avec messieurs du conseil d'estat, a scavoir monsieur de Villeroy, monsieur de Chasteauneuff, monsieur de Pontcarré, monsieur de Thou, monsieur de Vicq, monsieur Janin.
Le jour de devant y estoyent les princesses du sang, habillez en dueil madame la princesse de Condé, madame la princesse de Conty, madame la contesse de Soissons, et madame la duchesse de Montpensier. Apres que les jours des ceremonies estoient finies, son corps fust deposé en une siene chapelle bastie pres de sa court, et dict on que la sera gardé jusques a son enterrement a Sainct Denis.
Depuis le depart des estats on parle fort de la guerre du duc de Savoye au Milannois, contre le Roy d'Espagne son beau frere, et court le bruit, que le duc, ayant bataillé, a perdu un grand nombre de ses gens, de sorte qu'il a esté contrainct de demander secours au Roy de France, lequel ne luy a esté non seulement refusé, mais aussy par edict du Roy publié par toutte la France, et expressement defendu a touts ses subjects, de quelle qualité qu'il soyent, de luy prester ayde ou secours en sorte quelconque, sur peine de la vie et confiscations des biens. On dict aussi, que ledict duc en ceste siene necessité, a esté fort supporté et soulagé de la ville et republicque de Geneve, tant en armes et munitions, qu'en bleds et vivres, dont il se sent tellement obligé, qu'il est resolu (comme on dict), de permettre en touttes ses terres et jurisdictions la diversité d'exercice de la religion.
Touchant le mariage de sa Majeste avec l'infante d'Espagne et reciproquement du prince d'Espagne avec madame de France; la Royne mere du Roy le presse fort, et faict de grands preparatifs pour c'est effect. Mais je voy et entends journelement avec admiration la volonté et affection des Francois, grands et petits, tant alterée et alienée de la nation Espagnolle, que je ne puis croire facilement, que ces nopces se facent bientost.
Voyla que c'est passe de plus notable depuis mes dernieres, jadioustant, que le xxiime d'Aoust de l'an passé on eriga une statue equestre du feu Roy Henri IV. au milieu du pont neuff, sur un piedestal fort esleué. L'ouvrage est de bronze et de la main du plus excellent sculpteur de nostre siecle, Johannis de Bologne Belgae, Academici Florentini. Ce chef d'oeuvre peze vingt et huict mille livres et est neantmoins cruece, mais d'un admirable grandeur et haulteur, de sorte qu'on le puelt accomparer au cheval Troyen. Je vous envoye un copie imprimée, laquelle est fort bien representée, excepté la face du Roy, en quoy le maistre s'est de beaucoup oublié. Je vous envoye aussi quelques pourtraits de mon feu oncle, le general Foeck, lesquelles un mien extreme desir et affection de tesmoigner a tous, l'obligation, que je luy ay, m'ont faict inventer et figurer moymesmes, et exprimer sur un papier, sa face imprimée en mon ame et esprit; a la mienne volunté, que le graveur eust aussi bien suivy la modelle et desseing comme je le luy avois donne; je demeurerois plus content, et les spectateurs l'admireroient peult estre davantage, pour voire representé, par la seule imagination, apres tant d'annees et intervalles, chose si semblable, comme est le premier desseing et crayon, que jay faict. Cependant je vous prierais de prendre ce mien labeur en bonne part, et durant mon absence me faire sentir vostre bienveullence et faveur, si par aventure l'exigence le requiert. Sur ce me recommendant treshumblement a voz bonnes graces,
Monsieur; je prie l'Eternel de vous maintenir en les sienes.
De Paris, ce 19. de May, 1615.
Vostre tres humble serviteur,
J. de Witt.
Opschr.: A Monsieur Gilles de Ledenberch, secretaire de Messeigneurs, Messeigneurs des Etats d'Utrecht, a Utrecht.