Briefwisseling en aantekeningen. Deel 1
(1934)–Willem Bentinck– Auteursrecht onbekendLonden, 19/30 April 1748.J'ai reçu votre lettre du 21 de ce moisGa naar voetnoot2) Vendredi au soir, trop tard pour y répondre. Vos appréhensions ne sont que trop bien fondées sur le mécontentement qui règne à présent et régnera de plus en plus entre le Gouvernement de ce païs-ci et le Gouvernement de la République. Ce mécontentement n'est nullement national encore, mais on parviendra à le rendre général. Les mêmes réflexions que vous faites m'ont frappé tout autant que vous. J'eus Samedi passé huit jours une conversation avec le duc de Newcastle sur ce sujet. | |
[pagina 477]
| |
Elle commença à l'occasion de la paix, qu'il me dit qu'il falloit absolument faire. Je lui répondis là-dessus, que l'on pouvoit toujours se précipiter dans une mauvaise paix, mais qu'on ne pouvoit être longtemps à s'en repentir; que si l'on crioit à présent contre lui, parce qu'on le croyait trop porté pour continuer la guerre, on crieroit tout aussi fort contre lui après qu'il auroit conclu une paix qui seroit désagréable à toute la nation, après les avantages remportez par mer, et les subsides immenses accordés par le Parlement pour les fraix de cette prochaine campagne. ‘Mais, Mylord’, continuai-je, ‘il faut que je vous dise pourtant que ce n'est pas d'une mauvaix paix que je m'embarasse; cela pourroit se remettre dans la suite par une bonne harmonie entre les alliés. Ce qui me fait de la peine et me désespère, ce sont les suites que je ne doute pas que cette paix n'aye. Vous m'avouerez qu'elle sera bien épluchée dans le Parlement d'hyver prochain, et qu'on s'en prendra au ministère.’ - ‘Oui’. - ‘Il faudra que vous (la) deffendiez.’ - ‘Oui’. - ‘Ce sera en jettant la faute sur nous autant que vous pourrez; en produisant, pour justifier votre conduite, les pièces originales, par lesquelles on a donné de chez nous tant d'assurances au Roi et en faisant voir au Parlement et à toute la Nation, combien notre état et les mesures prises chez nous ont été différens de ce que l'on avoit promis’. - ‘Que pouvons-nous faire autrement?’ - ‘Mais, Mylord, vous voyez bien que tout ce qui peut s'ensuivre de ce que j'ai dit ne sauroit être qu'une désunion totale des deux Nations, qui est ce que la France cherche et ne manquera pas de fomenter. Cela rendra la brèche entre le Roi et le Prince et la Princesse de plus en plus irréparable, et à la fin ne peut être que la ruine totale des deux Nations’. - ‘How can we help it?’ J'ai écrit une partie de cette conversation au Greffier il y a aujourd'hui huit joursGa naar voetnoot1), avec quelques réflexions; | |
[pagina 478]
| |
mais entre nous je ne suis pas tout à fait content de notre petit ami; car il fait trop le courtisan et ne trouve point du tout bon que l'on s'avise ici de désaprouver la conduite que l'on tient à la Haye. Je trouve pourtant que je dois l'en informer, et que lorsqu'on veut se conduire d'une manière fort critiquable, on n'a aucun droit de prétendre que les gens se crèvent les yeux pour ne le pas voir; surtout quand ils y ont intéret. Le Greffier voudroit que l'on justifiât tout ce que l'on fait et tout ce que l'on omet; je le ferai toujours quand cela sera possible; mais d'aller dire des pauvretés, des sottises et des mensonges, pour pallier ou nier des choses avérées et connues de tout le monde, le fera qui voudra, je ne trouve pas que cela me convienne. Et pour revenir à ce que vous craignez, aussi bien que moi, qui arrive; c'est à dire que chacun veuille se justifier aux dépens de son voisin; il faut certainement avant toutes choses prendre garde que l'Angleterre n'ait pas trop lieu de se plaindre des conditions de paix. - - Je ne parle pas pour favoriser plus l'Angleterre que la République, mais pour aller au plus grand bien général: et comme le plus de bruit vient toujours d'iciGa naar voetnoot1), je voudrois qu'ils eussent ici le moins sujet de crier. - - Après cela je crois qu'il est nècessaire qu'il y ait quelqu'un ici, qui travaille autant qu'il est possible sur le parti contraire au Ministère, pour faire voir à ceux de ce parti, à qui on pourroit faire entendre raison - - et je suis persuadé qu'il y en a plusieurs et des premiers même - - pour leur faire, dis-je, voir les mauvais effets que tous les reproches mutuels ne sauroient manquer d'avoir; qu'ils feront un tort infini au Prince et à ses amis dans la République, qu'ils mettront hors d'état de remédier aux deffauts qu'il y a encore dans notre | |
[pagina 479]
| |
