Briefwisseling en aantekeningen. Deel 2
(1976)–Willem Bentinck– Auteursrechtelijk beschermd
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Angleterre sera avantageux à la cause commune et particulièrement au système de l'impératriceGa naar voetnoot2). Ce changement n'a été occasionné que par les difficultés, que le duc de Newcastle rencontroit journellement dans le cabinet de la part du duc de Bedford ou pour mieux dire de la part de mylord Sandwich, qui menoit le duc de Bedford et lui faisoit faire tout ce qu'il vouloit. Mylord Sandwich pour faire de la peine au duc de Newcastle, avec qui il s'étoit déjà brouillé pendant les négociations d'Aix-la-Chapelle, prenoit et faisoit prendre par le duc de Bedford le parti de monsieur Pelham, dans toutes les choses où celui-ci différoit de son frère le duc de Newcastle. Le but de Sandwich étoit de semer la zizanie entre les deux frères, d'affoiblir peu à peu leur parti, de les culbuter enfin et de se mettre avec Bedford à la tête de tout en Angleterre. Mais deux choses ont prévenu l'exécution de ce projet: la première c'est, que le duc de Bedford n'a ni les talents, ni l'application, ni l'activité nécessaire pour jouer un rôle pareil. La seconde c'est, que les deux frères Newcastle et Pelham ont vu le but de Sandwich et se sont unis pour se soutenir contre lui. A quoi il faut encore ajouter, que Sandwich s'est perdu dans l'esprit du public en montrant une ambition démesurée à laquelle il a tout sacrifié, sans aucune délicatesse sur le choix des moyens, outre qu'il n'est pas assez grand seigneur pour se soutenir par lui même, moins encore pour former et entretenir un parti comme les deux frères Newcastle et Pelham le peuvent par leurs grandes possessions, leurs alliances, le grand nombre de leurs amis et surtout par leur caractère personnel et la confiance nationale. Mylord Sandwich pour mieux embrouiller et embarasser le duc de Newcastle s'étoit entre autres associé avec les débris de l'ancien parti walpolienGa naar voetnoot3) et en formant des liaisons avec des gens, qu'il avoit été un des plus ardents à culbuter et dont il avoit parlé publiquement avec le plus grand mépris, il s'est trop tôt démasqué. Le duc de Newcastle, qui s'est fait un point d'honneur de soutenir l'ancien système, je veux dire, le maintien du continent, et les liaisons entre la cour impériale et les puissances maritimes se voyant opposé si vigoureusement dans son point favori a cherché déjà depuis longtems à se faire épauler par Carteret. Mais celui-ci | |
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s'étoit rendu si désagréable aux autres par la façon, dont il les avoit traités, pendant qu'il avoit été dernièrement secrétaire d'étatGa naar voetnoot4), que ni Pelham, ni le chancelier n'en ont voulu entendre parler pendant longtems. Mais à la fin ils y ont rendus, en partie pour faire leur cour au roi, qui aime Granville. Et comme Granville est placé non dans le cabinet ou dans le ministère proprement dit, mais seulement à la tête du Conseil Privé, il n'est pas dans leur chemin et n'a que faire de leur donner aucune jalousie, s'il se conduit sagement, comme il a promis de le faireGa naar voetnoot5). J'ai lieu de croire, que mylord Anson, qui a épousé une fille du chancelier et qui est fort bien avec lui (et avec le duc de Newcastle), s'est laissé employer par le duc de Newcastle à persuader le chancelier, ayant la promesse du duc de Newcastle d'être mis à la place de mylord Sandwich à la tête de l'amirauté, qui est le poste, qu'il a toujours ambitionné et où il a été en effet mis par ce changement, quand Sandwich a été mis dehors. Par tout ce que je viens de dire il est, ce me semble, clair que Newcastle a très habilement joué son jeu, a profité de toutes les circonstances et par le choc, que l'on a voulu lui donner il s'est encore raffermi lui-même et raffermi son parti (non seulement pour le présent, mais aussi pour l'avenir par l'acte pour la régence en cas de minorité). Ce que je dis de sa façon de penser sur les affaires générales, n'est point du tout au hazard. Il s'est ouvert à moi sur toutes les difficultés, qu'il rencontroit toutes les fois, qu'il s'agissoit de donner de l'argent. Il m'a mis lui-même au fait de son plan pour Granville, avant qu'il fut exécuté et il m'a prié de parler à Granville comme à lui-même sur les affaires étrangères en m'assurant, que Granville pensoit sur toutes les mesures à prendre pour le continent tout comme lui duc de Newcastle et moi et il m'a même dit de quelle façon il vouloit se servir de lui pour persuader le roi et gagner monsieur Pelham son frère. En conséquence j'en ai parlé au long et en détail à mylord Granville, qui de son côté m'a assuré, que jamais il ne changereoit de langage, ni se départiroit du système, qu'il avoit toujours soutenu et qu'il avoit assez suffisamment manifesté, pendant qu'il avoit été dans le ministère; que sa résolution étoit de se tenir aux affaires du conseil sans se mêler du cabinet pour ne pas donner de jalousie et ne causer aucun ambarras, mais que, si l'on avoit besoin | |
