Briefwisseling en aantekeningen. Deel 1
(1934)–Willem Bentinck– Auteursrecht onbekend
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(Den Haag, einde Febr. 1744.)Ga naar voetnoot1)La chose étant résolue, il s'agit du Quo Modo. Et comme il n'est pas convenable que l'Angleterre se déclare ou s'intéresse ouvertement pour le changement de gouvernement de la République, il faudroit, selon moi, commencer par la demande de la restitution du Marquisat de Veere et Flessingue, à pur et à plein. Rien n'est plus simple ni plus naturel. Ce n'est pas une nouveauté; car le Roi a ecrit de Herrenhausen le 4 sept. 1736 V.S. une lettre aux Etats Généraux,Ga naar voetnoot2) dans laquelle S.M. dit qu'elle se flatte que ‘Les Etats de Zélande auront plus d'égards à la juste exécution du Testament du feu Roi Guillaume III, que de priver le Prince d'Orange de ses droits, qui sont si légitimes et qui paroissent même incontestables. Mais que si les Etats de Zélande se veulent porter, contre toute espérance, à ôter au Prince la possession légitime du Marquisat susdit, S.M. ne sauroit douter que les Etats Généraux, comme Exécuteurs Souverains du dit Testament, ne se prêtent efficacement à soutenir les droits du dit Prince, et n'emploient tous leurs bons offices et tout le poids et l'influence qui leur appartiennent pour arrêter une détermination si préjudiciable aux droits de ce Prince, et de tous ses descendants, et pour lui conserver et à toute sa famille la possession juste de ce marquisat, qui lui est dérivé de ses glorieux Ancêtres’. Les Etats Généraux, ont répondu à cette lettre, le 27 décembre. N.S. de la même année, c'est à dire plus de trois mois après qu'elle étoit écrite: et s'excusent sur ce que ‘chaque Province est une Souveraineté à part, qui n'est responsable ni à L.H.P. ni à personne autre de | |
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ce qui regarde sa constitution particulière ou ses affaires domestiques; et sur ce que la qualité d'Exécuteurs du testament du feu Roi Guillaume ne leur donne pas plus d'autorité dans les Provinces que d'autres exécuteurs testamentaires; la qualité d'Exécuteurs Souverains n'étant pas connue dans ce Païs.’ Ajoutons que l'affaire n'étoit plus in integro, que les Etats de Zélande ‘avoient pris une résolution finale’ après plusieurs années de délibérations, qu'ils avoient offert au Prince un dédommagement en argent, ‘que les Etats Généraux étoient prêts à emploier leurs bons offices pour régler ce dédommagement par accord ou par décision d'arbitres, et que cela leur paroissoit le moien le plus propre pour terminer cette affaire à l'amiable.’ Commençant et finissant leur lettre à S.M. par des complimens qui ne signifient ni ne prouvent rien. Il auroit été facile de répondre à cette lettre; mais l'affaire en est restée là. En attendant le Prince d'Orange a eu la prudence de répondre à l'offre de dédommagement fait par la Zélande, ‘que le Marquisat de Vere et Flessingue étoit à lui, ou n'étoit pas à lui; qu'au prémier cas, ce Marquisat n'étoit pas à vendre, et qu'au second cas, il ne pouvoit comprendre pourquoi on lui en offroit de l'argent.’ Comme S.M. dans sa lettre qualifie les prétensions et les droits du Prince, de légitimes et d'incontestables, il paroit fort naturel que S.M. les fasse valoir, et en ce cas, il faut s'adresser au Prince pour avoir toutes les informations tant sur le fait que sur le droit. Si le Roi prend ce parti, on ne manquera pas de dire, comme auparavant, que c'est une affaire domestique, qui regarde la Province de Zélande, qui est Souveraine chez elle. En ce cas, il est naturel que le Roi s'adresse à ceux à qui on le renverroit, c'est-à-dire, à la Province de Zélande. Il faudroit pour cela avoir ici quelqu'un d'un caractère relevé, capable de conduire une affaire pareille et qui fut chargé de s'adresser en cas de refus ou de renvoi, directement aux Etats de Zélande; de leur faire savoir que l'intention du Roi est sérieuse et que S.M. n'auroit pas réitéré cette demande, si elle vouloit la laisser tomber. Si la Province de Zélande continue à refuser de rendre justice au Prince, le Roi a en main plusieurs | |
