Briefwisseling en aantekeningen. Deel 2
(1976)–Willem Bentinck– Auteursrechtelijk beschermd27 maart 1751Si le Prince abandonne l'élection du roi des Romains, les conséquences, qui s'ensuivent par rapport à lui personnellement sont le désaveu par lui même de tout ce qui a été fait en son nom et par son ordre, tant à la cour de Vienne, qu'à toutes les autres cours d'Allemagne au vu et au su de toute l'Europe d'un bout à l'autre du nord au sud. Ce désaveu ou changement de plan sera attribué dans le public, je veux dire aux autres cours étrangères, à inconstance, légèreté, manque de fermeté, manque de conduite, perte de son crédit dans le gouvernement ici. Car personne n'ira croire, que c'est par con- | |
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viction, que le Prince abandonne cette mesure, dont tout l'univers voit l'importance pour le soutien des principes stadhoudériens, pour le maintien de l'ancien système et du parti, qui a fait le Prince stadhouder. Personne ne croira, que c'est de gayeté de coeur, que le Prince abandonne les principes et les maximes fondamentales de sa maison et dont il a fait lui-même profession et des déclarations réitérées de bouche, dans des actes publics et dans des lettres écrites de sa propre main aux plus grands souverains de l'Europe. On dira, que le Prince est forcé de changer de mesures; qu'il n'est plus le maître de donner le ton ici et que c'est l'ancien parti françois, qui l'y a forcé. C'est à dire, que le Prince sera traduit et exposé à la face de toute l'Europe. Voilà pour le Prince. Quant à la République il est vrai, que ses finances délabrées exigent une grande oeconomie et entre autres une réduction. Mais ce n'est que pour un tems pour se remettre et être plutôt en état de prendre en main, comme autrefois, la défense de la liberté de l'Europe et la sienne propre, qui est une dépendance et suit de l'autre. La République est lassée et harassée par une guerre ruineuse et plus dispendieuse, qu'elle n'auroit du être et qu'elle n'auroit été, si elle avoit été bien conduite et si la République auroit satisfait à tems ses engagements. Mais de la nécessité ou elle se trouve de se réduire ses dépenses domestiques, il ne s'ensuit pas du tout, que la République doive changer de plan de conduite ni de mesures pour le système général de l'Europe. Le même raisonnement auroit lieu, si nous étions encore sans stadhouder et je suis sûr, que messieurs De Slingelandt et FagelGa naar voetnoot2) vivoient encore, ils raisonneroientGa naar voetnoot3), parceque les principes en question sont fondés sur l'intérêt fondamental et essentiel de la République, sur l'histoire et sur l'expérience, en un mot sur la nature des choses, qui n'est pas arbitraire, mais inaltérable. Rien ne seroit d'une plus mauvaise politique, que de témoigner aucun changement de principes à présent, que l'on travaille au rétablissement des finances, parce que si pendant ce tems là et à cette occasion l'on changeoit de mesures et de principes, la République recevroit dans l'Europe un affront, un déshonneur et un discrédit, dont elle ne se relèveroit jamais. L'on diroit, que les finances sont tellement abîmées, que la République ne peut jamais se relever, ni se mêler plus d'aucune affaire, ni d'aucun démêlé entre ses voisins, que par conséquent elle n'est plus d'aucun poids | |
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dans la balance de l'Europe. La suite et la conséquence naturelle de cette idée (qu'il seroit inutile de contredire en paroles, pendant que toute l'Europe en verroit les effets) seroit, que nos ennemis d'un côté et nos alliés de l'autre se croiroient dispensés d'aucun égard pour une nation, qui seroit devenue par là pondus inutile terrae. Les uns et les autres prendroient leurs mesures sans nous, selon leur convenance ou leur intérêt et nous tomberions dans un mépris, qui accéléroit notre ruine. Je n'entre pas ici dans le détail comme je le pourrois et je passe l'application particulière de cette idée générale, parceque cela mèneroit trop loin, mais en deux mots ce seroit la ruine de tout système politique, sans qu'on en eut un autre à substituer à celui qu'on a déjà, bien loin d'en avoir un meilleur. Je défierois même le plus habile politique de prédire où l'on s'arrêteroit si une fois l'on sort du chemin où l'on est et où l'on doit par conséquent rester, si l'on n'en sait un meilleur et qu'on ne voye en même tems sûrement, où il mène. Mais si dans