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de lui, on le trouveroit toujours prêt à aider de son conseil, de sa voix et de sa direction pour le soutien de son système. Les principes et sa façon de penser sont précisément tels, qu' on les pourroit souhaiter à tous égards. Il regarde l'article de l'argent comme celui, qui doit faire tout. Il regarde l'emploi de l'argent à tems, comme une oeconomie. Je sai, qu'il en a parlé de cette façon à monsieur Pelham et qu'il lui a dit et fait dire par d'autres, que la seule méthode de redresser les affaires de finances, de tenir l'argent à un bas intérêt et de faire sentir à la nation par une diminution de la dette nationale les effets des sages mesures domestiques de monsieur Pelham, étoit la continuation de la paix; que la durée de cette paix dépendoit uniquement des difficultés, que la France trouveroit à la rompre; qu'il étoit par conséquent de la bonne oeconomie aussi bien que de la prudence de sacrifier pendant quelques années de paix quelques sommes en subsides pour prévenir des dépenses beaucoup plus grandes. Je sai par le duc de Newcastle, que quand il s'est agi l'année passée de conclure avec la barrière. Mylord Granville a fait assurer sous main monsieur Pelham de son soutien et de son concours dans cette affaire. Mylord Granville s'explique aussi clairement et aussi rondement, qu'il est possible sur l'article du roi de Prusse, dont il connoît à fond le caractère personnel et les principes. Il est déterminé dans l'opinion, que le seul moyen de faire rester le roi de Prusse tranquille et de le tenir dans un échec continuel, c'est de s'assurer de la Russie, dont il est d'avis, qu'il faut absolument s'assurer quovis modo pour cet effet. Je suis persuadé, que lui et Newcastle, qui pensent absolument de même sur ce point, s'arrangeront et se concerteront ensemble sur les moyens de faire entrer le reste du ministère et le roi dans la même façon de penser et de prendre des mesures efficaces en conséquence, ce qui n'a pas été possible jusqu'à présent. La manière, dont on s'y est pris n'est pas celle, qu'il faut pour réussir. Les raisonnements des ministres des autres cours à Londres ont même fait plus de mal que du bien, car ils ont éventé les mines du duc de Newcastle et ont donné à ce qu'il faisoit pour persuader par raison et par convenance domestique et nationale un air de concert avec les cours intéressé, qui a plus reculé qu' avancé l'affaire. Et tout ce que Münchausen à Hanovre y a fait ne me donne qu'une très mince idée de son jugement et de sa bonne volonté pour la réussite d'une mesure directement calculée contre le roi de Prusse. Pour ce qui regarde mylord Holdernesse je le connois depuis | |
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son enfance et je suis sûr, qu'il ne traversera pas un système, qu'il a toujours soutenu et dans lequel il a été élevé. Son caractère personnelGa naar voetnoot6) me fait juger, qu'il n'abandonnera pas le duc de Newcastle, par qui il vient d'être placé dans le poste le plus brillant, où il puisse arriver. Et son intérêt l'y engagera aussi, car il n'est pas assez grand seigneur pour se former un parti, moins encore pour en former un contre les Pelhams, qui sont trop forts et trop affermis tant par ce changement dans le ministère, que par les arrangements pris pour la régence en cas de minorité, pour devoir redouter aucun parti quelquonque en Angleterre. De tout ce que je viens de dire je crois pouvoir conclure, que le changement en Angleterre sera avantageux à la cause commune. Mais pour tirer parti des circonstances favorables il faut laisser faire le duc de Newcastle et mylord Granville sans les pousser, en un mot laisser reposer pendant tout cet été l'affaire des subsides, que l'on souhaite pour la Russie. Aussi bien n'y a-t-il rien à faire avant la tenue du parlement. Il faut prendre garde aussi de ne pas donner au duc de Newcastle des jalousies, dont il est fort susceptible. Et pour cela il ne faut pas s'addresser à mylord Granville dans des affȧires, qui sont du département du duc de Newcastle en quoi on dérangeroit aussi le plan de Granville, qui est de se donner tout entier aux affaires du conseil et de ne pas se mêler de celles du cabinet, à moins qu'il n'y soit appellé. En Angleterre tout le monde sans exception regarde l'affaire de l'élection comme un point de la dernière importance. Aucune mesure n'est plus de goût de la nation, ni ne trouvera plus d'approbation, que