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moiens de douceur et de force pour la lui faire rendre. S'il faut avoir recours à la force, je crois, par exemple, qu'on pourroit saisir les Vaisseaux et autres effets appartenans aux Zélandois partout où on les trouveroit; jusqu'à ce qu'ils aient satisfait à ce qu'on demande d'eux; leur faisant en même tems savoir que ce n'est que dans la vue de les y porter qu'on en agit ainsi, et que tout sera exactement restitué dès qu'on aura rendu justice au Beaufils du Roi. Rien ne sera plus propre à mettre en mouvement le Peuple de cette Province, à intimider les ennemis du Prince, et à les obliger à lui restituer son patrimoine. Si les Etats Généraux prenoient parti pour la Zélande et faisoient des représentations, on leur devroit dire, que c'est une affaire qu'ils ont eux-mêmes décidée être domestique, que comme la Province de Zélande est Souveraine et indépendante et n'est responsable ni à L.H.P. ni à personne autre, le Roi en agit avec elle comme telle, et est même surpris que les Etats Généraux prennent parti contre le Roi, dans une affaire domestique entre S.M. et cette Province, et abandonnent leur qualité d'exécuteurs, par laquelle ils sont obligés, comme tout autre exécuteur testamentaire, de veiller à la conservation du bien de leur Pupile; bien loin de refuser leurs bons offices pour lui en procurer la restitution. Mais, je doute fort qu'on fût obligé d'en venir à cette extrémité. Si une fois cette affaire revenoit sur le tapis, bien des gens oseroient parler se sentans soutenus, qui ne l'ont pas osé jusqu'à présent faute de soutien; d'autres soupçonneroient bientôt que la résolution est prise de pousser l'affaire à bout et que le Roi ne se laisseroit pas amuser par de frivoles distinctions, ni paier d'une réponse destituée de fondement: ils règleroient là-dessus leurs démarches, et y penseroient bien, avant de faire un pas dont ils redouteroient les suites. Conclusion, je crois que ce seroit par là qu'il faudroit commencer; et celui qui seroit ici chargé de cette commission, travailleroit en même tems sous main pour avancer d'une autre façon les intérêts du Prince, à quoi il trouveroit des facilités très grandes, car le Gouvernement présent est tombé dans le plus grand mépris, et il n'est pas possible qu'il s'en relève. | |
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Reste à examiner le Quando. Il faut, ce me semble, attendre que les affaires soient ici aussi avancées qu'elles pourront l'être cette année; et c'est ce qui sera bientôt décidé. On pourroit objecter que cela feroit peut-être reculer les affaires, et pourroit obliger la République à se jetter entre les bras de la France. A quoi je répons que cette crainte ne doit pas avoir lieu à présent. La France s'est trop bien démasquée; elle a réveillé les esprits et excité l'attention de toute la Nation de façon qu'on n'ose plus prendre son partiGa naar voetnoot1). Je crois qu'il seroit bien plutôt à craindre, si on laissoit passer cette circonstance et revenir les esprits à leur première assiette, la France ne regagnât dans la suite encore plus de terrain. De plus le parti françois sait parfaitement qu'il lui est totalement impossible d'effectuer aucun acte de vigueur contre l'Angleterre non seulement à cause de l'inpopularité, mais aussi à cause de l'impuissance de la République par Mer. Mais pour couper court à cette objection, et à toutes les autres qu'on pourroit faire, la chose est absolument nécessaire, par conséquent il la faut faire: elle importe aux intérêts du Roi, tant en qualité d'Electeur, qu'en qualité de Roi: et quand elle sera une fois commencée, il faudra lever les difficultés une à une, à mesure qu'elles se présenteront. Il faudroit que le Prince fut averti afin qu'il se rendit en même tems à la Haye pour appuier la demande faite par le Roi, et pour solliciter en personne la restitution de ce qu'on lui a ôté avec violence et qu'on lui retient injustement. Il seroit peut-être même très à propos qu'il se rendit pour le même effet en Zélande, où il y a bien des gens qui lui sont attachés et qui ont été très choqués de la manière dont il a été traité. D'abord qu'en Zélande on verra qu'il y a plus à gagner qu'à perdre en se déclarant pour lui, tout le monde se rangera de son côté, et c'est ce qu'il sera facile de leur faire voir, pourvu qu'on s'y prenne d'un côté avec adresse et de l'autre avec vigueur. Quand on ne gagneroit que le point de la restitution du | |
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Marquisat avec ses droits et prérogatives, ce seroit beaucoup. Le Prince se trouveroit à la tête d'une Province considérable, surtout par ses liaisons avec celle de Hollande, et par là même en état de se faire des amis et de se pousser lui-même. Mais ce n'est pas là le seul fruit que cette démarche de l'Angleterre produiroit; le principal seroit que cette déclaration publique pour les intérêts du Prince lui formeroit bientôt un parti considérable: tout comme l'abandon de l'Angleterre a dégoûté tous ceux qui auroient pu se déclarer pour lui, et a fait triompher ses adversaires, parcequ'on l'a regardé comme une personne destituée de tout appui; de plus ce seroit une occasion admirable de travailler à former un parti pour le pousser à tout, sous prétexte de ne travailler qu'à lui procurer la restitution de son bien. Je prie qu'on me fasse réponse a celle-ci le plutôt possible, afin que je sâche comment me conduire. |
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