un très ancien portrait de Guillaumin par lui, très différent du nôtre, noir mais intéressant. Mais sa maison tu verras c'est plein, plein, comme un marchand d'antiquités, de choses pas toujours intéressantes. Mais dans tout cela il y a ceci de bon que pour arranger des fleurs ou des natures mortes, il y aurait toujours de quoi. J'ai fait ces études pour lui, pour lui montrer, que si ce n'est pas un cas où on lui payerait en argent, nous le dédommagerons pourtant toujours de ce qu'il ferait pour nous. Connais-tu une eau-forte de Bracquemond, le portrait de comte? c'est un chef-d'oeuvre. Il me faudrait aussitôt que possible 12 tubes blanc de zinc de Tasset et 2 tubes moyen laque géranium. Puis aussitôt que tu pourrais me les envoyer, je tiendrais absolu- | |
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ment à copier encore une fois toutes les Etudes au fusain de Bargue, tu sais les figures nues. Je peux les dessiner relativement vite, mettons dans un mois, les 60 feuilles qu'il y a, donc tu enverrais un exemplaire en commission, je ferais en sorte de ne pas les tâcher ou salir. Si je négligeais d'étudier encore les proportions et le nu, je me trouverais mal pris plus tard. Que cela ne te paraîsse pas absurde ou inutile. Gachet m'a dit aussi, que si je voulais lui faire un grand plaisir, il désirerait que je refasse pour lui la copie de la Piéta de Delacroix, qu'il a regardé très longtemps. Dans la suite probablement il me donnera un coup de main pour les modèles; je sens qu'il nous comprendra tout à fait et qu'il travaillera avec toi et moi sans arrière-pensée, pour l'amour de l'art pour l'art, de toute son intelligence. Et il me fera peut-être bien avoir des portraits. Or pour avoir des clients pour les portraits, il faut pouvoir en montrer différents que l'on a fait. Voilà tout ce que je vois de possibilité de placer quelque chose. Mais pourtant, pourtant de certaines toiles un jour trouveront des amateurs. Je trouve seulement que tout le bruit qu'ont fait les grands prix payés dans les derniers temps pour des Millets, etc., ont encore empiré l'état de choses, quant à la chance qu'on a rien que de rentrer dans ses frais de peinture. C'est à avoir le vertige. Donc qu'y penserons-nous, cela abrutirait. Mieux vaut encore peut-être chercher un peu d'amitié et vivre au jour le jour. J'espère que le petit continuera à aller bien et vous deux également, jusqu'au revoir, à bientôt, je vous serre bien la main. Vincent. | |
639Beste Moeder, Wel bedankt voor uw laatsten brief, dien ik nog niet beantwoordde. Wil heeft mij nog verteld dat U nog naar Nuenen zijt geweest, wat ik mij zoo erg goed kan begrijpen en ben reeds verlangend van U te hooren, hoe U daar de dingen gevonden hebt en oude vrienden hebt bezocht. De tijd gaat snel voorbij al duren sommige dagen lang. Het was eigenlijk mijn plan niet om reeds weer naar Parijs terug te gaan, ik had nog een jaar te St Remy gebleven, als niet de laatste keer ik niet wel was, ik het bepaald gedeeltelijk moest toeschrijven aan den invloed die de ziekte van anderen op mij had waarom ik besloot dat het tijd was om te veranderen van omgeving, wilde ik | |
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mijn betrekkelijke werkkracht en wat mij rest van gezond verstand behouden. Dat schreef ik nog heden aan Dr. Peyron, ik had er met hem woorden over gehad, maar wij waren toch goed gescheiden en hij had Theo naar tijding van mij gevraagd. Ik hield veel van hem en wederkeerig maakte hij een onderscheid in mijn voordeel tusschen mij en anderen van zijn patiënten. En het is zoo dat als ik er ooit wilde terugkomen, ik er als bij vrienden zijn zoude. Doch het genoegen Theo terug te zien en kennis te maken met Jo, die mij verstandig en hartelijk en eenvoudig voorkomt, en met mijn nieuw naamgenootje, en verder terug te zijn onder de schilders en weer verdiept in al de strijd en discussie en vooral arbeid in het wereldje op zichzelf van de schilders, al die afleiding werkt, naar 't me voorkomt, gunstig in zoover dat de symptomen van de kwaal, die er als de thermometer van zijn, geheel verdwenen zijn dezer dagen - ofschoon men naar ik leerde daar niet heel vast staat op mag maken. De dokter hier heeft mij veel sympathie betoond, ik kan er aan huis komen zoo dikwijls ik wil en hij is goed op de hoogte van wat er onder de schilders dezer dagen behandeld wordt. Hij is zelf zeer zenuwachtig, vooral denkelijk is dat er niet beter op geworden sedert den dood van zijne vrouw. Hij heeft twee kinderen, een meisje van 19 en een jongen van 16. Hij zegt mij dat het werken nog 't beste is om in mijn geval er boven op te blijven. Nu in de laatste 14 dagen of 3 weken, die ik te St. Remy was, heb ik nog gewerkt van 's morgens vroeg tot 's avonds zonder ophouden. En ben maar een paar dagen te Parijs gebleven, en hier dadelijk weer aan 't werk gegaan. Theo wachtte me aan de spoor op en mijn eerste indruk was hij bleeker zag dan toen ik vertrok. Maar al pratende en toen ik hem thuis aan den gang zag viel het mij mede - ofschoon hij hoestte, toch is het werkelijk waar hij er in dien tijd niet op achteruitging. Al bleef 't dus 't zelfde, zou ik haast durven gelooven dat dit reeds wat gewonnen mag worden gerekend. En het volgend jaar hij eer sterker dan zwakker zal worden. Het is een geduldwerk zijn gestel en het leven in zijn omstandigheden. Enkele bijzonderheden hoorde ik van hem betreffende Cor. Als U schrijft groet hem recht hartelijk voor me en vertel hem eens ik weer terug ben. Ik zou hem wel schrijven maar het is een zoo heel ander vak het zijne en het mijne. | |