gouvernement et qui demandent du tems. Je ne puis dans une lettre entrer dans un plus grand détail. Mais il y en a dans l'Opposition qui ne voudroient certainement faire du mal chez nous. Je vous dirai que Chesterfield par son Apologie s'est rendu le mépris de tous. Vous comprenez bien que ce que je viens de dire seroit peine perdue, si le Prince continue toujours dans les mêmes idées et dans une conduite qui fait du mal iciGa naar voetnoot1). J'ai écrit là-dessus au Greffier qu'il faut dans toutes ces disputes que l'un des deux se montre le plus sage; et le plus sage doit être le Prince. Il le peut mieux que le Roi, parce qu'il est plus indépendant chez nous que le Roi ne l'est iciGa naar voetnoot2). Je luiGa naar voetnoot3) ai aussi écrit qu'il peut compter que tant que S.A. gardera les mêmes Ministres et surtout le Pensionnaire, on n'aura aucune confiance en elle, ni ici ni dans aucune Cour de l'Europe. Mais comment faire changer de conduite au Prince? C'est ce qu'il faut voir. Sûr est-il que la chose est absolument nécessaire; et si elle ne se fait pas, il faut que vous sortiez d'affaires, ou vous êtes perdu de réputation. Je doute fort que les représentations ni toutes les raisons fâssent aucun effet; il faut pourtant qu'elles soient faites et alléguées et bien déduites; il faut lui faire voir de quelle manière il vous a exposé; qu'il rend par là vos services inutiles; que vous ne pouvez pas rester chargé de mauvais pas que le Pensionaire et d'autres lui font prendre; que c'est pourtant ce qui vous arrive, et vous arriveroit constamment, si vous continuiez à le servir en aussi mauvaise compagnie. La conclusion de tout doit certainement être que si le Prince veut rester entre les mains des ses ennemis, vous devez tout net vous en laver les mains et vous retirer publiquement, sans chercher de palliatifs ni de partis mitoyens. Alors il ne s'agit plus de cacher les choses, vous devez une justification de votre conduite | |
[pagina 480]
| |
à un peuple qui a tant attendu de vous. Soyez sûr que c'est le seul moyen de faire prendre aucun bon parti à S.A. et de soutenir votre honneur. Il faut lui faire voir clair comme le jour qu'il s'appuye sur un roseau cassé et que ceux à qui il se fie, ne cherchent qu'à le trahir et à le perdre. Il ne (le) verra pourtant jamais, tant que ses amis et ses ennemis resteront pesle-mesle autour de lui. C'est pourquoi je reviens toujours à mon premier sentiment, que pour qu'il sente le besoin qu'il a de ses amis, il faut une fois qu'il s'en trouve privé, - vous savez qu'ils vous suivront tous. Mais c'est un pas qu'il faut faire pendant que vous avez encore la confiance et l'estime du public, et que ce public sâche les raisons de votre conduite. J'ai déjà dit que vous le lui devez par les engagemens que vous (avez) pris avec lui au nom du Prince et qui n'ont en rien été remplis; ainsi si vous laissez raffroider la confiance, la faveur publique se perdra et vous n'aurez plus en votre pouvoir de faire ce que vous pouvez encore à présent. Je vous assure de plus que vous pouvez toujours être sûr de l'appui d'ici, malgré Chesterfield, Harrington, Trevor etc. Je suis charmé de voir que vous songiez à mettre votre honneur à couvert. Je vous y servirai toujours de tout ce que j'aurai en mon pouvoir. Mais songez toujours, je vous prie, à quelques petites choses que je mettrai ici en peu de mots. Il vaut mieux ne pas faire les choses, que de les entreprendre lorsqu'il est trop tard. Rien n'est si incertain et ne se passe si aisément que la faveur et la confiance du public; car il passe toujours d'une extrémité à l'autre et n'est jamais longtems en chemin. Les actions qui doivent être soutenues par la confiance et la faveur du public doivent se faire avec promptitude et avec fermeté. Je dis avec fermeté, parce que l'on est perdu dans l'esprit du public s'il vous voit mollir. Considérez donc le parti que vous avez à prendre, prenez-le et tenez-vous-y. Il ne tient qu'à vous de soutenir votre crédit en Hollande et ici. Mais si vous restez avec le Pensionnaire et que l'on voye votre nom joint avec le sien, comme servant et conseillant le Prince, vous perdrez tous les jours de la confiance là-bas et ici. Je vois par vos lettres que vous sentez tout ce que je | |
[pagina 481]
| |