celle-làGa naar voetnoot7). Granville en regarde la réussite comme une affaire d'honneur de l'Angleterre contre la France. Le ministère hanovrien n'entre ici pour rien en considération, non plus que les vues, qu'il peut avoir. Je parle de la façon dont la chose est considérée en Angleterre par toute la nation et par les ministres anglois in globo et sans distinction de vues ou de partis différents. Aussi je suis persuadé, que monsieur de Fleming réussira à procurer un subside pour la Saxe, pourvu que l'on soit sûr de la voix de la Saxe pour l'élection, ce qui sera une condition sine qua non. Le duc de Newcastle a entamé cette affaire avec tant d'ardeur, qu'elle est devenue pour lui une affaire personnelle, car il l'a eue en tête dès l'année 1748 et cela très fortementGa naar voetnoot8). Il la regarde comme le | |
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premier pas à faire pour consolider un système chancelant, que la France travaille à ruiner tout à fait et encore plus particulièrement comme un pas, par lequel il embarque et entraîne ses confrères dans les affaires du continent d'une façon, qu'ils ne peuvent plus reculer. Aussi ne peut on désobliger plus fortement le duc de Newcastle et même toute la nation, qu'en témoignant de l'indifférence sur la réussite de l'élection. J'ai observé (étant en Vienne), qu'il y avoit quelques personnes, qui s'imaginoient, que c'étoit une mesure purement hannovrienne dans laquelle le ministère angloisGa naar voetnoot9), non pour la chose elle-même, mais pour raccommoder d'autres choses désagréables, qui s'étoient passées entre la cour de Vienne et celle de Londres. Mais je puis assurer, que cela n'est pas et j'ai eu trop d'occasion d'éclaircir cette affaire et le véritable but du duc de Newcastle pour m'y pouvoir tromper. Rien n'étant plus essentiel pour le maintien de la bonne harmonie entre deux cours, que le choix des personnes, qu'on y employe de part et d'autre dans un caractère public, je n'ai pas manqué de faire sentir au duc de Newcastle la nécessité de laisser monsieur Keith dans le poste où il estGa naar voetnoot10). Cela étoit d'autant plus nécessaire, qu'il y a plusieurs personnes du premier rang, qui ambitionnent le poste de Vienne, qu'ils regardent avec raison comme le poste le plus distingué de tous par son importance et par l'intérêt national. J'ai très instamment prié le duc de Newcastle de regarder en ceci le principal objet et de ne point envoyer à Vienne un homme, qui chercheroit à briller par des beaux discours et par des dépêches fleuries et qui, avant d'être au fait de la cour de Vienne, de la façon d'agir avec LL.MM.II. et du caractère des ministres, pourroient tout gâter et reculer les affaires, que le duc de Newcastle veut avancer. J'ai été confirmé dans cette façon de penser par la manière, dont monsieur Keith agit et écrit, car j'ai vu autant de ses dépêches les plus secrettes, que j'en ai voulu voir et je puis assurer, que l'on ne peut pas servir mieux la cause commune, que Keith, qui sans faire en rien tort à la vérité donne à tout le plus convenable et le plus radouci. Je crois fermement, que l'on laissera Keith à Vienne, non seulement pour les raisons, que je viens de dire, qui ont à la vérité convaincu le duc de Newcastle et peut-être ne convaincroient pas d'autres, mais parceque si l'on laisse mon- | |
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sieur Keith sur le pied, où il est, c'est une épargne considérable et cet argument est d'un grand poidsGa naar voetnoot11). A cette occasion le duc de Newcastle m'a dit, que le roi souhaitoit d'avoir un militaire de la part de la cour de Vienne et il a ajouté, qu'il avoit ouï dire, qu'à Vienne on pensoit à envoyer en Angleterre le comte Colloredo, qui a été à TurinGa naar voetnoot12); que cela seroit très agréable et que si c'étoit le dessein, le plutôt, qu'on l'exécuteroit, seroit le mieux. Je n'ai pas négligé me trouvant en Angleterre de faire une tentative encore en faveur du général Schulenburg à cause que LL.MM.II. s'intéressent pour lui. Non seulement j'ai été confirmé dans l'idée que jamais au grand jamais le roi ne se résoudra à lui donner aucune permission, ni même à entendre parler de lui; mais j'ai même appris une particularité, qui fait voir, qu'il n'y a réellement rien à espérer, ni aucun tour à donner à la chose. Cette particularité est, que la comtesse de YarmouthGa naar voetnoot13) dans le premier embarras, où elle s'est trouvée par l'éclat que l'affaire avoit fait à Hannovre, s'est elle-même addressée au roi et a prié S.M. de la délivrer des importunités de monsieur de Schulenburg. Après ceci je ne vois plus de remède et je tiens ce fait de si bon lieu, que je n'en puis pas douter. |
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