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Theo's vacantie nadert en dus zult U hem betrekkelijk spoedig terug zien. Zij hebben plan ook een paar dagen naar hier te komen, want wij hebben elkaar maar weinig en kort en gehaast gezien. Het is hier ongelukkig duur in het dorp, maar Gachet de dokter zegt me het in al de dorpen in den omtrek al mee net eender is, en hijzelf er ook veel van te lijden heeft bij vroeger vergeleken. En in de eerste tijden dien ik nog in de buurt van een dokter dien ik ken, te blijven. En hem kan ik in schilderijen betalen en een ander zou ik dat niet kunnen in geval er eens iets gebeurde nu zeg ik U goeden dag, want ik moet er op uit. Hopende Uzelf en Wil in goede gezondheid dezen zult ontvangen en in gedachten omhelsd, Uw liefh. Vincent. | |
640Chers frère et soeur, (10 Juni.) La journée de dimancheGa naar voetnoot*) m'a laissé un souvenir bien agréable, ainsi on sent bien qu'on est moins loin les uns des autres, et j'espère que nous nous reverrons souvent. Depuis dimanche j'ai fait deux études de maisons dans la verdure; à côté de la maison où je suis il est venu s'établir toute une colonie d'Américains qui font de la peinture, mais je n'ai pas encore vu ce qu'ils font. Réflexion faite, pour ce qui est de prendre cette maison ou bien une autre, voici ce qu'il y a. Ici je paye un franc par jour pour mon coucher, donc si j'avais les meubles, la différence de 365 francs ou de 400 ne serait pas à mon avis d'importance très grande, et alors j'aimerais bien que vous autres eussiez en même temps que moi un pied-à-terre à la campagne. Mais je commence à croire que je doive considérer les meubles comme perdus. Mes amis où ils sont, à ce que je m'imagine ne se dérangeront pas pour me les envoyer, moi n'étant plus là. C'est surtout la paresse lraditionnelle et la vieille histoire traditionnelle, que de leur côté les étrangers de passage laissent des meubles provisoires à l'endroit où ils sont. Mais je viens encore de leur écrire pour la troisième fois que j'en ai besoin, j'ai dit dans ma lettre que si je n'avais pas de leurs nouvelles je me sentirais obligé de leur envoyer un louis pour les | |
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frais d'expédition. Probable que cela fera de l'effet, mais c'est une impolitesse. Que veux-tu, dans le midi ce n'est pas tout à fait comme dans le nord, les gens y font ce qu'ils veulent et ne se donnent pas le mal de réfléchir ou d'être prévenant pour les autres, si l'on n'est pas là. Du moment qu'on est à Paris, on est comme dans l'autre monde, et je crois qu'ils ne se dérangeront probablement pas, à plus forte raison qu'ils n'aimeront pas à se mêler davantage de cette affaire dont ils ont beaucoup causé à Arles. C'est drôle tout de même que le cauchemar ait cessé ici à tel point, je l'ai toujours dit à M. Peyron que le retour dans le nord m'en débarasserait, mais drôle aussi que sous la direction de celui-là, qui pourtant est très capable et me voulait décidément du bien, cela avait plutôt agravé. De mon côté aussi cela me fait de la peine de remuer tout cela en écrivant aux gens. Je trouvais que le petit a bonne mine et vous autres aussi; il faudra vite revenir. De messager, il n'y en a pas d'ici directement à Paris, mais il y en a de Pontoise. Or de Pontoise à ici il y en a tous les jours. Veuille donc prier le père Tanguy de se mettre incontinent à l'oeuvre pour déclouer toutes les toiles qui sont sur châssis là-haut dans la mansarde. Il fera des rouleaux des toiles, des paquets des châssis. Alors ou bien j'enverrai le messager de Pontoise, ou bien je viendrai dans une quinzaine une fois avec M. Gachet en prendre une partie. J'en ai vu chez toi aussi dans le tas qui est sous le lit, beaucoup que je peux retoucher, je crois, à leur avantage. Je regrette bien ne pas voir l'exposition Raffaëlli; surtout je voudrais aussi voir ton arrangement de ces dessins sur de la cretonne, comme tu disais. Un jour ou un autre je crois que je trouverai moyen de faire une exposition à moi dans un café, je ne détesterais pas d'exposer avec Cheret, qui doit avoir des idées là-dessus certainement. A bientôt, je vous serre bien la main, vous souhaitant prospérité surtout avec le petit, t.à.t. Vincent. | |
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d'un taureau en aidant à les débarquer. Donc sa femme m'écrit que c'était pour cela que du jour au lendemain ils l'avaient remis, mais que samedi, donc aujourd'hui, on les enverrait; ils n'ont pas de chance, la femme ayant été malade aussi et n'étant pas encore complètement guérie, il n'y avait d'ailleurs pas un mot de reproche dans la lettre, mais que cela leur avait fait de la peine, que je n'étais pas venu les voir avant de partir; cela m'a fait de la peine à moi aussi. Ci-inclus je dois t'envoyer une commande de quelques couleurs. J'ai encore une étude qui est dans le genre de la moisson, qui se trouve chez toi dans la chambre où est le piano. Des champs vus d'une hauteur, avec une route sur laquelle une petite voiture; actuellement je travaille à un champ de coquelicots dans de la luzerne. Et j'ai une étude de vigne, que M. Gachet aimait beaucoup la dernière fois qu'il est venu voir. Pour le moment je n'ai rien d'autre à dire, il est venu une lettre de la mère, qui avait été à Nuenen et languit beaucoup de vous voir arriver et de voir le petit. Je vous serre bien la main à tous deux. t.à.t. Vincent. | |
