Paul van Ostaijen. Een documentatie
(1996)–Gerrit Borgers– Auteursrechtelijk beschermd
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résuméOn trouve dans cet ouvrage documentaire, classées chronologiquement, les données orales et écrites sur la vie et l'oeuvre de Paul van Ostaijen, réunies au cours des dernières vingt-deux années. La majeure partie de la première catégorie - renseignements et souvenirs - a été fournie par des contemporains de l'écrivain. Les documents de première main proviennent de son oeuvre, ainsi que de sa correspondance, pour autant que les lettres écrites de sa main et celles qui lui ont été adressées soient à la disposition des chercheurs. Cette correspondance a été reproduite intégralement et collationnée consciencieusement. Les Chapitres I et II renseignent les lecteurs sur les origines de Van Ostaijen et le milieu où il a grandi. Le Chapitre III évoque les années, semées de conflits, où il fréquenta l'école moyenne, c'est-à-dire l'époque où sa personnalité commence à s'affirmer, où il commence à s'intéresser à la littérature, aux arts plastiques et aux problèmes sociaux, et où il établit ses premiers contacts avec des esprits congénères dans les groupes de jeunes de sa ville natale. Le Chapitre IV est consacré à l'année précédant la première guerre mondiale. Il habite alors Hove, dans la banlieue anversoise; il abandonne ses études pour accepter un emploi de rond-de-cuir à l'hôtel de ville d'Anvers. Vers cette époque, le cercle de ses amis s'élargit; il écrit les premiers poèmes qui ont été conservés et fait ses débuts dans le journalisme en publiant dans un | |
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hebdomadaire anversois deux articles sur les arts plastiques. Le Chapitre V a trait aux années de guerre. Réfugié avec les siens aux Pays-Bas, il ne tarda pas à regagner Anvers, où il occupe son poste à l'hôtel de ville jusqu' à la fin des hostilités. L'évolution de son sens poétique et critique s'accomplissait dans l'atmosphère d'isolement, chargée de tension, que subissaient les jeunes dans la ville occupée. Son besoin grandissant de se distinguer des autres le poussa au début à adopter des allures de dandy. Ses premières liaisons amoureuses, ses explorations de la vie nocturne et ses expériences des stupéfiants datent de cette époque. En 1916, il réunit dans Music-hall ses poèmes de jeunesse, qui décèlent une évolution allant du décadentisme à l'unanimisme. Sous l'influence de ses lectures, il s'oriente de plus en plus vers les courants artistiques modernes qui naissent en Europe. Son deuxième recueil, intitulé Het sienjaal (Le signal, 1918), comprend surtout des poèmes teintés d'expressionnisme humanitaire. En 1917, il s'érige dans ses critiques en porte-parole d'un groupe de jeunes artistes anversois, peintres et sculpteurs, à qui il expose les théories futuristes, cubistes et expressionnistes. Il publie des articles sur la littérature et davantage sur les arts plastiques, en écrit aussi sur le mouvement flamand et s'affiche comme activiste unioniste. En outre, il écrit durant une saison des comptes rendus de représentations théâtrales. Peu de temps avant l'armistice, il s'exila à Berlin en compagnie d'une amie, dans le but essentiel de se soustraire aux poursuites judiciaires pour activisme qui le menacent. Sa correspondance est la principale source de renseignements sur la période d'après-guerre. Le Chapitre VI dépeint d'abord le climat politique et artistique qui régnait à Berlin après la capitulation et mentionne ensuite les relations que Van Ostaijen entretint avec les artistes de l'endroit. Son oeuvre et ses conceptions dénotent nettement qu'il assimilait de mieux en mieux l'esprit nouveau de ce milieu ouvert. De ce fait, il s'isola davantage de ses compatriotes qui ne lui rendaient pas justice et lui accordaient peu d'audience. Cet isolement se prolongera jusqu'à sa mort. On peut avancer qu'un processus important de son évolution intellectuelle s'est accompli durant son exil à Berlin: il perdit ses illusions et concentra son esprit sur ses conceptions artistiques essentielles les plus défendables. Dans le domaine politique, en tant qu'artiste et flamingant, il considérait le mouvement flamand comme une affaire d'ordre social et, théoricien plutôt qu'homme d'action, croyait que le spartakisme et le communisme qui en découlait, ouvraient le plus de perspectives. En tant que poète, son évolution le mena de l'expressionnisme humanitaire à un expressionnisme ‘désindividualisé’, apparenté au cubisme. Lors de ce processus d'affinement, il introduit dans son art des éléments dadaïstes qui | |