le tems, qu'on travaille au rétablissement des finances et qu'on employe la plus grande oeconomie, la République reste ferme, non seulement dans ses finances, mais dans les principes et ...Ga naar voetnoot4) politiques, qui l'onGa naar voetnoot5) fait respecter et craindre, toute l'Europe jugera, et avec raison, que c'est par sagesse, par prudence, par une connoissance profonde de la situation intérieure des différentes cours de l'Europe, de leurs intérêts etc., que la République profite des circonstances, favorable à présent pour se remettre, afin d'être en état, quand les affaires se rebrouilleront, de reparoître sur la scène et d'y figurer d'une manière, qui réponde à son ancienne réputation et à l'honneur du Prince, qui en est le chef. Il faut poser pour une maxime politique et pour un axiome, que la République doit choisir entre se mêler de toutes les affaires de l'Europe ou de se ne mêler d'aucune. Sous le gouvernement stadhouderien avant l'année 1650 la République s'est trouvée mêlée en tout, bon gré mal gré par les circonstances. Depuis 1650, jusqu'en 1672, monsieur De Witt, quoiqu'agissant sur de tout autres principes, a pourtant bien senti la vérité de cette maxime et il l'a si bien suivie, qu'il ne s'est pas passé aucun grand événement dans l'Europe, où la République n'aye été directement mêlée. Du tems du dernier stadhouder la même maxime a eu lieu. Et depuis sa mort les grand ministres, qui ont | |
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conduit les affaires de la République et donné, pour ainsi dire, le ton à toute l'Europe, ont constamment suivi la même maxime. Ce n'est que depuis l'année 1733Ga naar voetnoot6), que l'on a commencé à changer de conduite à cet égard. Les raisons en sont connues à tout le monde. Ce n'étoit pas faute de voir aussi clairement, que par le passé l'intérêt manifeste, que la République avoit à ne pas laisser tourner toute la machine sans y prendre part; mais parceque l'on avoit peur d'un stadhoudre. L'intérêt de la République étoit si clair, que l'abbé de La VilleGa naar voetnoot7) n'a pas fait difficulté de me dire en presénce de mylord StairGa naar voetnoot8) et de monsieur De Wassenaer, le baillifGa naar voetnoot9), qu'il ne lui convenoit pas, à lui, La Ville, de parler contre cette neutralité, parcequ'elle lui avoit valu un bon établissement et une pension de 6.000 £, mais que du reste il avouoit, que s'il avoit été du gouvernement ici, il n'auroit jamais consenti à cette neutralité. Pendant les derniers troubles tout le parti contre le Prince aveuglé par leur terreur panique, ont travaillé sur ce principe de neutralité, dans la même vue, par les mêmes raisons, qu'en 1733. La providence y a mis ordre. S'il y a un événement important au monde et dont les suites puissent être de conséquence, c'est l'élection d'un roi des Romains. Il faut n'avoir pas pris la peine d'y penser pour ne pas voir l'influence, que la continuation de la couronne impériale dans la maison d'Autriche a directement sur la continuation de la paix en Europe, en cas que l'empereur vint à mourir; sur la force de l'alliance entre la maison d'Autriche et les puissances maritimes, sur les conséquences pour les Païs-Bas et par plusieurs autres considérations, que je passe à présent, mais que je réserve pour une autre occasion. Il suffiroit de voir la peine, que la France et son émissaire, la Prusse, se donnent pour l'empêcher, pour être convaincu, que cette affaire, si elle réussit, est bonne pour nous, puisqu'elle est mauvaise pour eux. Et si la République niGa naar voetnoot10) étoit pas mêlée, il seroit de la bonne politique à elle de tâcher de s'y fourrer, l'affaire étant une fois en train, et de se faire de nécessité vertu en s'y fourrant après coup, pour s'en faire | |
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un mérite et rester dans la possession d'être considérée comme une puissance sans laquelle on ne fait rien de grand en Europe. Encore moins doit-on ou peut-on songer à s'en tirer et à abandonner l'affaire après qu'elle a été entamée à l'instigation du Prince, dont l'avis est et doit être considéré dans des affaires de conséquence, comme l'avis de la République. N.B. La république de Venise fait voir ce que doit devenir et devient avec le tems une République, qui a pour maxime fondamentale une neutralité perpétuelle, c'est à dire, qui ne se mêle pas des affaires de l'Europe. |
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