642Mon cher Theo, (17 Juni.) Merci beaucoup de ta lettre d'avant-hier et du billet de 50 fr. qu'elle contenait. J'ai attendu l'envoi de couleurs et de toile de Tasset - qui vient d'arriver et duquel également je te remercie beaucoup - pour répondre à la question relativement à la différence de la couleur de Tanguy et Tasset. Voici c'est absolument la même chose, dans les tubes de Tasset il y en a parfois, surtout pour le blanc, qui sont mal remplies. Lorsque cependant Tanguy de son côté remplit mal lui aussi - certes sans le faire exprès - je ne vois seulement pas la raison pourquoi l'un aurait à l'autre des reproches bien sérieuses à faire. Y-a-t-il une différence dans les factures, là c'est ce qui m'intéresserait davantage. Et puis dans les couleurs il y a un tripotage comme dans les vins, comment pouvoir juger juste, lorsque comme moi on ignore la chemie. Je trouverais néanmoins fort bien, que dans la cas où le père Tanguy se donnerait pour nous un mal d'expédier les toiles qui sont dans sa mansarde, qu'alors tu lui prendrais de la couleur chez lui, fut-elle un peu plus mauvaise que l'autre. | |
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Ce ne serait que comme de juste. Mais ce qu'il dit d'une différence dans les tubes, je le répète c'est pure imagination de sa part, et la raison pourquoi qu'on allait chez Tasset, c'est que les couleurs de ce dernier sont en général moins fades. Maintenant c'est pas important cette différence, et si Tanguy y met de la bonne volonté pour emballer les toiles en dépôt chez lui - juste qu'il ait la commande pour les couleurs. C'est avec plaisir que j'ai fait connaissance avec le HollandaisGa naar voetnoot*), qui est venu hier, il a l'air bien trop gentil pour faire de la peinture dans les conditions actuelles. Si néanmoins il persiste à vouloir en faire, je lui ai dit qu'il ferait bien d'aller en Bretagne avec Gauguin et de Haan, parce qu'il vivra là-bas de 3 francs par jour au lieu de 5 francs et aura de la bonne compagnie - que moi aussi j'espère bien les y rejoindre, puisque Gauguin y va. J'en ai été bien content d'apprendre qu'ils vont renouveler leur tentative là-bas. Certes tu as raison que cela vaut mieux pour Gauguin que de rester à Paris. Très content aussi de ce qu'il trouve bien la tête d'Arlésienne en question. J'espère bien faire quelques eaux-fortes de motifs du midi, mettons 6, puisque je peux sans frais les imprimer chez M. Gachet, qui veut bien les tirer pour rien, si je les fais. C'est certes une chose qu'il faut faire, et on fera de sorte, que ça forme en quelque sorte suite à la publication Lauzet Monticelli, si tu trouves bien. Et Gauguin probablement gravera quelques toiles de lui en combinaison avec moi. Son tableau qui t'appartient et surtout pour le reste des choses de la Martinique. Lesquelles planches M. Gachet nous tirera également. Bien entendu on lui laissera liberté d'en tirer des exemplaires pour lui. M. Gachet viendra un jour voir mes toiles à Paris et alors nous en choisirions pour la gravure. Dans ce moment j'ai deux études en train, l'une un bouquet de plantes sauvages, des chardons, des épis, des feuilles différentes de verdure. L'une presque rouge, l'autre très verte, l'autre jaunissante. La deuxième étude, une maison blanche dans de la verdure, avec une étoile dans le ciel de nuit et une lumière orangée à la fenêtre et de la verdure noire et une note rose sombre. Voilà tout pour le moment. J'ai une idée pour faire une toile plus importante de la maison et du jardin de Daubigny, dont j'ai déjà une petite étude. | |
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J'étais bien content que Gauguin s'en aille avec de Haan encore. Naturellement ce projet de Madagascar me paraît peu possible à exécuter, j'aimerais encore mieux le voir partir pour le Tonkin. Si cependant il allait à Madagascar, je serais capable de l'y suivre, car il faudrait y aller à deux ou trois. Mais nous ne sommes pas encore là. Certes l'avenir est bien dans les Tropiques pour la peinture, soit à Java, soit à la Martinique, le Brésil ou l'Australie, et non pas ici, mais tu sens qu'à moi il ne m'est pas prouvé que toi, Gauguin ou moi, soyons ces gens d'avenir-là. Mais certes encore une fois, là et non pas ici un jour probablement proche on verra travailler des impressionistes, qui se tiendront avec Millet, Pissarro. Croire à cela c'est naturel, mais y aller sans les moyens d'existence et de rapport avec Paris un coup de tête, alors que des années durant on s'est rouillé en végétant ici. Bon. Merci encore une fois et bonne poignée de main à toi et ta femme et bonne santé au petit, que je languis bien de revoir. t.à.t. Vincent. | |
643(Onvoltooide brief uit deze dagen onder zijn papieren gevonden.)