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se manifestent très nettement dans son troisième recueil Bezette stad (Ville occupée, 1921) et dans une moindre mesure dans le recueil inédit De feesten van angst en pijn (Les fêtes d'angoisse et de douleur). Il s'efforce également de justifier sa théorie du ‘cubisme émancipé’ dans ses articles sur les arts plastiques. Enfin, ayant lu l'oeuvre de Scheerbart et celle de Mynona, il se met à écrire en prose: il abandonne son projet de composer un roman autobiographique pour écrire des ‘contes grotesques’. Bien que cette période transitoire fût très féconde au point de vue littéraire, Van Ostaijen ne parvint pas à conquérir son indépendance matérielle, ses tentatives d'ouvrir un commerce d'objets d'art ayant échoué. De ce fait, la vie commune avec son amie devint intenable. De plus, le climat artistique de Berlin l'avait déçu. Après de longues hésitations - il avait été condamné entre-temps à onze mois de prison pour activisme -, il regagna seul Anvers aux environs de la Pentecôte, en 1921. Le Chapitre VII se rapporte au court laps de temps qu'il passa sous le toit paternel (jusqu'en décembre 1921) et à l'année suivante, durant laquelle il accomplit ses obligations militaires à Issum. Les lettres de cette époque révèlent qu'il a traversé une crise au début de son temps de service. S'étant tu un bon moment, il écrivit enfin le poème Winter (Hiver) qui permet d'avancer qu'il venait de trouver son propre style. Avec ce poème, il inaugure la période du ‘lyrisme pur’, autrement dit, de ‘l'expressionnisme organique’. Le Chapitre VIII embrasse les années 1923-1925, qu'il passa à Anvers. Il chercha en vain un emploi dans un commerce d'art allemand. En 1924, il travailla quelque temps chez un libraire anversois. L'aide de son frère lui permit de jouer durant cette période les modestes marchands d'objets d'art en chambre. Son frère se maria, sa mère mourut en octobre 1923, et la reprise de la vie commune avec son amie échoua au bout de quelques mois. A la fin de l'année 1923, il partagea la vie de son père. Au début de 1923, Van Ostaijen et Wies Moens essayèrent de se rapprocher, mais cette tentative fit long feu. Il n'eut pas plus de succès quand, de concert avec Oscar Jespers, il entreprit au mois d'avril de former une association de peintres et de sculpteurs flamands. Dans le courant de l'été, il fit la connaissance de Jozef Muls, qui l'invita à collaborer à sa revue Vlaamsche Arbeid. Depuis l'insuccès de sa revue Sienjaal (1920), Van Ostaijen n'avait pas cessé de collaborer incidemment à divers périodiques, encore qu'il ne fût en communion d'idées avec aucun d'entre eux. On peut en dire autant de Vlaamsche Arbeid; il n'empêche que Van Ostaijen a continué jusqu'à sa mort à collaborer à cette revue. Au début de 1925, lors de la fondation de la revue De Driehoek, Van Ostaijen fit la connaissance de E. du Perron et se lia d'amitié avec lui par la suite. Ses | |
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liens amicaux avec Gaston Burssens, qui venait de publier Piano, datent de cette époque. Ce furent ses deux amitiés durables dans le monde littéraire - les seules. Le présent chapitre, de même que les suivants, dépense une attention de plus en plus approfondie à l'art poétique de Van Ostaijen, afin de lui donner du relief par rapport à l'évolution de ses théories sur le lyrisme et à celle de son propre lyrisme. Van Ostaijen eut à ce moment l'occasion de se faire mieux connaître comme prosateur. En effet, un quotidien et un hebdomadaire publièrent quelquesuns de ses petits ‘contes grotesques’ dans le courant de l'été 1923. L'année suivante, il confia à Vlaamsche Arbeid quelques contes, plus ou moins apparentés à l'art de Kafka. Il sera le premier à publier en 1925 la traduction de cinq récits de cet écrivain. Enfin, De Driehoek édita un de ses longs contes, De trust der vaderlandsliefde (Le trust du patriotisme, 1925), dans la collection ‘Cahiers van de Driehoek’. Bien plus qu'auparavant, Van Ostaijen s'occupe de