viens de vous dire; je vous conjure de ne le jamais perdre de vue; je travaillerai ici pour vous autant que je pourrai et je compte que je n'aurai pas grand peine. Songez seulement toujours à entretenir les bonnes dispositions où l'on est ici à votre égard; votre honneur, comme vous dites, est engagé, et le salut de notre païs, aussi bien que du Prince, est indissolublement lié à votre honneur. Je ne cherche pas à vous mettre, comme un Pharisien, un fardeau que je ne voudrois pas toucher du bout du doigt. Ce que je vous conseille, je le suivrai pour moimême. Je vous ai écrit la manière désagréable dont je suis ici. On me donne une commission qui presse, je veux la presser; on ne le trouve pas bon; au lieu de demander une réponse décisive, on veut que je m'amuse à faire des représentations quand je trouverai l'occasion favorable; on ne me donne aucune réponse sur les articles qui me sont absolument nécessaires, quoique j'en écrive toutes les postes. Je ne cesse de demander des ordres pour finir, car on me tient ici comme un sot; qu'est ce qu'on peut dire de moi de me voir solliciter pendant des mois un emprunt pour subvenir aux fraix de la marche des Russes, qui auroient le tems pendant mes belles sollicitations d'arriver en Paradis! Il faut que cette commission finisse, ou je lui casse le cou. Après cela qu'ai-je à faire plus longtems ici; à moins que le Prince m'ordonne d'y rester, je ne vois point du tout qu'il me convienne de parler sans être autorisé, de battre le pavé sur mes propres crochets, et encore moins de demander qu'on me paye la peine que j'ai pris de courir les rues de Londres sans rien faire. Je vois bien, comme je l'ai écrit au Greffier, que le Pensionnaire est charmé de la figure que je fais ici, mais je vous répons sur mon honneur, que je n'en serai pas la dupe. Vous pouvez (voir) par ce que je viens de dire que, quoique le Duc, Myl. Sandwich et vous soyez d'avis que je reste iciGa naar voetnoot1), je ne le puis pas sans ordre du Prince, d'abord que j'aurai une réponse finale; et celle-là il faut que je l'aye le plutôt que je pourrai. Ainsi je vous le répète. Si l'on veut que je fâsse plus long séjour ici, il faut que | |
[pagina 482]
| |
quelqu'un trouve le moyen de me le faire ordonner par le Prince, car je ne veux pas me faire Valet de PiqueGa naar voetnoot1). | |
Londres le 19/30 Avril 1748.Monseigneur, J'ai eu l'honneur de recevoir de Mr. le Greffier une Résolution secrète de L.H.P. du 16 de ce mois touchant la subsistance des troupes Prussiennes dans les Etats de l'Impératrice. J'en ai parlé au duc de Newcastle, qui m'a prié de ne lui pas faire d'instances là-dessus, parce qu'on avoit renvoyé cette affaire à S.A.R. Mgr. le DucGa naar voetnoot2). Ainsi je ne doute pas, Mgr., que la chose ne se fasse au gré de V.A.S. Mr. le Greffier m'a écrit que V.A. ne souhaitoit pas, que je présentâsse des mémoires pour presser l'emprunt des 300 m £ St. Mon unique but, Mgr., est d'avoir une réponse décisive, afin qu'en cas de refus V.A. puisse encore avoir le temps de prendre d'autres mesures, car à toutes mes représentations de bouche on ne me répondra qu'en disant qu'il est impossible de trouver de l'argent, parce que le crédit est si bas. Je crois bien que cela n'est que trop vrai, mais il me faudroit une réponse finale, que je puisse rendre à V.A.S., et il me paroit que l'affaire demande d'être terminée promptement. Si V.A. trouve dans le mémoire des choses ou des termes, qui lui déplaisent, et qu'elle veuille avoir la bonté de me donner ses ordres là-dessus, je les changerai. Il y a un article, Mgr., sur lequel j'ai eu l'honneur d'écrire plusieurs fois à Mr. le Greffier, c'est le temps stipulé pour le remboursement. Je n'ai aucune réponse là-dessus. C'est pourtant ce qu'il y a de plus nécessaire; aussi bien que l'exactitude du remboursement au tems fixé. J'aurai l'honneur d'attendre les ordres de V.A. pour faire finir cette affaire d'une façon ou d'autre; comme aussi pour savoir si V.A.S. aura encore besoin de moi dans ce païs-cy, après cette affaire finie. Mes services | |
[pagina 483]
| |
lui seront toujours dévoués. Je souhaiterois bien qu'ils pûssent lui être plus utiles. Comme l'apprens que V.A. va partir pour l'armée, je prens la liberté de faire des voeux les plus ardens pour sa personne. Que je puisse, Mgr., voir accomplir mes souhaits; je verrai V.A.S. comblée de bonheur et de gloire. | |
Londres ce 19/30 Avril 1748.Monseigneur, Après avoir écrit ma lettre, j'ai eu l'honneur de voir Myl. Anson, qui m'a demandé si je n'avois aucun ordre touchant le paiement de la poudre que mon frère avoit eu l'année passée des prises françoises. Je lui ai répondu que non. Sur quoi il m'a prié d'en écrire aujourd'hui, parceque l'argent des prises doit être partagé et paié dans 15 jours et que, quoique Myld. Sandwich lui eût écrit, il y a je crois trois semaines, que les lettres de change seroient envoiées au premier jour, elles ne sont pas encore venues. C'est ce qui m'oblige d'importuner V.A. par ce second bout de lettre, pour Lui donner connoissance que ce paiement presse et pour prier très humblement V.A. de vouloir avoir la bonté d'y donner ordre. |
|