Mon cher ami Gauguin, Merci de m'avoir de nouveau écrit mon cher ami et soyez assuré, que depuis mon retour j'ai pensé à vous tous les jours. Je ne suis resté à Paris que trois jours et le bruit etc. parisien me faisant une bien mauvaise impression, j'ai jugé prudent pour ma tête de ficher le camp pour la campagne, sans cela j'aurais bien vite couru chez vous. Et cela me fait énormément plaisir que vous dites que le portrait d'Arlesienne, fondé rigoureusement sur votre dessin, vous a plu. J'ai cherché à être fidèle à votre dessin respectueusement et pourtant prenant la liberté d'interprêter par le moyen d'une couleur dans le caractère sobre et le style du dessin en question. C'est une synthèse d'Arlésienne si vous voulez; comme les synthèses d'Arlésiennes sont rares, prenez cela comme oeuvre de vous et de moi comme résumé de nos mois de travail ensemble. Pour le faire j'ai payé moi pour ma part encore d'un mois de de maladie, mais aussi je sais que c'est une toile, qui sera comprise par vous, moi, et de rares autres, comme nous voudrions qu'on comprenne. Ici mon ami le Dr. Gachet y est après deux, | |
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trois hésitations venu tout à fait et dit: ‘Comme c'est difficile d'être simple’. Bon - je vais encore souligner la chose en la gravant à l'eau-forte, cette chose-là, puis basta. L'aura qui voudra. Avez-vous aussi vu les oliviers? Maintenant j'ai un portrait du Dr. Gachet à expression navrée de notre temps. Si vous voulez, quelque chose comme vous disiez de votre Christ au jardin des oliviers, pas destiné à être comprise, mais enfin là jusque là je vous suis et mon frère saisit bien cette nuance. J'ai encore de là-bas un cyprès avec une étoile, un dernier essai - un ciel de nuit avec une lune sans éclat, à peine le croissant mince émergeant de l'ombre projetée opaque de la terre - une étoile | |
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à éclat exagéré, si vous voulez, éclat doux de rose et vert dans le ciel outremer où courent des nuages. En bas une route bordée de hautes cannes jaunes, derrière lesquelles les basses Alpines bleues, une vieille auberge à fenêtres illuminées orangée, et un très haut cyprès, tout droit, tout sombre. Sur la route une voiture jaune attelée d'un cheval blanc et deux promeneurs attardés. Très romantique, si vous voulez, mais aussi je crois de la Provence.Ga naar voetnoot*) Probablement je graverai à l'eau-forte celle-là et d'autres paysages et motifs, souvenirs de Provence, alors je me ferai une fête de vous en donner un, tout un résumé un peu voulu et étudié. Mon frère dit que Lauzet, qui fait des lithographies d'après Monticelli, a trouvé bien la tête d'Arlésienne en question. Alors vous comprenez qu'étant arrivé à Paris un peu ahuri, je n'ai pas encore vu de vos toiles. Mais bientôt j'espère y retourner pour quelques jours. Très content d'apprendre par votre lettre, que vous retournez en Bretagne avec de Haan. Il est fort probable que - si vous me le permettez - je viendrai pour un mois vous y rejoindre, pour y faire une marine ou deux, mais surtout pourvous revoir et faire la connaissance de de Haan. De ces jours-là nous chercherons à faire quelque chose de voulu et de grave, comme cela serait probablement devenu si nous eussions pu continuer là-bas. | |
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Tenez, une idée qui peut-être vous ira, je cherche à faire des études de blé ainsi - je ne peux cependant pas dessiner cela - rien que des épis tiges bleus verts, feuilles longues comme des rubans vert et rose par le reflet, épis jaunissant légèrement, bordés de rose pâle par la floraison poussiéreuse - un liseron rose dans le bas enroulé autour d'une tige. Là-dessus sur un fond bien vivant et pourtant tranquille, je voudrais peindre des portraits. C'est des verts de différente qualité, de même valeur, de façon à former un tout vert, qui ferait par sa vibration, songer au bruit doux des épis se balançant à la brise; c'est pas commode du tout comme coloration. | |
644Mon cher Theo, (24 Juni.) Merci beaucoup de ta lettre et du billet de fr. 50 qu'elle contenait. L'échange que tu as fait avec Bock est très bien et suis bien curieux de voir comment il fait à présent. J'espère que la santé de Jo va mieux, puisque tu dis qu'elle a été indisposée. Certes il faut venir ici le plus tôt possible, la nature est bien, bien belle ici et je languis de vous revoir tous. M. Peyron m'a écrit il y a deux jours, ci-joint sa lettre, je lui ai dit qu'il me semblait suffisant de donner aux garçons une dizaine de francs. Maintenant les toiles de là-bas sont arrivées; les Iris ont bien séché et j'ose croire que tu y trouveras quelque chose, ainsi il y a aussi encore des roses, un champ de blé, une petite toile avec montagnes et enfin un cyprès avec une étoile. Cette semaine j'ai fait un portrait d'une jeune fille de 16 ans ou à peu près, en bleu contre fond bleu, la fille des gens où je loge. Je le lui ai donné ce portrait, mais j'en ai fait pour toi une variante, une toile de 15. Puis j'ai une toile longue d'un mètre sur 50 centimètres seulement de hauteur, de champs de blé et une qui fait pendant, d'un sousbois, des troncs lilas de peupliers et là-dessous de l'herbe fleurie, rose, jaune, blanche et verts divers. Enfin un effet de soir - deux poiriers touts noirs contre ciel jaunissant, avec des blés et dans le fond violet le château encaissé dans la verdure sombre. Le Hollandais travaille assez assidûment, mais se fait encore illusion sur l'originalité de sa manière de voir considérablement. Il fait des études à peu près comme en faisait Koning, un peu de | |
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gris, un peu de vert, avec un toit rouge, une route blanchissante. Que faut-il dire dans un cas comme cela, s'il a de l'argent, alors certes il fait bien de faire de la peinture, mais s'il faut qu'il intrigue beaucoup pour en vendre, je le plains d'en faire de la peinture, comme d'autres d'en acheter à un prix relativement trop élevé. Là si pourtant il travaille seulement bien assidûment tous les jours, il arriverait. Mais seul ou avec des peintres qui travaillent peu, il ne ferait pas grand chose, je crois. J'espère faire semaine prochaine le portrait de Mlle Gachet et peutêtre aurai-je une fille de campagne à poser aussi. Je suis content de ce que Bock me fait cet échange, car je trouvais qu'ils avaient bien payé un peu cher relativement l'autre toile, étant des amis. J'aimerais beaucoup un peu plus tard venir à Paris quelques jours, précisément pour aller une fois chez Quost, chez Jéannin, un ou deux autres. Je voudrais bien que tu eusses un Quost, et il y aurait probablement moyen d'en échanger un. Gachet viendra aujourd'hui voir les toiles du midi. Prospérité avec le petit et bonne poignée de main en pensée à toi et à Jo, | |