littérature dans ses écrits critiques. Il n'en reste pas moins qu'il publia encore trois études consacrées respectivement à Campendonk, Oscar et Floris Jespers, mais il traitait des sujets littéraires dans la plupart des articles qui parurent dans Vlaamsche Arbeid. Il inaugura cette suite d'études en 1923 par un exposé détaillé des ses conceptions de la poésie, intitulé Modernistiese dichters. Le Chapitre IX relate la brève période où Van Ostaijen exploitait à Bruxelles la galerie ‘A la Vierge Poupine’. Pour ce faire, les comptes rendus des expositions qu'il organisa alors ont également été consultés. Bien que les premiers symptômes de la tuberculose se manifestassent déjà, il déployait une activité fébrile comme marchand de tableaux, et il se produisait plus souvent en public: il entretenait des relations suivies avec ses collègues bruxellois et donna quatre conférences. Dans la première, Proeve van parallellen tussen de moderne beeldende kunst en de moderne dichtkunst (Essai sur le parallélisme entre les beaux-arts modernes et la poésie moderne), prononcée au congrès d'histoire de l'art de Bréda peu de temps avant qu'il ne s'installe à Bruxelles, il distingue deux courants primordiaux dans l'art moderne: l'expressionnisme ‘organique’ et l'expressionnisme ‘romantique’, qu'il rejette. Il développe les principes du lyrisme organique dans deux conférences à Bruxelles, puis dans une troisième, à Anvers. Il publiera celle-ci sous le titre de Gebruiksaanwijzing der lyriek (Mode d'emploi du lyrisme). Ainsi donc, Van Ostaijen inscrit à son actif des conférences, un certain nombre d'articles dans Vlaamsche Arbeid où il formule le plus souvent ses théories poétiques, et enfin un de ses contes, édité en volume sous le titre de Het bordeel van Ika Loch (Le bordel d'Ika Loch). Le Chapitre X est consacré à la période où il vécut de nouveau sous le toit paternel et pendant laquelle il reprit le métier de marchand de tableaux en | |
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chambre. Sa santé s'altéra dans le courant de l'année 1926, au point qu'il dut renoncer au voyage à Paris qu'il s'était proposé de faire à la fin de l'année. Son état empira à vue d'oeil au début de l'année suivante; il passa l'été à la campagne, dans l'attente de son admission au sanatorium. Bien que malade, il écrivit beaucoup, surtout en 1926. Il atteignit un point culminant dans le domaine poétique, mais ne parvint pas à faire éditer les textes de ses tentatives antérieures de ‘lyrisme pur’ qu'il aurait aimé faire éditer sous le titre de Eerste boek van Schmoll (Premier livre de Schmoll). Outre les ‘contes grotesques’, dont le plus long, intitulé De bende van de Stronk (La bande de l'homme-tronc), date probablement de cette époque, il écrivit encore, dans une langue très délicate, des comptes rendus de ses observations et expériences, ainsi que des histoires d'animaux, réunis sous le titre de Diergaarde voor kinderen van nu (Jardin zoologique pour enfants d'aujourd'hui). Il continua à accorder une très large place à l'exposé de ses points de vue et de ses conceptions en matière de lyrisme dans les critiques détaillées qui parurent dans Vlaamsche Arbeid. De plus, il écrivit une série de petits essais, écrits de la même encre que ses ‘contes grotesques’, qui escortent ses dissertations théoriques, et qui furent édités après sa mort sous le titre de Selfdefence. Le Chapitre XI a trait aux six derniers mois de sa vie, qu'il passa au sanatorium ‘Le Vallon’ de Miavoye. Presque toutes les données ont été empruntées à la volumineuse correspondance de cette époque qui a été conservée. Cette correspondance fournit d'abondants détails sur les efforts déployés en vue de la fondation de la revue Avontuur par le triumvirat Van Ostaijen, Du Perron et Burssens, ainsi que sur la ‘définition du point de vue’, discussion entre Van Ostaijen et Du Perron à propos d'une enquête. Toutefois, ces documents variés livrent bien d'autres renseignements, et permettent de suivre pour ainsi dire de jour en jour la dernière phase de l'existence terrestre de Van Ostaijen, qui fit encore oeuvre créatrice peu de temps avant sa mort. Une analyse de son dernier ouvrage, à la fin de ce traité, montre l'étendue de son talent.
Traduit du néerlandais par L. Roelandt. |
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