645Mon cher Theo, La commande de couleurs ci-joint tu les enverrais le commencement du mois, enfin au moment le plus convenable, c'est pas pressé pour quelques jours plus tôt ou plus tard. Hier et avant-hier j'ai peint le portrait de Mlle. Gachet que tu verras j'espère bientôt; la robe est rose, le mur dans le fond vert avec un point orangé, le tapis rouge avec un point vert, le piano violet foncé, cela a 1 mètre de haut sur 50 de large. C'est une figure que j'ai peinte avec plaisir - mais c'est difficile. Il m'a promis de me la faire poser une autre fois avec un petit orgue. J'en ferai un pour toi. - J'ai remarqué que cette toile fait très bien avec une autre en largeur, de blés, ainsi l'une toile étant en hauteur et rose, l'autre d'un vert pâle et jaune vert complémentaire du rose; mais nous en sommes encore loin avant que les gens comprennent les curieux rapports qui existent entre un morceau de la nature et un autre, qui pourtant s'expliquent et se font valoir l'un l'autre. Mais quelques-uns pourtant le sentent bien et c'est déjà quelque chose. Et puis il y a ceci de gagné, que dans les toilettes on voit des arrangements de couleurs claires bien jolies, si on pouvait | |
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avoir les personnes qu'on voit passer, pour faire leurs portraits, ce serait aussi joli que n'importe quelle époque du passé et même je trouve que souvent dans la nature il y a actuellement toute la grace du tableau de Puvis, entre l'art et la nature. Ainsi hier je vis deux figures: la mère en robe carmin foncé, la fille en rose pâle avec un chapeau jaune sans ornement aucun, des figures très saines campagnardes, bien hâlées par le grand air, brûlées par le soleil; la mère surtout avec un visage très très rouge et des cheveux noirs et deux diamants dans les oreilles. Et j'ai encore pensé à cette toile de Delacroix: L'éducation maternelle. Car dans les expressions des visages il y avait réellement tout ce qu'il y eut dans la tête de George Sand. Sais-tu qu'il y a un portrait - buste George Sand - de Delacroix, il y en a un bois dans l'Illustration, avec les cheveux coupés courts. Bonne poignée de main en pensée à toi et à Jo et prospérité avec le petit. t.à.t. Vincent. | |
646Mon cher Theo et chère Jo, (30 Juni.) Je viens de recevoir la lettre dans laquelle tu dis que l'enfant est malade; je voudrais bien venir vous voir et ce qui me retient, c'est la pensée que je serais encore plus impuissant que vous autres dans le cas donné de chagrin. Mais je sens combien cela doit être très éreintant et voudrais pouvoir donner un coup de main. En venant de but en blanc, je crains d'augmenter la confusion. De tout mon coeur je partage vos inquiétudes pourtant. C'est bien dommage que chez M. Gachet la maison est si encombrée de toutes sortes de choses. Sans cela je crois que ce serait un bon plan de venir loger ici - chez lui - avec le petit, au moins pour un bon mois - je crois que l'air de campagne fait énormément de l'effet. Dans la rue ici il y a des gosses nés à Paris et réellement maladifs - qui pourtant vont bien. Venir ici à l'auberge se pourrait aussi, c'est vrai. Pour que tu ne sois pas trop seul, je pourrais moi venir chez toi pour une semaine ou quinzaine. Cela n'augmenterait pas les dépenses. Pour le petit, vrai, je commence à craindre qu'il faudra lui donner de l'air et surtout le petit va et vient des autres enfants d'un village. Pour Jo aussi qui partage nos inquiétudes et hasards, je crois que de temps en temps il lui faut prendre cette distraction de la campagne. | |
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Une lettre de Gauguin assez mélancolique, il parle vaguement d'être bien décidé pour Madagascar, mais si vaguement qu'on voit bien qu'il ne pense à cela que parce qu'il ne sait réellement pas à quoi d'autre penser. Et l'exécution du plan me paraît presqu'absurde. | |
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Voici trois croquisGa naar voetnoot*) - l'une d'une figure de paysanne, grand chapeau jaune avec un noeud de rubans bleu céleste, visage très rouge, caraco gros bleu à pointillé orangé, fond d'épis de blé. C'est une toile de 30, mais c'est bien un peu grossier je crains. Puis le paysage en longueur avec les champs, un motif comme serait de Michel, mais alors la coloration est vert tendre, jaune et bleu vert. Puis un sous-bois des troncs de peupliers violets, qui perpendiculairement comme des colonnes traversent le paysage, la profondeur du sous-bois est bleue et sous les grands troncs la prairie fleurie, blanche, rose, jaune, verte, longues herbes roussies et fleurs. Les gens d'ici à l'auberge ont resté dans le temps à Paris, là ils étaient constamment indisposés, parents et enfants, ici ils n'ont jamais rien du tout et surtout pas le plus petit, qui est venu quand il avait 2 mois et alors la mère avait du mal pour lui donner à téter, tandis qu'ici presqu'aussitôt tout cela est allé bien. D'un autre côté toi tu travailles toute la journée et à présent probablement ne dors-tu guère. Je croirais volontiers que Jo aurait deux fois plus de lait ici et qu'alors qu'elle viendrait ici, on pourrait se passer des vaches, ânes et autres quadrupèdes. Et pour Jo, pourque dans la journée elle ait de la compagnie, ma foi elle pourrait encore aller loger juste en face de chez le père Gachet, peut-être te rappelles-tu qu'il y a une auberge juste en face en bas de la pente? Que veux-tu que je dise quant à l'avenir peut-être, peut-être, sans les Boussod?Ga naar voetnoot**) Ce sera comme ce sera, tu ne t'es pas épargné du mal pour eux, tu leur as servi avec une fidélité exemplaire tout le temps. Je cherche moi à faire aussi bien que je peux, mais ne te cache pas que je n'ose guère y compter d'avoir toujours la santé nécessaire. Et si mon mal revenait, tu m'excuserais, j'aime encore beaucoup l'art et la vie, mais quant à jamais avoir une femme à moi, je n'y crois pas très fort. Je crains plutôt que vers mettons la quarantaine - mais ne mettons rien - je déclare ignorer mais absolument, absolument, quelle tournure cela puisse encore prendre. | |
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Mais je t'écris de suite que pour le petit, je crois qu'il ne faut pas t'inquiéter outre mesure, si c'est qu'il fait ses dents, eh bien pour lui faciliter la besogne peut-être pourrait-on le distraire davantage ici où il y a des enfants, des bêtes, des fleurs et du bon air. Je vous serre bien la main à toi et à Jo en pensée et embrasse le petit. t.à.t. Vincent.
Il viendra probablement te voir un Anglais, Australien, nommé Walpole Brooke, demeurant 16 Rue de la Grande Chaumière - je lui ai dit que tu lui indiquerais une heure où il pourrait venir voir mes toiles, qui sont chez toi. Il te montrera probablement de ses études, qui sont encore assez ternes, mais il observe pourtant la nature. Il a été ici à Auvers durant des mois et nous sortions quelquefois ensemble. Il a été élevé au Japon, on ne le dirait pas en voyant sa peinture - mais cela pourrait venir. Merci de l'envoi de couleurs, du billet de 50 fr, et de l'article sur les Indépendants. | |
647Cher frère et soeur, Mon impression est qu'étant un peu ahuri tous et d'ailleurs tous un peu en travail, il importe relativement peu d'insister pour avoir des définitions bien nettes de la position dans laquelle on se trouve. Vous me surprenez un peu semblant vouloir forcer la situation. Y puis-je quoi que ce soit, enfin puis-je faire chose ou autre que vous désireriez? Quoiqu'il en soit, en pensée encore une bonne poignée de main et cela m'a quand même fait beaucoup de plaisir de vous revoir tous. Soyez-en bien assurés t.à.v. Vincent. | |
648Mon cher Theo et chère Jo, De ces premiers jours-ci, certes j'aurais dans des conditions ordinaires espéré un petit mot de vous déjà. Mais considérant les choses comme des faits accomplis - ma foi - je trouve que Theo, Jo et le petit sont un peu sur les dents et éreintés - d'ailleurs moi aussi suis loin d'être arrivé à quelque tranquillité. | |
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Souvent, très souvent je pense à mon petit neveu - est-ce qu'il va bien? Jo voulez-vous me croire - si cela vous arrive de nouveau, ce que j'espère, d'avoir encore d'autres enfants - ne les faites pas en ville, accouchez à la campagne et restez-y jusqu'à que l'enfant ait 3 ou 4 mois. A présent il me semble que l'enfant n'ayant encore que 6 mois, déjà le lait devient rare, déjà vous êtes - comme Theo - fatiguée trop. Je ne veux pas dire du tout éreintée, mais enfin les ennuis prennent trop de place, sont trop nombreux et vous semez dans les épines. C'est pourquoi que je vous donnerais à penser de ne pas aller en Hollande cette année-ci, c'est très, très coûteux toujours le voyage, et jamais cela a fait du bien. Si, cela fait du bien si vous voulez à la mère, qui aimera à voir le petit - mais elle comprendra et préférera le bien-être du petit au plaisir de le voir. D'ailleurs elle n'y perdra rien, elle le verra plus tard. Mais - sans oser dire que ce soit assez - quoi qu'il en soit, il est certes préférable que père, mère et enfant prennent un repos absolu d'un mois à la campagne. D'un autre côté, moi aussi, je crains beaucoup d'être ahuri et trouve étrange que je ne sache aucunement sous quelles conditions je suis parti - si c'est comme dans le temps à 150 par mois en trois fois. Theo n'a rien fixé et donc pour commencer je suis parti dans l'ahurissement. Y aurait-il moyen de se revoir encore plus calme - je l'espère, mais le voyage en Hollande je redoute que ce sera un comble pour nous tous. Je prévois toujours que cela fait souffrir l'enfant plus tard d'être élevé en ville. Est-ce que Jo trouve cela exagéré, je l'espère, mais enfin je crois que pourtant il faut être prudent. Et je dis ce que je pense, parce que vous comprenez bien que je prends de l'intérêt à mon petit neveu et tiens à son bien-être; puisque vous avez bien voulu le nommer après moi, je désirerais qu'il eût l'âme moins inquiète que la mienne, qui sombre. Parlons maintenant du Dr. Gachet. J'ai été le voir avant-hier, je l'ai pas trouvé. De ces jours-ci je vais très bien, je travaille dur, ai quatre études peintes et deux dessins. Tu verras un dessin d'un vieille vigne avec une figure de paysanne. Je compte en faire une grande toile. Je crois qu'il ne faut aucunement compter sur le Dr. Gachet. | |
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D'abord il est plus malade que moi à ce qu'il m'a paru, ou mettons juste autant, voilà. Or lorsqu'un aveugle mènera un autre aveugle, ne tomberont-ils pas tous deux dans le fossé? Je ne sais que dire. Certes, ma dernière crise, qui fut terrible, était due en considérable partie à l'influence des autres malades, enfin la prison m'écrasait et le père Peyron n'y faisait pas la moindre attention, me laissant végéter avec le reste corrompu profondément. Je peux avoir un logement, 3 petites pièces à fr 150 par an. Cela, si je ne trouve pas mieux, et j'espère trouver mieux, en tout cas est préférable au trou à punaises chez Tanguy et d'ailleurs j'y trouverais un abri moi-même et pourrais retoucher les toiles, qui en ont besoin. De telle façon les tableaux s'abîmeraient moins et en les tenant en ordre la chance d'en tirer quelque-profit augmenterait. Car - je ne parle pas des miennes - mais les toiles Bernard, Prévot, Russell, Guillaumin, Jeannin, qui étaient égarés là, c'est pas leur place. Or des toiles comme celles-là - encore une fois des miennes je ne parle pas - c'est de la marchandise, qui a et gardera une certaine valeur et la négliger c'est une des causes de notre gêne mutuelle. Mais je ferai encore mon possible de trouver que tout va bien. Il est certain, je crois, que nous songeons tous au petit, et que Jo dise ce qu'elle veut. Theo comme moi j'ose croire se rangeront à son avis. Moi je ne peux dans ce moment que dire que je pense qui'l nous faut du repos à tous. Je me sens - raté. - Voilà pour mon compte - je sens que c'est là le sort que j'accepte et qui ne changera plus. Mais raison de plus, mettant de côte toute ambition, nous pouvons des années durant vivre ensemble sans nous ruiner de part ou d'autre. Tu vois qu'avec les toiles qui sont encore à St. Rémy, il y a au moins 8 avec les 4 d'ici, je cherche à ne pas perdre la main. Cela c'est absolument pourtant la vérité, c'est difficile d'acquérir une certaine facilité de produire et en cessant de travailler, je la perdrais bien plus vite et plus facilement, que cela m'ait coûté de peines pour y arriver. Et la perspective s'assombrit, je ne vois pas l'avenir heureux du tout. Ecris-moi par retour, si tu n'as pas encore écrit, et bonnes poignées de main en pensée, j'espérerais qu'il y eût une possibilité de se revoir bientôt à têtes plus reposées. Vincent. | |
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649Chers frère et soeur, La lettre de Jo a été pour moi réellement comme un évangile, une délivrance d'angoisse, que m'avaient causée les heures un peu difficiles et laborieuses pour nous tous, que j'ai partagées avec vous. C'est pas peu de chose lorsque tous ensemble nous sentons le pain quotidien en danger, pas peu de chose lorsque pour d'autres causes que celle-là aussi nous sentons notre existence fragile. Revenu ici, je me suis senti moi aussi encore bien attristé et avais continué à sentir peser sur moi aussi l'orage, qui vous menace. Qu'y faire - voyez-vous, je cherche d'habitude à être de bonne humeur assez, mais ma vie à moi aussi est attaquée à la racinemême, mon pas aussi est chancelant. J'ai craint - pas tout-à-fait, mais un peu pourtant - que je vous étais redoutable étant à votre charge, mais la lettre de Jo me prouve clairement que vous sentez bien, que pour ma part je suis en travail et peine comme vous. Là - revenu ici je me suis remis au travail - le pinceau pourtant me tombant presque des mains et - sachant bien ce que je voulais, j'ai encore depuis peint trois grandes toiles. Ce sont d'immenses étendues de blés sôus des ciels troublés et je ne me suis pas gêné pour chercher à exprimer de la tristesse, de la solitude extrême. Vous verrez cela j'espère sous peu - car j'espère vous les apporter à Paris le plus tôt possible, puisque je croirais presque que ces toiles vous diront, ce que je ne sais dire en paroles, ce que je vois de sain et de fortifiant dans la campagne. Maintenant la troisième toile est le jardin de Daubigny, tableau que je méditais depuis que je suis ici. J'espère de tout mon coeur que le voyage projeté puisse vous procurer un peu de distraction. Souvent je pense au petit, je crois que certes c'est mieux d'élever des enfants, que de donner toute sa force nerveuse à faire des tableaux, mais que voulez-vous, je suis moi maintenant - au moins me sens - trop vieux pour revenir sur des pas ou pour avoir envie d'autre chose. Cette envie m'a passée, quoique la douleur morale m'en reste. Je regrette beaucoup de ne pas avoir revu Guillaumin, mais cela me fait plaisir qu'il ait vu mes toiles. Si je l'avais attendu, j'aurais probablement resté à causer avec lui de façon à perdre mon train. | |
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Vous souhaitant de la chance et bon courage et prospérité relative, je vous prie de dire une fois à la mère et à la soeur que je pense à elles bien souvent, d'ailleurs j'ai ce matin une lettre d'elles et repondrai sous peu. Poignées de main en pensée, t.à.t. Vincent.
Mon argent ne me durera pas bien longtemps cette fois-ci, ayant à mon retour eu à payer les frais des bagages d'Arles. Je garde de ce voyage à Paris de bien bons souvenirs, il y a quelques mois j'osais peu espérer revoir encore les amis. J'ai trouvé bien du talent à cette dame hollandaiseGa naar voetnoot*). Le tableau de Lautrec, portrait de musicienne, est bien étonnant, je l'ai vu avec émotion. | |
650(In zijn Moeders' handschrift staat hierboven: allerlaatste brief uit Auvers.) Beste moeder en zuster, Hartelijk dank voor uwe goede brieven, die mij recht veel genoegen deden. Tegenwoordig voel ik me kalmer dan verleden jaar en werkelijk de onrust in mijn hoofd is zooveel bedaard. Ik heb trouwens wel altijd dat geloofd, dat het terugzien van de omgeving van vroeger dat zou uitwerken. Dikwijls denk ik aan U beiden en zou wel erg graag U nog eens terugzien. Erg goed dat Wil in het hospitaal is gaan werken - en dat zij zegt de operaties vielen me mee juist omdat zij apprecieert de middelen om de smart te verminderen en het er op uit zijn van veel dokters om hetgeen gedaan moet worden eenvoudig en verstandig en met goedheid te doen - wel dat noem ik de dingen goed aankijken - en vertrouwen. Maar juist voor de gezondheid zooals U zegt is het erg noodig in den tuin te werken en de bloemen te zien groeien. Ik voor mij ben geheel geabsorbeerd in die onafzienbare vlakte met korenvelden tegen de heuvels, groot als een zee, fijn geel, fijn zacht groen, fijn paars van een omgewerkt en gewied stuk grond, regelmatig met het groen van bloeiende aardappelplanten gespikkeld, alles onder een lucht met fijn blauwe, witte, rose, violette tonen. | |
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Ik ben geheel in een stemming van haast al te groote kalmte, in een stemming om dat te schilderen. Hartelijk hoop ik dat U met Theo en Jo recht gezellige dagen zult hebben en evenals ik zult U wel zien hoe goed zij voor het kindje zorgen, dat er ook goed uit ziet. Gegroet voor heden, ik moet op mijn werk uit, in gedachten omhelsd uw liefh. Vincent. | |
651Mon cher frère, (23 Juli.) Merci de ta lettre d'aujourd'hui et du billet de 50 fr. qu'elle contenait. Je voudrais peut-être t'écrire sur bien des choses, mais d'abord l'envie m'en a tellement passée, puis j'en sens l'inutilité. J'espère que tu auras retrouvé ces messieurs dans de bonnes dispositions à ton égard. En ce qui me regarde, je m'applique sur mes toiles avec toute mon attention, je cherche à faire aussi bien que de certains peintres, que j'ai beaucoup aimé et admiré. Ce qu'il me semble en revenant - c'est que les peintres euxmêmes sont de plus en plus aux abois. Bon ....mais le moment de chercher à leur faire comprendre l'utilité d'une union, n'est-il pas un peu passé déjà? D'autre part une union, se formerait-elle, sombrerait si le reste doive sombrer. Alors tu me dirais peut-être que des marchands s'uniraient pour les impressionistes, ce serait bien passager. Enfin il me semble que l'initiative personnelle demeure inefficace et expérience faite, la recommencerait-on? J'ai constaté avec plaisir que le Gauguin de Bretagne, que j'ai vu, était très beau et il me semble que les autres, qu'il a fait là-bas, doivent l'être aussi. Peut-être verras-tu ce croquis du jardin de Daubigny - c'est une de mes toiles les plus voulues - j'y joins un croquis de vieux chaumes et les croquis de 2 toiles de 30 représentant d'immenses étendues de blé après la pluie.Ga naar voetnoot*) Hirschig a demandé de te prier de vouloir bien lui commander la liste de couleurs ci-jointe chez le même marchand de couleurs dont tu me les envoies. | |
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Tasset peut les lui envoyer directement à lui contre remboursement, mais alors il faudrait lui accorder les 20%, ce qui sera le plus simple. Ou bien tu les joindrais à l'envoi de couleurs pour moi en ajoutant la facture, ou en me disant combien en est le montant, et alors il t'enverrait l'argent à toi. Ici on ne peut pas en trouver de bonnes de couleurs, J'ai simplifié ma commande à moi jusqu'à un minimum bien raide. Hirschig commence à comprendre un peu, il m'a semblé; il a fait le portrait du vieux maître d'école, qu'il lui a donné, bien - et puis il a des études de paysage qui sont comme les Koning qui sont chez toi, à peu près comme couleur. Cela deviendra peut-être tout à fait comme cela ou comme les choses de Voerman, que nous avons vues ensemble. A bientôt, porte-toi bien et bonne chance dans les affaires, etc., bien le bonjour à Jo et poignées de main en pensée t.à.t. Vincent.
Le jardin de Daubigny avant-plan d'herbe verte et rose. A gauche un buisson vert et lilas et une souche de plante à feuillages blanchâtres. Au milieu un parterre de roses, à droite une claie, un mur, et au dessus du mur un noisetier à feuillage violet. Puis une haie de lilas, une rangée de tilleuls arrondis jaunes, la maison elle-même dans le fond, rose, à toit de tuiles bleuâtres. Un banc et 3 chaises, une figure noire à chapeau jaune et sur l'avantplan un chat noir. Ciel vert pâle. | |
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652(Lettre qu'il portait sur lui le 29 juillet)
Mon cher frère, Merci de ta bonne lettre et du billet de 50 fr. qu'elle contenait. Puisque cela va bien, ce qui est le principal, pourquoi insisterais-je sur des choses de moindre importance, ma foi, avant qu'il y ait chance de causer affaires à tête plus reposée, il y a probablement loin. Les autres peintres, quoiqu'ils en pensent, instinctivement se tiennent à distance des discussions sur le commerce actuel. Eh bien vraiment, nous ne pouvons faire parler que nos tableaux. Mais pourtant mon cher frère, il y a ceci que toujours je t'ai dit et je le redis encore une fois avec toute la gravité que puisse donner les efforts de pensée assidument fixée pour chercher à faire aussi bien qu'on peut - je te le redis encore que je considérerai toujours que tu es autre chose qu'un simple marchand de Corot, que par mon intermédiaire tu as ta part à la production même de certaines toiles, qui même dans le débâcle gardent leur calme. Car là nous en sommes et c'est là tout ou au moins le principal que je puisse avoir à te dire dans un moment de crise relative. Dans un moment où les choses sont fort tendues entre marchands de tableaux d'artistes morts et d'artistes vivants. Eh bien, mon travail à moi, j'y risque ma vie et ma raison y a fondré à moitié - bon - mais tu n'es pas dans les marchands d'hommes pour autant que je sache, et tu peux prendre parti, je le trouve, agissant réellement avec humanité, mais que veux-tu?
EINDE |
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